Ode - Chap. 9.3 - Confessions et projets d’avenir
Publié : 11 févr. 2015, 17:06
En soirée.
La nuit tombait et Lockhyel avait tenté d’obtenir un maximum d’informations toute la journée. Il avait fait part de ses découvertes au reste de la meute et écouté leurs réactions. Ils étaient à l’auberge du village et Serah venait de terminer de jouer pour les rejoindre.
Girav avait rejoint Anaïs au château et Lockhyel avait senti de l’impatience lors de sa dernière conversation avec la Magientiste. Elle voulait repartir et cela se comprenait bien, elle était si près du but de ce long voyage… Le varigal de son côté voulait absolument avoir sa fameuse conversation avec les deux sœurs avant de repartir, ça serait donc ce soir ou jamais.
Cela faisait un moment qu’il souhaitait cette discussion et les derniers évènements n’avaient fait que rendre plus pressant son besoin de leur poser LA question qui le taraudait.
Quand il jugea le moment opportun, il demanda aux Sœurs Ferron si elles avaient un moment à lui accorder. Choisissant une table dans un coin tranquille il commanda à boire pour trois, avant de s’installer face à elles. Il prit alors la parole sur un ton hésitant
"Voilà… je ne sais pas trop par où commencer… mais je voudrai…ou plutôt j’ai… quelque chose d’important à vous demander à toutes les deux."
Il fit une légère pause cherchant ses mots avant de poursuivre :
"J’y réfléchis depuis un moment déjà, mais les derniers évènements avec Bécuma m’ont donné la force, ou peut-être le courage de vous parler. J’ai pu voir vos réactions face à ce qu’elle avait fait, et je ne veux pas que le destin se charge de ça à ma place de vous faire découvrir certains aspects de mon passé dans des circonstances aussi pénibles que celles qui nous ont permis d’en savoir plus Bécuma .
Il y a aussui autre chose d’important que je voulais vous demander , mais pour que vous puissiez y répondre j’ai besoin que vous ayez en tête qui je suis réellement et ce que votre réponse impliquera."
A nouveau il fit une légère pause. Il prit le temps de les regarder dans les yeux l’une et l’autres, puis, après avoir inspiré un grand coup, il se lança :
"Vous connaissez quelques bribes de mon histoire, mais vous avez le droit d’en savoir plus sur un frère de meute…"
« Je suis né dans un petit village forestier dont Raen est également originaire.
C’est Raen qui, de retour de son service d’ost, a été charger de la formation des jeunes, et donc de la mienne. Il détecta certains de mes talents et me dis que j’avais de l’avenir dans la profession de chasseur en me poussant dans cette voie. A mesure que ma formation avançait, je tissais des liens plus étroits avec lui Il devint un genre de grand frère pour moi. Je passais beaucoup de temps avec lui et fis également connaissance à cette époque de sa petite sœur… »
Lockhyel avait de bons souvenirs de cette époque et cela se voyait dans le léger sourire qu’il affichait à l’évocation de ce lointain passé, il poursuivit son récit, et son visage s’assombrit d’un coup
« Puis vint le jour du départ pour mon service d’Ost . Je fus incorporé comme éclaireur dans une patrouille frontalière. Un jour, on me demanda de faire une reconnaissance sur un village isolé censé être un repère de bandits et hors-la-loi. Ma reconnaissance me révéla qu’il n’y avait rien à craindre. Le village était principalement occupé par des femmes, des enfants et vieillards. Je fis mon rapport et vit mon chef de patrouille manifester une joie inattendue devant cette « incroyable opportunité » puis il nous ordonna de donner l’assaut… »
La voix du Varigal se brisa légèrement sur ces derniers mots mais il continua néanmoins essayant sans trop de succès de chasser l’émotion de sa voix :
« Ce fût un infâme carnage au cours duquel de nombreuses atrocités furent commises. Pillages, violes quasi systématiques des femmes, exécution sommaire de vieillards et d’enfants et destruction gratuite de tout ce qui pourrait assurer la survie future des rares villageois qui auraient pu échapper au massacre. »
A mesure que ces images revenaient dans sa tête, Lockhyel revivait les évènements de cette nuit. Le feu, le sang , les cris… son regard se perdit dans le vague , et ses mains se refermèrent en deux points serrés, son dégoût de la nature humaine revint sauvagement s’imposer à son esprit, à ses côtés le loup gronda légèrement et il dût lutter pour ne pas se lever et fuir , disparaitre à nouveau au fond des bois avec Œil de Nuit et ne plus penser à rien d’autre. Mais son regard se posa alors sur les jumelles et cela lui donna la force de rester, il fallait qu’il poursuive pour pouvoir leur poser LA question . Il reprit dans un murmure :
«J’entends encore leurs cris, ils me maudissent tous…je suis responsable de leurs mort… C’est moi qui ai trouvé le village et qui est mené tout le monde là-bas…. Et je n’ai rien fait….. J’aurais pu ! J’aurais du m’y opposer ! Mais je n’ai rien fait, je les ai regardé faire sans réagir…Dans une pathétique tentative de rachète ma lâcheté, j’ai tenté de les dénoncer au capitaine dès notre retour mais sans succès. »
Il fit une nouvelle pause pour mettre de l’ordre dans sa tête et organiser son récit. Il n’avait pas l’habitude de parler autant, et encore moins de lui et de sujets aussi douloureux. Il passa sous silence son passage à tabac pour ne pas avoir participé activement au massacre, son long séjour au trou et tous les ennuis que cela lui avait causés. Cela n’aurait fait que le rendre plus pitoyable. Il ne chercherait pas d’excuse à sa lâcheté.
Il reprit :
« Ma tentative de dénonciation m’a attiré beaucoup d’ennuis au sein de ma patrouille .On me confia des missions de reconnaissances inutiles, dans des lieux suicidaires, mais je revins à chaque fois. Un jour, je surpris une conversation entre le chef de patrouille et quelques hommes qui disaient que si la nature ne voulait pas venir à bout de ce foutu éclaireur, il allait falloir l’aider.
C’est donc conscient du fait qu’on allait tenté de me tuer que je partis pour ma dernière mission, en plein hiver dans une zone de montagne.
A mon retour ils m’avaient tendu une embuscade. Ils étaient plusieurs, menés par le chef de patrouille. Leur erreur fut de vouloir me capturer vivant pour « jouer » un peu avec moi…"
"Je réussis à prendre la fuite mais pas intact… ils me traquèrent des heures à travers la forêt enneigée. Le chef de patrouille était fou de rage, j’avais tué son frère dans ma fuite et lui avait laissé une vilaine blessure. Je perdais beaucoup de sang et fini par tomber dans un trou où je perdis connaissance. »
Il s’interrompit, pour revenir au présent :
« Je ne vous raconte pas ça pour que vous ayez pitié de moi, mais pour que vous puissiez faire le lien avec la fameuse bande que je craignais tant de rencontrer durant notre trajet. Les pendus appartenaient à ma patrouille et c’est cette bande qui a attaqué le convoi marchand que nous avons trouvé dans les bois… »
Puis il reprit le cours de son histoire :
« C’est également eux qui ont tué Galwin, mon premier mentor Varigal …. Il m’avait trouvé inconscient et pris sur lui de me former comme Varigal. Ce fût une elle période, mais elle ne dura que quelques mois.
Alors que nous faisions une étape dans un village et que Galwin m’avait envoyé faire un exercice en pleine nature, mon ancien chef de patrouille et ses hommes, qui était également sur mes traces arrivèrent au village. Ils ne trouvèrent que Galwin et celui-ci fût massacré à ma place. »
De nouveau Lockhyel interrompit son récit pour revenir au présent.
« Je ne sais pas s’ils me cherchent toujours, mais ce dont je suis certain, c’est que si je les croise à nouveau ceux qui seront à mes côtés seront en danger, et je veux que vous en soyez consciente. »
La suite était difficile à raconter, il ne voulait pas se replonger dans le récit de cet évènement, mais il était allé trop loin pour s’arrêter maintenant. Il voulut chercher à nouveau du courage dans le regard des jumelles mais il n’osait pas encore le croiser, de peur d’y lire du dégoût ou du rejet, mais les savoirs là, près de lui suffit à lui donner la force de poursuivre.
« Ne sachant où aller, je décidais de rentrer chez moi de retourner auprès de ceux que j’aimais, pour retrouver Raen et ma famille, en faisant cela je les exposais bien évidemment aux mêmes dangers que Galwin mais sur le coup je n’y pensais pas… »
Son élocution ralentie soudain chaque mot devenant plus douloureux à mesure qu’il se souvenait de la suite
« Quand je suis arrivé en vue de mon village il y avait de la fumée. L’attaque était récente et certaines des maisons terminaient de brûlé et il y avait…. Il y avait des corps partout. Certains calcinés d’autres non… Ma maison n’était plus que ruine.. mes parents étaient pendus à l’une des rares poutres qui restait debout …. La maison de Raen brûlait encore … le corps de sa sœur avait été trainé, nu, au milieu de la rue mais Raen était attaché à l’intérieur. J’ai sorti son corps des flammes, mais il était mort j’en étais sûr … Je l’ai posé un peu à l’écart des maisons … son visage était noir, la chaire brulée… il ne respirait plus. »
Lockyel s’arrêta ne pouvant continuer plus loin. Il respira profondément repensant à la dernière conversation qu’il avait eue avec le chasseur avant qu’il prenne la route avec Bécuma … Ce qu’il lui avait dit lui avait fait du bien et l’avait en partie poussé à tenter ce pari fou qu’il était en train de faire avec les jumelles … il reprit donc sa narration :
« J’ai traqué les responsables du massacre et réussis à en capturer un qui s’était éloigné du reste de son groupe. Celui-ci avant de mourir m’a appris qu’ils s’étaient vengés du massacre infâme qui avait été perpétré sur leur village il y a quelque temps en frappant un village au hasard.
Je payais pour ce que j’avais fait… le destin avait décidé de me montrer la nature profonde des hommes. Après ça j’ai quitté définitivement les hommes pendant des années pour vivre au fond des bois où seule la loi de la nature règne, une loi rude, mais juste. L’ordre naturel des choses avec les proies et les prédateurs, mais pas de sentiment de haine, de violence gratuite, de vergence, simplement la nécessité de vivre au jour le jour, sans garantie pour le prédateur de survivre à sa proie. »
Son histoire touchait à sa fin .Le plus difficile était derrière. Il releva enfin la tête pour affronter leur regard et ce qu’il y lirait. Il devait leur faire face pour la suite.
« Voilà… vous savez tout de moi ou presque… Tout comme Bécuma je suis responsable de plusieurs morts et sans moi les habitants de deux villages entiers seraient encore en vie, j’ai également tué d’autres hommes, pour sauver ma vie mais aussi sous le coup de la colère.
Et comme Bécuma j’ai fui mes actes au lieu d’y faire face…
J’ai fui les miens pendant des années jusqu'à ce que je rencontre Deirdre Louriène qui a repris en main ma formation de Varigal et puis vous deux…qui avez réussi à faire diminuer le dégout que j’avais de ceux de mon espèce…
Maintenant que vous savez ce qu’implique le fait de marcher à mes côtés, et d’être membre de la même meute que moi, j’ai quelque chose à demander. »
Il y était le moment de vérité, allaient-elles l’accepter tel qu’il était, allaient-elles le rejeter … il n’avait pas de famille pas vraiment d’ami et plus de village où retourner. Elles étaient les seules personnes avec Raen dont-il se sentait suffisamment proche pour oser faire ce type de demande.
« Accepteriez-vous qu’Œil de Nuit et moi nous fassions partie de votre meute à toutes les deux ? »
Réalisant que la question n’était pas vraiment très claire il précisa :
« Pas simplement de la meute temporaire qui nous unis sur cette mission, mais de la meute forte et soudée que vous avez créée toutes les deux dans la durée ? Nous accepteriez-vous Œil de Nuit et moi comme frère de meute ? »
Puis il ajouta précipitamment :
« Je ne tiens pas à m’imposer à vous comme j’ai senti que Bécuma l’avait fait, ni à m’imposer entre vous. Je veux juste être avec vous … enfin si vous voulez bien de nous bien sur…. et rassurez-vous, je quitterais sans vous poser plus de problèmes que ça à la fin de la mission si votre réponse est négative, je comprendrais."
C’était fait… il leur avait demandé… pour la première foi depuis des années il sentait le besoin de vivre avec ses semblables, et son cœur battait à tout rompre dans l’attente de leur réponse …
La nuit tombait et Lockhyel avait tenté d’obtenir un maximum d’informations toute la journée. Il avait fait part de ses découvertes au reste de la meute et écouté leurs réactions. Ils étaient à l’auberge du village et Serah venait de terminer de jouer pour les rejoindre.
Girav avait rejoint Anaïs au château et Lockhyel avait senti de l’impatience lors de sa dernière conversation avec la Magientiste. Elle voulait repartir et cela se comprenait bien, elle était si près du but de ce long voyage… Le varigal de son côté voulait absolument avoir sa fameuse conversation avec les deux sœurs avant de repartir, ça serait donc ce soir ou jamais.
Cela faisait un moment qu’il souhaitait cette discussion et les derniers évènements n’avaient fait que rendre plus pressant son besoin de leur poser LA question qui le taraudait.
Quand il jugea le moment opportun, il demanda aux Sœurs Ferron si elles avaient un moment à lui accorder. Choisissant une table dans un coin tranquille il commanda à boire pour trois, avant de s’installer face à elles. Il prit alors la parole sur un ton hésitant
"Voilà… je ne sais pas trop par où commencer… mais je voudrai…ou plutôt j’ai… quelque chose d’important à vous demander à toutes les deux."
Il fit une légère pause cherchant ses mots avant de poursuivre :
"J’y réfléchis depuis un moment déjà, mais les derniers évènements avec Bécuma m’ont donné la force, ou peut-être le courage de vous parler. J’ai pu voir vos réactions face à ce qu’elle avait fait, et je ne veux pas que le destin se charge de ça à ma place de vous faire découvrir certains aspects de mon passé dans des circonstances aussi pénibles que celles qui nous ont permis d’en savoir plus Bécuma .
Il y a aussui autre chose d’important que je voulais vous demander , mais pour que vous puissiez y répondre j’ai besoin que vous ayez en tête qui je suis réellement et ce que votre réponse impliquera."
A nouveau il fit une légère pause. Il prit le temps de les regarder dans les yeux l’une et l’autres, puis, après avoir inspiré un grand coup, il se lança :
"Vous connaissez quelques bribes de mon histoire, mais vous avez le droit d’en savoir plus sur un frère de meute…"
« Je suis né dans un petit village forestier dont Raen est également originaire.
C’est Raen qui, de retour de son service d’ost, a été charger de la formation des jeunes, et donc de la mienne. Il détecta certains de mes talents et me dis que j’avais de l’avenir dans la profession de chasseur en me poussant dans cette voie. A mesure que ma formation avançait, je tissais des liens plus étroits avec lui Il devint un genre de grand frère pour moi. Je passais beaucoup de temps avec lui et fis également connaissance à cette époque de sa petite sœur… »
Lockhyel avait de bons souvenirs de cette époque et cela se voyait dans le léger sourire qu’il affichait à l’évocation de ce lointain passé, il poursuivit son récit, et son visage s’assombrit d’un coup
« Puis vint le jour du départ pour mon service d’Ost . Je fus incorporé comme éclaireur dans une patrouille frontalière. Un jour, on me demanda de faire une reconnaissance sur un village isolé censé être un repère de bandits et hors-la-loi. Ma reconnaissance me révéla qu’il n’y avait rien à craindre. Le village était principalement occupé par des femmes, des enfants et vieillards. Je fis mon rapport et vit mon chef de patrouille manifester une joie inattendue devant cette « incroyable opportunité » puis il nous ordonna de donner l’assaut… »
La voix du Varigal se brisa légèrement sur ces derniers mots mais il continua néanmoins essayant sans trop de succès de chasser l’émotion de sa voix :
« Ce fût un infâme carnage au cours duquel de nombreuses atrocités furent commises. Pillages, violes quasi systématiques des femmes, exécution sommaire de vieillards et d’enfants et destruction gratuite de tout ce qui pourrait assurer la survie future des rares villageois qui auraient pu échapper au massacre. »
A mesure que ces images revenaient dans sa tête, Lockhyel revivait les évènements de cette nuit. Le feu, le sang , les cris… son regard se perdit dans le vague , et ses mains se refermèrent en deux points serrés, son dégoût de la nature humaine revint sauvagement s’imposer à son esprit, à ses côtés le loup gronda légèrement et il dût lutter pour ne pas se lever et fuir , disparaitre à nouveau au fond des bois avec Œil de Nuit et ne plus penser à rien d’autre. Mais son regard se posa alors sur les jumelles et cela lui donna la force de rester, il fallait qu’il poursuive pour pouvoir leur poser LA question . Il reprit dans un murmure :
«J’entends encore leurs cris, ils me maudissent tous…je suis responsable de leurs mort… C’est moi qui ai trouvé le village et qui est mené tout le monde là-bas…. Et je n’ai rien fait….. J’aurais pu ! J’aurais du m’y opposer ! Mais je n’ai rien fait, je les ai regardé faire sans réagir…Dans une pathétique tentative de rachète ma lâcheté, j’ai tenté de les dénoncer au capitaine dès notre retour mais sans succès. »
Il fit une nouvelle pause pour mettre de l’ordre dans sa tête et organiser son récit. Il n’avait pas l’habitude de parler autant, et encore moins de lui et de sujets aussi douloureux. Il passa sous silence son passage à tabac pour ne pas avoir participé activement au massacre, son long séjour au trou et tous les ennuis que cela lui avait causés. Cela n’aurait fait que le rendre plus pitoyable. Il ne chercherait pas d’excuse à sa lâcheté.
Il reprit :
« Ma tentative de dénonciation m’a attiré beaucoup d’ennuis au sein de ma patrouille .On me confia des missions de reconnaissances inutiles, dans des lieux suicidaires, mais je revins à chaque fois. Un jour, je surpris une conversation entre le chef de patrouille et quelques hommes qui disaient que si la nature ne voulait pas venir à bout de ce foutu éclaireur, il allait falloir l’aider.
C’est donc conscient du fait qu’on allait tenté de me tuer que je partis pour ma dernière mission, en plein hiver dans une zone de montagne.
A mon retour ils m’avaient tendu une embuscade. Ils étaient plusieurs, menés par le chef de patrouille. Leur erreur fut de vouloir me capturer vivant pour « jouer » un peu avec moi…"
"Je réussis à prendre la fuite mais pas intact… ils me traquèrent des heures à travers la forêt enneigée. Le chef de patrouille était fou de rage, j’avais tué son frère dans ma fuite et lui avait laissé une vilaine blessure. Je perdais beaucoup de sang et fini par tomber dans un trou où je perdis connaissance. »
Il s’interrompit, pour revenir au présent :
« Je ne vous raconte pas ça pour que vous ayez pitié de moi, mais pour que vous puissiez faire le lien avec la fameuse bande que je craignais tant de rencontrer durant notre trajet. Les pendus appartenaient à ma patrouille et c’est cette bande qui a attaqué le convoi marchand que nous avons trouvé dans les bois… »
Puis il reprit le cours de son histoire :
« C’est également eux qui ont tué Galwin, mon premier mentor Varigal …. Il m’avait trouvé inconscient et pris sur lui de me former comme Varigal. Ce fût une elle période, mais elle ne dura que quelques mois.
Alors que nous faisions une étape dans un village et que Galwin m’avait envoyé faire un exercice en pleine nature, mon ancien chef de patrouille et ses hommes, qui était également sur mes traces arrivèrent au village. Ils ne trouvèrent que Galwin et celui-ci fût massacré à ma place. »
De nouveau Lockhyel interrompit son récit pour revenir au présent.
« Je ne sais pas s’ils me cherchent toujours, mais ce dont je suis certain, c’est que si je les croise à nouveau ceux qui seront à mes côtés seront en danger, et je veux que vous en soyez consciente. »
La suite était difficile à raconter, il ne voulait pas se replonger dans le récit de cet évènement, mais il était allé trop loin pour s’arrêter maintenant. Il voulut chercher à nouveau du courage dans le regard des jumelles mais il n’osait pas encore le croiser, de peur d’y lire du dégoût ou du rejet, mais les savoirs là, près de lui suffit à lui donner la force de poursuivre.
« Ne sachant où aller, je décidais de rentrer chez moi de retourner auprès de ceux que j’aimais, pour retrouver Raen et ma famille, en faisant cela je les exposais bien évidemment aux mêmes dangers que Galwin mais sur le coup je n’y pensais pas… »
Son élocution ralentie soudain chaque mot devenant plus douloureux à mesure qu’il se souvenait de la suite
« Quand je suis arrivé en vue de mon village il y avait de la fumée. L’attaque était récente et certaines des maisons terminaient de brûlé et il y avait…. Il y avait des corps partout. Certains calcinés d’autres non… Ma maison n’était plus que ruine.. mes parents étaient pendus à l’une des rares poutres qui restait debout …. La maison de Raen brûlait encore … le corps de sa sœur avait été trainé, nu, au milieu de la rue mais Raen était attaché à l’intérieur. J’ai sorti son corps des flammes, mais il était mort j’en étais sûr … Je l’ai posé un peu à l’écart des maisons … son visage était noir, la chaire brulée… il ne respirait plus. »
Lockyel s’arrêta ne pouvant continuer plus loin. Il respira profondément repensant à la dernière conversation qu’il avait eue avec le chasseur avant qu’il prenne la route avec Bécuma … Ce qu’il lui avait dit lui avait fait du bien et l’avait en partie poussé à tenter ce pari fou qu’il était en train de faire avec les jumelles … il reprit donc sa narration :
« J’ai traqué les responsables du massacre et réussis à en capturer un qui s’était éloigné du reste de son groupe. Celui-ci avant de mourir m’a appris qu’ils s’étaient vengés du massacre infâme qui avait été perpétré sur leur village il y a quelque temps en frappant un village au hasard.
Je payais pour ce que j’avais fait… le destin avait décidé de me montrer la nature profonde des hommes. Après ça j’ai quitté définitivement les hommes pendant des années pour vivre au fond des bois où seule la loi de la nature règne, une loi rude, mais juste. L’ordre naturel des choses avec les proies et les prédateurs, mais pas de sentiment de haine, de violence gratuite, de vergence, simplement la nécessité de vivre au jour le jour, sans garantie pour le prédateur de survivre à sa proie. »
Son histoire touchait à sa fin .Le plus difficile était derrière. Il releva enfin la tête pour affronter leur regard et ce qu’il y lirait. Il devait leur faire face pour la suite.
« Voilà… vous savez tout de moi ou presque… Tout comme Bécuma je suis responsable de plusieurs morts et sans moi les habitants de deux villages entiers seraient encore en vie, j’ai également tué d’autres hommes, pour sauver ma vie mais aussi sous le coup de la colère.
Et comme Bécuma j’ai fui mes actes au lieu d’y faire face…
J’ai fui les miens pendant des années jusqu'à ce que je rencontre Deirdre Louriène qui a repris en main ma formation de Varigal et puis vous deux…qui avez réussi à faire diminuer le dégout que j’avais de ceux de mon espèce…
Maintenant que vous savez ce qu’implique le fait de marcher à mes côtés, et d’être membre de la même meute que moi, j’ai quelque chose à demander. »
Il y était le moment de vérité, allaient-elles l’accepter tel qu’il était, allaient-elles le rejeter … il n’avait pas de famille pas vraiment d’ami et plus de village où retourner. Elles étaient les seules personnes avec Raen dont-il se sentait suffisamment proche pour oser faire ce type de demande.
« Accepteriez-vous qu’Œil de Nuit et moi nous fassions partie de votre meute à toutes les deux ? »
Réalisant que la question n’était pas vraiment très claire il précisa :
« Pas simplement de la meute temporaire qui nous unis sur cette mission, mais de la meute forte et soudée que vous avez créée toutes les deux dans la durée ? Nous accepteriez-vous Œil de Nuit et moi comme frère de meute ? »
Puis il ajouta précipitamment :
« Je ne tiens pas à m’imposer à vous comme j’ai senti que Bécuma l’avait fait, ni à m’imposer entre vous. Je veux juste être avec vous … enfin si vous voulez bien de nous bien sur…. et rassurez-vous, je quitterais sans vous poser plus de problèmes que ça à la fin de la mission si votre réponse est négative, je comprendrais."
C’était fait… il leur avait demandé… pour la première foi depuis des années il sentait le besoin de vivre avec ses semblables, et son cœur battait à tout rompre dans l’attente de leur réponse …