OdE - Chap. 6.4 - Deux coeurs, deux âmes

[Maëlys]

"Désolé d'avoir abordé ce sujet avec toi mais .. j'avais besoin de savoir.
Le seul aperçu que j'ai eu des limbes a suffit à me glacer le sang mais bien qu'il puisse te paraître réel il me semble moi tellement différent et ... inaccessible."

Lorsqu'il se mit à parler sans la regarder, elle se mordit la lèvre. Elle n'avait pas voulu être aussi incisive, pas le blesser alors qu'il avait peut-être suffisamment souffert pour sa vie d'après ses dires mais cela sortait tout seul. Elle pouvait le détester pour ce qu'il avait fait à Erwan puis l'instant d'après regretter sa pensée précédente car celui qu'elle voyait de ses yeux était Erwan...

Puis lors de ses dernières paroles qu'il lui adressa d'un regard insistant, elle sentit son coeur se briser.

"Arrête ! Arrête-ça de suite !" s'exclama-t-elle d'une vois autoritaire

"Ne me demande pas ça, même si tu n'es pas lui je ne peux pas faire ça, je ne suis pas un assassin, je ne tue pas les gens ainsi, même après ce qui vient de se passer. Et même si je le faisais, cela m'avancerai à quoi, à rien ! A rien du tout, ce qui est fait est fait, Erwan ne reviendrait pas plus, tout comme je ne te convaincrai jamais d'y retourner afin qu'il puisse reprendre son corps !"

Elle reprit son souffle après sa tirade, entre la fureur et le désespoir. Puis elle continua :

"Si tu as peur des autres, je ne dirais rien à ton sujet. Te faire souffrir serait aussi terrible pour moi que de le voir souffrir et je ne tiens pas à créer le malheur autour de moi."

[darkbaron]

"Erwan" lui tourna le dos afin de verser une larme et respira lentement en pensant à sa "vie". Maëlys avait été si gentille et serviable avec lui... Elle était même prête à cacher la vérité aux autres, ses propres amis... Néanmoins, cela pouvait lui attirer des ennuis et il ne le voulait pas. Oui, il avait envie de vivre, mais Maëlys était une jeune femme si douce... La vie n'avait pas de sens quand on risquait de sacrifier quelqu'un comme elle, une personne prête à souffrir pour permettre à d'autres de vivre. De plus, l'ancien hôte l'avait également aimée et il sentait qu'il avait une dette envers lui après avoir pris son corps. Il s'essuya les yeux avant de se retourner vers elle et la regarda un moment en s'approchant d'elle. Enfin, il prit sa main en parlant d'une voix abattue, voire même fataliste :

"Nous ferions mieux de rejoindre les autres... De toute façon, mon sort ne nous appartient pas. Il est désormais entre leurs mains, que nous le voulions ou non. Je pense qu'ils savent déjà que je suis différent, bien qu'ils ignorent la nature exacte de cette différence. Bien sûr, ils ne se doutent probablement pas qu'Erwan n'est plus et qu'un autre en a profité pour prendre sa place, mais ils savent qu'Erwan a séjourné dans les limbes, un endroit effroyable dont on ne revient pas indemne... Même si tu gardes le silence, ils sauront tôt ou tard que je ne suis pas Erwan et je préfère affronter ce moment courageusement."

Il la regarda avec détermination en serrant sa main dans la sienne et ajouta :

"Je ne veux pas t'attirer de problèmes. Tu ne dois pas être ma complice. J'ai hésité longuement avant de prendre cette décision, mais si je dois vivre, je veux que ce soit comme Erwan, en étant honnête avec les autres... Enfin, si c'était comme ça qu'il vivait. S'ils décident que je dois mourir, il en sera ainsi. De plus, mon existence te fera toujours souffrir et je sais que tu ne me verras jamais autrement que comme celui qui t'a volé celui que tu aimes."

Il s'approcha davantage et baisa sa joue en murmurant :

"Sache que j'ai été honoré de faire ta connaissance et que j'ai sincèrement tenu à toi. Ce fut un plaisir de revivre pour te connaître."

[Maëlys]

Entendant les paroles d'Erwan, Maëlys baissa puis ferma les yeux un instant avant de relever son regard et de le planter dans ceux de l'homme.

"Non, chuttt, ne dit rien de plus" avait-elle tenter de dire mais sa voix n'avait été qu'un murmure balayé par la voix masculine. Reprenant une longue respiration, elle attendit encore quelques instants avant de devoir accepter ce qu'elle ne pouvait changer, puis lui dit :

"Je suppose que tout ce que je dirais ne pourra pas te faire changer d'avis ? Si tu as si peur d'eux, pourquoi ne fuis-tu pas ? Le tunnel sera sûrement ouvert d'ici demain, je peux te cacher quelque part en attendant, tu peux te cacher. Tu peux vivre, ne plus à avoir à endurer tout ce qui t'es arrivé. Le dernier de mes souhaits est de te voir gisant par terre, que tu sois Erwan ou quelqu'un d'autre, la violence et la mort n'est pas une solution, pas selon moi. Les hommes doivent vivre ensemble contre ce qui nous est imposé, pas se battre comme des charognards autour d'un bout de viande."

Lorsqu'il posa ses lèvres sur sa joue, elle sentit une vague de regrets monter en elle, elle ajouta sur le même ton que lui :

"Le plaisir a été partagé, même si je ne m'en rends peut-être pas entièrement compte actuellement, qui que tu ai pu être, je suis sûr que tu aurais eu ta place à côté de nous."

"Je suppose que tu veux qu'on retourne vers le camp désormais ? J'ai l'impression qu'on a assez à manger pour ce soir et peut-être demain midi aussi, enfin si tu arrives à t'y retrouver dans le temps... Ca se trouve on est en plein milieu de la nuit..."

[darkbaron]

Après l'avoir longuement écoutée, "Erwan" se colla contre elle et la prit tendrement dans ses bras. Il voulait sentir une dernière fois la chaleur de son corps... Peut-être allait-il avoir d'autres occasions, mais pour le moment, rien ne lui permettait de l'affirmer et il ne voulait pas périr sans l'avoir serré une dernière fois dans ses bras. Plus le temps passait et moins il comprenait Erwan : une jeune femme charmante l'aimait et il était parti dans un endroit dans lequel il n'avait pas sa place...

Au fond, est-ce que Maëlys ne méritait pas mieux que ça ? Quelqu'un comme elle méritait un homme qui ne risquait pas de l'abandonner. Il pensait cela et, pourtant, c'était précisément ce qu'il était en train de faire en laissant son sort entre les mains du reste du groupe... Vivre était si difficile !

Au bout d'un moment, il recula et plaça ses mains sur ses épaules en la regardant avec un sourire sur le visage et dit d'une voix douce :

"Maëlys. Regarde-moi... Tu sais que je ne peux fuir. Je ne sais rien et je serai incapable de survivre seul. Tu veux me sauver car tu abhorres la violence, mais j'ai choisi de tout avouer parce que je ne veux pas te causer du tort et faire de toi ma complice. Or, tu proposes de me cacher...

Désolé, mais tu comprends que je ne peux accepter une telle chose qui va à l'encontre de ma décision, bien que cela me touche énormément, tout comme tes mots... Sincèrement, tous les mots que tu as prononcés il y a peu furent les plus douces des caresses.

J'ai désormais un autre dilemme : dis-je avouer ma véritable nature aux autres afin que je puisse avoir la conscience tranquille ou bien dois-je plutôt me taire afin de rester à tes côtés? La vérité, Maëlys, c'est que tu ne veux pas voir Erwan t'abandonner. Tu ne veux pas le voir partir et, si je choisis d'avouer, je risquerai de périr de leurs mains et donc de t'abandonner. L'hôte précédent a commis cette erreur, et je te jure que je ne veux pas la répéter."

Il caressa doucement sa joue en souriant tendrement. Il avait voulu avouer pour son bien, mais si ce n'était pas la bonne décision pour elle ? Tout en réfléchissant à cette question, il observa les environs et ajouta en caressant les cheveux de sa bien-aimée entre ses doigts :

"Je ne sais pas me retrouver dans le temps, mais on doit pouvoir rentrer. C'est sans doute plus sage ainsi..."

[Maëlys]

Alors même qu'il se rapprochait encore plus d'elle, Maëlys se laissa faire. Il avait compris la limite qu'il ne pouvait franchir, il avait sûrement compris qu'il y avait des choses qu'elle ne pouvait lui accorder.

Au bout d'un long moment, elle ajouta :

"Bien sûr que j'ai pas envie de te perdre, qui aurait envie de perdre celui qui lui est proche... Personne n'a envie de se retrouver seul, alors que la moitié du royaume sera bientôt à feu et à sang et que mon chez moi est à plus d'un mois par les routes... Je suis seule, perdue dans un endroit que je n'aurai jamais pensé connaître, je n'ai envie de voir personne disparaître."

Elle s'arrêta avant de conclure :

"Enfin, j'ai l'impression que quoi que je puisse te dire désormais tu ne voudras pas changer d'avis n'est-ce pas?"

Posant sa main sur le bras d'Erwan qui lui caressait les cheveux, elle l'écarta doucement en terminant :

"Viens, on va y aller alors."

Puis sa tête se baissa et elle se retourna. Elle avait beau essayer de conserver un certain calme, elle ne sentait que trop bien les larmes qui ne demandaient qu'à sortir, qui n'attendaient qu'un instant de faiblesse avant de trahir ce qu'elle allait faire : le laisser se jeter dans un gouffre sans fond, le laisser se perdre à cause du reste du groupe.