[Jeu vidéo] Dishonored
Publié : 18 janv. 2013, 15:25
Dishonored est un jeu dont vous avez pu entendre parler récemment car c'est sans doute le dernier jeu de discrétion à la mode et il a l'avantage de disposer d'une identité propre : vous êtes un ancien garde du corps accusé à tort et reconverti en vengeur masqué dans un contexte mêlant à la fois steampunk et surnaturel car la technologie est relativement avancée et il y a une entité lovecraftienne qui confie des pouvoirs à qui elle veut pour s'amuser.
En gros, Witcher 2 (pour le synopsis : "un garde du corps est accusé à tort de l'assassinat de son souverain et part en quête des coupables après s'être évadé de prison") rencontre Batman (un masque pour à la fois préserver l'anonymat et engendrer la peur dans le coeur des ennemis), qui rencontre lui-même Cthulhu (l'entité évoquée au-dessus, l'Outsider). Quelque chose dans ce genre...
Ce que l'on peut apprécier dans ce jeu, c'est qu'en dépit de son côté jeu d'infiltration, il y a une véritable diversité des approches : va-t-on utiliser les pouvoirs surnaturels pour survoler l'ennemi afin de passer totalement inaperçu ? Massacrer et semer le chaos sur son passage en laissant un tas de cadavres dans son sillon ? Jouer un assassin discret ? Au contraire, abandonner l'idée d'être un assassin et ne tuer personne (on peut endormir ou assommer), en dépit de son envie (compréhensible) de vengeance ? Posséder un rat pour passer sous le nez des gardes ? Grâce à son ensemble de pouvoirs et son arsenal, Corvo peut tout faire.
On peut se permettre de ne pas être discret et de foncer au corps à corps comme un bourrin (on trouve assez de potions de soin). Certes, il n'a pas tous les pouvoirs au début car on les débloque en trouvant des runes en jeu, mais il peut rapidement acquérir de quoi être puissant. Les capacités surnaturelles sont divisées en deux catégories : il y a les pouvoirs (téléportation, possession, etc) et les capacités passives (santé améliorée, agilité améliorée, etc).
Parlons brièvement des runes et charmes d'os : on peut les trouver grâce à un cœur bio-mécanique qui murmure des choses au héros (c'est naturellement un cadeau de l'Outsider). Les runes permettent d'acheter les pouvoirs et les charmes d'os offrent des bonus permanents dans à peu près tout et n'importe quoi, sachant qu'on ne peut avoir qu'un nombre limité de charmes actifs en même temps. Les deux obligent le joueur à prendre la peine de visiter les lieux.
Si un joueur néglige l'exploration pour se précipiter sur l'objectif principal (car il y a des objectifs principaux et des objectifs optionnels), il ne les trouvera jamais tous, ce qui veut dire qu'il n'aura pas tous les bonus qu'il voudra et ne pourra pas non plus acheter autant de pouvoirs (de toute façon, on ne peut pas tous les avoir, même en ayant toutes les runes, sauf erreur de ma part). Il y a donc une partie exploration.
Je regrette quand même la présence d'un système de... certes, pas moralité ou karma, mais de chaos ou de stabilité. Dans les faits, toujours est-il que tuer, c'est mal, même si on comprend que tuer ne peut que semer le chaos car, en période de peste transmise par les rats, cela fait plus de cadavres à dévorer (sauf si on les jette dans une benne à ordures, ce qui permet de diminuer le chaos car, même pour un assassin, le recyclage permet apparemment de préserver la société). En plus, s'il y a moins de gardes, il y a donc moins d'ordre, et qui dit moins d'ordre dit société qui sombre dans le chaos : plus de meurtres, réponse à l'insécurité excessive, sécurité qui va augmenter en certains endroits, gardes qui vont attaquer à vue des civils, PNJ qui vont se battre et s'entretuer, etc.
En un sens, ça se tient, c'est justifiable, mais ça pourrit le rôle de vigilante. Les gardes vous tuent à vue, mais si vous jouez l'anti-héros qui sème la terreur chez les gardes et nobles corrompus en épargnant les civils et les innocents, vous pourrirez le monde, donc si vous voulez la bonne fin, vous serez obligé d'essayer de faire le moins de morts possibles.C'est comme ça que je me suis retrouvé à épargner la quasi-totalité d'une bande de voyous en les survolant tel Spider-man ou Batman, sauf que Batman leur aurait brisé les jambes en tombant sur eux car, comme chacun sait, c'est un milliardaire qui aime cogner en sous-vêtements de pauvres gens poussés à une vie de criminalité par la misère (j'avoue cette vision des choses ne vient pas de moi).
Le plus terrible, c'est qu'on peut même neutraliser nos cibles (l'objectif principal) sans les tuer, mais les alternatives non-létales des cibles sont parfois pires que l'assassinat pur et simple, donc on préférera sans doute tuer. Sur le plan moral, il y a des cas où tuer est bien moins cruel que de laisser vivre : excommunier l'homme à la tête d'un culte en le marquant au fer rouge, ce qui fait de lui un paria, ou abandonner une femme entre les mains d'un individu qui a clairement un penchant malsain pour elle en font partie. La mort est plus douce dans les deux cas. Chercher la difficulté à épargner quand le sort réservé est pire que la mort me semble insensé...
Enfin, abordons le point le plus fâcheux : le héros, Corvo est muet, alors que tous les PNJ ont une voix. C'est un comble car on ne choisit ni son nom ni son visage. Tout est imposé au joueur, comme un autre muet du jeu vidéo, Gordon Freeman. Les rares fois où on a un choix de dialogues, le personnage ne parle pas. Il doit sans doute transmettre ses pensées par télépathie. De mon point de vue, ça tue l'intérêt que l'on peut ressentir pour le personnage. N'importe quelle voix, même celle d'un héros d'action sans conviction dont on aurait volé l'âme après l'avoir lobotomisé (je te regarde, Witcher 2 en VF), aide un minimum à se glisser dans la peau d'un personnage et à s'attacher à lui. Il paraît qu'un héros silencieux permet normalement de mieux s'identifier à lui, mais je trouve ce principe bidon. Je ne veux pas être moi dans la peau d'un autre (je ne joue pas à Code Quantum RPG), je veux être quelqu'un d'autre.
Je finirai là-dessus : le jeu a une identité graphique propre (ce n'est pas photo-réaliste, il a son propre style), mais au final, il manque de personnalité. Est-ce parce que certains thèmes ne sont pas assez traités ou parce que les personnages manquent de caractère ? Sans doute un peu des deux. Ce n'est pas un mauvais jeu, il est très bien conçu, mais on ne s'attache pas au héros car aucune complicité ne s'installe entre le personnage et le joueur. On a juste une coquille vide dans laquelle se glisser. Corvo, en tant que tel, n'existe pas. Il est ce qu'on en fait. Or, ce n'est pas un débutant. Il a tout un background qu'on n'a pas vécu. Il avait une vie avant nous et celle-ci sonne creux. On aurait gagné à explorer son passé afin d'apprendre à le connaître.
En gros, Witcher 2 (pour le synopsis : "un garde du corps est accusé à tort de l'assassinat de son souverain et part en quête des coupables après s'être évadé de prison") rencontre Batman (un masque pour à la fois préserver l'anonymat et engendrer la peur dans le coeur des ennemis), qui rencontre lui-même Cthulhu (l'entité évoquée au-dessus, l'Outsider). Quelque chose dans ce genre...
Ce que l'on peut apprécier dans ce jeu, c'est qu'en dépit de son côté jeu d'infiltration, il y a une véritable diversité des approches : va-t-on utiliser les pouvoirs surnaturels pour survoler l'ennemi afin de passer totalement inaperçu ? Massacrer et semer le chaos sur son passage en laissant un tas de cadavres dans son sillon ? Jouer un assassin discret ? Au contraire, abandonner l'idée d'être un assassin et ne tuer personne (on peut endormir ou assommer), en dépit de son envie (compréhensible) de vengeance ? Posséder un rat pour passer sous le nez des gardes ? Grâce à son ensemble de pouvoirs et son arsenal, Corvo peut tout faire.
On peut se permettre de ne pas être discret et de foncer au corps à corps comme un bourrin (on trouve assez de potions de soin). Certes, il n'a pas tous les pouvoirs au début car on les débloque en trouvant des runes en jeu, mais il peut rapidement acquérir de quoi être puissant. Les capacités surnaturelles sont divisées en deux catégories : il y a les pouvoirs (téléportation, possession, etc) et les capacités passives (santé améliorée, agilité améliorée, etc).
Parlons brièvement des runes et charmes d'os : on peut les trouver grâce à un cœur bio-mécanique qui murmure des choses au héros (c'est naturellement un cadeau de l'Outsider). Les runes permettent d'acheter les pouvoirs et les charmes d'os offrent des bonus permanents dans à peu près tout et n'importe quoi, sachant qu'on ne peut avoir qu'un nombre limité de charmes actifs en même temps. Les deux obligent le joueur à prendre la peine de visiter les lieux.
Si un joueur néglige l'exploration pour se précipiter sur l'objectif principal (car il y a des objectifs principaux et des objectifs optionnels), il ne les trouvera jamais tous, ce qui veut dire qu'il n'aura pas tous les bonus qu'il voudra et ne pourra pas non plus acheter autant de pouvoirs (de toute façon, on ne peut pas tous les avoir, même en ayant toutes les runes, sauf erreur de ma part). Il y a donc une partie exploration.
Je regrette quand même la présence d'un système de... certes, pas moralité ou karma, mais de chaos ou de stabilité. Dans les faits, toujours est-il que tuer, c'est mal, même si on comprend que tuer ne peut que semer le chaos car, en période de peste transmise par les rats, cela fait plus de cadavres à dévorer (sauf si on les jette dans une benne à ordures, ce qui permet de diminuer le chaos car, même pour un assassin, le recyclage permet apparemment de préserver la société). En plus, s'il y a moins de gardes, il y a donc moins d'ordre, et qui dit moins d'ordre dit société qui sombre dans le chaos : plus de meurtres, réponse à l'insécurité excessive, sécurité qui va augmenter en certains endroits, gardes qui vont attaquer à vue des civils, PNJ qui vont se battre et s'entretuer, etc.
En un sens, ça se tient, c'est justifiable, mais ça pourrit le rôle de vigilante. Les gardes vous tuent à vue, mais si vous jouez l'anti-héros qui sème la terreur chez les gardes et nobles corrompus en épargnant les civils et les innocents, vous pourrirez le monde, donc si vous voulez la bonne fin, vous serez obligé d'essayer de faire le moins de morts possibles.C'est comme ça que je me suis retrouvé à épargner la quasi-totalité d'une bande de voyous en les survolant tel Spider-man ou Batman, sauf que Batman leur aurait brisé les jambes en tombant sur eux car, comme chacun sait, c'est un milliardaire qui aime cogner en sous-vêtements de pauvres gens poussés à une vie de criminalité par la misère (j'avoue cette vision des choses ne vient pas de moi).
Le plus terrible, c'est qu'on peut même neutraliser nos cibles (l'objectif principal) sans les tuer, mais les alternatives non-létales des cibles sont parfois pires que l'assassinat pur et simple, donc on préférera sans doute tuer. Sur le plan moral, il y a des cas où tuer est bien moins cruel que de laisser vivre : excommunier l'homme à la tête d'un culte en le marquant au fer rouge, ce qui fait de lui un paria, ou abandonner une femme entre les mains d'un individu qui a clairement un penchant malsain pour elle en font partie. La mort est plus douce dans les deux cas. Chercher la difficulté à épargner quand le sort réservé est pire que la mort me semble insensé...
Enfin, abordons le point le plus fâcheux : le héros, Corvo est muet, alors que tous les PNJ ont une voix. C'est un comble car on ne choisit ni son nom ni son visage. Tout est imposé au joueur, comme un autre muet du jeu vidéo, Gordon Freeman. Les rares fois où on a un choix de dialogues, le personnage ne parle pas. Il doit sans doute transmettre ses pensées par télépathie. De mon point de vue, ça tue l'intérêt que l'on peut ressentir pour le personnage. N'importe quelle voix, même celle d'un héros d'action sans conviction dont on aurait volé l'âme après l'avoir lobotomisé (je te regarde, Witcher 2 en VF), aide un minimum à se glisser dans la peau d'un personnage et à s'attacher à lui. Il paraît qu'un héros silencieux permet normalement de mieux s'identifier à lui, mais je trouve ce principe bidon. Je ne veux pas être moi dans la peau d'un autre (je ne joue pas à Code Quantum RPG), je veux être quelqu'un d'autre.
Je finirai là-dessus : le jeu a une identité graphique propre (ce n'est pas photo-réaliste, il a son propre style), mais au final, il manque de personnalité. Est-ce parce que certains thèmes ne sont pas assez traités ou parce que les personnages manquent de caractère ? Sans doute un peu des deux. Ce n'est pas un mauvais jeu, il est très bien conçu, mais on ne s'attache pas au héros car aucune complicité ne s'installe entre le personnage et le joueur. On a juste une coquille vide dans laquelle se glisser. Corvo, en tant que tel, n'existe pas. Il est ce qu'on en fait. Or, ce n'est pas un débutant. Il a tout un background qu'on n'a pas vécu. Il avait une vie avant nous et celle-ci sonne creux. On aurait gagné à explorer son passé afin d'apprendre à le connaître.