[JdR] Témoignages - tabous

Pour les discussions de fond ou pour s'amuser autour du JdR en général, c'est-à-dire concrètement tout ce qui n'est pas directement en lien avec une partie en cours sur le forum.
darkbaron
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[JdR] Témoignages - tabous

Message : # 11300Message darkbaron
12 janv. 2013, 16:18

Dans le sujet "les personnages féminins en Fantasy", on a abordé un sujet important : le sexisme en JDR. En effet, jouer un personnage féminin, c'est potentiellement s'exposer au sexisme, qui existe à toutes les époques et dans presque tous les settings (disons-le : c'est rare que le machisme et le sexisme soient absents). Que l'on joue au XXème siècle ou durant l'antiquité, dans un monde de Fantasy ou de science-fiction, la misogynie peut exister. Néanmoins, ce n'est pas forcément drôle pour le joueur ou la joueuse d'y être confronté en permanence, même si c'est réaliste. On pourrait d'ailleurs en dire autant pour le racisme.

Ce sont des formes de tabous compréhensibles car on ne joue pas nécessairement pour être exposé à la haine et l'intolérance, même si ça existe. En fait, ce qui me met mal à l'aise, c'est surtout qu'on part presque forcément sur la forme la plus extrême sans aborder les formes moins visibles, mais plus pernicieuses. Par exemple, un film comme "qui veut la peau de Roger Rabbit ?" aborde des thèmes matures : on y parle de racisme, mais c'est un racisme ordinaire, quotidien, qui ne conduit aucunement ceux qui y adhèrent à souhaiter la mort des toons. Ces derniers sont victimes de discriminations qui rappellent celles qui ont existé (un club où les toons se donnent en spectacle est strictement réservé aux clients humains et interdit aux toons non-employés). Le protagoniste lui-même est intolérant et va accomplir le travail sur lui-même au contact de toons, lui permettant de réviser son jugement, avant de finalement mettre un terme aux agissements du seul souhaitant un génocide. C'est une vision très nuancée et subtile, bien plus que dans bien des œuvres, ce qui ne la rend pas pour autant anodine pour ceux qui la subissent.

Tout ça pour dire que c'est finalement la violence avec laquelle le sujet est souvent abordé qui me dérange. Oui, la haine a conduit à des pogroms et des faits horribles, mais personne ne trouve drôle de subir ça. Le problème de présenter des personnages aussi extrêmes, c'est qu'ils seront forcément limités à ça. Ce sont des pourris, mais ça ira rarement plus loin. On n'aura aucune profondeur. Parfois, cette explication peut suffire, mais ça limite les interactions. La chose ne me dérange pas uniquement chez les PNJ. Je refuserai catégoriquement tout personnage-joueur très raciste (dans le sens, prêt à tout) ou adhérant à une idéologie assez horrible.

Cela mérite d'être nuancé : dans un hypothétique cadre WW2 (cadre dans lequel je ne jouerai sans doute jamais), je ne refuserai pas un soldat de la Wehrmacht qui reste finalement un troufion de base, un brave gars enrôlé sans forcément adhérer aux idées du parti, qui pense sans doute avant tout à défendre son pays. C'était d'ailleurs le point de vue des Alliés, qui avaient en gros une hiérarchie de l'horreur. Tous les soldats allemands n'étaient pas vus comme des monstres et c'est normal car c'était loin d'être le cas. Oui, ils étaient des ennemis car on a forcément des ennemis dans une guerre, mais ça s'arrête là.

Il ne s'agit donc pas non plus de faire un procès contre ceux qui auraient le malheur d'inclure un personnage du genre. Certains se sont indignés que la représentation de l'einherjar dans Scion soit un soldat allemand de la WW2, en oubliant que sont choisis ceux qui sont morts en combat, voire ceux qui sont morts en luttant bravement contre l'ennemi, indépendamment de leurs croyances et de leur sens moral. Quand on choisit des gens pour leur amour du combat et leur bravoure, on s'attend forcément à ne pas tomber sur des pacifistes doux. Oui, un einherjar a un certain goût pour la violence. Son sens moral ne fait pas partie des critères de sélection car on regarde avant tout si ses valeurs sont proches de celles que chérissent les nordiques. Il pourra être de n'importe quelle origine.

La question des tabous est toujours délicate : on peut vouloir aborder un thème avec sérieux et maturité, mais ça n'empêchera pas d'autres de nous tomber dessus car traiter cela dans le cadre d'un "jeu" semble vouloir dire qu'on prend finalement cela avec légèreté, alors qu'il n'en est rien. On peut aisément interpréter nos intentions quand on évoque un sujet sensible de la sorte. C'est pour cela que le JDR historique préfère généralement traiter de périodes assez éloignées. À l'inverse, d'autres ne peuvent pas comprendre les tabous d'autrui ("comment ça, tu ne me laisses pas jouer mon personnage nazi/psychopathe ?") parce qu'ils pensent qu'on n'a pas à s'imposer des limites quand il s'agit de l'interprétation d'un rôle, que cela déplaise ou non.

Tout cela pour dire, avez-vous des tabous ?
Dernière modification par darkbaron le 27 mai 2014, 02:05, modifié 2 fois.

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Iris
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Pourquoi on refuse...

Message : # 11301Message Iris
12 janv. 2013, 17:33

Hello,

Je pense que le premier point à aborder est : pourquoi refuse-t-on un profil ou une situation ? ... Car déjà, il s'agit de deux choses différentes, et qui n'ont d'ailleurs pas forcément à voir avec des sensibilités de type "tabou" :
  • Refuser un profil :
    • le Meneur peut refuser un personnage injouable / qui va lui saboter à coup sûr le scénario / qui est incompatible avec l'éventualité d'un groupe uni / qui ne respecte pas les prérequis qu'il a posé...
    • Un Joueur peut refuser de jouer avec un profil dont il estime qu'il va surtout lui pourrir la vie / le plaisir de jeu
  • Refuser une situation :
    • Un Meneur peut refuser une situation qu'il ne se sent pas capable de gérer (romance par exemple, ou des intrigues politiques complexes...)
    • Un Joueur peut refuser des situations qui détruisent sa relation à son personnage, qui le dégoûtent du jeu, du scénario... L'inventaire peut être assez large (viol, torture, échecs répétés, ruine de tous les efforts précédemment entrepris, humiliations sociales répétées...)
Si on aborde le problème sous cet angle, on touche à la question de la motivation, et je copie / colle ce que j'avais noté à ce sujet d'un dossier sur l'apprentissage :
Motivations intrinsèques

Quand un individu choisit lui-même son activité, pour le seul plaisir de la pratiquer et avec un fort sentiment d’autonomie : c’est la motivation intrinsèque. Les motivations intrinsèques conditionnent la persévérance, c’est-à-dire l’aptitude à poursuivre des efforts sur le temps long, pour réussir des études supérieures ou être sportif de haut niveau par exemple.
  • Découverte. Motivation orientée vers la connaissance.
  • Accomplissement. Motivation orientée vers la satisfaction d’atteindre des objectifs personnels.
  • Excitation. Motivation orientée vers la recherche de sensations.
Attention : Sous peine d’être saturée, la curiosité demande que la complexité de l’environnement soit modérée. La curiosité signale une disponibilité à la trouvaille, à la découverte au hasard.

Motivations extrinsèques

Quand l’environnement contrôle plus ou moins les loisirs d’un individu, la motivation extrinsèque est à l’œuvre. Lorsque la motivation extrinsèque remplace totalement la motivation intrinsèque, il y a le risque de perdre l’aptitude à la persévérance. La personne tend à s’arrêter sitôt que la stimulation extérieure cesse.
  • Renforcement extérieur. L’individu agit parce qu’il y est incité par une menace (punition) ou une récompense (argent, compliments…).
  • Regard social. Le sujet se plie à des règles sociales consciemment acceptés. Il s’agit de pouvoir être fier de soi de même que les membres de sa communauté.
  • Utilité. Le comportement est un outil dans le cadre d’un plan que le sujet considère comme acceptable et souhaitable. Il a choisi cet objectif et décide de se donner les moyens pour l’atteindre.
  • Valeur. Le sujet accomplit des activités peu intéressantes mais conformes à ses valeurs.
Conditions
  • Liberté. La satisfaction d’avoir choisi soi-même sa voie et ses activités Implique la satisfaction d’un sentiment d’autonomie dont le besoin est plus ou moins important selon les individus.
  • Estime de soi. L’estime globale de soi est un facteur positif, mais de portée limitée car pouvant être gêné par une piètre efficacité.
  • Sentiment d’efficacité. Il faut avoir l’impression d’être bon dans ce que l’on fait, que le résultat obtenu est celui visé. Il peut s’agir d’une confortable illusion de principe, ce qui la fragilise d’autant.
  • Temps. Manquer de temps, avoir un rythme contraignant, épuisant, stressant… sont autant de facteurs épuisants qui nuisent à la motivation et peuvent conduire à un profond désintérêt. Le résultat peut également être une tendance à ne se consacrer qu’à l’urgence, à se laisser aller à la procrastination, enterrant sous un amas de petites tâches urgentes les activités complexes, incertaines et dispendieuses de temps.
Démotivations
À l’inverse, la démotivation découle d’un sentiment d’impuissance. Il en existe trois grandes formes.
  • La résignation et le découragement se caractérisent par l’incapacité à donner du sens à l’activité : « à quoi ça sert ? », « de toute façon je n’y arriverais jamais », « à chaque fois j’échoue »…
  • L’abandon et la fuite se manifestent par des attitudes d’évitement, le sujet se fait passer pour malade ou s’absente. Ne supportant pas une contrainte ou frustration et il pourra choisir d’aller s’amuser ou partir brusquement au loin.
  • La rébellion prend la forme d’une opposition frontale, des provocations, des résistances et refus d’obéissance. En même temps, le sujet peut prétendre que les activités sont trop faciles et donc indignes de lui. C’est tout particulièrement courant chez un individu doté d’un charisme suffisant pour lui permettre d’être un leader de son groupe de pair. En somme les sujets les plus agressifs dans un groupe d’apprenants sont également souvent les plus populaires.
Or que voit-on ? Que les situations fréquemment problématiques (humiliations, torture, viol...) cumulent des facteurs qui tuent la motivation :
  • aucune liberté = le PJ est une victime, il ne peut que subir ; parfois il n'est en outre arrivé là que par dirigisme du Meneur
  • estime de soi = en général, les humiliations de toutes sortes portent atteinte à l'estime de soi... donc pour les supporter en tant que Joueur il faut être capable de mettre suffisamment de distance pour ne pas se sentir blessé et dégoûté par les souffrances du PJ. Cela implique en outre que passé le "mauvais moment", il y ait de la part du Meneur une accentuation de ce qui permet de favoriser l'estime de soi du PJ (ne serait-ce que pour qu'il ne reste pas à pleurer dans un coin pour cause de cohérence & vraisemblance du RP)
  • aucun sentiment d'efficacité = ces situations sont le résultat d'un échec... donc vécues doublement négativement, comme sanction de mauvaises décisions et comme douloureuses en elles-mêmes. Par ailleurs les séquelles qui en résultent plombent l'efficacité du personnage, moralement et / ou physique, et comme il est amoindri, il y a une perte voire une disparition du sentiment d'efficacité
Et voilà décortiqué pourquoi on ne peut jouer ni les viols, ni la torture, ni l'esclavage, ni ...

Si on continue de prendre ces critiques, pourquoi un PJ raciste / sexiste est-il problématique dans un groupe ?
  • Liberté : il bridera les actions des PJs méprisés en les considérant mauvaises par principe
  • Estime de soi : par ses moqueries et brimades, il nuit à l'estime de soi des PJs persécutés
  • Sentiment d'efficacité : en niant leurs compétences et leurs réussites, là encore, il contribue à la démotivation du Joueur victime


Pourquoi cependant ces difficultés peuvent-elles être intéressantes ?
  • si elles ne sont pas constantes, qu'elles constituent une étape (il faut que ce soit explicite, et pas que le Meneur fasse mine de dire "dépasse-toi jusqu'à la prochaine tuile que je t'envoie pour te rabaisser le caquet"
  • si elles ont un sens dans l'histoire, un lien avec une thématique, et donc que les souffrances peuvent être acceptées car elles son un mal nécessaire pour... ou bien qu'elles ont malgré leur horreur ouvert des opportunités, changé la vie, finalement en mieux...
A noter également que les critères existent en métajeu :
  • Liberté : j'ai choisi un jeu / scénario horrifique en connaissance de cause, je sais que je vais en baver ; j'ai accepté que le Meneur fasse des surprises
  • Estime de soi : je m'apprécie, je n'ai pas besoin d'un perso glorieux à chaque fois, je peux expérimenter des trucs plus durs pour voir, mais je reste moi et tout va bien
  • Sentiment d'efficacité : d'habitude les jeux sont trop faciles, j'ai envie de me mettre à l'épreuve et voir si j'arrive à m'en sortir, c'est juste un test virtuel + mon perso a des compétences variées que je sais bien utiliser et je connais le système
  • Découverte : si on fait un truc qu'on a jamais essayé, on découvre et c'est chouette
  • Accomplissement : faut quand même pouvoir arriver à quelque chose
  • Excitation : la surprise est le meilleur pourvoyeur d'excitation, mais pour ça il faut accepter ... de lui faire confiance, pour que ça ne se manifeste pas sous forme de démotivations & refus ...
A quoi ajouter que la confiance en la personne du Meneur est essentielle et sa capacité à repérer la souffrance aussi.


En conséquence, je n'ai pas de tabou par principe, mais je veux que les souffrances aient une utilité dans l'histoire et que le Meneur ait conscience de ses actes, qu'il puisse éventuellement dire en métajeu "ça ne va pas durer, c'est une occasion pour toi d'explorer ça, mais ça ne sera pas comme ça tout le long", et bien sûr qu'il s'y tienne ! Rien de pire que des promesses non tenues pour tuer la confiance !


D'où il résulte que les thèmes durs / matures / etc. ne peuvent fonctionner à mon sens que si Joueurs & Meneurs ont conscience de ces données et qu'ils respectent le "contrat de jeu" qu'ils se donnent.



C'était la réponse Hors Sujet du jour :mrgreen:
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DukeTogo
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Re: Témoignages - tabous

Message : # 11396Message DukeTogo
19 janv. 2013, 18:30

iris, en relisant ta réponse très intéressante et riche d'enseignement, j'adore !

Me permet tu de l'utiliser pour lancer une conversation sur un site JDR ?

Bises

A part ça, pour répondre à la question de Darkbaron sur "ais-je des tabous en jdr?", je crois bien que oui.

A vrai dire, je ne m'étais jamais posé la question, me contentant de mon bon sens personnel, mais tout est relatif...
Donc en y réfléchissant :

Déjà en MJ, je ferais très attention à toutes formes de violence sur un pj. Je pense que le plus prudent est de narrer ce qui se passe plutot que de vouloir faire jouer, faire vivre mais in fine "faire subir" la scène de façon trop réaliste via les descriptions, le roleplay habité, etc. Donc, si un PNJ devait capturer un PJ et que ce PNJ est un gros salopard vicieux, je dirais simplement au joueur "il te torture pendant tant de temps, tu es éprouvé (jet de volonté ou de moral), etc"

En tant que joueur, j'ai eu la surprise de me prendre au jeu de faire un méchant.
La situation était la suivante : Un des joueurs a proposé une 'tite campagne où l'on jouerait des orques (voire des gobelins) dans le but de se fendre la poire, etc.
Au départ, je ne voulais pas en être, préférant m'abstenir (tel Cantona, "je m'en vais comme un prince"') et puis j'y suis quand même allé, jouant un guerrier-voleur gobelin, veule, lâche et jaloux, neutre mauvais. 2 joueurs jouait le remake des barbarians, mais en plus crétin car orques. Il fut donc facile de les manipuler, de les amadouer (c'est pas juste, vous, vous êtes balèzes, et puis vous êtes frêres, moi je suis faible, et... snif... snif... j'ai pas de frères... Deux minutes plus tard, je devenais leur frère !)
Progressivement, j'ai viré Joe Dalton, une vraie teigne. J'ai gravi les échelons du clan, devenant un chef redouté dont la cruauté faisait trembler à des kilomètres à la ronde. Mieux que ça, ma virilité devient légendaire, les orquettes qui passaient à la casserole dans ma tente, façon Khal Drogo début de la saison 1, ne savaient pas que je m'étais procuré des fioles d' "agrandissement". Je fais pas un dessin, mais imaginez la surprise des gars de la tribu à l'extérieur qui entendaient geindre... Bref, c'est pas classieux mais pour poser le bonhomme, gagner le respect, ca le fait.

A cette table, l'ambiance était très bonne, personne n'était choqué des idées gratinées qui fusaient.
Mais je dois reconnaitre que si un externe nous avait rejoins à la table , il n'aurait pas eu d'autres choix que de se soumettre à mon pj nommé Cockcroach (trad = le cafard) qui mixait allégrement les qualités et le melon de Scarface et Thulsa Doom, auquel j'ajouterai El General du film Traffic, adepte du syndrome de Stockholm...

Le plus terrible là-dedans, et j'en ai honte, c'est que c'est le personnage dans lequel j'ai livré mes meilleures prestations, alors que je me targue de préférer jouer les bons samaritains (prêtre bon neutre ou paladins sobre et humble façon Luke Skywalker, loin des stéréotypes Chevalier arrogants que l'on voit parfois dans ces rôles).

Du coup, je pense que je ne referais jamais un personnage mauvais car une fois lancé en roleplay, étant jusque-boutiste car je m'efface pour laisser les clefs au personnage, qui sait ce que je serais capable de dire ou faire?

Mon but premier en JDR étant de partager un bon moment, jouer un mauvais, et le jouer réellement est potentiellement tirer une balle dans le pied du "contrat social" que j'aime tant, car nécessairement, jouer à fond impliquerait que je tente de bouffer l'espace vital d'un autre pj.

- - - - -

Un autre tabou serait de me jouer en pj. Ca a l'air débile mais ce genre de projet est parfois proposé...

Un dernier tabou est de jouer à Vampire ou INS qui met en place des personnages exceptionnellement puissants par rapport au commun des mortels. Je n'ai rien contre les chemises à jabots, le problème est d'imaginer avoir pouvoir de vie ou de mort sur autrui.
Y'a un coté éthique qui me gène aux entournures. J'avais un pote roliste qui ne jurait que par INS. Un jour, je tombe sur un scénar que je feuillette.
La narration d'intro racontait un bel adonis mystérieux (en réalité un démon spécialisé dans la luxure) rentrant dans une église et réclamant au prêtre de le confesser. Le prêtre, incapable de résister à l'ascendant de l'inconnu fut contraint de... euh... affaire DSK, quoi... :shock: :o

Je me rappelle avoir refermé le bouquin, et haïs profondément l'auteur, l'éditeur, et je nourris à l'égard de ce jeu un réel ressentiment. :evil:

Voilà le genre de tabou franchi impardonnable. Perso, je suis athé, mais trop c'est trop.

Bon, j'arrête là.
"Seuls les singes et les pitres sollicitent l'applaudissement" Tywin Lannister

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Iris
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Conversation ?... euh ?...

Message : # 11397Message Iris
19 janv. 2013, 20:05

DukeTogo a écrit :iris, en relisant ta réponse très intéressante et riche d'enseignement, j'adore !

Me permet tu de l'utiliser pour lancer une conversation sur un site JDR ?

Bises
Oui, oui, pas de soucis, fais comme tu le sens ;) Il s'agit de prises de notes & synthèse & adaptation à partir d'un dossier sur l'apprentissage, références :
  • ce que j'en avais tiré sur mon blog en l'appliquant aux études de droit : http://iris-d-automne.over-blog.fr/arti ... 14673.html
  • le point de départ, sur la motivation en lien avec l'apprentissage : "Donner envie d'apprendre", numéro °11 - L'essentiel Cerveau & Psycho de août-octobre 2012.

...


Sinon pour revenir à ton intervention DukeTogo...

1. Jouer un mauvais jusqu'à se dégoûter soi-même : je pense que dans l'absolu, si on creuse un peu la psycho, on peut jouer n'importe quel type de perso, de même qu'un bon acteur doit pouvoir jouer la pire ordure possible... mais en dehors de l'aspect expérimental, je crains que ce soit assez malsain... après tout, se mettre dans la peau d'un SS convaincu de sa cause et qui massacre ... c'est peut-être instructif (pour comprendre les mécanique de l'horreur, du génocide), mais on sort du domaine du "jeu", on est dans l'expérience de vécu émotionnel, d'empathie avec le monstre et son humanité, pire encore, c'est une découverte de la "banalité du mal" (célèbre expression de Hanna Arendt au sujet de criminels de guerre nazi). Si je pense qu'on peut pousser assez loin l'exploration sans quitter le domaine du "jeu", je pense aussi que faire de purs "méchants" qui ne sont pas amenés à se remettre en question, est non seulement fade, mais aussi désagréable, confusément poisseux... de quoi ne pas se sentir satisfait ou grandi...

2. L'humiliation gratuite : de la même manière, la torture, le pouvoir et tout les petits à côté de grand méchant du côté obscur, ça n'a d'intérêt que si on pose la question de leur sens, de leurs limites... mais ça demande en amont de la part du Meneur qu'il se soit vraiment posé la question de l'éthique, qu'il utilise sa chronique pour donner sa vision du monde, et pas juste des combats et des idéaux superficiels, bref, quelque chose de profond... L'exploration des ténèbres, ça n'a d'intérêt pour moi "Joueuse" que s'il y a une leçon, un message, et qu'il a été un peu réfléchi... Dès lors, une fois qu'on enlève l'horreur gratuite "défouloir", on a quelque chose de bien plus "fort" et plus intéressant... mais évidemment, ça veut dire qu'on ne joue pas de parodie, qu'on ne fait pas exprès de se comporter comme des gamins et qu'on réfléchit, chacun autour de la table, à ce qu'on fait, comment marche l'univers, et le questionner... Perso, c'est dans ce sens que j'essaie de concevoir mes scénarios "sombres", ... du coup, je pense que possiblement... tu pourrais peut-être trouver ton compte à jeter un oeil aux vampires dans FIM ;) Pour te donner une idée de la démarche, j'ai tendance à essayer de creuser le "sens" des mythes, leur symbolique, leur histoire, etc. Ici, un exemple sur le vampire où justement j'avais trouvé pas mal de doc :

:)
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Thalgrim
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Re: Témoignages - tabous

Message : # 11400Message Thalgrim
20 janv. 2013, 08:18

DukeTogo a écrit :Un dernier tabou est de jouer à Vampire ou INS qui met en place des personnages exceptionnellement puissants par rapport au commun des mortels. Je n'ai rien contre les chemises à jabots, le problème est d'imaginer avoir pouvoir de vie ou de mort sur autrui.
Y'a un coté éthique qui me gène aux entournures. J'avais un pote roliste qui ne jurait que par INS. Un jour, je tombe sur un scénar que je feuillette.
La narration d'intro racontait un bel adonis mystérieux (en réalité un démon spécialisé dans la luxure) rentrant dans une église et réclamant au prêtre de le confesser. Le prêtre, incapable de résister à l'ascendant de l'inconnu fut contraint de... euh... affaire DSK, quoi... :shock: :o

Je me rappelle avoir refermé le bouquin, et haïs profondément l'auteur, l'éditeur, et je nourris à l'égard de ce jeu un réel ressentiment. :evil:

Voilà le genre de tabou franchi impardonnable. Perso, je suis athé, mais trop c'est trop.
Après, faut voir que INS/MV, c'est du 3ème (voir 4ème ou 5ème) degré et qu'en plus, je suis convaincu que Croc adore choquer et jouer sur l'image parfois sulfureuse du JdR. Si j'approuve pas forcément la seconde partie de la démarche, étant donné que je ne prend pas grand chose au sérieux, les scénarios INS/MV me font parfois sourire, voir carrément hurler de rire dans au moins un cas. Après dans la majorité des cas, ils sont moyens, pas vraiment drôle et utilisent des ficelles de provocation éculé (dans le cas que tu cite, ça me choque pas du tout, mais ça me fait pas rire non plus, bref c'est médiocre et c'est un scénario qui n'a probablement pas grand intérêt).

Par rapport à Vampire, je suis loin d'être un fan absolu de l'univers et du jeu (j'y joue parfois, mais j'y vois pas mal de défaut), mais par contre, ça ne me semble pas très pertinent de refuser d'y jouer juste à cause de la puissance des personnages. Parce les jeux où les PJ sont exceptionnellement puissants par rapport au commun des mortels, il y en d'autres. Les jeux de super-héros évidemment, mais aussi et plus simplement ce bon vieux Donjon et Dragon. Parce que normalement, à Donj, le PNJ lambda il dépassera rarement le niveau 3, et encore, dans des classes non héroïques. Du coup, le moindre PJ niveau 8/10, ben il est bien au dessus de la population.

Asdel
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Re: Témoignages - tabous

Message : # 11412Message Asdel
20 janv. 2013, 14:12

J'ai vu hier Django Unchained et je compte très prochainement aller voir Gangster Squad.
Ces deux films m'interpellent par rapport ) votre débat. En effet, tous les deux mettent en scène des "gentils" (je dirai plutôt des anti-héros) capables d'utiliser des méthodes tout à fait illégal (des chasseurs de primes qui préfèrent jouer de la gâchette plutôt qu'essayer de capturer les méchants, et des flics qui engagent une lutte à mort contre la mafia, en utilisant les mêmes armes que cette dernière) afin d'arriver à leur fin.
Jouer un personnage vraiment de l'autre côté de la barrière, c'est intéressant, mais très vite lassant. A moins de jouer avec des Codes, le Paladin Noir Loyal Mauvais par exemple, qui se restreint à ne pas tuer des enfants. Mettez le face à des dilemmes (obéir à un ordre abject/bafouer son honneur) et ça peut créer des séquences de jeu super intéressantes. Et y'a pas mal de jeux et scénarios qui fonctionnent sur ses dilemmes moraux. Je pense par exemple à COPS, j'y ai joué un flic à la base intègre, qui est devenu de plus en plus ripoux pour contrer les agissements de ses ennemis, un cartel chicano. Dans la logique des choses, à force d'être border-line, nos persos sont presque tous passés du mauvais côté, et là c'est un régal en jeu, entre ceux qui ont eu leur famille menacée physiquement pour qu'ils arrêtent, les passages à tabac et la pression d'instances fédérales pour nous "mettre la pression", j'ai eu une excellente expérience de jeu. Et pourtant on allait pas forcément dans la finesse pour résoudre certains crimes.
Après, le MJ se débrouillait pour ne pas choquer outre mesure, avec des descriptions sobres et vivantes des actions. De plus, le groupe était relativement équilibré, dans le sens où nous jouions aussi à des missions plus classiques où nos personnages étaient des gentils qui ne passaient pas par la violence et que ce moyen n'était pas le seul pour nous exprimer.
Mais de fait, pour avoir aussi joué à Vampire et INS, je pense comme Thalgrim, il y a des degrés d'humour dans les jeux de Croc qui sont très potaches voire graveleux, et le WoD peut faire des persos très puissants. Mais rien n'empêche de jouer très sérieusement, et de confronter les PJs à des soucis s'ils vont trop loin dans l'utilisation du système ou du gore. Sur INS/MV, mes meilleurs souvenirs sont sur un très long weekend où nous jouions des anges et des démons dans la même équipe, avec la même mission mais sans savoir exactement qui était qui, et ça a créé de beaux moments de tensions dans un sale jeu de dupe.
Pour Vampire, des gros bourrins y'en a, mais c'est pas le sens du jeu pour moi. C'est bien plus intéressant de jouer sur les concepts métaphysique, la quête de pouvoir ou la conservation de l'humanité, la manipulation des humains, de leur amour et de leur haine...Et si ça part trop dans des sujets bourrins et tabous, rien n'empêche le MJ d'utiliser les mêmes artifices.

Pour conclure sur la question centrale des tabous, je vous recommande de lire "Jouer avec l'Histoire" des Pinkerton Press. En se fondant sur le jeu historique, les auteurs (Renaud Maroy et Jean-Philippe Jaworsky pour ne citer que ceux là) posent la question des tabous dans notre société. Personnellement, jouer border-line ne me gêne pas, mais il ne faut pas que ça passe dans de la surenchère glauque et morbide, du style jouer Wraith dans les Camps de concentration. Mais c'est comme tous les films noirs/polars/films de guerre, il y a "manière et manière de" comme on dit, de la série Z au vrai polar noir, il y a souvent une limite à ne pas franchir pour ne pas dégoûter les lecteurs et donc les joueurs.

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Re: Témoignages - tabous

Message : # 11414Message darkbaron
20 janv. 2013, 14:59

Thalgrim a écrit :Après, faut voir que INS/MV, c'est du 3ème (voir 4ème ou 5ème) degré et qu'en plus, je suis convaincu que Croc adore choquer et jouer sur l'image parfois sulfureuse du JdR. Si j'approuve pas forcément la seconde partie de la démarche, étant donné que je ne prend pas grand chose au sérieux, les scénarios INS/MV me font parfois sourire, voir carrément hurler de rire dans au moins un cas. Après dans la majorité des cas, ils sont moyens, pas vraiment drôle et utilisent des ficelles de provocation éculé (dans le cas que tu cite, ça me choque pas du tout, mais ça me fait pas rire non plus, bref c'est médiocre et c'est un scénario qui n'a probablement pas grand intérêt).

Par rapport à Vampire, je suis loin d'être un fan absolu de l'univers et du jeu (j'y joue parfois, mais j'y vois pas mal de défaut), mais par contre, ça ne me semble pas très pertinent de refuser d'y jouer juste à cause de la puissance des personnages. Parce les jeux où les PJ sont exceptionnellement puissants par rapport au commun des mortels, il y en d'autres. Les jeux de super-héros évidemment, mais aussi et plus simplement ce bon vieux Donjon et Dragon. Parce que normalement, à Donj, le PNJ lambda il dépassera rarement le niveau 3, et encore, dans des classes non héroïques. Du coup, le moindre PJ niveau 8/10, ben il est bien au dessus de la population.
Concernant INS/MV, c'est clairement un jeu dont le thème pourrait se résumer à "provocation". Je ne suis pas forcément opposé à cette forme d'humour en soi, mais c'est un genre qui demande une certaine maîtrise. Il y a une nuance claire entre provocation et attaque gratuite, entre critique et agressivité bête et méchante. C'est une différence qu'INS/MV a parfois du mal à saisir. D'un autre côté, le jeu n'est pas là pour faire dans la subtilité, mais je sais que ça a déjà agacé certains joueurs qui ne détestent absolument pas le jeu en soi, mais réprouvent sa volonté de cogner fort et aveuglément. Je ne sais plus quel archange est censé avoir des skin-heads comme serviteurs et un MJ que je connais a changé ça parce que l'association, même si elle a un fond de vérité, reste déplaisante pour ceux qui ont la foi et n'aiment pas être mis dans le même panier que les autres. C'est un cas où l'humour ne prend pas et où on voit difficilement autre chose que de l'insulte et de la méchanceté.

Concernant la puissance, oui, les jeux où les PJ ne sont pas au-dessus du commun des mortels sont rares. C'est le cas au début de Warhammer, mais ça finit par changer dès qu'on a avancé dans plusieurs carrières. Il y aura toujours plus puissant, mais on ne peut pas dire qu'on fait encore partie du "commun des mortels" quand on est maître sorcier, surtout que je ne pense pas que tous les sorciers sont en mesure d'atteindre cette carrière. En fait, c'est rare qu'on reste un simple mortel, en dehors des jeux d'horreur comme Cthulhu ou WoD - mortels, voire des jeux purement historiques, donc réalistes.

DukeTogo
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Re: Témoignages - tabous

Message : # 11445Message DukeTogo
20 janv. 2013, 23:39

Bah, vous savez l''humour, je suis pas le dernier à le pratiquer meme si il est au niveau de la ceinture, je suis meme capable de me mater un spectacle entier de Bigard, c'est dire.
Mais dans l'exemple dont je vous parle, le coup du bel adonis démoniaque qui rentre dans une église et oblige un pretre à lui faire une f******* dans le parloir de confession, franchement c'est débectant et perso, ca passe pas.

Sinon, je sais pertinemment qu'a Donj, pour ne citer que celui-là, les pjs vont évoluer et être bien au dessus de la moyenne. Mais ça ne les empêchent pas de se faire potentiellement dégommer par des monstres, d'autres héros ou bien d'être pourchassés par des chasseurs de prime embauchés par une commune dans laquelle ils auraient commis des exactions gratinées.

De plus, le cadre n'est pas contemporain et en plus cela se passe sur une autre planète, on peut donc plus facilement être détaché.

Ce qui me gène avec INS ou Vampire, c'est que les personnages sont comme des Dieux et les gens de tout les jours (moi, vous, nous) ne sont que des insectes fournissant un terrain de jeu, un terrain de chasse. Egalement, quand il m'arrive de parler avec des joueurs qui pratiquent ces jeux, je n'entends que des "mouarf mon perso est top balèze" ou bien "je suis le cerveau du clan, tout le monde doit m'obéir, je tire les ficelles"...

Mes deux centimes ^^
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darkbaron
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Re: Témoignages - tabous

Message : # 11446Message darkbaron
21 janv. 2013, 00:52

Oui, pour moi, un démon du sexe demande de la subtilité : on parle de séduction, de corruption, de tentation. Imaginons qu'un démon du sexe veuille séduire une personne coincée, par exemple une bibliothécaire sexy (bah oui, autant qu'elle soit sexy). Le mec trash fera ce que tu cites. Le démon subtil et rusé remplacera le livre qu'elle lit par un ouvrage érotique en échangeant les couvertures des deux afin qu'elle ne se rende compte de la supercherie qu'au moment de la lecture. ça, c'est le genre de tromperie dont doit se montrer capable un démon du sexe ! La fourberie, il n'y a que ça de vrai...

Concernant la puissance des vampires : elle est fragile. Un lion ne s'attend pas à se faire dévorer par des rats dès qu'il ferme l’œil. Un vampire, si. Une imprudence de sa peur et il finit au soleil. C'est pour ça qu'ils ont inventé la Mascarade, ce qui est quand même un aveu de faiblesse.

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