TDF chap.10 - Un fief tranquille

[Casaïr]

Darren se plia volontiers à la demande de sa tante quant à son positionnement au côté de Lysanor pour accueillir Lord Rhéomar et patienta tranquillement en attendant l'arrivée du seigneur. Une fois celui-ci arrivé, le jeune chevalier se demanda distraitement quoi faire si d'aventure son oncle lui adressait la parole, avant de rapidement se rendre compte que cela serait inutile : si Dame Guenièvre l'avait effectivement présenté, son époux ne lui avait accordé qu'un bref regard, juste le temps pour Darren de saluer respectueusement le maître des lieux, finalement soulagé de ne pas trop retenir l'attention du Lord. Au contraire de son fils, Jared, qui semblait le dévorer des yeux. Amusé, le chevalier salua le garçon d'un signe de tête avant de reprendre sa place et d'écouter Rheomar et Aleth présenter Myrosh. Ca, c'est sûrement le type même de personne difficile à présenter comme ami à son père, songea-t-il en souriant face à l'exercice de sa cousine qui ne s'en tirait finalement pas si mal.

Restait maintenant à voir comment se passerait la suite des événements.

[DukeTogo]

Un peu plus tôt, dans la pièce où l'on essayait de guérir Jolan.

Mestre Corvin eut un moue face aux questions du pupille Hastwyck et accepta sans discuter la demande de ne pas consommer de lait de pavot et lui répondit avant de le laisser également : "Oh vous allez surement guérir, Jolan, vous allez surement guérir."

Alyse gouta peu à la perspective de devoir attendre davantage avant de rentrer. Quand au bébé fauve, elle ne voulait pas en parler. Jolan fut ensuite seul avec Dame Guenièvre quand une servante emmena la jeune fille.

A la question de placer sa jeune soeur au service de lady Bulwer, dame Guenièvre acquiesça tout en exprimant qu'il faudrait d'abord qu'elle apprenne à tenir une conduite mesurée. Jolan eut le sentiment que l'expression impassible de l'épouse du lord cachait qu'elle ne pensait pas pour lui-même. Elle inspira profondément pour continuer.

"Jolan. Vous préoccupez de votre jeune soeur dans... dans votre état vous honore." Elle se releva pour faire quelque pas à coté de son lit et ajouta. "Et me fait sentir honteuse."

Le pupille ne pouvait qu'être choquée d'entendre Dame Guenièvre s'exprimer ainsi. Elle eut un petit geste de la main lui demandant de la laisser continuer. "La vérité est que j'ai initialement conduit votre soeur à vous pour que vous décidiez à la renvoyer sans délais. Nous pourrions aisément la faire escorter. C'est que... cette petite est agitée et ne me parait pas un bon exemple pour Lysanor. Mestre Corvin dit qu'elle rechigne à suivre la moindre instruction. Elle qui semblait si sage et curieuse à son arrivée."

Elle posa la main sur le bord du lit, sans pour autant toucher la main du pupille Hastwyck. "Elle m'en rappelle un autre, qui n'a jamais cessé de se comporter comme un petit sauvageon." ajouta-t'elle en souriant.

"Je suis désolé, Jolan et espère que vous me pardonnerez ces pensées. Alyse peut bien sûr rester le temps que vous voudrez et s'il vous arrivait malheur, peut-être... peut-être... pourvoierons-nous à ses besoins et son éducation."

Elle eut un regard tendre vers le jeune homme, un regard qu'il ne lui avait jamais connu auparavant.

[Crépuscule]

Jolan prit un visage sobre quand Dame Guenièvre lui révéla le fond de son cœur, mais la touche maternelle qu'elle avait apporté dans sa vie et le rappel de sa propre enfance lui fit vite s'adoucir. Il ne doutait pas du cœur de cette femme mais avait conscience qu'elle avait ses propres priorités.

"Merci pour votre franchise, ne vous inquiétez pas, je comprends votre geste. Nous voulons tous deux offrir le meilleur environnement pour voir grandir ces deux fleurs précieuses. Et nous sommes d'accord que ce ne sera pas ensemble qu'elles s'épanouiront, la terre qui m'a permis de me fortifier n'est pas aussi adaptée à Alyse. Mais je me dois de l'escorter, dès que cela me sera possible, nous leverons l'ancre. J'espère que nous pourrons compter sur vos recommandations quand le moment sera venu de trouver le jardin qui la verra éclore hors de son cocon."


*******

Plus tard, quand la douleur revint l'assaillir, Jolan se focalisa sur ses ennemis connus et inconnus, et alimenta sa rage de cette douleur, sa rage de vivre, sa rage de pourfendre tous ces murs bâtis de mensonges, sa rage de vengeance ....

Quand il apprit l'arrivée du Lord (entendit l'animation à l'extérieur) , Jolan tenta de se mettre sur pied, luttant contre les élancements causés par chacun de ses mouvements, craignant de finir pitoyablement effondré au pied de son lit, mais ne luttant pas moins pour ne pas que cela arrive.

[Iris]

Lysette avait été rappelée au chevet de Jolan après l'entrevue avec Lady Aleth et plein de monde. Sa mission n'était pas terminée. Ensuite Dame Guenièvre était venue. Du coup elle était ressortie -- encore. Puis il fallut ramener Lady Alyse Hastwyck et Dame Guenièvre finit par partir.

Au moins il y avait du mouvement ! Cependant personne n'avait démis Lysette de ses fonctions de garde-malade. La situation la confrontait à un grave dilemme : si elle n'avait pas reçu de contre-ordre, était-ce parce qu'on l'avait oubliée ?.. ou parce que l'ordre était toujours valide ? ..

Prudemment, l'intrépide servante se risqua à suggérer qu'elle allait chercher de l'eau fraîche pour la carafe de Jolan, et put ainsi disparaître à l'extérieur de la pièce, laissant le blessé seul. Bien sûr Lysette alla chercher de l'eau, mais elle traîna un peu dehors pour profiter de l'animation et des cancans. A un moment elle eut une frayeur : Tristifer regardait de son côté ! Et Lady Aleth ne devait pas être si loin que cela, suffisamment près en tous cas pour témoigner du fait qu'elle avait abandonné son poste ! Se protégeant derrière sa carafe pleine destinée à un mourant alité, elle fila loin de l'agitation, remonta les étages et se posta discrètement à une fenêtre donnant sur la cour.

Rhéomar revenait ! On l'annonçait ! Pas question de rater ça ! Les beaux soldats ! Qu'ils avaient fière allure, tout brillants, brossés et tout ! Même si elle n'était pas assez proche pour tout entendre, elle imaginait les paroles qui accompagnaient les gestes chaleureux et démonstratifs du Lord. On lui avait présenté Ser Brutasse, mais il l'avait ignoré. Bien fait ! Et le Lord saluait tout le monde sous les hourras de tous le château.

Un geste malencontreux et elle renversa un peu d'eau de la carafe pleine à ras bord qu'elle avait oubliée.

"Messire Jolan !" se rappela-t-elle avant de filer en direction de la chambre du mourant. "Pourvu qu'il claque pas pendant ma garde ! Pourvu qu'il soit pas clamsé ! Aïe aïe aïe !"

Pas facile de courir avec de l'eau qui sautait à chaque pas ! La carafe blottie contre son corsage, elle arriva essoufflée chez Jolan, entrant sans frapper, le décolleté bien mouillé.. Pour voir un mort qui marchait, livide.

"Ah ! mais ... ! Mais...!"

Elle posa la carafe désormais aux trois-quart pleine sur le premier buffet venu avant de se précipiter pour soutenir Jolan, ou le rattraper dans sa chute.

"Messire, vous voulez que je vous aide à vous habiller ? Mais d'abord remettez vous au lit !"

Que le jeune homme voulût se lever pour accueillir le Lord était quelque chose qu'elle pouvait comprendre, mais déjà qu'il s'asseye dans son lit, hein, et qu'il lui dise où trouver les vêtements. Et puis il fallait le laver, il était tout poisseux de sueur.

Mais d'un autre côté... qu'en penseraient Lady Aleth et Mestre Corvin ? Prise de frayeur, elle resta interdite, incapable de prendre une décision. Vêtir Jolan d'abord ou après avoir cherché le mestre ?... Dilemme...

[Crépuscule]

Focalisé sur son désir de ne pas être présenté à Lord Rhéomar alité, faible et pitoyable, Jolan en avait oublié qu'il était sous bonne garde. Réalisant qui se tenait là, tel qu'il était sous les couvertures, face à sa garde malade, il se figea sur le coup, non sans une grimace que lui tira la contraction des muscles de son abdomen, puis se rassit sur le bord du lit, tirant sur lui la couverture pour offrir un minimum de décence.

Il demanda alors à la servante, un peu sèchement, sans énervement mais avec la détermination de quelqu'un qui ne changera pas d'avis :

"Lysette ! Je .. Voulez vous bien approcher ce bac à eau du lit que je puisse me rafraîchir le corps avant de me vêtir pour me présenter à Lord Rhéomar. Et vous trouverez mes habits dans cette armoire, une chemise simple, je ne voudrais pas tâcher les plus travaillées, et je vais mettre par dessus le justaucorps en cuir pour protéger le reste, bien serré pour maintenir le pansement. Et sortez moi aussi le pourpoint rouge aux brodures dorées, sans autres broderies, et les haut-de-chausses associées."

Garde-robe de Jolan
Je suis parti du principe que Jolan avait des vêtements aux couleurs de sa maison mais aussi de la maison Castellane (et plus d'autres plus neutres, il faut pas oublier qu'il aime bien présenter ). Si ça ne se fait pas qu'un pupille porte les couleurs de sa maison hôte, je mettrai autre chose, y a du choix, Jolan est un vrai fashuon victim

Question, Jolan tient debout où doit-il quérir Lysette de lui trouver une canne ?

[Iris]

Pfiou, il avait l'air bien grimaçant, un peu plus et il crevait tout nu sur le tapis !

Lysette eut une seconde d'hésitation. Devait-elle recevoir des ordres d'un mourant qu'elle devait surveiller dans son lit ?... Ah mais s'il se rompait le cou pendant qu'elle cherchait quelqu'un pour lui dire quoi faire, on lui crierait dessus ! Dansant d'un pied sur l'autre, elle finit par s'exécuter, non sans commenter : "Z'êtes tout gluant de sueur, c'est pas un pauvre tissu mouillé qui nettoiera ça." Elle eut un reniflement mais se retint de tout autre remarque.

Elle versa l'eau dans la vasque, apportant le savon et deux toiles de ce qui faisait office de gant de toilette, examina la disposition des lieux, avisa l'état du patient qui n'allait pas galoper, et se dit qu'elle pouvait faire un peu pareil que pour les vieux de la famille. D'abord une grosse serviette sur le sol, près du lit, pour éponger les éclaboussures, puis une autre pour que Jolan puisse s'asseoir dessus et éviter de tremper le lit, ensuite une troisième -- pour un messire on fait les choses en grand -- pour frictionner et sécher le jeune homme.

"Vous t'nez pas d'bout Monsire, asseyez vous là, sur la serviette. Je vous aide. Laissez la couverture, on s'en fiche, j'en ai vu d'autre." et son ton dédaigneux semblait indiquer qu'elle n'était pas franchement impressionnée par la virilité de Jolan.

Sur quoi elle savonna vigoureusement le gant de toilette qui moussa, et entreprit de frictionner Jolan, dos, bras, jambes... A ses récriminations, elle rétorqua sans même écouter : "Vous voulez que ça avance oui, ou zut ?" et dans la barbe qu'elle n'avait pas : "Ralalala mon vieux tonton faisait moins de chichi ! Bah oui, c'est moi qui d'vait m'en occuper, nourrir, laver, amener sur le pot... Tiens, vous voulez que j'vous mène à la chaise percée ? Ma grand-mère disait toujours que c'est important de bien évacuer, ça garde en bonne santé. Z'avez pas évacué depuis un moment, hein ?" Et dans la foulée, elle tendit le gant savonneux à Jolan en désignant son entre-jambe qu'il dissimulait tant bien que mal de sa main, par un réflexe pudique : "Pour ça vous débrouillez tout seul !"

Enfin, elle fit gonfler d'eau le deuxième gant de toilette, jusqu'à ce qu'il dégouline, et rinça généreusement Jolan... en mouillant un peu trop les pansements au passage. Un coup d’œil dans leur direction en songeant "zut", mais elle avait la flemme de les refaire comme la lady avait montré. Une fois Jolan assez prestement lavé, frictionné, séché... Elle rangea le dispositif de toilette en tas, pour qu'il n'encombre pas.

" Alors... euh... l'armoire..."

Elle l'ouvrit.

Resta immobile devant l'étendue du linge plié ou suspendu.

"Vous avez dit quoi déjà ? "

Commença pour Jolan une longue séance fastidieuse consistant à répéter, pièce de vêtement par pièce de vêtement, et à enchaîner les "là !", "non pas là, là !"...

[Thalgrim]

Le reste de la journée était passée bien vite pour Myrosh, qui avait passé un long moment à ressasser les paroles de Jolan dans un coin du château. Les révélations de son ami sur la provenance de sa blessure occupait toujours son esprit lorsque le retour du lord fut annoncé. Le prêtre se força à interrompre ses sinistres réflexions qui ne le menaient de toute façon à rien. Il se maudit intérieurement de ne pas avoir vu le temps passer : Jolan avait besoin d'aide, et pas de quelqu'un qui cède au désespoir.

Dans la cours, Myrosh resta en retrait lorsque le père d'Aleth et son escorte y entrèrent. Le contraste était saisissant entre le maître du domaine et son frère, et les manières jovials et directes du premier lui plurent tout de suite. Le prêtre rouge remarqua aussi le jeune homme qui restait à cheval et qui paraissait éviter de regarder dans sa direction. Le frère cadet d'Aleth sans doute, vu sa tenue et sa proximité avec le seigneur de Waterford.
Le serviteur de R'hllor s'avança de quelques pas tandis que la jeune Lady Castellane le présentait à son père, et s'inclina :
"Lord Rhéomar, je suis honoré de vous rencontrer."

[DukeTogo]

Pendant que le lord était reçu dans la cour du château, Lysette avait le plus grand mal avec le pupille Hastwyck. Celui-ci tenait à peine debout comme un pantin fragile.

Lord Rhéomar répondit à la présentation du prêtre rouge.
"Ah oui? Sois-en remercié, Myrosh d'Asshaï. Il faut croire que tu auras porté chance à mes champions !"

Il eut un regard circulaire, s'adressant à la cantonnade : "Un lynx de fumée? On dit cette bête monstrueuse, énorme et hideuse. Il faudra nous dire à quoi cela ressemble. Vous avez ramené sa tête au moins? Enfin... Béric et Jolan ayant remporté chacun un tournoi, j'imagine que la tête de la bête vous revient. Vous nous direz tout ça à table !"

Jared Castellane descendit enfin de son cheval. Il semblait avoir grandit depuis son départ et apprécia peu le désir de sa mère de le serrer contre elle.

Kieran Orell marmonnait depuis un moment et lâcha enfin.
"Bon sang, j'ai compté plusieurs fois que j'en ai mal à la tête. On dirait que vous rentrez à moins que vous n'étiez parti. Des problèmes là-bas?
- Même pas. répondit le lord. C'est juste que certains hommes ont eu le béguin pour des filles du coin et j'ai accepté qu'ils s'installent à Trémière. La proximité du soleil de Dorne leur donne presque une peau de cuivre, hein mon garçon?"
Jared eut le regard fuyant, qui sait ce qui s'était passé là-bas et si le jeune lord avait eu l'occasion de conter fleurette.
Enfin, faut croire que ça en a inspiré d'autres, car sur le chemin du retour, j'en ai deux-trois qui ont disparus. C'est pas bien grave... Je ne suis pas inquiet, lord Hastwyck virera les tire-au-flanc si besoin est. Bon, c'est pas tout, mais il commence à faire faim !"
A l'attention du chef des serviteurs.
"Et veillez à bien nourrir nos hommes aussi."

[Iris]

Aleth se conforma à ses édits et s'efforça de ne pas laisser paraître ses interrogations.

... était-ce donc commun que les soldats... désertent ?... était-ce ... anodin ?...

... apparemment Jared souhaitait désormais être traité en adulte... quel genre d'homme deviendrait-il ?... partirait-il du domaine pour devenir Ser ?...

... la tête du lynx de fumée... eh bien, il y avait bien le chaton de Darren... mais ce n'était guère impressionnant... en matière de trophée les chasseurs avaient été bien chiches, il n'y avait guère que les blessures de Béric pour témoigner de l'exploit...

Il était temps d'aller à table, et Aleth suivit tranquillement le mouvement, écoutant les conversations et évitant de trop parler, comme cela lui avait été inculqué depuis des années.

[Iris]

Tandis que la cour se vidait et que chacun allait vers le lieu de ses festivités, Lysette avait réussi -- enfin ! --- à vêtir Jolan comme il le souhaitait. Cela avait été exténuant et elle n'en pouvait plus de chercher la chemise ceci, le pourpoint cela, et ficeler comme ci, non pas comme ça !...

A présent Jolan Hastwyck, l'insistant Messire trop obstiné voulait désormais se lever et marcher... sauf qu'il n'y arrivait pas.

Lysette avait laissé le jeune homme se lever, mais il oscillait et elle finit par se précipiter quand elle crut qu'il allait tomber pour de bon. Elle l'attrapa des deux bras et chancela sous le poids -- un homme adulte ce n'est pas un lapin ! -- et malencontreusement tapa dans la blessure, arrachant un grognement de douleur au blessé qui la repoussa en s'appuyant sur le lit.

Elle commença : Z'allez pas y'arriver Messire. avant que sa voix se précipite et devienne plus aiguë, sous le coup de l'énervement et de l'effroi que lui causait la mine de revenant du pupille et son obstination presque démoniaque : " Et je veux pas que vous mourriez pendant que je suis là. Quand ce s'ra plus mon service, vous f'rez bien c'que vous voulez, mais vous mourrez pas quand je suis là !"