OdE 9.4 - Un Choix de vie - Sous les noires frondaisons

[Iris]

Léorah se rendit compte quand elle criait qu'elle attirait l'attention : certes les blessés et convalescents avaient un espace vital raisonnable... mais dans ce village, impossible de parler fort et garder la conversation privée. Anaïs fit immédiatement "chut" à la guerrière : quelque juste fût sa colère, il fallait parler moins fort pour ne pas se mettre en danger... ni mettre en danger les autres... Trine notamment : si l'on entendait qu'elle avait déjà parlé aux étrangers, ce serait bien plus compliqué par la suite de parvenir à avoir des entrevues avec elle.

" Je suis tellement désolée, je m'en veux tellement... "

Serah avait toujours paru si fragile... attachante, mignonne, mais aussi délicate...

" Je me suis toujours demandée si elle n'était pas venue au village du Haut-Mùdan contre son gré, pour ne pas nous laisser... et maintenant... "

" Léorah, je ne sais pas ce que je peux faire pour que vous me pardonniez. Sans doute n'y a-t-il rien à faire, et mes excuses ne changeront rien à la situation. Ce qui se passe me brise le coeur. Jamais je n'aurais voulu que le prix pour revoir mon fils soit de vous faire vivre une telle douleur avec votre sœur jumelle."

Même Léorah qui n'était pas douée pour lire les sentiments ne pouvait manquer de voir les larmes qui pointaient dans les yeux d'Anaïs ni ne pas entendre la voix marquée par l'émotion.

S'essuyant les yeux et reprenant plus normalement :

" Elle n'a pas l'air enfermée. Elle est traitée avec beaucoup d'égard. Je ne comprends rien à ce qui se joue. Elle est distante, chante par moment, reste au loin. On n'a pas le droit de l'approcher pour ne pas la déranger. Le demorthèn et son apprenti lui accordent un intérêt que je ne m'explique pas."

[MeiYaw]

Du sang froid. Il faut absolument que je me calme. Je reprends plus calmement.

Anaïs, ne vous méprenez pas. Ma colère n'est pas dirigée contre vous. Serah a fait ses choix, malgré mes doutes, et avec son coeur. Qu'elle soit ici avec nous est sa décision, et j'ai fait tout mon possible pour la protéger. Mais je ne peux pas la protéger d'elle même... Nous savons, en tant que mercenaires, que les missions... sont ce qu'elles sont : dangereuses, et même mortelles. Mais là, elle n'est ni blessée ni morte.

Je suis plus déterminée que jamais. Je parle, sans desserrer la mâchoire, pour éviter que ma voix ne soit trop forte...

La déranger ?? Pour qui se prennent ils ceux là.... C'est ma soeur, bon sang. Je veux la voir...
Quand aura lieu le procès ?

[Iris]

Anaïs eut un pâle sourire à l'adresse de Léorah : même si tout ce que la guerrière disait était juste, la magientiste était un médecin qui travaillait avec son cœur pour des enfants malades, et elle avait tendance à s'impliquer dans ce quelle faisait. Elle ne pouvait réagir avec distance ou indifférence à la souffrance.

" Le procès devrait avoir lieu le 20e de Sulthainn. Tout ira assez vite, en une après-midi de débats l'affaire sera tranchée. Le 21e aura lieu... le sacrifice de Trine."


" Ce qui vous est arrivé a bien touché vos corps qui ont été affaiblis, mais j'ai l'impression que cela a surtout affecté l'esprit. Au village ils parlent de visions des esprits qui sondent l'âme. Je me demande s'ils n'auraient pas usé de fumées hallucinogènes. Cela n'aurait rien d'insurmontable, on peut le faire même avec des moyens rudimentaires. Beaucoup de champignons des forêts et marais, et d'autres plantes encore sont à la fois des poisons et des remèdes selon la manière dont on les prépare. Les demorthèn assoient leur pouvoir sur le culte des esprits, mais ces esprits étranges qu'ils décrivent ne sont pas très différents des visions subies au cours d'un délire mystique."

Rationaliser et expliquer ne résolvait pas tout, mais aidait à reprendre pied, à ne pas avoir l'impression d'être totalement perdue dans un univers qu'elle ne maîtrisait pas.

[ramb]

"Alors en bref, pour le moment nous devons attendre, récupérer, nous organiser pour prendre la fuite.
Avec une personne qui ne voudra peut-être pas venir, voir deux et une motivé.
Le tout dans la nuit du 20e. En faite à l'issu du procès il faudra demander à rester dormir une nuit de plus au village avant de partir et quelque soit le résultat et nous enfuir dans la nuit le plus vite possible. Pour sauver Trine, Serah et ton fils.
Alors que nous ne somme que quatre saint d'esprit."

Les mots de Grirav était crut, mais il cherchait plus une solution que de choquer les gens.

"Il va falloir bien se préparer."

[Iris]

Anaïs écouta Grirav avec un peu d'étonnement :

" Tu penses que c'est possible ? ... "

Son regard glissa sur sur les environs, avec les palissades, les villageois qui montaient la garde.

" Ils nous poursuivront. Dans le noir, ils ne pourraient pas nous abattre de leurs arcs, mais si nous descendons le chemin qui mène au Bas-Mùdan, nous serions très faciles à retrouver."


Dans l'absolu, elle n'était pas contre l'idée, ce pouvait être un plan B qui sauvait tout le monde... mais en faisant courir des risques bien plus importants à chacun... Il fallait aussi établir des modalités qui leur laisseraient une chance raisonnable... Elle-même n'avait aucune expérience en infiltration ou exfiltration, et n'imaginait pas comment s'y prendre.

[ramb]

"C'est surtout une deuxième solutions, mais je vais creuser dans se sens."

Attendant les avis des autres Grirav se concentra sur le possibilité de s'occuper d'une sentinelle, de lui prendre son arc et de s'enfuir.
Bref dès qu'il a un peu de temps il regarde autour de lui, et surtout l'organisation des tours de gardes.

[Iris]

Les sentinelles étaient principalement armées de lances et restaient toujours par deux apparemment. L'équipement de base était complété par des armures de cuir, des dagues, parfois des hachettes ou des arcs courts.

Si Grirav parvenait à quitter de nuit l'enceinte du village, il pourrait théoriquement atteindre la cahute qui servait d'entrepôt à la potière et là, récupérer tout son matériel. Il serait alors sur le chemin descendant vers le Bas-Mùdan, mais c'était aussi la sortie la plus surveillée. L'autre option : la forêt des Esprits... les villageois du Haut-Mùdan avaient l'air de penser que rien ne pourrait leur arriver de ce côté, et par conséquent mettaient moins d'énergie à la garder.

[MeiYaw]

C'est à peine si j'écoute les explications d'Anaïs. Tout cela me semble une perte de temps de parlote, mais je sais qu'elle fonctionne comme ça maintenant.

Il ne nous reste que 4 jours pour mettre au point un plan d'évacuation.

C'est Grirav qui reprend les choses en main. Il est vrai que mon cerveau est embrumé et je ne parviens que difficilement à organiser mes idées. Je ne sais pas si cela est du aux hallucinogènes mais l'absence et la détention de ma soeur ne m'aide pas du tout !

Je suis totalement d'accord avec toi. La nuit va être difficile. J'espère que le petit nous sera confié et qu'il acceptera de venir, ça nous serait une complication de moins, puisque Serah semble être déjà décidée... Si elle ne cherche pas à nous rejoindre durant les 4 prochains jours, c'est qu'elle a véritablement changé, et qu'il faudra surement se battre avec elle pour qu'elle nous accompagne. J'ose espérer que le gamin ne sera pas déjà endoctriné, mais rien n'est moins sur.

Serait il envisageable de lui parler avant le procès, afin de voir ce qu'il pense de la possibilité de partir avec nous ? Déjà savoir s'il serait d'accord nous permettrait de gagner du temps. Et puis, il me parait légitime qu'une mère veuille ne serait ce que discuter avec son fils, savoir comment il va.

Quoi qu'il en soit, la nuit suivant le procès sera longue, aussi, nous devrons être en forme. N'épuisons pas nos forces dans des travaux inutiles.

[Iris]

Anaïs se contenta de rebondir sur un des derniers points évoqués :

"Je verrai Aidan, oui... même s'il ne semble pas très désireux de me parler..."

Sa voix était douloureuse.

" La dàmàthair Arsante est une fanatique. Les enfants apprennent le dogme avec elle, en ânonnant et répétant en chœur des préceptes aberrants et haineux..."

Réfléchissant :

" S'éviter des travaux pénibles est une chose, mais nous ne pourrons parler aux jurés, à Aidan et surtout Trine qu'en participant aux tâches quotidiennes. Celles qui se déroulent dans le village ont bien trop de témoins : il sera difficile sinon impossible d'avoir une conversation sincère ou presque détendue. "

[Gobsama]

Lockhyel avait senti qu’on le détachait… il avait senti Anaïs lui prodiguer des soins, mais il était resté recroquevillé sous sa couverture dans un coin du bâtiment qu’il occupait comme une bête blessées qui se serait terrée dans un trou en espérant guérir.

Il ressassait sans arrêt cette étrange impression de proximité qu’il avait ressentie à l’égard de ces choses dans les bois… Que la nature punisse les actes contre-nature… des monstres pour punir des monstres, tout cela avait du sens et faisait remonter en lui quelque chose de sombre primaire et instinctif….

Tous ses efforts de resocialisations de ces derniers mois semblaient tellement loin et vains. Ces esprits lui proposaient une vie tellement plus simple en encore avec une partie de son moi profond, où il pourrait se comporter comme il le voudrait sans être jugé par ses semblables.

Pourtant quelque chose clochait, il sentait qu’il s’en était fallu de peu pour qu’il se laisse convaincre et il n’était pas encore tout à fait certain de ne pas se laisser convaincre, mais il y avait encore au fond de lui quelque chose qui l’empêchait de sombrer complètement.

Un nom s’imposa à lui …. Œil de Nuit… il avait besoin de lui plus que jamais. Il étendit sa perception au maximum, cherchant cet étrange lien qui les unissait et l’appela silencieusement de toutes ses forces… il ne pût qu’imaginer ce que le loup avait pu ressentir en son absence, mais Lockhyel pour sa part avait l’impression d’être privé d’une part de lui, d’une extension naturelle de lui.

Il entendait les gens discuter autour de lui, mais n’arrivait tout simplement pas à se joindre à leur conversation.

Puis il entendit Anaïs parler de la disparition d’œil de nuit et de ce qui était arrivé à Serah et il comprit que sa meute était en danger… ce qui le ramena violemment à la réalité au moment où Girav lui demandait :

"Lockhyel il faut que tu vois Trine, il faut que l'on sache qui est contre nous.
Maintenant nous devrions être moins surveillsé, vu que nous avons passez l'épreuve."

Le varigal se contenta d’acquiescer d’un signe de tête marquant ainsi que c’était bien dans ses intentions, mais pour ceux qui l’entouraient il était évident que c’était le premier signe de communication directe depuis son retour de « l’épreuve. »

Il tenterait comme le suggérait Anaïs de se mêler aux tâches communes pour approcher Trine et en savoir plus sur ces fameux jurés.

Les échanges continuèrent autour de lui et il n’arrivait toujours pas à prendre la parole, un plan semblait se mettre en place pour la nuit suivant le procès.

Il sentait la détresse de Leorah concernant le sort de sa sœur et d’une certaine façon il la partageait. Il avait pris sur lui de leur demander de faire partie d’une même meute et l’une de ses membres n’était plus là avec eux… Il devait savoir ce qui était arrivé à Serah…. Il devait savoir ce qui lui était arrivé à lui aussi…

Coupant presque la parole à Anaïs, il sortit de son mutisme au risque surprendre ceux qui l’entouraient :

« Il n’est pas question pour moi non plus d’abandonner Serah, et de toute façon j’ai besoin de comprendre ce qui nous ai arrivé…. Je ne sais pas pourquoi, mais je sens qu’il s’en est fallut de peu pour que je rejoigne Serah. Les choses esprits dans ces bois étaient tellement persuasives… »

Il resta un instant absent, le regard dans le vague, avant de se rendre compte qu’il s’était interrompu en pleine conversation.

« Nous n’avons que quatre jours pour nous préparer….Leorah, je vais t’accompagner à la fameuse maison pour voir ta sœur, j’ai des questions à poser au demorthèn et à son apprenti sur ce qui nous est arrivé, et peut-être que si je les occupe cela te donnera une opportunité de voir ta sœur seule si tu veux. »

Regardant les autres il poursuivit

« Ensuite nous tacherons de nous mêler aux tâches communes pour approcher Trine et en savoir plus sur ces fameux jurés et tout ce qu’elle pourra nous apprendre.
Il pourrait être également intéressant de discuter avec La dàmàthair Arsante pour voir avec quel discours elle endoctrine les enfants, cela pourrait aider à préparer des arguments pour la contrer… "

puis il ajouta dans un souffle en se parlant à lui même:

… sauf si elle a raison.

Encore une foi il suspendit brusquement la conversation, son regard fixant quelque chose loin au-delà des murs, avant de finalement revenir à la réalité et d’ajouter sur un ton où perçaient tout à la foi une pointe de détresse et une résolution de fer…

« A la fin de la journée, si je n’ai pas de nouvelle, je partirais à la recherche de mon frère… j’en profiterais pour faire un repérage des environs et repérer les éventuelles voie d’évasions. »