Fortuna Imperatrix Mundi

Le diner était servi dans la grande salle du château Castellane. Béric discutait avec Kieran Orell de l’implication des soldats du domaine. Lord Rhéomar riait avec son fils Jared qui transformait son pain en adversaire de joute et sa fourchette en lance de tournoi. Tristifer avait amené à table Gareth Waters pour le questionner davantage, encore et encore et le troubadour, patient, répétait les mêmes réponses. "Notez ça, Corvin. Vous l'avez bien noté, hein?"

Des conversations d’hommes dans un monde d’hommes, songea un instant lady Aleth. Lysanor séparait la lady de Dame Guenièvre qui semblait juger en permanence la qualité du maintien de ses filles.
En présence de celle-ci, Jolan s’abstint de reprendre la conversation qu’il voulait réellement tenir avec la lady. Mais à vrai dire, Dame Guenièvre n’avait jamais mis Jolan à l’aise, contrairement à Rhéomar qui se montrait assez chaleureux avec lui.

« Alors, Hastwyck, t’en fais une tête! » clama le lord en riant. « Qu’on lui serve à boire, par les Sept, haha! Et nous aussi! »
Jolan sourit et but de bon coeur, accompagné du lord, de Kieran, de Béric et Tristifer aussi qui leva son verre sans tourner la tête.

Beric Vigilance 3D : 3+5+2 = 10
Aleth Vigilance 3D : 6+1+6 = 13
Jolan Vigilance / Observation / Empathie 3D+1B : 3+5+5(+2) = 13
Gareth Ingéniosité (mémoire) 3D : 6+3+1 = 10

Aleth et Jolan percurent chez Gareth un changement d’attitude. Il avait cessé de hocher la tête à ce que disait Tristifer -toujours entre deux coups de fourchettes ou une rasade- pour se tourner lentement vers le pupille. Le visage du troubadour venait de s’assombrir…

Aleth était à table avec les autres, mais les conversations concernaient surtout les hommes présents, et sa mère était là pour s'assurer qu'elle et Lysanor filent droit. Elle était donc en mode protocolaire, avec fonction écoute et observation... seules choses qu'elle pouvait faire en plus...

Gareth n'avait pas l'air content ?...

" Meilleur musicien qu'espion ? Ce qu'il a trouvé ne suffit sans doute pas pour satisfaire Tristifer. "

" Pourquoi regarder Jolan ? Il est impliqué ? Qu'est-ce qui ne va pas ? J'ai raté quelque chose ? "

Attablé avec les autres convives, Béric continuait de discuter de ce sujet brûlant avec Kieran Orell : la milice Castellane. Il y en avait beaucoup à dire, et encore plus à faire...

Lors que le seigneur leva son verre, il l'accompagna mais ne but qu'à demi-gorgée pour garder toute la cohérence dont il avait besoin dans son débat actuel.
Aussi, occupé dans sa discussion, il ne remarqua aucun mouvement particulier et continua sa discussion.

Gareth partageait donc les maigres informations obtenues avec Tristifer en profitant du repas. L'entrepôt était déjà une fort belle piste en soi, à n'en point douter... Cela n'était sans doute pas assez beau pour le noble, mais ce dernier n'était jamais satisfait, de toute façon : il faudrait probablement lui amener le trône de fer sur un plateau pour le combler pleinement ! Et encore...

Quelque chose détourna l'attention du ménestrel : un nom, prononcé au hasard d'une conversation... Hastwyck. Il vit alors celui qui le portait...

Mon pauvre, les corbeaux volent autour de toi,
Prépare-toi à connaître l'effroi...

Voilà que, même dans ces circonstances, l'envie de composer lui prenait... Pouvait-il seulement aborder ce qu'il avait vu et entendu devant toute l'assemblée ? Ce n'était sans doute pas sage...

Jolan venait de laisser de côté ses préoccupations pour profiter de l'attention chaleureuse que lui portait lord Rheomar, mais bien vite, il constata que son nom n'avait pas laissé indifférent le ménestrel. Il prit alors quelques secondes pour repenser au dernière fois qu'il avait été en présence de l'homme ... a bien y repenser, il était vrai que son nom n'avait pas été cité devant lui, seul son prénom avait été exprimé, et peu de chance que quelqu'un ait parlé de lui au château quand le ménestrel avait été introduit.

Mais après, ce n'était pas le premier à faire mauvaise mine au son de ce nom comme s'il sentait plus mauvais qu'un putois. Mais quelque chose persista dans ses pensées. Cet air sombre ne semblait pas celui celui du dédain dont il était accoutumé, il semblait y avoir quelque chose de plus profond, il se demanda alors quel lien il pouvait bien y avoir entre sa maison et Gareth Waters ... Un graine venait de se planter dans son esprit, et grandissait à présent comme une mauvaise herbe s'insinuant dans les moindres recoins ... le ménestrel était un voyageur ... aurait-il croisé la route de son frère par le passé ... si les Sept avait mis sur son chemin le dernier homme a avoir vu son frère disparu ?

Folle idée, il tenta de la chasser en avalant une autre gorgée de vin, mais il n'allait pas être si simple de se débarrasser de ce chien-dent. Irrémédiablement, son regard revenait régulièrement sur ce Waters dont il finit par croiser le regard dont il ne décrocha pas.

Rhéomar écoutait d'une oreille distraite son frère cadet qui, comme à son habitude, voulait tout et son contraire, à commencer par se débarrasser de Lyndal Flowers tout en ayant un marché productif.
Mestre Corvin soupira discrètement et son regard croisa celui de lady Aleth et il esquissa un bref sourire, avant de se rendre compte qu'il se passait quelque chose.

Une autre personne avait du remarquer comme quelque chose de pesant dans l'air : Dame Guenièvre informa Jared et Lysanor qu'il était l'heure de se coucher et elle se leva pareillement.

"Bonne nuit, que les Sept vous gardent" dit-elle en quittant la table avec les enfants. Elle lança un rapide regard serein à Aleth.

Enfin, Gareth vit le regard de Jolan Hastwyck plongé dans le sien et comprenait que celui-ci avait remarqué sa réaction. La jeune lady attendait et les regardait tout deux. Le silence prit le pas et finalement tout les regards se tournaient désormais vers le troubadour...

La soirée se déroula sans encombres. Gareth aurait aimé la voir plus joyeuse, mais entre son enquête et les derniers événements, il n'avait pas le cœur à l'être.

Un comble, quand on était un ménestrel comme lui ! Qui voudrait d'un troubadour triste pour égayer ses soirées ? Autant engager une Sœur Silencieuse comme jongleuse...

Les convives quittèrent peu à peu les lieux. Il ne resta bientôt plus que quelques personnes, dont Hastwyck et la très aimable lady Aleth.
Ces derniers le regardèrent, ce qui ne le surprit guère. Comment pouvait-il en être autrement avec la tête qu'il devait avoir ?

Il hésita un moment en plongeant son regard dans ceux des deux autres personnes. Il ne voulait pas jouer l'oiseau de mauvais augure, mais avait-il le choix ?
À la place du fameux Hastwyck, il aurait aimé savoir si on le cherchait. Il devait donc lui révéler la vérité... Il prit une profonde inspiration et prit la parole :

"On vous cherche, Hastwyck. Des types vêtus de noir à l'air patibulaire... Je ne sais pas pour vous, mais quand j'entends parler de types avec ce genre de description, ça signifie qu'on va avoir l'occasion de voir du pays et de faire un petit tour dans le Nord pour s'occuper d'un Mur, tout ça pour quelques sauvageons et des monstres qui n'existent que dans les contes de vieilles femmes...

J'ignore l'histoire de votre famille, mais je pense que vous avez intérêt à faire preuve de discrétion, sauf si l'idée de perdre votre virilité à cause du gel ne vous dérange pas."

C'était tout lui, ça : même quand il annonçait le pire, il devait essayer de briser la gravité des faits avec légèreté et un humour généralement peu subtil...
Au fond, n'était-ce pas d'ailleurs son devoir de ménestrel de faire en sorte de rendre ce monde moins sombre par tous les moyens possibles ?

Le choc fut brutal, d'espoirs illusoires il sombrait d'un coup dans le gouffre de la terrible réalité. Il crut à cet instant sentir un vent glacial s'engouffrer dans ses entrailles, et les lumières vacillantes des candelabres se ternir ... le Mur ... seul un murmure sortit de sa bouche trahissant son anéantissement :

"... la Garde de Nuit ...."

La peur fit bientôt place à une colère grandissante, pourquoi les corbeaux étaient-ils à sa recherche ... son Père, ce ne pouvait être que lui, il avait dû leur promettre son recrutement ... si c'était vrai c'était si pitoyable comme comportement ... mais les raisons d'un tel acte semblait si évidentes que ça le rendait malade ...il lui fallait prendre l'air.

Reprenant contenance, il se servit un nouveau verre, le saisit et déclara après avoir embrasser du regard les derniers convives, s'arrêtant finalement sur Gareth :

"Eh bien que dire de plus ... l'Hiver vient ... " sur quoi il se redressa, leva son verre pour un toast, puis l'avala d'une traite.

Se tournant vers Rheomar "Si vous voulez bien m'excuser, je vais prendre congé ..." Saluant avec politesse d'un signe de tête les gens présents, sauf réaction contraire de quelqu'un qui chercherai à le retenir, Jolan quittera la salle pour trouver un coin tranquille. Direction les jardins où il pourrait trouvait le calme nécessaire pour réfléchir.

Bien sûr, n'importe quel personne influente dans le Bief pourrait avoir diriger les corbeaux vers l'indésirable Hastwyck ... ce ne serait pas une grosse perte, ce serait comme désherber le beau jardin qu'était le Bief ... mais il ne parvenait pas à accepter cette option, son père semblait le coupable idéal, il en avait toute les raisons, que demander de plus que de voir disparaître son fils indigne à l'autre bout de Westeros, le plus loin possible ...

Encore en pleine discussion, Béric ne s'arrêta que lorsqu'il remarqua le silence s'appesantir dans la pièce.
A peine avait-il entendu les enfants se retirer et leur mère...

Puis, il reporta son attention vers le centre de la pièce où le menestrel se tenait. Il l'entendit prononcer ses paroles et fixa ensuite du regard Jolan.
Qu'avait-il donc fait pour que les Corbeaux le recherche ?

Gardant le silence, il n'ajouta aucun mot devant cette situation qui était somme toute ... épineuse.

Rappel : seul Dame Guenièvre, Jared et Lysanor sont sortis de la grande salle

"Qu'est ce que c'est cette histoire? Et toi, Jolan, restes là. Waters. Sois plus précis : qui cherche qui?"

Lord Rhéomar avait changer d'expression en un clin d'oeil, comme s'il n'avait jamais ingéré plusieurs godets de vins entrecoupés de bière.
Le seigneur de Castellane n'avait pas bougé de son large fauteuil. Mais tous présent avaient le sentiment qu'il s'était levé, comme pour repartir en guerre.

Son ancien compagnon d'armée, Kieran Orell en fut bouche ouverte puis regarda le ménestrel, d'un regard qui disait

Parles mon gars. Et évites de louvoyer.