TDF Chapitre 8 - Un fief (pas si) paisible

[DukeTogo]

Waterford était bondée. Il faisait déjà assez chaud de bon matin. Le marché ressemblait à une ruche, bondée. L’économie du fief Castellane était florissante en comparaison du domaine voisin de Bandallon. La route de Waterford n’était pas étrangère à cet état de fait. Large et praticable, elle permettait de rejoindre depuis la côte la Route de la Rose en passant sur le domaine Bridges. Celui-ci était fort pauvre en comparaison et les Castellane entretenaient à leur frais la route sur ce petit domaine, le signal déclencheur d’intervention étant le moindre tonneau de vin qui pouvait casser quand le chariot trébuchait dans un cul-de-poule.

Le grand marché avait lieu à chaque lune et attirait du monde du domaine et d’au delà. En plus des étals majoritairement occupés par le débonnaire Lyndal Flowers et ses vendeurs, tous flanqués d’un gaillard au rude gabarit, l’on pouvait acheter et vendre ses services. Des fils de ferme cherchaient du travail, des filles de ferme négociaient leur ventre. L’épouse Bartheld vendait pains et pâtisseries à un rythme très sérieux, soutenue par la verve et le verbe haut de Gyles sous le regard amène de Flowers.

" Foi de Fooooourreau Magique, venez goûter la briooooche magique cuite dans le fooooourneau magique de la très estimée maison Bartheld ! "

En ce jour comme tout les quatorze jours, la garde de Waterford étaient partiellement présente et ne faisaient pas grand cas de ce qu’il pouvait se passer. Tout le monde connaissait presque tout le monde. Un peu à l’écart, une grande blonde athlétique était juchée sur un point surélevé avec quelques vauriens non loin d’elle.

C’était aussi pour les moins démunis l’occasion de voir et d’être vu. Tenant ses deux enfants à la main, Rose Seldon était fort joliment habillée et n’était pas l’épouse du prévôt pour rien. Faisant sensation comme à chaque apparition, le cortège des Jouvencelles suivant Dame Adrienne sous le regard mauvais de Yorik. Les esprits les plus alertes pouvaient comprendre que certains nantis venaient au grand marché de Waterford davantage pour cette prestation haut de gamme que pour négocier et acheter, ce qu’il faisait quand même dans un rituel bien rodé à en croire des lots encordés déjà prêt.

Tom le Bref allait et venait, se faufilant, râlant beaucoup en revenant constamment au septuaire délabré d’Endra ou il avait élu domicile. Son égoïsme et son refus de partager la fraicheur du lieu étaient tel qu’il pouvait aller jusqu’à uriner et déféquer sur place pour éloigner les badauds. Une certaine épée-à-louer vint déranger lady Castellane, malgré la tentative de dissuasion du brave soldat qui l’escortait. Ce grand brun à l’étiquette discutable se positionna très vite en ami dévoué du garde, jalousant la chance qu’il avait de voir régulièrement ce cheptel de jolies juments auxquelles il ferait pas payer la chambre. Et puis il mima de prendre conscience de la présence de la lady, devançant d’un pas alerte chacun de ses mouvements, s’interposant presque pour lui couper toute retraite.

« Oh mais que vois-je? Une apparition, une sirène, une fleur, une rose, une colombe? Une plume ! Oui, par les Sept, donnez moi une plume, belle enfant ! Voyez ma pauvreté : je ne possède que cette épée à mon fourreau. Oui, donnez-moi ce qu’il vous plaira ! Une plume, une aile, une cuisse ! »

[Iris]

Aleth avait comme d'habitude de nombreux projets à l'esprit, se déplaçant dans une robe estivale gris perle parmi les plus sobres qu'elle eût, en accord avec son humeur assez inquiète et préoccupée. Toute à ses projets, elle n'imaginait pas que quelqu'un pût oser s'imposer à elle de la sorte et elle le regarda en se demandant ce qui pouvait bien lui passer par la tête. Un instant elle s'inquiéta d'être de nouveau prise pour une des pensionnaires de Dame Adrienne, puis ces histoires de fleurs et de volailles lui en rappelèrent d'autres. Ne se sentant pas tenue à trop de retenue envers l'importun insistant, elle lui répondit sans attendre de répondre, espérant encore pouvoir s'en défaire facilement :

" Une colombe dont vous voulez des plumes, une aile ou une cuisse ? Vous vous prenez pour un loup errant et me confondez vous avec la volaille censée vous tomber rôtie dans la gueule ? "

Son ton indiquait clairement qu'il y avait une erreur et qu'elle n'appréciait pas d'être vue comme une proie, quelques flatteuses métaphores qu'on utilisât pour habiller ce rôle.

Finissant malgré tout par avoir des scrupules pour le cas où l'homme serait vraiment dans la détresse : " Si vous maîtrisez les armes et que vous souhaitez un emploi en la matière, il faut voir Béric Kardalt, le maître d'arme de la Maison ; il devrait être à Waterford pour le marché. Au pire vous pourrez toujours le demander au poste de garde ou au château. "

Un instant, elle hésita à préciser qui elle était, mais l'homme n'avait fait aucun effort pour se présenter, elle avait en outre un garde en escorte et enfin, elle ne tenait pas à discuter longuement avec l'improbable personnage qui lui demandait de but en blanc de... Hum, ne se faisait-elle pas d'idée sur le sens de son propos ? Peut-être voyait-elle le mal partout ?

[Casaïr]

Arrivé seulement la veille, Darren n'avait pas encore su s'habituer pleinement à la vie au domaine Castellane. Et ce n'étaient pas les nouvelles entendues la veille de la bouche de sa cousine qui pouvaient l'aider à se sentir chez lui. Il voulait parler à sa tante, mais se dit que se battre avec elle dès le matin n'était sans doute pas la meilleure approche. Il préféra donc d'abord faire le tour du marché installé pour la journée, cherchant avant tout à se changer les idées, puis de retourner un peu plus tard au château pour discuter calmement avec Dame Guenièvre.

N'étant astreint de rien, il déambula de son côté, notant la présence de Flowers qu'il n'appréciait que modérément. Il aperçut celle qu'on appelait Dame Adrienne et fut saisit par la prestance dont elle faisait montre. Tout en cherchant à reprendre contrôle de ses émotions, il regarda ailleurs et vit Aleth avec... comment s'appelait-il déjà ? Cel... quelque chose. Le chevalier ne se rappelait jamais vraiment du nom des gens qui ne l'intéressait guère, une paresse que son père aurait bien aimé voir disparaître avec le temps, car "il est impossible de savoir si l'inconnu d'hier ne deviendra pas l'ami ou l'ennemi de demain". Grimaçant au souvenir de l'un des adages paternels, Darren se dirigea d'un pas tranquille en direction de sa cousine mais sans vraiment chercher à la rejoindre rapidement, prenant la peine de regarder les étals, s'achetant l'une des fameuses brioches vantées par Gyles, taquinant d'un sourire le ménestrel au passage.

Arrivant enfin auprès de sa cousine, il s'amusa de la voir, tantôt rabrouant l'idiot inconvenant à ses côtés, tantôt cherchant à lui indiquer à qui s'adresser pour un emploi quelconque.

"Chère cousine, je pense que notre ami ici présent saura parfaitement à qui s'adresser s'il cherche un travail, lança-t-il gaiement en approchant avant de proposer un morceau de brioche à Aleth. Reste à savoir s'il y a de la place à Waterford pour une lame de plus, en espérant qu'elle soit aussi affûtée que la langue bien pendue de son propriétaire !"

C'était dit sans animosité aucune. Après tout, ce n'est pas parce qu'il ne faisait aucun effort pour retenir les noms que Darren devait se montrer désagréable pour autant.

[Crépuscule]

Comme évoqué la veille, Jolan avait proposé d'aller au marché en compagnie des enfants.

Allant à l'allure de sa soeur, il était donc un peu en retrait quand Aleth croisa l'étranger. Il les rejoignit alors que Darren s'en revenait également.

Une épée à louer, voilà bien le dernier genre de personne que Jolan avait espérer faire côtoyer les filles dans cet exercice de vie en société.

[DukeTogo]

" Si vous maîtrisez les armes et que vous souhaitez un emploi en la matière, il faut voir Béric Kardalt, le maître d'arme de la Maison ; il devrait être à Waterford pour le marché. Au pire vous pourrez toujours le demander au poste de garde ou au château. "

Ah... Oui, j'ai vu le personnage hier. Sûr qu'il est pas mauvais à cheval. Mais non, je veux pas qu'on me donne un boulot de garde. Non, je..." s'approchant davantage, essayant sans succès de lui prendre la main car elle pivota à temps sur elle même. "Non, moi ce que je veux, c'est un baiser, une cheville, un mollet, une jambe..."

C'est alors qu'arriva Darren ce qui eut l'effet de donner un peu d'espace. Corbin Celtigar tiqua un moment puis rhabilla très vite son visage d'un grand sourire.

"Ah oui? Cousine? A la bonne heure, tu n'es donc pas un rival auprès de cette jolie fleur. Je ne sais que trop bien comment les chevaliers proprets peuvent être de redoutables vendeurs de rêve auprès des ladys. C'est presque dommage que tu ne sois pas apparu par jalousie, je n'aurais pas à faire la démonstration de mon talent à l'épée. Je suis bon à la taille..." se tournant vers Aleth "...et ce n'est rien à coté de mes coups d'estoc."

L'arrivée d'une jeune enfant et de son grand frère marqua un temps d'arrêt dans la partie qui se jouait à trois jusqu'alors.

"Oh, quelle jolie enfant !" s'exclama l'escogriffe en baissant la tête vers Alyse pour l'admirer.

[Iris]

Arborant une expression aussi digne que possible malgré son déplaisir, Aleth n'avait désormais plus guère de doute quant aux manières déplorables du mercenaire et à la visée de ses métaphores. Elle était sur le point d'envoyer une réplique acidulée à l'inconnu quand Darren arriva. Elle garda le silence pendant les échanges des deux hommes, fort tentée de clore fermement l'entrevue avant de reprendre le cours de sa journée, mais Jolan arrivait désormais avec sa sœur.

" Messer, vous parlez beaucoup de ce que vous désirez mais ne vous souciez guère de ce que je veux ou ne veux pas."

A Darren et Jolan : "J'ai une commande à passer chez le tisserand Bartheld, nous nous retrouverons tout à l'heure."

Dans son esprit, l'échange était terminé et elle comptait retourner à ses occupations sans plus songer à l'incident. Par réflexe de politesse, elle partirait avec un signe de tête à destination de l'inconnu, qu'il ne se sente pas exagérément insulté, mais ses efforts n'iraient guère au-delà.

[Casaïr]

Le sourire un rien incrédule qui flottait présentement sur les lèvres de Darren indiquait, si besoin était, tout le bien qu'il pensait de ce qu'il venait d'entendre. Et, aussi étonnant que cela puisse être, il se retrouva embarqué, bien malgré lui, à repenser à ses propres actions passées qui, bien que -parfois- plus galantes que la "démonstration de séduction" de Celtichose, n'en avait pas moins la même finalité. Par les Sept, si j'avais voulu me retrouver face à un miroir, j'aurai mieux fait de regarder l'eau du puits, songea-t-il.

"Nous... ne serons pas rivaux, en effet, finit-il par lâcher du bout des lèvres, mais je n'en reste pas moins intéressé par sa tranquillité, si tu vois ce que je veux dire. Sans vouloir être discourtois, traites-tu toujours ainsi les gens qui pourraient être amenés à t'employer ? Auquel cas je comprends pourquoi tu viens jusqu'ici pour louer tes services..."

Réfléchissant un peu, il vit s'amener Jolan en compagnie d'une jeune fille et Aleth s'en aller, provoquant un haussement de sourcil circonspect de la part de Darren. Autant pour ma brioche, songea-t-il en riant sous cape. Il salua Jolan, grimaça de nouveau devant les manières de Celtitruc avant de s'incliner devant la demoiselle.

"Je crois qu'on ne se connait pas encore, peux-tu nous présenter, Jolan ?" demanda-t-il en souriant gentiment.

Une fois fait, il se tourna de nouveau vers l'importun, le jaugeant du regard, mi-sérieux, mi-amusé.

"Du reste, comment tes pas t'ont conduit jusqu'ici ? Un homme de ta trempe ne doit sûrement pas manquer d'employeur, non ? Je serai curieux de savoir le genre de personnes qui ont pu avoir besoin de tes services. Et je ne parle qu'au niveau martial, bien entendu."

[DukeTogo]

Corbin Celtigar resta coi devant le flegme de la lady. L'intonation d'Aleth était inflexible et elle put s'éloigner sans être dérangé davantage.

Répondant à Darren : "Ah ça, oui, je peut être employé par les plus grands, t'as pas idée."
Regardant Aleth s'éloigner en se grattant la tėte: "C'est pas gagné pour moi avec la lady on dirait. Bah on dirait qu'il va falloir que je me contente de la rouquine de l'auberge.."

C'est alors qu'un petit groupe a l'extrémité de la grande place attira l'attention. Tristifer venait de faire son apparition à cheval, efflanqué de quatre gardes. Surplombant la foule, il avait une expression dure et sa tenue de cuir noir renforçait l'impression strict qu'il dégageait. Le gros de la foule se tourna vers lui alors qu'il se redressait debout sur les étriers pour être entendu de tous.

"Lyndal Flowers ! Saches que tu n'es pas le bienvenu sur Waterford et que la preuve de ta forfanterie sera bientôt révélée. Waterford est une terre de justice où les voleurs et les contrebandiers n'ont pas leur place."

Un silence de mort s'abbatit sur le marché. Dès regards se tournaient vers le gros marchand qui restait bouche ouverte de surprise.

"Les Castellane n'auront aucune clémence contre ses ennemis. Ton silence prouve tes méfaits."

Et puis, il y'eut un juron. Et un autre. Un des gros bras de Flowers repoussa vivement un villageois qui tirait sur une marchandise. Un autre villageois traita Flowers de voleur. D'autres commencèrent à se servir sur les étals. En très peu de temps, la situation dégénéra. Les gros bras furent débordés, le mouvement devint un mouvement de foule. D'autres en profitèrent pour se servir sur différents comptoirs sans discernement aucun. L'étal de l'épouse Bartheld tomba au sol et Gyles se précipita pour la protéger de tout mouvement de foule. Les gardes autour de Tristifer étaient désemparés. Celui-ci se tenait de son mieux à son cheval qui montrait des signes d'agitations. Les autres gardes présent sur le marché ne savaient pas trop quoi faire. Quelques malandrins se déployèrent. La situation était hors de contrôle.

HRP : nous jouons cela sur forum donc cela aura un rythme décousu. Soyez chou de ne pas oublier que c'est le bordel, donc n'oubliez pas que vous réagissez dans l'urgence.

[Crépuscule]

Jolan serra la mâchoire face au comportement de Celtigar, heureusement, Darren aborda les mondanités avant qu'il ne commence à serrer les poings.
Il lui présenta avec courtoisie sa soeur :

"Je te présente lady Alyse Hastwyck, ma soeur. Alyse, je te présente ser Darren Risley, le cousin d'Aleth."

Il observa d'un oeil bienveillant sa soeur lorsqu'elle salua en retour le chevalier. Il regarda ensuite s'éloigner Aleth, tentant d'ignorer l'étranger tandis que Darren échangeait quelques mots avec lui. Il aurait souhaité l'accompagner mais son amie ne semblait pas s'en soucier, Jolan sentait qu'un fossé se creusait entre eux, cela le peinait mais il ne savait pas vraiment quoi faire contre cela.

La réponse de Celtigar et la mention sur Bénédicte le fit tourner la tête dans sa direction par réflexe, le regard assombrit. Ce type, n'attendait qu'une chose, croiser le fer et montrer sa supériorité aux armes, Jolan en avait conscience, mais à cet instant, il était bien tenté de l'offrir cette opportunité ... mais il devait garder le contrôle, surtout avec Alyse à ses côtés, il n'était pas venu pour ça.

Tristefer arriva alors et déclencha ce chaos soudain. Jolan saisit Alyse et tenta de s'éloigner du marché, regardant en arrière pour tenter de voir Aleth, mais avec toute cette cohue, il ne vit rien. Il se dirigea vers le septuaire, écartant les gens si nécessaire pour protéger sa soeur.

[Iris]

Aleth, toujours suivie de son garde, se dirigeait vers la boutique de Messer Bartheld, le tisserand, en bord du marché, mais non loin de l'étal de l'épouse Bartheld et de Gyles.

Quand Tristifer parut et se mit à délirer en place publique, elle resta soufflée, presque abasourdie devant tant de sottises. Mais plus encore, elle se demandait dans quelle mesure elle était à l'origine de cette folie, simplement en évoquant Lyndal Flowers la veille. Elle aurait voulu pouvoir le retenir, le ramener à la raison, mais sa folie était contagieuse et virulente.

La jeune Castellane cherchait des yeux les autres gardes pour comprendre ce qu'ils faisaient, mais ne voyait rien... et elle devait elle-même éviter d'être bousculée et piétinée dans la débandade de la foule. Elle imaginait les mères s'inquiéter pour leurs jeunes enfants au milieu de la tourmente, tandis que d'honnêtes marchands voyaient le travail de plusieurs jours mis en péril.

Au garde à sa suite : "Allez trouvez Béric, avertissez les postes de garde et la Commanderie de la soldatesque. Ne vous inquiétez pas pour moi, j'irai chez les Bartheld. Il faut faire vite !"

Conformément à ses intentions affichées, elle allait chez le tisserand, en se montrant aussi vigilante que possible, cherchant avant tout à rester le plus en bordure possible du marché. Elle cherchait du regard les autres gardes et d'éventuels villageois non pris de furie qu'elle pourrait rassurer, espérant vaguement que de proche en proche, un début de calme pourrait revenir et qu'il n'y aurait pas de blessés...

Avec un peu de chance, elle arriverait sans encombre à la boutique, et se trouverait non loin de Gyles et de l'épouse Bartheld.