Fortuna Imperatrix Mundi

Premiers Jets de Perception (Per x2 + bonus de Corps)
- Elsana : 13 + 1D10 (2)
- Erytheïs : 15 +1D10 (6)
- Alvin : 13 + 1D10 (3)
- Muphèmeto 13 + 1D10 (9 !)

Alors que les cris d'Erytheïs étaient repris, d'abord timidement, puis avec plus de vaillance par les villageois réunis en ce triste jour, Cymballine ne manqua pas de grimacer à l’annonce du seigneur et lança, sans vraiment attendre de réponse : « Voilà une décision qui manque de réflexion… »

En effet, les deux jeunes gens étaient encore, jusqu’à récemment, dans leurs Collèges respectifs et, bien que l’enseignement qu’on leur dispensa fut sans nul doute l’un des meilleurs, ils n’étaient clairement pas prêts à supporter une telle charge, preuve s’il en fallait des regards éperdus qu’ils échangeaient avec leur père. Toutefois, et malgré la distance les séparant, il fut possible à Erytheïs et Muphèmeto de percevoir autre chose, surtout dans le regard d’Alda, comme de la… jalousie ? c’était difficile à déterminer, mais pas impossible non plus que cela soit vrai : Alda faisait tout ce qu’elle pouvait, jusqu’à porter la flamberge familiale (très ancienne tradition urguemande chez les barons et autres seigneurs plus ou moins petits) pour prouver qu’elle pouvait prendre la succession de son père tout en sachant pertinemment qu’elle n’aurait jamais gain de cause.

Dans la foule, nombre de villageois semblaient affectés à différents niveaux par ce qui serait sans doute bientôt considéré comme un aveu de faiblesse par leurs voisins, passant de la tristesse désabusée à l’incompréhension totale. Seul Hectarion affichait un sourire totalement déplacé qu’il tentait de dissimuler lorsque l’on se tournait vers lui, mais aucun des Inspirés ici n’avaient manqué son attitude.

***

Alors que les gens commençaient à refluer en silence vers le village toujours précédé d’Arélyo et des siens, le vent glacial apporta un cri terrifié venant de l’ouest du cimetière, rapidement suivi de deux autres. Deux gardes chargés à l’origine de veiller au bon déroulement de la procession se hâtèrent dans la direction, arme au poing. Quel genre d’événement pouvait bien venir assombrir d’avantage cette journée déjà si terne ?

Erythéïs Hespéris fut satisfaite que son appel fût suivi, mais il en faudrait encore beaucoup plus pour que l'avenir du domaine fût véritablement assuré. Les motifs d'inquiétude ne manquaient pas : l'équilibre précaire entre les jumeaux, les hésitations de la population, des voisins ambitieux, et plus près : Hectarion. Ce trouble-fête était depuis quelques temps déjà l'un de ses soucis : elle le soupçonnait d'avoir un pouvoir dangereux dans les ombres. Son expression de satisfaction ne laissait aucun doute : il allait falloir rapidement identifier la nature de la menace qu'il représentait. Elle donnerait des instructions à son retour... et tâcherait de faire le point sur tous les ennemis des seigneurs de Brégance.

Alors qu'elle allait partir avec Léda, des cris furent entendus. Hésitant un instant à aller voir immédiatement, Erythéïs s'arrêta pour confier sa fille à Fragan et Satine, leur demandant de l'attendre quelques instants. Un cri pouvait signifier la découverte d'un crime choquant, ou bien une menace monstrueuse. Dans le second cas, il faudrait des renforts pour combattre. Avisant du service d'ordre et de la présence du bourreau minotaure Muphéto -- dont elle avait appris il y a peu la nature d'inspiré -- elle lui fit signe, espérant que cela suffirait pour le motiver à venir.

Muphèmeto était resté silencieux durant toute la cérémonie, les bras croisés, à l’arrière, surveillant la foule. Il observa les deux enfants lorsque leur père leur délégua son pouvoir et pu voir dans les yeux d’Alda une sorte de jalousie. Il se disait que c’était à prévoir, vu tout ce qu’elle faisait, tout son dur labeur… elle n’y arriverait probablement jamais.

Lorsque cette mascarade fut enfin terminée et que la foule sortait lentement du cimetière, des cris déchirèrent cette ambiance macabre. Il venait de l’ouest. Muphèmeto leva les yeux dans cette direction et vit deux gardes se hâter dans la direction. C’est alors qu’Erythéïs passa devant lui, lui signifiant de la suivre vers la source du dérangement. Il n’aurait probablement pas réagi au signe de la liturge s’il n’avait appris il y a peu sa nature d’inspirée. Il soupira néanmoins bruyamment, laissant échapper de ses narines de l’air se transformant immédiatement en vapeur dans le froid hivernal.

Il suivit alors la liturge d’un pas lourd, traversant la foule diminuante.

Je regardais les deux enfants recevoir ce fardeau avec un soupir. Qu'allait donner cette cohabitation pour le moins inattendue ? Tous deux n'étaient encore que des jeunes gens à peine formés, avec des désirs plus forts que la raison. Plus forts que le devoir.
Mais après tout, n'est-ce pas cette caractéristique, qui a détruit ma vie ? Qui m'a littéralement tué ? Ne serait il pas plus intéressant pour eux de vivre par passion plutôt que par devoir ? De refuser le dictat de la naissance et du bien commun ? De ne... Que se passait il ?
Je jetai un regard à la ronde, vit le mouvement des gardes, la veuve Hesperia les suivre. Sans attendre, je me glissais dans la foule, cherchant la réaction des dirigeants et des autres inspirés. La main sur la garde de ma rapière, je me faufilais, sans ralentir un instant, entre les jambes, mes pieds et les personnes qui s'étaient réunies. Pas chassé, petite course, l'épaule en avant ici, la tête baissée là, j'évoluais dans cet environnement comme un poisson dans l'eau.

Bordel, je savais pas exactement pourquoi, mais fois de flamme, je le sentais mal.

Elsana observa Hectarion et son sourire toujours aussi ... déplacé.

Des cris ? Que se passait-il encore ? Comme si un enterrement n'était pas assez lourd sans y ajouter des complications. La jeune femme observait les personne autour, les autres inspirés devançaient la foule, s'étant mu presque d'un seul mouvement. Ne restait plus qu'elle. Dépassant les badauds, fendant la foule, la méduse se dirigeait vers les cris.
Dans le mouvement, sa capuche retomba, laissant ses serpents libres de se mouvoir. Sa chevelure pourpre contrastant avec la neige autant qu'elle contrastait avec les gens.

La main sur les armes, elle se tenait prête.

Fragan récupéra rapidement la fillette que lui confiait, à lui et Satine, Erytheïs.

« On veille sur elle, ne t’inquiète pas. »

C’était bien sûr plus facile à dire qu’à faire pour la jeune femme qui avait, comme toujours, bien du mal à se séparer de son unique enfant. Toutefois, les cris qui retentissaient la dissuadèrent de rebrousser chemin.

Les autres inspirés suivirent plus ou moins rapidement, plus ou moins avec enthousiasme. L’épais manteau de neige gênait passablement le groupe –surtout le farfadet qui, à cet endroit en avait presque jusqu’à la ceinture- et, bien que la distance fut assez courte, l’agacement se manifesta rapidement, relayé par les deux gardes se trouvant à peine à quatre coudées devant eux et qui pestaient tant qu'ils pouvaient.

C’est en soufflant plus que de raison, hormis le minotaure qui avançait d’un pas tranquille, et après avoir contourné une butte rendue incertaine par la congère qui la constituait en grande partie, qu’ils virent la cause de tout ce bruit : un jeune couple vraisemblablement venu se recueillir se trouvait entouré par trois corbeaux qui les dévisageaient avec curiosité. L’événement aurait pu prêter à rire si les volatiles ne faisaient pas la taille d’un épagneul, et surtout s’ils n’avaient pas été en pierre.

Erythéïs resta une seconde sans réagir à prendre la mesure de la situation. Les questions se bousculaient dans sa tête : les corbeaux visaient-ils la sépulture ou le couple ? En savoir permettrait-il de dénouer la situation ?

" Tout va bien, nous allons vous aider."

Même si elle réfléchissait encore à trouver un plan. Elle ignorait de combien de temps l'on disposait pour agir et préféra partir du principe que les choses pouvaient vite mal tourner.

" L'un de vous est peut-être plus personnellement lié à la personne qui gît dans la tombe ?" C'était vraisemblable, mais pas certain. "L'autre pourrait-il bouger un peu : s'il n'est pas la cible des corbeaux, cela permettra de le mettre à l'abri et facilitera notre intervention."

L'objectif d'Erythéïs : réduire le problème en limitant le nombre de non-combattants exposés tout en parvenant à mieux cerner l'origine du souci.

Pendant que l'ébauche de plan prenait forme dans les esprits terrifiés (et donc sûrement ralenti) du couple, la jeune femme s'adressa à ses compagnons : "L'un de vous s'y connaît en statues animées ? " Avec le ton : "Si oui, c'est le moment de dire quelque chose d'intelligent et vite, avant que ça ne dérape."

Les deux jeunes gens, jusque là raides comme des piquets comme si le simple fait de respirer pouvait leur porter préjudice, ne remarquèrent le groupe venu à leur rescousse qu'au moment où Erytheïs s'adressa à eux.

L'homme, qui ne paraissait pas avoir plus de vingt ans, la regarda un moment sans comprendre, l'esprit comme paralysé par le froid et la peur. Herewald, l'un des deux gardes accompagnant le groupe d'Inspirés s'adressa à voix basse à la maîtresse espionne :

"J'ai pas l'impression qu'on arrivera à grand chose de cette façon..."

Joignant le geste à la parole, il fit un pas en direction du couple qu'il arrêta immédiatement, le corbeau le plus près des nouveaux arrivants tournant sa tête à presque 180°tout en ouvrant le bec pour pousser un croassement inaudible. Il le referma rapidement quand Herewald recula précipitamment, mais l'oiseau de pierre semblait maintenant s'intéresser aux troubles-fête, ouvrant grand les ailes pour se rendre encore plus impressionnant.

Muphèmeto réagit à la réaction d‘Erythéïs sans la regarder.

"Ouais, les séparer, face à des ennemis inconnus, quelle bonne idée !"

Après un souffle nasal sonore de dédain, Muphèmeto continua sa marche en direction du couple, d’un pas lourd et las.

Lorsque la créature bougea, le minotaure mit la main à sa hache, pour ne saisir que de l’air. Son arme était rangée à la maison, n’étant pas à sa place à un enterrement. Il émit un petit grognement d’agacement et poursuivi son chemin. L’important était d’aider le couple et sa masse était certainement un meilleur rempart que quoi que ce soit d’autre en ce moment.

Je m'approchais doucement, restant derrière la brute qui fonçait. Des corbeaux de pierre. Alors que les oiseaux occupaient toutes mes pensées, c'est les souvenirs de milles leçons du cryptogramme qui sautèrent devant mes yeux. Ecliptisme ? Solution possible. Illusion ? Possible. Peu probable ? Reste possible. Je dégainai ma rapière, sautais en arrière de quelques pas et jetai un regard aux alentours. Aucune présence apparente de danseur. Quelles étaient ces choses ?

"Prenez garde, Muphèmeto, à ces créatures,
Il m'est impossible de définir leur nature.
Un relatif danger, elles peuvent représenter.
Il ne serait de bon ton de les agresser.

Je n'avais malheureusement pas d'autre conseils, dans l'instant, à prodiguer. Mais ces créatures, jusque là, ne semblaient pas vouloir attaquer ? Serait-il possible de s'en débarrasser sans avoir à les charger ?