Pour agrémenter son costume trois pièces noir, le docteur avait pris un haut de forme de la même couleur ainsi qu’une canne en bois d’ébène, agrémenté d’un pommeau d’argent, souvenir de feu son père. Finalement, pour parfaire sa mise, Thomas avait ajouté une goutte de musc. Il s’était miré une dernière fois dans le miroir en pied de l’entrée, avant de faire quérir un fiacre par le jeune garçon de sa logeuse, qu’il avait dépêché un peu plus tôt afin de réserver une bonne table au restaurant.
Le docteur était arrivé avec quelques minutes de retard chez les Deighton, comme l’exigeaient les bonnes manières de ce temps. Il avait complimenté la mise de Lydia et exprimé son ravissement de voir Juste en bien meilleure forme que lorsqu’il les avait quittés.
Puis, reprenant le fiacre, le couple s’était dirigé vers le restaurant The Crabbshakk. Il se situait dans un quartier petit-bourgeois, et ne payait à l’extérieur pas de mine engoncé dans un immeuble sobre et sombre. Galamment, il avait conduit la jeune veuve à l’entrée. Là, ils avaient été reçus par le patron, un homme petit et massif, voire légèrement bedonnant. La quarantaine, crâne bien dégarni où de rares cheveux roux luttaient contre des mèches grises, l’homme conduisit en personne son « meilleur client », le docteur Sullen pour ne pas le nommer, à une table où il semblait avoir des habitudes. Il parlait avec le rude accent de Kell, mais ses joues rouges et ses fanons de morses qui tressautaient avec son rire rauque et régulier dénotaient un certain appétit pour la vie et les joies simples.
Le patron laissa quelques instant ses hôtes à table, dans un petit carré privé qui donnait contre la baie vitrée et la rue, tandis qu’il allait quérir un «petit pichet de blanc » ainsi que les cartes. Si l’extérieur ne payait pas de mine et aurait pu inquiéter Lydia, l’intérieur était bien plus chic qu’on aurait pu le penser. Il y avait en tout une vingtaine de tables, toutes séparées par des paravents en bois rouges et travaillés avec soins dans des motifs floraux. Le sol était recouvert d’un parquet sombre, parfaitement entretenu par un soin constant et régulier à la cire. Les murs étaient nus, couleur blanc cassé, en dehors de quelques marines et autres tableaux de pêche qui rappelaient les origines des propriétaires des lieux. Il y avait une certaine austérité dans le décor, mais il était recherché, les lampes à huile trônant sur les tables offrant de merveilleux jeux de lumières dans ces petites alcôves. C'était un endroit charmant et surtout très calme, où l'on entendait des conversations feutrés se mêler au tintement cristallin des couverts dans les plats de faïences.
Un jeune homme, le fils de la maison, revint avec le vin et les cartes, ainsi que du pain blanc. Les menus étaient simples, soupes de poissons en entrée, assortiments de riz ou de pommes de terres avec quelques légumes des Hautes-Terres, et plusieurs variétés de poissons et de coquillages de première fraicheur pour le plat principal, comme l’expliqua Sullen à son hôte. Avec un petit rire, tout en se proposant pour servir le vin, il ajouta que les desserts, inspirés de la mer, ne contenaient toutefois aucune goutte de produits iodés.
Lui-même prendrait un crabe farci au cognac ainsi qu’une petite soupe de rougets. Il laissait le soin à Lydia de choisir ce qui lui plaisait, recommandant cependant les soles meunières ou les ailes de raies au câpres.
En attendant les commandes, Thomas regarda la jeune femme et, pour lancer la conversation, demanda quels étaient le lien de parenté qui l'unissait à Juste, ayant lui même cru comprendre qu'elle avait recueilli le jeune homme.
Je vous laisse décrire comment vous vous êtes préparés, vos commandes pour le repas et la réponde à la question. Mais tu veux ajouter des choses sur les retrouvailles ou le trajet fais-toi plaisir, et si tu as des idées pour lancer la conversation .