Ode - Chap. 9.2 - Un Choix de vie [Acte II]

[Cialf]

- Tu as raison, je suis la reine des imbéciles. Tu me l'as déjà dit, non? Je suis désolée si ta sœur y a vu un manque de confiance. J'avais terriblement honte devant Serah. Avec toi, ça passe mieux. Maintenant, Serah et Lockhyel doivent être en train de courir partout dans la ville pour recueillir des informations, ce n'est pas bien difficile, les gens comme dame Ennebelle se déplacent toujours avec une foule de domestiques, des majordomes, des femmes de chambre... Toute la ville doit déjà en parler. Bien sûr, ils ne connaissent qu'une version: la sienne.

"Enfin, tout ça, vous le savez déjà, ou vous le saurez très vite. Il y a plus urgent. Je serai jugée par le seigneur du lieu, et il est le cousin de l'accusatrice. Je ne connais pas le seigneur Evan Mac Evran, c'est peut-être quelqu'un de très juste, mais je n'y mettrais pas ma tête à couper. Si je suis jugée à huis clos, je me défendrai, mais ils me jugeront selon leurs intérêts de famille et vous n'y pourrez rien. En audience publique, le seigneur n'osera pas commettre une injustice flagrante devant ses sujets. Il faut qu'il y ait le maximum de gens, des marchands, des artisans, des paysans, des gens qui confient leurs enfants aux damathairs... Des damathairs...

"J'étais une damathair, Léorah... Une damathair... Tu ne peux pas savoir le bien que ça me fait de le dire.

[Amnèsya]

Je reste impassible malgré les imagines, étranges que je perçois.
Je suis sure qu'avec Leorah, on aurait adoré la rendre calyre...

"Et... "

[Cialf]

- Et.. Et... Je sais, ta sœur m'a dit que vous étiez des bâtardes, que vous étiez tenues à l'écart par le village, et vous n'avez pas beaucoup profité des leçons de la damathair. C'est dommage. Très dommage, même. Pour moi, j'étais damathair dans un village et je me sentais vraiment responsable devant ma communauté. Je sais ce que j'ai fait, j'ai commis une faute lourde et si tout le monde me condamne, je l'accepterai. Mais je ne veux pas qu'il y ait une injustice envers la mémoire de cette enfant. Dame Ennebelle va m'accuser et je ne sais pas de quoi... Perversion, torture, drogue, sorcellerie, peut-être quelque chose qui n'a rien à voir avec ce que j'ai fait. Si elle ne m'accuse que sur mes actes, je m'expliquerai.

Léorah m'écoute, toujours imperturbable. Je ne sais pas en quel métal elle est faite, mais c'est du solide.

- L'affaire a dû faire du bruit, mais j'ai complètement cessé d'écouter les varigaux pendant six mois. Lockhyel n'aura pas de mal à s'informer, la famille de dame Ennebelle est très connue. C'était l'an dernier en automne, dans le village de Muillan Garr, dans les Collines d’Osta-Baille...

[Amnèsya]

Dans ma tête, je note les quelques infos qu'elle me donne...
Des noms, des possibilité d'en apprendre plus surtout la fin l'an dernier en automne auprès des gens de la dame et éventuellement des varigaux mais la j'ai des doute Locke en aurait eu vent, dans le village de Muillan Garr, a côté d'Osta-Baille.

Je soupire et me prends la tête dans les mains et me masse un instant les tempes avant recroiser les mains fermement.

- Avant que je perde patience ou que les gardes arrivent, je t'explique comment on va procéder pour la suite. Phrase simple. Courte et surtout FACTUELLE (ce n'est pas crié mais fortement insité). Qui, quand, comment, pourquoi?
Tu nous a dis à l'automne dernier, c'est vague... Au moins le fils de Dame Ennebelle. Etait-ce le seul enfant?
Et par pitié, arrête tes suppositions et autres spéculations, on a pas le temps.

J'y serais aller peut être plus progressivement, mais l'avantage avec Leorah, c'est qu'on gagne du temps par rapport à ma méthode.

[Cialf]

- Léorah, tu es une tête de mule et c'est ce que j'aime bien chez toi. J'essaie de faire les choses dans l'ordre. La première chose, c'est d'avoir les conditions d'un procès équitable. Sinon, je peux leur raconter une belle histoire, Serah peut la mettre en vers et l'accompagner au rebec... Excuse-moi, j'ai l'air de me moquer, je sais bien que Serah... Bon, j'arrête les suppositions.

"Donc, les faits. En sortant d'ici, il faudrait que tu me procures du papier et de quoi écrire. Venant de toi, les gardiens devraient mieux accueillir la demande. J'ai besoin d'écrire plusieurs choses: entre autres, la liste de mes anciens élèves. Ce sera important au procès.

"L'héroïne: une campagnarde naïve, sortant du service d'ost, va à l'université d'Osta-Baille pour s'instruire. Les autres élèves, des filles de noblesse ou de bonne bourgeoisie, se moquent de son accent, de ses robes mal fagotées. Elle est toujours à court d'argent, mais comme elle est travailleuse et bonne élève, elle arrive à s'en sortir en donnant des leçons payantes à des élèves plus riches. Elle est bonne en escrime, et à cette époque, tu aurais été étonnée de mon jeu de jambes. Une fois, nous étions en promenade en canot, quelques amies, une bande de voyous a voulu nous dépouiller et c'est moi qui ai tiré l'épée pour les faire fuir.

"L'héroïne revient dans son village natal et elle est acceptée sans problèmes comme damathair. Elle est heureuse dans son travail, les enfants sont contents et grandissent en bonne santé: jusqu'ici, c'est une belle histoire.

"Il y a trois ans à peu près... Trois ans et demi exactement, chez nous, l'année scolaire commence à l'Earrach Feis, à l'équinoxe de printemps... Une dame d'Osta-Baille...

[Amnèsya]

Leorah, une tête de mule... Je suis sure que cela lui fera plaisir...

On verra plus tard pour la susceptibilité... Surtout ne pas la couper.

le début d'une histoire classique pour un bon personnage... C'est ce que dirais Serah... Et j'ai déjà reconnue tes qualités martiales.

Donc l’équinoxe du printemps derniers

[Iris]

Dans le fond on entendait un garde qui venait d'avaler de travers et toussait en s'étouffant. Son comparse prenait ça plutôt à la légère et lui tapait un peu sur le dos.

" Dommage que les deux jumelles viennent pas en même temps..." soupira-t-il avec un fond de grivoiserie... qui signalait aussi que Serah / Léorah n'était pas oubliée et qu'il n'était pas impossible que les gardes viennent lui suggérer de s'activer.

[MeiYaw]

Pendant ce temps là, Léorah s'amuse avec Mog...

[Cialf]

Les gardes s'impatientent... Ou alors ils cherchent un prétexte pour récolter quelques daols de plus... Léorah fait montre d'une patience inhabituelle, il vaut mieux ne pas en abuser.

- J'accélère. Les dames d'Osta-Baille redécouvrent les vertus de l'éducation traditionnelle par une damathair de village. Beaucoup de sport, d'apprentissage du combat, de vie en plein air, pour s'imposer pendant leur service d'ost. Mais aussi de la littérature, des traditions, assez de calcul, pour faire carrière à la cour ou parmi les riches négociants. Je suis l'oiseau rare: une damathair formée à l'université et qui n'a pas peur de travailler dur. Je reçois un élève de la ville, puis deux, puis dix... A la fin, j'en avais quinze. Entre eux et les enfants villageois, les rapports ne sont pas toujours faciles, mais j'arrive à les faire aller ensemble... J'en fais trop, je demande toujours plus d'exercices... L'hiver dernier, je me casse une jambe dans la montagne, je reprends le travail avant d'être complètement rétablie, tu vois le résultat... Mais ça ne m'arrête pas. Je voulais être une professionnelle exemplaire et irréprochable, comme toi. Sauf que toi, tu es naturellement parfaite, c'est différent. Et puis au printemps dernier...

C'était un jour de pluie. Une silhouette trempée sous sa capuche , fragile, frissonnante sous l'averse glacée. Et à côté d'elle, sa mère, souriante, sûre d'elle, imperturbable, sa belle robe et ses bijoux ruisselant de pluie. Telle mère, telle fille... Il faut toujours se méfier des proverbes.

- Elle est arrivée en cours d'année, en Ceitean, vers la fin du printemps. Ennea. Seize ans, bientôt dix-sept. Elle aurait déjà dû commencer son service d'ost, mais elle était trop fragile, trop gauche. Elle était fille unique, l'héritière d'une grande famille noble. Dame Ennebelle est venue en personne pour me flatter, me dire "Je vous fais totalement confiance, je connais votre réputation. Elle sera digne de son nom et saura tenir l'épée de chevalier. Si quelqu'un peut y arriver, c'est vous." Et je l'ai crue. J'ai accepté.

Je me retourne, je m'appuie au mur en fermant les yeux. J'avais cru que ce serait plus facile avec Léorah qu'avec Serah, mais cela me déchire. Est-ce parce qu'elles se ressemblent tant toutes les deux?

- Excuse-moi, Léorah, je croyais que j'y arriverais.

[Amnèsya]

En revanche contrairement à Leorah, la gestion du stress n'est pas ma tasse de thé... Et ca commence à ce soir.

"Et tu va y arriver parce que franchement tu fais pitié. Tu ressemble plus à une gamine qui essaye de cacher ses bêtises qu'a cette damathair que tu me décris... Tu fais honte à ce souvenir...
Alors Vite..."