TdF - Chap 13 - Noires ailes, noires nouvelles

MJ DukeTogo
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Iris
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Re: TdF - Chap 13 - Noires ailes, noires nouvelles

Message : # 59434Message Iris
18 juin 2017, 21:40

Jared était stupéfait et regardait Elixi sans être capable de rien faire ni dire. Il était déchiré entre son désir pour elle et sa timidité. Il ne la quittait pas du regard, totalement aveugle au reste du monde. Quelles collines ? Quel paysage ? Elle était si belle, si parfaite. ... il voulait la toucher... tout son corps se tendait à cette idée, et son sane bouillait dans ses veines. Il demeurait incapable de bouger ni articuler un mot.

Elle le regardait... elle était si... nue!

Quoi ? Elle avait posé une question ? Il n'était plus sûr de ce qu'elle avait demandé.

"Tu es belle " articula-til la gorge nouée et gêné de ce qu'il ressentait dans son intimité.
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Re: TdF - Chap 13 - Noires ailes, noires nouvelles

Message : # 59462Message Crépuscule
20 juin 2017, 20:23

Elixi sourit tout en s'accroupissant dans l'eau, faisant disparaître sa poitrine sous le miroir liquide reflétant le ciel clair.

"Venez, elle est fraîche et pure. Si vous restez près du bord sans trop y pénétrer vous ne risquez rien.

Vous me dites belle messer, craigniez vous que je sois une sirène qui cherche à vous attirer dans les profondeurs de mon domaine ? Approchez donc en avoir le coeur net mon beau seigneur...
"

Son ton était taquin, et son regard restait fixé sur lui
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Message : # 59463Message Iris
20 juin 2017, 21:59

Jared demeura un moment immobile, partagé entre le désir et la timidité. Il voulait la rejoindre mais craignait... il ne savait pas quoi ... Oh s'il osait...

Il se déchaussa nerveusement, puis ôta sa tunique. Torse nu, il s'arrêta et la regarda sans rien dire. C'était gênant d'être regardé de la sorte.... mais il ne voulait paraître faible ou timoré ! Combien il aurait aimé avoir le physique avantageux de Béric ou Darren. Au lieu de quoi il restait gringalet.

Une main dissimulant son intimité -- et les signes par trop visibles de son émoi -- il fit glisser le reste de ses vêtements et se hâta dans l'eau, soulagé d'être libéré de cette première épreuve.
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Hissez haut vigoureux capitaine à la fière proue !

Message : # 59465Message Crépuscule
21 juin 2017, 08:57

Elixi s'immergea complètement en se laissant glisser sous l'eau avant de ressortir un peu plus près de Jared.

Tout en tournant autour de lui, disparaissant une seconde et ressortant la tête la suivante
"Approche vaillant explorateur ... toi qui t'aventures dans des eaux inconnus ... attrape-moi ... si tu le peux ... et tu pourras me prendre ... mon trésor. "

Et sur un petit rire cristallin, elle s'éloigna un peu et se repoussa en arrière.
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Message : # 59476Message Crépuscule
22 juin 2017, 08:51

Après lui avoir filé entre les deux et l'avoir aspergé deux ou trois fois, Elixi laissa Jared se rapprocher d'elle et lui attraper le poignet.

"Me voilà prise dans tes filets ..."

Elle glissa ses doigts vers sa main et les entrecroisa entre chacune des ses phalanges, souriant quand Jared serra sa main ainsi prise au piège. Le regardant dans les yeux, elle resta quelques secondes interdite, sachant ce qu'elle désirait mais en ayant également quelques craintes.

Elle n'aurait su dire si c'était elle ou lui qui était venu à la rencontre des lèvres de l'autre, mais elle apprécia ce baiser dans toutes ses imperfections, elle caressa de sa langue celle de Jared, se rapprochant encore de lui, ses seins se retrouvant accolés à la poitrine de Jared. Sentant la chaleur et la vigueur croitre contre son bas ventre, elle se recula par instinct, un peu malgré elle, un peu trop brutalement vu l'expression gênée de Jared.

Elle se ressaisit, lui sourit puis saisit doucement sa main, tout en revenant vers lui.
"Rien à faire, je ne peux plus m'échapper" dit-elle tout doucement comme une excuse. Puis, reprenant un ton taquin, elle ajouta :
"Alors? Suis-je bien une sirène ?"
Elle amena délicatement la main de Jared contre le galbe de sa poitrine, et le guida plus bas, vers ses hanches ...
"Il faut chercher plus bas"

... elle poursuivit le long de ses fesses puis fit glisser sa main par devant jusqu'à son entrejambe.
"... juste une femme...
Moi je n'en ai pas, mais toi ..
."

Laissa la main de Jared à l'entrée de sa cache au trésor, elle porta la sienne sur son membre érigé... L'eau entre eux semblait sur le point de bouillir tellement leurs corps dégageait de chaleur ...

****

... une belle matinée ... inoubliable. Il se contenta de se remémorer ces moments là, la suite était ... un peu insatisfaisante même si non désagréable, un mélange étrange de plaisir et de honte ... c'était comme pour tout, il allait avoir besoin d'entraînement ...

Ses pas, à la lueur de la lune fraîchement levé, l'avait mené près des écuries où il vit Horald, le frère d'Emmon et Raul, le fils de l'éleveur de cochon en pleine altercation

Horald rétorquait d'un ton narquois : "Toi un chevalier ? Laisse moi rire, Ser Jambonneau il faut t'appeler ?"

"Rigole p'tite tête, tu auras un bien plus beau sourire quand je t'aurais brisé les dents avec mon épée"
Raul était rustre mais il n'en était pas moins massif et plus âgé qu'eux.
"Tiens, vlà Castellane, lui sera peut être assez malin pour reconnaître un chevalier quand il en voit un."
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Re: TdF - Chap 13 - Noires ailes, noires nouvelles

Message : # 59489Message Iris
22 juin 2017, 21:19

Jared arrivait la tête pleine de rêves et heureux d'être venu ici. Il était un homme à présent. Qu'est ce que cela lui faisait ? Il n'en était pas certain. C'était plutôt bien. Dans l'ensemble.

Il fut interrompu dans ses méditations par une dispute entre deux hommes qu'il ne connaissait que de visage , au mieux de nom.

" quel est le problème ?" demanda -t-il
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Re: TdF - Chap 13 - Noires ailes, noires nouvelles

Message : # 59507Message Crépuscule
25 juin 2017, 15:48

Mon père ne portait pas les Kermesi dans son cœur et ne les décrivait pas comme des gens très fins, celui là êtait un beau spécimen..

Horald, qui devait avoir je pense approximativement le même âge que Jared, répondit à ce dernier :

Il prétend être chevalier.
Je SUIS chevalier ! Ser Gerold de Haut Hermitage m’a adoubé en début d’année alors qu’il traversait les Montagnes Rouges ! Mon père a organisé une grande mêlée lors de son passage pour l’occasion et j’ai défait tous les autres combattants alors que j’étais le plus jeune. C’est là qu’il a vu que je savais bien me battre et qu’il m’a fait chevalier.
“Pfff sûrement un simple chevalier errant sans le sou qui a festoyé à l’oeil contre quelques belles paroles, ça ne fait pas de toi un VRAI chevalier… Haut Ermitage tu dis … c’est une branche cadette des Dayne qu’il y a là-bas … Ser Gerold Dayne tu dis ?”
Horald semblait réfléchir, cherchant à se rappeler ce qu’il avait bien pu entendre à son sujet, il lui semblait qu’il avait un surnom et une mauvaise réputation.
Ouais, p’têt bien … “ Le regard de Raul brilla comme s’il avait eu une révélation ou une idée de genie “Oui Dayne! C’est bien ça!”
Un sale traître de dornien, et ça ne fait de toi guère mieux. J’ai entendu ton père venir réclamer de l’argent à Emmon, il y a coupé court en lui disant que La Tournesolaie les aidera le jour où vous vous rappellerez vos devoirs envers vos seigneurs. Quand mon père saura qu’en plus vous fricoter avec les dorniens, attendez vous à être bientôt chasser de ces terres où on enverra de VRAIS chevaliers pour les défendre !

Raul serrait les poings, il était à deux doigts de frapper le jeune Cuy. Je n’aurais su dire si Jared allait prendre partie ou révéler des talents de diplomate ou bien si le destin allait en décider autrement ...
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Mais laissez les s'entretuer si ça leur plait !

Message : # 59510Message Iris
25 juin 2017, 16:59

Jared avait l'impression que tout se déroulait sans qu'il parvînt à trouver quoi que ce soit d'intelligent à dire dans la seconde. Il essayait de comprendre l'affaire : une grande mêlée, c'était bien l'exercice le plus violent dans un tournoi ? Est-ce que c'était possible d'y vaincre tout le monde ? Quant aux lignées cadettes ou non du sud de Dorne, Jared ne savait qu'en penser. Mais cela ne suffisait pas, il fallait en prime qu'il soit question d'argent, de jambons, et de guerre privée... Le jeune Castellane en connaissait assez sur l'honneur viril pour savoir que les hommes voulaient défendre leurs affirmations jusqu'au bout et avoir le dernier mot. En s'interposant, n'allait-il pas au final passer pour un lâche ?

La gorge nouée, il glissa, sans être bien sûr d'être entendu : "Vous voulez vous battre en duel pour l'enterrement ?"
J'ignore quelles sont les caractéristiques de Jared, à tout hasard, j'ai lancé 3D en Persuasion : 3, 6, 6

On peut prendre 2D si Jared est plus faiblard, ou 2D+1B... Cela ferait 9 ou 12.
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Re: TdF - Chap 13 - Noires ailes, noires nouvelles

Message : # 59708Message Crépuscule
19 juil. 2017, 00:35

Raul s’approcha d’Horald pour se coller à deux pouces de lui, imposant sa stature et sa taille au cadet Cuy, qui dû lever le nez pour ne pas le retrouver pointé sous le menton du présumé chevalier fraîchement adoubé. Horald commença à reculer pour ne pas rester dans cette posture rabaissant quand Raul le poussa en arrière, le faisant tomber en arrière, le cul dans la terre.

“Si tu connaissais nos traditions, tu saurais que les nôtres ne refusent jamais un défi pour démontrer leur force quand il leur est lancé, j’accepte donc, mais je serais bien étonné que l’Andal en fasse autant.”


C’était à présent au tour du jeune Cuy de serrer les poings, je comprenais bien ce qu’il ressentait en cet instant. Il venait de se faire humilier, et s’il refusait le défi, il passerait pour un lâche, mais s’il acceptait, il passerait pour un idiot. D’autant que seul fasse au montagnard qui était son aîné et qui lui était supérieur en force, il n’avait pas toutes ses chances … Horald se releva, regarda Raul dans les yeux, ces yeux qui le défiait, puis se tourna vers Jared tout en dédaignant son adversaire :

“Tu as raison, ce serait irrespectueux de se battre à la veillée ou à l’enterrement de l’héritier Hastwyck, un chevalier devrait comprendre cela.”


Le cadet Cuy était plutôt malin, Raul se prétendait chevalier et il le défiait à son tour de se comporter comme tel. Il commença à s’écarter, accompagné de Jared, laissant là Raul, mais il se retourna :

“Un jour prochain, nous nous recroiserons, ce jour là, je relèverai ce défi, ce jour là, je te ferai regretter ton arrogance et prouverai quel piètre chevalier tu es.”

Mais en terme d’irrespect, le père de Raul avait pour sa part outrepassé les limites, ce qui se traduisit par la voix rageuse de lord Raynald qui tonna, hurlant à ce moment précis et perçant le silence régnant dans la Trémière :
“Tu vas virer ton cul de ma maison, baiseur de cochons ! Hors de ma vue et de mes terres avant que je te fasse chasser par mes hommes ! Et emmène ton fils tout chevalier de pacotille qu’il soit …”


Ces mots finirent de disperser les jeunes hommes qui partirent chacun de leur côté, qui pour rejoindre son père, qui pour aller voir ce qui se passait. Ils découvrirent mon père repousser de toute sa stature Gorri Kermesi par la grande porte de la Trémière.

Qu’avait bien pu mettre mon père dans une telle rage ... Les murs ont peut être des oreilles mais les gardes et les serviteurs ont aussi une langue bien vivace, ce qui permit à Jared d’en apprendre plus quand Elixi vint lui apporter sa cape de cérémonie avant que le jour ne se lève, le lendemain matin.

Kermesi avaient eu vent que lord Raynald était en fond et il avait profité de trouver mon père seul devant la cheminée de la grande salle pour venir lui faire quelques requêtes. Ce n’était pas le bon moment, tout le monde savait à la Trémière que quand il s’assoit près du feu dans la grande salle, c’est qu’il souhaite rester seul … Mais bien qu’un des gardes avait prévenu Kermesi que lord Raynald ne voulait pas être dérangé, il n’en avait pas tenu compte. Mon père resta silencieux tout du long pendant ses réclamations : Un meilleur paiement de la fourniture des bêtes; Et puis qu’en l’absence de soutien des Cuy et avec les nombreux dangers dont eux, montagnards, les préservaient, qu’il avait besoin de plus de moyens pour tenir bon; Et encore qu’à Port-Tremière, on ne donnait pas de travail à leurs jeunes; Enfin, pour finir, les Cuy ne méritant pas d’après lui le soutien des clans wascons, il lui a dit qu’il l’épaulerai s’il comptait faire la requête de récupérer les terres frontalières des Montagnes Rouges. Il serait suivi par les autres familles, et ensemble ils prouveront l'inefficacité des Cuy à gérer ces montagnes. Il ne lui demandait qu’une (autre) chose en échange, de prendre son fils devenu chevalier il y a peu au service de la maison Hastwyck. Ce fut l’étincelle qui alluma le brasier de la colère que contenait mon père depuis que Kermesi avait ouvert la bouche.
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Re: TdF - Chap 13 - Noires ailes, noires nouvelles

Message : # 59709Message Crépuscule
19 juil. 2017, 00:46

Quand l’aurore arriva ce jour là, les Kermesi avaient quittés la Trémière depuis plusieurs heures (en maudissant lord Raynald) à l’heure où tout le monde commençait à se regrouper devant le petit septuaire où je reposais. C'est alors que la silhouette de trois chevaux apparurent se détachant sur le ciel qui s’illuminait peu à peu. Sacha, le courageux garde qui avait suivi les ravisseurs d’Alyse et qu’Aleth avait sauvé, avait parcouru des lieux pour porter l’annonce de mon enterrement jusqu’à Hauteterre. Il revenait accompagné de Noirécu et d’un jeune garçon qui avait à peu près l’âge de Jared, portant tous deux la cape noire traditionnelle de la région.

L’heure n’était pas au présentation et les derniers arrivants prirent place solennellement parmi les quelques personnes réunit là pour écouter le septon Wysh. Il annonçait que j’étais à présent sur la voie me ramenant auprès des Septs, la Mère donnait la vie et l'Étranger la reprenait, il en était ainsi, et … je ne sais quoi encore ... En fait mon attention, bien loin d’une voie quelconque illuminée par la lumière des Septs ou celle de Rh’llor, se concentrait sur ceux et celles qui étaient là pour moi, ancrée en quelque sorte dans leurs pensées.

Marianne, ma mère et Alyse, ma soeur, avaient le visage dissimulé par le voile sombre qui complétait les capes noires qui les couvraient, un voile destiné à cacher leurs larmes. Karlota, Paula, Elexi et quelques femmes du voisinage que je n’aurais su nommer portaient quant à elle des mantilles ou des crêpes noires. Je sentais la tristesse de Karlota qui repensait aux gâteaux qu’elle préparait à l’époque pour moi et qu’elle me donnait en douce. Je sentais le désespoir de ma mère, et un tourbillon de sentiments à donner le tournis. Du chagrin, incommensurable, mais noyé dedans, de la colère de l’avoir abandonné et de n’être jamais revenu pour elle. Des regrets de ne pas m’avoir vu grandir. De la reconnaissance, d’avoir arraché Alyse de ses ravisseurs, mais la désapprobation de lui avoir ensuite arraché de nouveau Alyse pour lui avoir rendu si différente. Et de l’incertitude, des doutes ... mais dans ce concentré complexe d’émotions, de l’amour, beaucoup d’amour. C’est par amour qu’elle m’avait laissé partir chez les Castellane il y a des années, et c’est par amour maintenant qu’elle souhaitait que je trouve la paix dans un jardin à mon image.

Au cœur de cette tempête de souvenirs et de ressentiments, le cœur d’Alyse semblait être un rocher inébranlable au milieu d’un océan déchaîné. Alyse avait perdu la chaleur qui se dégageait d’elle, et ses émotions semblaient enfouies dans les profondeurs de son être, elle était impassible. Pourvu qu’elle trouve le chemin lui permettant d’avancer loin de ce chaos qu’elle avait eu à vivre, et loin de la haine que ce chaos pouvait engendrer. Tant de poids repose à présent sur tes épaules petite sœur, pardonne-moi. Mon frère, entends ma dernière prière, où que tu sois, veille sur elle.

Jared se tenait là, dans la courte cape noire plissée retouchée par Elixi, elle lui couvrait les bras et les épaules et il la maintenait par dessus son bras droit, en berne, imitant les autres hommes qu’il avait vu faire ainsi, mon père, ainsi que Lars, Emmon et Horald. Sacha, Noirécu et son jeune compagnon faisaient de même. Ulfen et Jovien en portaient aussi, des plus simples et usées, probablement empruntées pour la cérémonie, tout comme d’autres serviteurs de la maison et des fermiers du domaine. Lars était perturbé. Je sentais son cœur batailler entre les diverses pensées qu’il ne parvenait pas à chasser de son esprit, sa fidélité envers Raynald et ses devoirs envers sa famille. Il était déchiré en sachant que suite à l’altercation de la nuit, il allait devoir choisir l’un ou l’autre. Et il se sentait coupable de penser à tout cela en cet instant, alors que ses pensées devraient être consacrées à l’hommage qu’il souhaitait me rendre, et à la compassion qu’il ressentait pour lord Raynald et lady Marianne.

Alyse avait de qui tenir ... les chiens ne font pas des chats, en effet, pour savoir ce que mon père avait sur le cœur à cet instant, il faudrait être sorcier. Raynald ne se plaint pas, il ne geint pas, même en son for intérieur, il se devait d’être fort. Il était plus que dévoué à cette tâche afin de maintenir la dignité de sa maison. Pourtant, sous cette armure de responsabilité qu’il portait, je le sentais, il était fatigué, usé, et n’avait espéré qu’une chose, avoir un fils pour reprendre le flambeau. Un héritier qu’il avait vu immédiatement en Reswald avant que la guerre n’éclate, puis un héritier qu’il avait finalement reconnu en moi. Père … je n’ai jamais désiré cela, mais je l’aurais assumé et j’aurais repris votre fardeau, car c’était mon devoir, et j’aurais fait tous les sacrifices nécessaires pour cela, mais je suis allé au delà de ce que j’étais capable de supporter … je n’avais pas la force que vous avez, je n’étais pas digne de votre reconnaissance, je n’attends pas que vous me pardonniez, j’en suis incapable moi même.

Toutes ces personnes, toutes ces émotions, et pourtant, j’en ressentais d’autres encore, par delà les plaines, par delà la distance, des sentiments qui prenaient vie par les mots, par la forme, par l’encre, Aleth ... Aleth, tes mots sont forts, et je les entends, rancœur, honte, colère, jalousie, tristesse face à la perte progressive de ce qui nous liait… Acceptes ta colère, n’en ai pas honte ou elle te rongera, il est bon que tu l’exprimes à ta façon, libères t’en.

A ton fond de jalousie face à l’ami que Bénédicte t’avais pris, s’est opposé ma propre honte de te laisser derrière ce mur que je bâtissais pour protéger mon secret. Ces deux graines ont germées et se sont agrippées à notre relation, créant les premières fissures qui l’ont détériorée. Pour autant, notre amitié est forte, et il aurait fallu plus que cela pour l’abattre. Tu n’as rien à te reprocher, tout ce que tu as fait, tout ce que tu as dit, notamment à la Trémière étaient sincère et m’ont aidé à grandir, à comprendre que je ne pouvais plus rester un garçon, que je devais prendre le chemin de l’homme que je devais devenir, si quelque chose s’est brisé en moi lors de ma séparation avec Bénédicte, tu n’en es en rien responsable, tu n’y es pour rien si j’ai été trop faible pour résister à ce choc. J’ai essayé d’être fort, de devenir l’homme qu’aurait dû être Dugal, d’être l’homme que Dugal aurait voulu que je devienne, capable de préserver sa sœur bien aimée, d’être le frère que tu n’avais plus … mais l’homme en moi qui a émergé n’était pas ce frère que tu as perdu, n’étais pas ce frère que j’avais perdu, c’était un homme dévoué, mais ce n’était pas un homme bien.

Oui j’ai souffert de devenir cet homme, mais je l’ai accepté sans faire taire cette souffrance. Si ces fissures n’avaient pas détérioré notre amitié, nous nous serions parlés plus ouvertement, et tu aurais pu me dire ce que tu avais sur le cœur, mais j’ai été égoïste, focalisé sur ma propre souffrance, aveugle à ce que tu ressentais face à cela, je te croyais seulement préoccupée par tous ces complots. Si nous en avions parlé, j’aurais tout fait pour t’offrir les moments de liberté d’homme que tu m’enviais tant. Si seulement je pouvais encore avoir une de ces discussions que nous aurions dû avoir, alors je te dirai que ces moments, tu peux les avoir ... pars Aleth, avant que tes obligations ne te rongent, va vivre libre, et sache si j’avais pu, je t’y aurais aidé. Le lierre va là où il le souhaite, là où il trouve ce dont il a besoin, soit Hedera, va dans les bois, trouve belettes et hiboux, tu trouveras ta place parmi eux, je n’en ai aucun doute.

Puisqu’il est temps d’être sincère, peut être que je ne te l’aurais pas dit, moi aussi j’ai eu ma pointe de jalousie mélangée d’envie, j'ai craint que tu ne partes avec eux après le tournoi, et j’ai eu peur de ne pouvoir t’y suivre, mais si tu me l’avais demandé, je t’y aurais aidé malgré tout. Pour finir sur ce que j’ai encore sur le cœur, à notre retour à Waterford, j’ai senti la fissure s’agrandir, j’ai vu que tu m’as cru capable de devenir un monstre prêt à torturer un prisonnier alors que je ne cherchais qu’à l'intimider, et tu as eu ces mots en s’adressant à nous devant le moulin ‘ma maison’ … j’avais perdu ma place dans ta maison, à ces mots, je suis redevenu le pupille alors que dans mon cœur, ta maison était aussi importante que la mienne. A ces mots, j’ai pensé que tu avais vu ce qui m’attendais, qu’un jour je devrais quitter la maison Castellane, et que tu avais accepté cela. Mais à présent, je m’en rends compte que si c’est cela, tu auras été plus clairvoyante que moi. En effet tu as raison, l’homme que je devenais était prêt à tout pour restaurer sa maison, j’étais prêt à trancher tous les liens qui pouvaient m’empêcher d’avancer, le poison du démon n’a eu d’effet que de faire taire cette part de moi qui résistait, mais c’est bien une autre part de moi qui a agit cette maudite nuit, et Myrosh m’a aidé à ouvrir les yeux, il fallait que j’arrête le désastre, j’aurais pu devenir un risque pour toi si notre amitié serait devenu un obstacle...

Il y eut un blanc, je venais de mettre au clair mes pensées, d’accepter ce qui m’était arrivé et ce que j’étais devenu, et mon choix final. Un poids s’envolait, et mes pensées étaient à présent plus claires, je voyais le monde comme il était, et que je n’y avais plus ma place.

Je vis de plus en plus loin la procession qui s’étirait à présent, depuis la Trémière et qui serpentait à travers les collines en direction des tertres fleuris. Jared marchait en tête, portant l’étoile à sept blanches, suivi de Lars puis du septon, derrière, Noirécu, Emmon, Sacha et Jovien portait mon cercueil. Suivaient ma mère, puis Alyse, mon père et derrière Ulfen, Horald et le jeune garçon venu avec Noirécu et le reste des personnes présentes pour ce dernier hommage.
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