Je vis, je meurs ; je me brûle et me noie ;
J'ai chaud extrême en endurant froidure :
La vie m'est et trop molle et trop dure.
J'ai grands ennuis entremêlés de joie.
Tout à un coup je ris et je larmoie,
Et en plaisir maint grief tourment j'endure ;
Mon bien s'en va, et à jamais il dure ;
Tout en un coup je sèche et je verdoie.
Ainsi Amour inconstamment me mène ;
Et, quand je pense avoir plus de douleur,
Sans y penser je me trouve hors de peine.
Puis, quand je crois ma joie être certaine,
Et être au haut de mon désiré heur,
Il me remet en mon premier malheur.
Mais que pouvait-elle faire ? .. Que pouvait-elle faire pour que Mestre Corwyn ne souffre plus ? ... Qu'ils puissent être joyeux amis sans que des déchirements insupportable ne viennent endurer le cœur sensible du Mestre ?... Qu'avait-elle fait pour que la situation en arrive là ? .. Elle ne s'était rendue compte de rien pendant longtemps... Depuis combien de temps nourrissait-il cette blessure ? ...Source a écrit :Louise Labé, "Je vis, je meurs", Sonnet VIII, 1556
A pas léger, elle le rejoignit à la fenêtre, en évitant de trop l'approcher, pour ne pas l'embarrasser trop, mais pouvoir parler doucement, sans hausser la voix :
" Mestre Corwyn..." et maintenant ? "J'ai l'impression de ... de vous causer de l'embarras..." à double-sens en fait... " Je ne souhaite pas que vous soyez gêné... par ma faute..." Pas certaine que ce fût la meilleure idée qu'elle ait jamais eue, elle n'en pressa pas moins un instant la main du jeune homme, pour essayer de lui dire qu'elle n'était pas offensée, qu'il ne devait pas bondir à chaque fois qu'il se trouvait par hasard près d'elle : "Ne vous mortifiez pas... Vous m'êtes un ami très cher, je serais peinée si vous étiez malheureux"
La scène lui rappelait un peu la conversation qu'elle avait eue avec lui tantôt, pour parler du dispensaire... Ses paroles d'alors n'avaient pas eu plus d'effets pour aider le Mestre à être moins troublé... Peut-être faisait-elle fausse-route et s'y prenait-elle de travers pour l'aider ?...
" Si cela vous agrée, j'ai des histoires de brigands toute fraîches !" tenta-t-elle avec un ton léger, dans l'espoir qu'un sujet futile et romanesque le mettrait de meilleure humeur... mais sitôt prononcées ces paroles, Aleth songea que le sujet portait sur des hommes qui avaient eu un comportement un peu.... inconvenant à son égard... et que ce n'était sans doute pas l'idéal pour calmer les nerfs du Mestre. Les propositions de Lord Cendregué auraient eu un meilleur effet... Dire qu'Aleth voulait surtout en fait des histoires sur la Garde de Nuit, en lien avec l'un d'eux en particulier... Difficile d'être plus maladroite avec les sentiments qu'elle prêtait à Mestre Corwyn. Aleth, n'as-tu donc pas de cœur ni de sensibilité pour agir avec une telle brutalité ?
Elle scrutait l'attitude du Mestre avec un mélange d'espoir et d'appréhension, se sentant bien maladroite à son tour.