TdF - Chap. 0.2 - Le lierre sur la tour vieille tour

MJ DukeTogo
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Iris
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TdF - Chap. 0.2 - Le lierre sur la tour vieille tour

Message : # 47847Message Iris
23 oct. 2015, 21:08

Le cahier était épais, doté d'une belle couverture de cuir souple aux reflets tirant sur le prune. Une longue lanière assortie en faisait le tour et le fermait en s'attachant autour d'un bouton métallique doré. Ouvert, il révélait des feuillets de papier de qualité, adapté à l'écriture et au dessin. Toutes étaient encore vierges. Ces étendues blanches étaient comme la lumière du jour nouveau, éblouissant et inconnu, riche de rêves à venir. C'étaient pourtant dans l'encre des les espoirs incertains et des souvenirs mélancoliques qu'elle plongeait sa plume.

Aleth l'avait acquis à Villevieille peu avant de revenir à Waterford, charmée par l'idée d'avoir un carnet de voyage.

Retrouvant son foyer, le redécouvrant avec un sentiment de familiarité et d'étrangeté, elle l'avait oublié dans l'euphorie première. Ses retrouvailles avait été joyeuses avec le séduisant Jolan, lui qu'elle avait tant aimé, pour toujours associé à l'image des roses qu'il chérissait. Waterford, son château, ses jardin, ses campagnes, sa petite ville, son port... tout la ravissait. Elle avait été si heureuse de pouvoir échanger de nouveau avec Mestre Corwin, flattée de la confiance qu'il lui accordait et des risques qu'il prenait pour qu'elle puisse étudier à loisir les documents relatifs à l'intendance du royaume. Elle avait été si fière de revenir avec son modeste savoir fraîchement acquis à l'hospice de Villevieille, impatiente de le mettre en pratique. Waterford était un domaine bien modeste par rapport à l'antique cité populeuse. Elle était convaincue alors de pouvoir tout changer, forte de ces préceptes étudiés avec zèle.

Trempant la plume dans l'encrier, elle commença à écrire.
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Iris
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Chapitre 6 - JOUR 01 - Cher Dugal

Message : # 47851Message Iris
23 oct. 2015, 22:36

Cher Dugal,

Depuis le silence et le lointain, entends-tu les pensées comme les Sept reçoivent nos prières ? La nuit doit appartenir à l’Étranger et à l'Aïeul pour qu'ils libèrent les ombres et murmurent les secrets. Dans ces heures du rêve, les chimères prennent substance et s'animent. Je galope avec la chasse sauvage, les cheveux libres dansant au gré de la tempête et les ténèbres sont nôtres. Au cœur des forêts impénétrables, sorcières et morts se rejoignent en un bal macabre. Têtes tranchées sur le banquet et armes brisés parmi les couverts. Ceux qui ouvrent les plaies, celles qui les recousent chantent en chœur. Un peu plus loin se trouve une source qui s'écoule jusque dans un bassin. La lune se lève, pleine, éclatante de sa blancheur argentée. Je me mire dans son miroir et je plonge les mains. La surface se ride et mon reflet m'échappe.

C'était moi. Ce n'était pas moi.

Tout était exactement l'inverse. Une vision fugitive. Un avenir qui avait été promis et dérobé.

Plongeant dans l'eau, je voudrais effleurer encore cette évanescence. Au plus profond de l'ombre, j'ai vu ton futur qui n'aura jamais été. J'ai retenu ma respiration aussi longtemps que je le pouvais jusqu'à me noyer de chagrin. L'eau était aussi salée que nos larmes.

Laisse-moi conter la vérité : ce qui aurait dû être.

Cette embuscade funeste, tu fus l'un des bienheureux survivants grâce à l'aide de Béric Kardalt et combattant aux côtés de Willos Tyrell. Vous prîtes Pyk et célébrèrent la victoire au cours du tournois qui s'ensuivit. Tu devins "Ser" grâce à ces hauts faits. Jalane Negrebar et même son irascible père se réjouirent de la gloire qui rejaillissait aussi sur la Maison de Bandallon. Votre mariage ne tarda pas et fut célébré dans le septuaire de Waterford. Des années plus tard, tous se souvinrent du faste des festivités et étaient fiers d'être au service de notre maison. Toi-même attaché à ton seigneur, tu eus fort à faire, partageant ton temps entre Waterford et Hautjardin. Tout le monde s'est toujours entendu à reconnaître à quel point tu étais d'une heureuse nature, l'un de ceux qui se font facilement des amis. Certes, parmi eux, certains voyaient au travers de toi un moyen de s'élever au plus près des maîtres du Biefs, mais tu agissais avec sagesse et intelligence. Même Mère ne pouvait manquer de sourire et se réjouir. Jalane eut jusqu'à ce jour deux enfants et sans doute d'autres à venir. Lysanor trouva des camarades de jeu, tes amis ayant eux-mêmes des enfant. Elle grandit entourée de joie et de fêtes, apprenant à chanter avec enthousiasme. Jared était bien sûr un peu distrait, mais il était heureux de vivre dans une maison unie et sans que personne ne lui demande d'apprendre le combat, un seul chevalier suffisant. Tristifer finit par revenir mais dut se contenter, bon gré, mal gré, d'une place d'intendant, borné d'un côté par notre père et de l'autre par toi, l'héritier que tous attendaient. Notre oncle développa le projet d'une grande alliance des seigneuries maritimes du Bief : Waterford, Bandallon, Noircouronne, Sunhouse, Trémière. Nos mariages à Jared et moi, prirent forme dans son esprit pragmatique. Lady Bulwer et Ser Emmon Cuy n'étant pas les plus mauvaises personnes, pourquoi refuser des unions si profitables ? Cette ligue des mers plaçait les Castellane au centre d'un puissant dispositif et ton amitié avec Willos Tyrell ne pouvait que la renforcer. Notre maison s'élevait en même temps que ton nom devenait l'un des plus illustres de notre lignée.

A bout de souffle je suis revenue à la surface.

Il faisait toujours nuit mais il n'y avait plus aucun écho de fête et j'étais seule. Je suis tout le temps seule. Trempée et presque nue, j'étais glacée, contemplant le miroir des espoirs brisés de toute une famille. L'eau cessait de s'agiter et redevenait plane, comme si jamais rien ne l'avait troublée. Je me voyais de nouveau et ce visage était celui d'un monstre. Une créature de cauchemar, de celles qui se nourrissent des malheurs des autres. Oiseau de proie et charognard, mi-corbeau mi-sorcière.

Si tu avais vécu, je n'aurais peut-être jamais étudié à Villevieille. Même alors, aurais-je appris la médecine? Jamais l'on ne m'aurait autorisée à me rendre à la Trémière avec Jolan et Béric. Le soldat de la Trémière serait mort. Vos deux vies en balance, je ne doute pas du choix qui aurait été fait. A côté du soleil de tes talents, je n'ai guère plus d'éclat qu'une pâle lune. Mes avis auraient pesé autant qu'une plume face à une épée. M'exposer aurait été inutile, de sorte que j'aurais passé mon existence à attendre qu'on me présente un fiancé acceptable. Peut-être même me serais-je réjouie dans l'ignorance que je pouvais vouloir et désirer.

Tout ce temps, j'ai fait mon possible pour te remplacer, pour compenser ton absence. Rien n'y a fait. Je ne suis qu'une femme. Si j'avais été un homme, mes efforts auraient pu avoir un sens, mais venant de moi, ils demeurent pathétiques.

Des plumes noires poussent sur mon visage et du lierre se mêle à ma chevelure. Cette soif de liberté me brûle les lèvres. Je n'y ai goûté que parce que tu es mort. C'est ton sang que j'ai dans la bouche. Je crois que je pourrais tuer pour plus de liberté, pour pouvoir choisir.

Pardonne-moi. Ta mort a plongé tous ceux que nous aimons dans le malheur, mais elle m'a donné l'opportunité d'exister.


Hedera
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Iris
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Jour 01 - Lettre à Jack Bulwer

Message : # 47878Message Iris
25 oct. 2015, 22:43

Cher Jack,

La nuit est tombée. Ses ténèbres d'encre fondent ensemble les silhouettes des arbres et les ailes des rapaces. Un hibou lance sa plainte dans le silence. Quand je regarde dehors chaque nuit, je me demande à quoi vous êtes occupé, où vous êtes et quels périls vous encourez au service du blason noir qui est devenu le vôtre.

Ces étranges brigands de la Confrérie de la liberté et vous partagez une curieuse forme d'honneur qui force l'admiration, et une liberté que je vous envie. Vous êtes liés par un serment qui ne ne vous libèrera qu'à votre mort, quand ils se sont engagés sur une voie qui leur coûtera tôt ou tard la vie, au combat ou au bout d'une corde. Au-delà de ce destin tragique que vous avez embrassé, je vois le choix que vous avez fait. Vous avez refusé le chemin tout tracé qui s'offrait à vous. En dépit du jugement de ceux qui vous entouraient, indifférent au mépris que l'on associait à vos idéaux, vous avez eu le courage de prendre une décision qui a radicalement changé votre existence. J'aimerais avoir la même force.

A force de persuasion, j'ai obtenu de Père l'autorisation d'apprendre le maniement des armes. J'enrage de ne pas avoir commencé plus tôt, il me faudra des mois pour avoir un niveau tout juste convenable. Je n'envisage pas de parvenir un jour à la cheville de combattants émérites comme Béric ou vous, mais j'espère bien en apprendre suffisamment pour faire face la prochaine fois que des brutes sans envergure s'en prendront à moi. Je veux être capable de tenir en respect mon adversaire. Par dessus tout, je répugne à être une victime : subir sans avoir d'autre espoir que d'être sauvée par un guerrier opportunément bien disposé à mon égard. Personne ne peut être libre s'il est incapable de défendre lui-même ses droits.

J'aimerais beaucoup vous revoir... vous êtes le seul homme que je connaisse à pouvoir comprendre mes motivations et, surtout, à être susceptible de les approuver. Chaque action, chaque demande, chaque parole que je prononce est pesée et jugée par mon entourage. Suis-je suffisamment digne ? vertueuse ? sage ? modeste ? ... Combien de fois ai-je dû hocher la tête en silence alors que je brûlais de l'envie de hurler ? Le seul moyen pour moi d'agir, corsetée comme je le suis, est de chercher les failles, les faiblesses, les portes de côtés. Il m'est interdit de m'avancer franchement pour enfin m'exprimer librement. Muselée, il n'y a que dans le tracé de l'encre que je peux être telle que je me vois.

Une idée, teintée d'espérance, m'a effleurée. J'imaginais soudain que vous pourriez être à Rubriant. Entre les voleurs venus détrousser les badauds, les contrebandiers livrant leur vin et les concurrents malheureux du tournois, vous pourriez avoir fort à faire. Je demanderai après vous, un Garde de Nuit ne passe pas inaperçu.

Si vous ne revenez pas pour moi, songez à nos brigands qui vous attendent dans nos geôles ! Tous soignés, bien nourris, aptes au maniement des armes. J'ai dû négocier avec mon oncle pour épargner leur vie. Je souhaitais que vous ayez un bon souvenir de votre visite à Waterford. Dans l'attente de votre venue, j'ai préparé à votre intention deux cadeaux... mais la réaction du ménestrel Gyles ce soir me fait douter. Il n'est pas le seul à me rappeler mon âge à toute occasion, une manière bien commode de disqualifier ma volonté, réduite à n'être que caprices d'enfant. Je me retrouve à présent à douter : que voyez-vous quand vous me regardez ? Me direz-vous aussi que j'ai tort, que je ne devrais pas parler de ce que je ne connais pas ? Vous prendra-t-il l'envie de rire en m'entendant ?


Je prie l’Étranger de veiller sur vous pendant encore longtemps,

Portez-vous bien,


Hedera
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Iris
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Jour 02 - Tristifer

Message : # 47915Message Iris
26 oct. 2015, 22:52

Cher Tristifer,

Nous voici à la veille du commencement du tournois et d'un problème épineux à résoudre : l'inscription de Béric. Je suis fort aise que la notre Maison m'ait confié la tâche de m'assurer de sa participation, mais je me pose tout de même quelques questions.

Je m'interroge sur vos motivations et votre soudain engouement pour ce tournois.

Cette attitude est tellement contraire à tout ce que vous faites et proclamez en temps normal, qu'il s'agit en soi d'une étrangeté. Cette manière soudaine de changer d'avis et d'être favorable à des dépenses qui ne correspondent pas à votre notion d'investissement me rappelle une autre bizarrerie : la manière dont vous avez présenté à Mestre Corwyn tout l'intérêt de l'installation d'une école à Waterford. Entendons-nous bien : j'approuve tout autant la réparation du toit du septuaire que l'ouverture d'une école, la traque des brigands de nos terres ou le développement de marais salants.

Ce qui m'inquiète en revanche, c'est la source de vos motivations. Si elles étaient susceptibles de venir du fond de votre cœur tourmenté, je me réjouirais sans réserve, mais je crains que cela ne vienne d'ailleurs.

Dans le cas de l'école, je suis à peu près prête à parier que Rose Seldon, l'épouse de notre prévôt, aime suffisamment ses enfants tout en étant assez ambitieuse à leur sujet, pour être prête à n'importe tout pour les favoriser. Elle est belle et ment bien. Je l'imagine sans peine avoir été effrayée après la scène que vous avez fait (certainement injustement) à son époux en l'accusant de détournements de bien public, vous défoulant sur lui simplement parce que vous ne parvenez pas à réduire la contrebande. Rose Seldon a la tête froide, cela lui ressemblerait bien de se rapprocher de vous pour jurer de l'attachement inconditionnel de sa famille à notre maison. Vous êtes certainement intelligent, mais vous pouvez aussi vous comporter comme un idiot quand vous sous-estimez votre interlocuteur. Je ne serais pas étonnée que Rose soit allée jusqu'à payer de sa personne pour vous démontrer sa loyauté et promettre un dévouement accru de son époux, du moment que ses enfants pouvaient bénéficier d'une bonne éducation. Une école est un investissement, quelque chose que vous pouviez admettre.

Mais qu'en est-il du tournois ? Rose n'a strictement aucun intérêt à ce qu'on procède à des dépenses somptuaires : au contraire, cela retarde ses chances de voir l'école ouvrir ses portes, le Mestre et un Septon y enseignant alternativement (et pourquoi pas Gyles, il semble après tout très attaché aux enfants en général). Qui a bien pu vous mettre dans la tête qu'il était de votre intérêt de faire exactement le contraire de à quoi vous êtes naturellement porté ? La seule personne suffisamment forte que je peux imaginer à Waterford serait Dame Adrienne (ou une de ses "protégées", mais je les imagine mal agir de manière indépendante avec une patronne aussi redoutable).

Pourquoi porter mes soupçons vers elle ? Comme toujours, je manque d'informations directe : je crains que personne ne m'en donne jamais... et si cela arrivait, j'en viendrais à craindre une tentative de manipulation !

Lorsque j'ai discuté avec Dame Adrienne au septuaire, elle s'est étonnée de ma requête, mais surtout, elle a plaisanté en disant qu'au château on croit que je rêve de chevaliers sur leurs blancs destriers. Qui donc pouvait habiter au château, se tromper tant sur moi tout en croyant me connaître ? Qui pouvait trouver une raison de parler de moi ? Je ne crois pas que Père aurait une manière aussi dépréciative de parler de moi. Béric me paraît faire suffisamment d'efforts pour supporter stoïquement de devoir m'enseigner l'escrime, il ne me qualifierait certainement pas de gentille petite chose inoffensive ; pas plus que Jolan qui me connait assez pour ne pas imaginer des bêtises pareilles. Par élimination, il ne restait plus beaucoup d'hommes de la Maison Castellane ayant les moyens de se payer les services de la "Maison de la Jouvencelle". Si je nourrissais encore des doutes quant à la manière dont vous me voyez, mon oncle, il me suffirait de me rappeler que vous avez une fâcheuse tendance à me traiter en enfant. Douée certes, utile par moment, à défaut de mieux, mais votre estime s'arrête là.

Mon oncle, je pense que vous êtes client de Dame Adrienne et qu'elle a réussi, j'ignore comment, à vous subjuguer de sorte que vous modifiez totalement vos vues quant à ce tournois.

Il y a là un motif sérieux d'inquiétude : une personne extérieure à la Maison Castellane y dicte sa volonté, influençant notre politique. Si encore je comprenais ses motivations, je trouverai la situation moins préoccupante. Je trouve ainsi la démarche de Rose Seldon, quoique amorale, assez compréhensible et donc acceptable. Dame Adrienne en revanche, joue à un autre niveau. Ses coups sont sans doute mûrement réfléchis et prévus à l'avance.

Mais que peut-elle bien espérer ? Agit-elle pour elle-même ou est-elle un agent de puissances installées à Dorne ? Faut-il craindre que nous soyons les pions d'intérêts étrangers ? Si l'on examine notre situation d'un point de vue extérieur, nous sommes une cible assez facile à atteindre car peu puissante et désorganisée depuis la mort de Dugal. Nous avons également du potentiel : vassaux direct des Tyrell, nous sommes très largement autonomes et bien placés géographiquement, au milieu d'une route de contrebande. Un agent dornien pourrait dès lors agir depuis Waterford en utilisant l'animation du marché pour contrôler l'action de ses autres agents. La discrétion associée à une maison de tolérance permet de dissimuler toutes sortes d'activité sous couvert de respect de la confidentialité de ses clients. Si j'ai raison, il y aura peut-être des traces dans les allées et venues des navires, dans les registres du port. Malheureusement, l'absence d'indice de ce côté peut simplement signifier que les courriers ou les agents porteurs d'instructions (ou en recevant) sont assez prudents pour ne pas se signaler trop régulièrement.

Que pourrait gagner Dorne à ce qu'un maître d'arme dornien s'illustre dans un tournois ? La réponse est-elle dans le gain direct au tournois ? ... ou bien dans les circonstances que le tournois crée pour avoir d'autres opportunités ? Dans le premier cas, Dame Adrienne aurait besoin de notre victoire ; dans le second cas, d'autres choses se trament et les coïncidences sont à examiner avec attention.

Voyez-vous mon oncle, je crains que vous manifestiez parfois des vues bien courtes en ne vous interrogeant pas sur les personnes les plus dangereuses parmi vos fréquentations. Êtes vous vraiment naïf à ce point ? Le fait que Dame Adrienne ait plaisanté vraisemblablement à votre sujet m'incline à penser qu'elle le pense.

(...)
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Jour 02 - Tristifer (suite)

Message : # 47916Message Iris
26 oct. 2015, 23:20

(...)

En l'état, il m'est impossible d'aller plus loin dans mes spéculations. Il me faut en apprendre davantage pour avoir une chance de confirmer ou infirmer mes idées.

En attendant, je me suis engagée auprès de Béric pour l'aider à obtenir son inscription au tournois. Mais à présent je me pose des questions : j'ai défendu le désir de Béric auprès de Père, qui l'a vu comme une récompense de ses services. Cela me paraissait juste d'appuyer les vœux d'un serviteur loyal de notre Maison. Si j'ai raison à propos de Dame Adrienne, elle a indirectement eu besoin de moi pour porter l'inscription au tournois. Connaissait-elle auparavant le désir de Béric et a-t-elle su saisir l'opportunité qui se présentait ? Béric me paraît incapable de manipulations. Mais je me rappelle d'une impression étrange que j'avais eu en parlant avec Dame Adrienne : je me demandais l'espace d'un instant comment des hommes si fiers, tels que vous, Tristifer et Béric, se comportaient face à elle. Dans votre cas, mon oncle, je pense avoir une idée assez juste de votre vulnérabilité. Elle m'amène malheureusement à m'interroger sur la fragilité éventuelle d'autres membres de notre Maison.

M'étant engagée à défendre l'inscription de Béric, et même si je soupçonne que cette action peut entraîner des conséquences que je n'apprécierais sans doute pas, je ferai de mon mieux. Mais je resterai, Ô combien vigilante.

Il reste, mon oncle, que vous n'êtes qu'un piètre agent diplomate et si mes soupçons sont fondés, le seul point positif pour notre marionnettiste de Waterford, est que vous ayez dénoué les cordons de la bourse du domaine : tout le reste me revient désormais. La situation que vous me laisser n'est pas évidente. J'arrive en terrain inconnu, sapé d'anciennes rancœurs.

A Noircouronne on nous prit pour des contrebandiers. A Trémière nous étions mal accueillis. Chez les Tyrell, le Sénéchal nous a à peine regardé malgré la gravité du problème que nous lui soumettions. Chez les Harte, les flèches pleuvaient des arbres, il manquait des chambres, l'épouse avait comploté l'assassinat de l'aîné de son époux. Ce serait agréable d'être bien accueillis quelque part pour une fois !



Nous verrons bien demain,


H.
Dernière modification par Iris le 11 nov. 2015, 16:45, modifié 2 fois.
Raison : Le MJ m'ayant coupé l'herbe sous le pied, je ne vais pas garder des projets qui ne peuvent être accomplis (à se demander sinon pourquoi le perso change d'avis ^^)
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Jour 02 - Jared Castellane

Message : # 48023Message Iris
29 oct. 2015, 20:52

Cher Jared,

Voilà près de trois mois à présent que je suis revenue de mes séjours successifs chez notre grand-père Lord Risley et au grand septuaire de Villevieille. Mon éloignement aura duré près de deux ans et aujourd'hui tu es proche de tes quatorze ans.

Quatorze ans... Cela signifie que ton éducation prendra un tournant plus sérieux et que l'on attendra de toi que tu incarnes pleinement le rôle de l'héritier de notre Maison. Nos statuts qui furent longtemps égaux vont se transformer en profondeur. Tu seras le porteur de tous les espoirs des Castellane. Tu devras savoir tenir une épée, monter à cheval et t'entendre à l'intendance de notre domaine ainsi qu'à la politique pour pouvoir défendre nos intérêts avec sagesse.

Tu es mon frère et j'espère le meilleur pour toi.

Mais parce que tu es mon cadet et que tu sors de l'enfance tandis que je me bats pour être reconnue pour mes capacités, je te regarde avec le sentiment doux-amer de celle qui n'aura eu qu'un rôle éphémère comme représentante de notre Maison. Bientôt tu me remplaceras et je devrais l'accepter avec humilité. Dans ces moments où je comptes les années... les mois... avant que tu ne me supplante, je ne peux m'empêcher de voir en Tristifer mon reflet : un homme qui ne peut hériter mais qui est convaincu de pouvoir faire mieux que celui qui a le pouvoir de droit. Combien de fois je me suis demandée ce que serait ma vie si j'étais un homme... je crois... je crois qu'il n'y a que le plaisir de porter de belles robes et coiffures que je regretterais à changer de genre ! A mon avis aucun homme ne renoncerait à l'avantage de sa naissance pour cela. Je ne peux changer mon sexe à force de volonté, il me faut donc accepter ce que je suis.

La convoitise nourrit le chaos : s'abandonner à son avidité ne peut que nuire à tous. Je me dois de me modérer et brimer mes ambitions.

Dans tout cela, le plus dur est d'entendre Père me dire qu'il espère que je resterai vivre avec mon époux à Waterford et que tu auras la "sagesse" de m'accepter comme conseillère. Je souris et remercie d'une révérence le compliment tout en pensant : "Ô Père, à quel point vous vous aveuglez. Cela ne sera jamais." Comment lui dire que son espoir d'une famille unie à l'image de ce qu'elle est ne pourra être ? Je ne pense pas que notre famille soit pour autant vouée au malheur, simplement je doute d'y avoir ma place dans les années qui viennent.

Soyons lucides, Jared.

Quand Père mourra, tu auras comme conseiller à la fois Mère, qui est plus proche de toi que de moi ; et Tristifer (si son abus de vin ne lui cause une cirrhose ou une attaque de goutte...). Cela fera déjà deux conseillers très intéressés à la gestion du domaine et de sa politique. Tu te marieras et je doute que ton épouse se contente de regarder. Cela fera déjà deux femmes dans ton entourage proche qui t'influenceront. Quel crédit aurais-tu à écouter en prime ta sœur ? Nous vivons dans une société qui valorise les vertus mâles et fait mine d'ignorer l'intelligence des femmes. Tu n'es pas un guerrier passionné de tournois : être entouré en sus d'un conseil féminin ne pourra que te nuire. L'on peut admettre le rôle d'une mère ou d'une épouse, mais une sœur en plus ..?

Quel que soit mon avenir, il ne sera pas dans le même domaine que toi.

... Tristifer et moi occupons déjà sensiblement le même espace : l'intendance et la politique de l'ombre. Nous ne cohabitons que parce que notre oncle m'estime insignifiante et ponctuellement utile (il ne peut être partout à la fois).

Mon temps est compté. Peut-être deux ans, guère plus plus.

Je ne sais pas ce que je dois faire. Rester à l'affût des opportunités certainement. Apprendre tout ce qui est possible dans ce temps limité pour augmenter peut-être le panel de mes choix ?... Ce décompte m'effraie par moment, à d'autres il me donne de la force.


J'espère que tu sauras trouver de l'intérêt pour les affaires de notre Maison et te nourrir de l'exemple de notre père,


Sois un homme avisé et juste, tu me consoleras de n'avoir pu régner à ta place,



H.
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Jour 02 - Torman, Ulric et Wulfgar

Message : # 48033Message Iris
30 oct. 2015, 23:46

Chers hiboux dépenaillés,

Vous n'avez rien dit de notre rencontre à Wulfgar, vous ne lui avez pas révélé qui avait donné les remèdes et les conseils pour les utiliser. Si vous avez gardé le silence devant un ami pour lequel vous craigniez tant, sans doute n'avez vous pas davantage parlé à vos autres compagnons.

Personne ne m'a vraiment interrogée quant à ce qui s'était passé. Sans doute la raison est-elle le combat qui venait d'avoir lieu et qui n'avait eu une issue heureuse que de justesse. Ma conversation avec deux hiboux dépenaillés était en comparaison sans grande importance. Seul comptait que j'en ai réchappé... que je n'ai pas causé de nouvelles complications par ma vulnérabilité.

A mon retour, après un récit pourtant sommaire, Père m'a admonestée à me rappeler que les brigands et les gardes de nuit, n'appartenaient pas à notre monde, quelles que fussent par ailleurs leurs qualités morales. Mais notre devise n'est-elle pas "Plus d'honneur que d'honneurs" ? Elle s'applique aux individus quelle que soit leur naissance et peu importe les choix qu'ils ont fait, du moment qu'ils sont intègres, respectant les valeurs auxquelles ils croient. Quand je vois des brigands agir avec honneur et des chevaliers distingués être prêts aux pires bassesses, comment puis-je encore croire en nos lois qui distinguent le bien du mal, le juste de l'injuste ?

Ces questions remettent en question l'ensemble de l'ordre social.

J'ai tu mes doutes.

Mais vous, pourquoi n'avez vous rien dit ? Craigniez-vous que l'on se moquât de ces brigands renonçant à une rançon pour défendre la réputation de modération de leur bande ? Était-ce si humiliant de ne pas m'avoir fait prisonnière ?

Si jamais je nourrissais l'illusion que vos bande de bandits vaudrait mieux que les chevaliers, elle est morte au moment où cet archer, l'un des vôtres, s'efforça avec acharnement de me tuer. Il agissait en tueur à gage, payé de 10 Couronnes pour se débarrasser de moi. Je ne sais toujours pas qu'en penser. Pourquoi me craindrait-on ? J'ai retourné le problème en tous sens, sans pour autant lui en trouver.

Combien j'aurais aimé que Cecily et Wulfgar fissent preuve de modération ! Ensemble ils ont tué ma seule piste ! Je n'ai que ces maudites pièces d'un roi Targaryen qui n'a régné que peu de temps. Que dois-je en faire ? La menace existe-t-elle toujours ? D'où vient-elle ? Pourquoi ? Ma dernière hypothèse encore en course ne me semble guère meilleure que celles qui l'on précédées. J'aimerais vous la conter et avoir votre avis, à vous qui vivez comme sous la surface et dans les ombres... Peut-être sauriez-vous me dire si je me trompe de nouveau du tout au tout ?..

Tout s'est décidé très vite. Un proche du Lord Sénéchal Tyrell a appris la déposition que nous avions faite au sujet de la présence d'hommes portant des manteaux d'or dans leur équipement et impliqués dans une tentative d'enlèvement sanguinaire. Cet homme certainement, est un espion lié aux commanditaires de ce coup de force. Peut-être est-il leur principal agent dans le Bief ? Pour une raison que je ne m'explique pas, il a pris peur. A-t-il cru que nous en savions plus que ce que nous disions ? Toujours est-il qu'il aura puisé en urgence dans les coffres des Tyrell, de préférence dans un coffre peu usité, de façon à ce que la ponction passe inaperçue. Un agent de ce maître espion est parti nous espionner, s'assurer de notre route en interrogeant nos gardes, puis est allé avertir l'assassin. Je suppose que ce dernier était lui-même un agent infiltré chargé d'espionner la Confrérie de la liberté. La somme de 10 couronnes ne représentait peut-être que la moitié du paiement, l'autre suivant à la confirmation de ma mort. Je suppose qu'il avait prévu de quitter d'urgence la Confrérie de la liberté après, ayant les moyens de commencer une nouvelle vie ailleurs.

Je ne comprends toujours pas en quoi mon décès a pu paraître si important alors que je n'ai même pas été personnellement témoin des échanges avec les supposés manteaux d'or : Béric et Jolan étaient témoins, tout comme Jack Bulwer. Je serais incapable de reconnaître celui qui s'était désigné comme "Ser Prédeaux" si je le voyais !

En tous cas, si cette malheureuse hypothèse toute boiteuse se tient moins mal que je ne le pense, alors il y a à Hautjardin un homme qui craint que je ne puisse l'identifier et qui est prêt à utiliser des moyens expéditifs pour s'assurer que je ne dévoile pas son rôle. Quelle ironie que de songer que c'est précisément en cherchant à m'empêcher d'agir qu'il m'aurait au contraire poussée à m'intéresser à lui alors que je ne soupçonnais pas son existence !

J'aimerais beaucoup savoir pourquoi prendre la peine d'espionner une bande de brigands... même de brigands politisés, défenseur de la dynastie Targaryen comme vous l'êtes. Y'a-t-il un lien avec la mission de l'aîné Hastwyck avant sa disparition ? Il y a beaucoup de Targaryens, vivants ou morts, dans cette histoire. Le rôle ou l'influence de votre groupe sont-ils si importants ? Cherche-t-on à remonter jusqu'à vos soutiens dans la noblesse ? Je n'aurais jamais imaginé qu'une bande de brigand du Bief puisse justifier qu'un espion au service de Port-Réal cherche à connaître vos actions dans la durée.

Soit je suis dotée d'une imagination maladive, soit j'ignore des éléments importants qui me permettraient de simplifier l'équation... soit j'ai raison et il se trame une affaire à la fois importante et étrange.


Si seulement nous pouvions avoir le temps de parler... Malheureusement même si cette opportunité se présentait, je doute que vous connaissiez la vérité, vous ne devez pas être dans le secret, si toutefois il existe...


Portez-vous bien, et de grâce, ne tuez plus les personnes qui pourraient nous donner des informations déterminantes !


H.
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Iris
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Jour 03 - Dame Adrienne

Message : # 48097Message Iris
01 nov. 2015, 22:53

Chère Dame Adrienne,


En découvrant le tournois ici, et en fait tout ce qui l'entoure, je me suis demandée ce qu'une professionnelle des relations telle que vous penserait. Pour ma part je suis partagée, mais l'impression première de sucre et de douceur me fait de plus en plus l'impression d'un glaçage qui recouvrerait un gâteau bien trop crémeux, à la limite de l’écœurement, et surtout bien vénéneux. Peut-être mon sentiment évoluera-t-il dans les heures et jours qui viennent ?.. Peut-être m'habituerai-je à cette comédie ?

Ce matin j'ai rencontré Ser Emmon Cuy pour la seconde fois. Nous nous étions croisé assez peu de temps à la Trémière. Je me rappelle qu'il m'avait regardée avec un sourire dont je ne savais que penser, mais il nous avait aidé en acceptant d'aider les Hastwyck un temps en dépit du tempérament épouvantable de Lord Raynald Hastwyck. J'étais venue le trouver pour demander des nouvelles de Père et Jared qui se trouvent actuellement à la Trémière. Il m'a prise de court en se montrant particulièrement galant, d'une perfection digne d'un roman courtois. J'avoue avoir été vraiment émue et étourdie. Je me suis également rappelée que Sunhouse est une Maison qui me semble être sensiblement du même rang que la nôtre et que Ser Emmon paraît très précisément être ce que l'on peut attendre du bon parti : héritier, Ser, courtois, ...

J'ai commencé à ressentir un malaise à la fin de notre conversation, quand j'ai commencé à comprendre ses allusions, en particulier sa grande joie à comprendre ou deviner que ma "fleur" était intacte. Il n'y a rien qui me donne plus envie de la donner à celui de mon choix, bien avant mon mariage ! Je me rends bien compte que c'est une réaction de pur esprit de contradiction, mais je ne peux m'empêcher de trouver malsain d'attribuer une valeur morale supérieure à une jeune fille qui a été coupée du monde et des tentations. En quoi cela me rend-il meilleure ? Je pourrais tout aussi bien être fragile, prête à céder au premier séducteur venu !

Plus que d'être courtisée et complimentée pour ma bonne mine, mes révérences et ma modération, que je tiens toutes trois de ma mère, j'aimerais être respectée et aimée pour ce qui me rend fière de moi. Plutôt que d'être respectée et désirée de par mon nom et de la dot que je dois tous deux à mon père, je voudrais être estimée et considérée pour ma volonté propre.

Il reste agréable d'être l'objet d'attentions aussi soutenues, mais je me sens vraiment gênée, un peu comme si je m'engluais dans une toile d'araignée : soie et piège à la fois.

Peut-être devrais-je suggérer à Ser Emmon de parler à Gyles ou Béric : nul doute que l'un ou l'autre ne m'idéalisent pas. A leurs yeux je dois être une enfant capricieuse et pénible, une charge qu'ils s'efforcent de supporter avec stoïcisme, ma présence étant imposée par leurs employeurs, mon oncle et mon père. Ou peut-être devrais-je évoquer ma sympathie pour les brigands de la Confrérie de la Liberté (du moins ceux que j'ai rencontrés, et à l'exclusion de celui qui a tenté de m'assassiner bien sûr) ou un Garde de Nuit ? Afin de pouvoir dire "Oh certes, ma fleur est intacte, mais je me lie d'amitié avec la lie de la société !" Pour un peu, par pur esprit de provocation, je serai tentée d'ajouter : "Concernant ma fleur, comme il s'agit de lierre, sauvage et aux fruits noirs, je songeais à l'offrir à mon ami qui porte le noir, entre mauvaises herbes poussant à l'ombre, nous serions peut-être mieux assortis que moi et un tournesol ?"

Ces années passées... l'isolement dans lequel j'ai vécu du fait du repli de ma famille sur elle-même après la mort de Dugal, m'a coupé de mon milieu d'appartenance. Père dit que les brigands et les Gardes de Nuit ne font pas parti de mon monde... mais quel est vraiment mon monde ? L'hospice de Villevieille était plein de religieuses et de combattants ayant l'infortune d'avoir perdu un affrontement. Pas exactement une société particulièrement recommandable. Le sang, la proximité de la mort, la douleur... tout cela ne rend guère civil. Par la suite, j'ai été confronté en moins de deux semaines à quatre agressions, incluant meurtre, tentative de meurtre, tentative d'enlèvement et de viol. J'ai plus de faciliter pour décrire des événements violents que des rencontres avec mes pairs de noble naissance.

Quand je vois l'aisance de Lady Silva, cette vipère manipulatrice qui parvient sans peine à obtenir admiration et soumission absolue d'un époux aveugle à la noirceur de son âme, ... j'en perds mes moyens. Il est évident que cela l'amuse de me rappeler à quel point je suis insignifiante à côté d'elle.

Une chose m'étonne : que vous n'ayez pas jugé bon, utile, approprié, opportun ou amusant ?... de m'écraser de votre condescendance quand je suis venue vous trouver. Je vous suis reconnaissante de la bonté que vous avez manifestée à mon égard. Bien sûr, il est fort possible que vous soyez bonne comédienne et que vous n'en pensiez pas moins, mais j'ai la naïveté de croire que vous aviez au moins un fond de bienveillance envers moi et au sujet du service dont je vous entretenais. Je vous disais que j'étais étonnée car Lady Silva au contraire a pris plaisir à me rappeler avec insistance mon inexpérience.

Il est trois choses par lesquelles on ne cesse de me rabaisser, avec malveillance ou simple condescendance : le faire que je sois une femme, que je sois jeune, que je ne sache m'y prendre avec les hommes. La déconsidération constante qui est associée à ces trois caractéristiques, tantôt me blesse, tantôt me rend furieuse.

Je serais curieuse d'avoir votre avis sur Lady Silva. Elle est effrayante tant elle parvient à obtenir une soumission fanatique des hommes qui l'entoure, tant son époux, que son ... je ne sais comment qualifier Ser Etan Verraz. Il a déjà tué pour elle. Sa passion me paraît confiner à la folie. Je n'arrive même pas à concevoir comment elle parvient à garder le contrôle sur eux. En fait, je ne suis pas sûre de vouloir le savoir tant cela me paraît à l'opposé de tout ce qui devrait être dans une relation.

Pour ma part, je suis tout simplement incapable d'obtenir quoi que ce soit de mon entourage. Il me faut faire des pieds et des mains, mendier et demander, encore et encore, pour quelques miettes. C'en est frustrant ! ... mais quand je vois Lady Silva, je me dis au moins que j'ai ma conscience pour moi.

... Pourquoi les autres ne la voient-ils pas telle qu'elle m'apparaît ? ..


Nous nous reverrons sans doute,


Portez vous bien,


H.
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Jour 03 - Jack Bulwer

Message : # 48852Message Iris
11 nov. 2015, 18:00

Cher Jack,

Je viens d'apprendre par un garde de Rubriant qu'il n'y avait pas l'ombre d'un Frère juré pour le tournois des Sept Frères. J'aurais vraiment cru que vous viendriez à Rubriant attiré par la concentration de vauriens, voleurs, contrebandiers et brigands qui doivent errer en quête de l'opportunité de fondre sur un visiteur imprudent ! J'étais déçue, mais surtout je souhaite qu'il ne vous soit rien arrivé de fâcheux. Cela fait bientôt quatre mois que vous promîtes de venir à Waterford, j'espère vraiment que vous passerez nous voir.

Dire que nos geôles sont en passe d'être pleines et qu'il n'y a personne pour les vider ! J'aurais le plus grand mal à défendre la vie de nos brigands si la situation s'éternise.


Espérant avoir prochainement de vos nouvelles,


H
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Jour 03 - Jack Bulwer

Message : # 49710Message Iris
26 nov. 2015, 22:06

Cher Jack,

Ce devait être un jour de fête, les hommes rivalisant fièrement, paradant sur leurs destriers portant les couleurs éclatantes des Maisons engagées dans les festivités ; les demoiselles admirant leurs héros lumineux, sans peur et sans reproche, heureuses de confier leurs couleurs à un héros en devenir qui proclamerait haut leur nom et proclamant une élue reine de beauté et d'amour. Sous le soleil devaient étinceler gaiement les armures polies et claquer les lances se brisant furieusement, avant que la lune éclaire les conciliabules et les galanteries vespérales. L'on aurait dû parler de fiançailles, songer à des mariages et des alliances. Les provocations et mesures de puissance devaient rester modérées par les règles qui assurent l'union des sociétés et distinguent la manière de traiter un allié de celle de se comporter à l'égard d'un ennemi. Même alors l'honneur dicte de ne pas se aller aux passions les plus funestes : avidité, impunité, soif de destruction...

Tout s'est effondré en un instant quand les Tyrell ont décidé de manifester fort cruellement leur domination sur le Bief.

Aujourd'hui dix hommes furent désignés vainqueurs du premier tour du tournoi.

Aujourd’hui dix hommes ont été promis au Mur.

Même si j'ai peu d'affection ou d'estime pour certains, ou que je suis assez indifférente à l'égard d'autres, je reste frappée par le cynisme de nos dirigeants. L'affaire des Manteaux d'or pouvait encore passer pour une déviance extrême et malheureuse, d'autant plus que située au plus haut. Mais il me faut admettre que cette corruption est bien plus répandue et commune. A quel point ? A force de découvrir le mal, ne finirai-je pas par ne voir qu lui ? Je doute par moment de tout. Alors j'ai la tentation de chercher un refuge, de quitter ce monde. J'étais heureuse à l'hospice de Villevieille : une existence de septa, consacrée au soin et à l'éducation m'épargnerait bien des tracas. Nulle ambition à défendre, rien à protéger contre la rapacité de puissants insatiables. Est-ce pour cela que vous avez abandonné votre rang d'héritier pour vous perdre dans le nord ? Vous disiez ne pas supporter la mort de votre promise, est-ce bien tout ? Vous paraissez si différent de ceux que je vois tout autour de moi : portiez vous aussi un masque alors ? Je ne sais comment reconnaître la vérité.

Je vous ai cherché encore.

Vous n'étiez pas parmi la délégation Tyrell.

Sans doute ai-je tort de vous chercher. J'ai l'impression de courir après mon ombre... comme si la sincérité ne se révélait que dans l'obscurité, que la vérité ne croît que protégée du soleil trop brûlant du regard des milliers d'yeux d'une foule. Éblouie par les apparences, je deviens aveugle, il me faut une clarté crépusculaire pour y voir clair. Ce n'est peut-être pas vous que je m'efforce de trouver dans cette nuit de l'âme, mais ce que vous représentez à mes yeux. Une droiture que ne révèle que la confrontation à sa mort. Vous êtes l'image de l'Étranger, le seul des Sept qui n'a pas de visage, le seul qui nous oblige à faire face à nous-même dans le dépouillement de l'épreuve et de la perte.

Quelle impression donne une jeune fille couverte de lierre qui prie l'Aïeule et l' Étranger plus que la Jouvencelle et le Guerrier ?

Il me faut cheminer dans un dédale, les yeux bandés. Je cherche un issue au cœur de ce labyrinthe, le moyen de sauver mon cousin Darren. Je n'ai que des frémissement pour me guider, que le frôlement de mes doigts sur les murs froids, aussi haut qu'orgueil.

Je me sens si seule ici.

Vous ne viendrez pas, n'est-ce pas ?

Vous ne m'aiderez pas : vous êtes une ombre impalpable et insaisissable.

Il n'y a pas que les roses jaunes à pousser et croître, le lierre s'appuie tout aussi bien sur les tours et les murs. J'ignore si j'aurais le temps de gravir les parois qui m'entourent, si je parviendrai à en venir à bout. Il me semble qu'on m'arrache à chaque fois que je progresse. Mauvaise herbe qui pousse sans qu'on le lui demande, jamais où l'on voudrait qu'elle soit.


Venez un jour prochain à Waterford ou je finirai par douter de votre existence et croire que vous n'êtes qu'une image échappée d'un de mes rêves,


H.
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