[OdE Chap.7-45] Dans la grande salle - 19h20

[Iris]

Les Mac Terfynisel remarquèrent qu'une mère et son fils d'une douzaine d'année s'approchait. Elle portait une robe de lainage en jaune gwylmith et s'enveloppait dans une cape noire au très beau drapé et moiré, brodé de motifs jaunes qui paraissaient dorés. L'adolescent marchait avec distinction. Il faisait déjà la même taille que sa mère et promettait de grandir encore. Il était vêtu d'une tenue de cour violette et noire parfaitement coupée et dans un tissu dont les reflets étaient un plaisir pour les yeux. Un chien massif, un molosse qui devait bien s'approcher du mètre au garrot les suivait au pied et s'assit sitôt qu'ils s'arrêtèrent près des nouveaux venus.

Le garçon surveillait son chien, le caressant près de son épais collier, lui interdisant du même coup d'aller vagabonder si l'envie lui en prenait. Le chien suivait les mouvements de l'enfant et de la mère.

" Bonsoir." commença la femme.

Flammenn non loin vint faire une révérence, en profitant pour les présenter aux Terfynisel : "Enora Mac Tremen. Bodian Mac Tremen."

[Iris]

Blodwen s'essaya à une révérence sobre -- ce qui paraissait le plus sûr -- après quoi elle présenta les membres de sa délégation présents non loin.

Enora Mac Tremen était au milieu de la trentaine, une silhouette maigre, avec des traits fin, des yeux aux pupilles noires, des cheveux bruns tressés et noués en chignon. Le jeune Bodian Mac Tremen semblait l'opposé exact de Kiddle : un maintien irréprochable, des cheveux châtains cuivrés tombant en boucles souples sur ses épaules, des ongles propres et bien coupés, et bien que ses traits fussent assez durs, comme taillés à la serpe, il n'avait probablement jamais manqué de rien, et sa peau paraissait fine.

" Bienvenue à Llewellen. Nous avons appris la nouvelle du décès de votre père, à l'automne dernier, soyez assurée de l'expression de nos plus sincère condoléances. Les Terfynisel sont une ancienne et loyale Maison du duché. Les liens se raffermissent à chaque génération. La mauvaise saison nous a empêché de faire votre connaissance plus tôt, vous avez bien fait de voyager au printemps. Nous avons entendu les difficultés que vous aviez rencontrées sur la dernière partie du trajet. Heureusement, vous nous arrivez saine et sauve."

Blodwen s'appliqua à un maintien aussi noble et détendu que possible.

- L'osfer Jazkez a été d'une aide précieuse.
- L'ordre hilderin fut fondé précisément pour lutter contre la menace feonde, je me réjouis à chaque fois qu'on me fait récit de la manière dont ses membres s'illustrent dans la protection des habitants de Taol-Kaer.

Bodian se tourna vers le chevalier :

- Nous conterez-vous ce soir vos combats ?

L'échange qui était jusque là très formel s'assouplit un peu. Bodian se rapprocha de Guénal l'Aveugle -- son cousin éloigné au 1er degré -- et de Jazkez pour bavarder. Pendant ce temps Blodwen discutait avec Enora.

" Comment s'est passé votre voyage ? "

A quoi Blodwen répondit en parlant factuellement des étapes et du trajet depuis Terfynisel.

Oanell et Aeldred avaient toute latitude de choisir l'un ou l'autre des échanges -- ou aucun -- ou de visiter la salle et faire connaissance avec d'autres personnes qui arrivaient.

[Caeso Senjak Khan]

" C'est la première fois que vous venez à Llewellen ?"

-En effet. Je suis originaire du Duché de Kel Louarn et en poste dans le duché de Tuaille que depuis quelques mois. C'est une région très agréable je dois dire, si l'on survit à la foret des soupirs bien entendu.

Il interrompit un moment sa conversation auprès de Guenal pour aller se présenter à Enora Mac Tremen et son fils qui s'avançait vers eux. Il s'inclina respectueusement.

-Osfer Jazkez, membre de la suite du Seigneur Blodwen de Terfynisel. Nous vous remercions pour votre hospitalité et je suis personnellement ravi de faire votre connaissance, Enora Mac Tremen, ainsi que celle de votre fils.

- Nous conterez-vous ce soir vos combats ?

-Avec plaisir. Toutes nos expériences dans la lutte contre les féonds est utile et se doit d'être partagée.

[Casaïr]

Aeldred discutait toujours avec Oanell lorsque les premières personnes d'importance firent leur apparition : Dame Enora et son fils Bodian. Comme ses compagnons il s'approcha et s'inclina comme le lui avait montré son amie bien qu'encore un peu raide dans le geste, il n'avait pas vraiment pu parfaire la technique depuis Louarn. Il écouta poliment les discussions qui se lançaient sans y prendre part (il n'était ni noble ni hilderin après tout) et se garda bien du moindre commentaire lorsque le jeune garçon demanda à Jazkez qu'il lui raconte ses exploits, préférant garder un visage neutre.

[Iris]

Aeldred glissait à nouveau en retrait pour échapper à l'attention de tous ceux qui étaient trop nobles pour lui -- c'est à dire beaucoup de monde.

Guénal l'Aveugle près de la cheminée continuait à deviser avec Bodian et Jazkez :

- Kel Loar ? J'en ai entendu beaucoup de bien. Sa bibliothèque est remarquable parait-il. reprit Guénal.
- Il y a eu une terrible attaque de feondas en 887, c'est bien cela ? questionna Bodian

Oui, c'était bien en 887. La ville avait été dévastée, attaquée par une horde monstrueuse. Tous ceux qui l'avaient vécu s'en souvenaient. Un carnage.

Jazkez était sur le point de répondre, quand il perçut une présence sur le côté. Briaga de Caiginn -- le second d'Ergon Tamir, la commanderesse de la Citadelle de Dèas -- et quelqu'un qui ne portait aucunement Jazkez dans son coeur : "Bonsoir Osfer Jazkez."

[Iris]

Enora Mac Tremen quitta Blodwen. Cette dernière fut alors abordée par Flammenn qui lui glissa quelques mots. Enfin, Blodwen alla retrouver Aeldred -- peut-être qu'Oanell était assez près.

- Aeldred, j'ai oublié de t'en parler, et honnêtement, j'aimerais ne pas trop m'attarder dessus avec la soirée qui s'annonce. Suite à ton départ de nos appartements, j'ai entendu encore des éclats de voix entre Kiddle et Pwyll. Je suis allée m'informer quand Kiddle est sorti en trombe. Aucun des deux n'a réussi à me donner une réponse claire quant à ce qui se passait. Pwyll a vaguement évoqué que Kiddle n'avait pas envie de dormir au château. Là dessus Ethel en a remis une couche pour expliquer fort savamment qu'elle et Kiddle se forçaient pour mon bien à rester sous ce toit. Franchement, je n'en peux plus de ces deux-là. Kiddle a reçu deux avertissements en deux jours, et ça continue encore. Quant à Ethel, elle vit dans son monde et envoie à l'emporte-pièce ses jugements et ses vérités. J'ai vraiment autre chose à faire que de gérer deux personnes qui veulent vivre sur les routes et n'en faire qu'à leur tête. Encore moins ici et maintenant.

Elle fait une pause et poursuit :

- Les deux nous quitteront à l'aurore. J'ai donné 15 daols de braise à Kiddle, et je leur ai dit d'aller trouver des informations pour la chasse aux feondas de Pwyll. Même s'ils reviennent, je ne les veux plus dans les jambes. Donc Pwyll les gère, ou toi ou peu importe. Ils veulent être libres, eh bien ils le sont, et je ne m'occupe plus d'eux.

- Je suis désolée. J'ai eu l'impression que tu étais proche d'eux, mais c'est au-dessus de mes forces, et j'ai déjà vraiment trop à faire.

[Casaïr]

'C'est moi qui m'excuse, répondit Aeldred, alors que la raison de l'esclandre revenait à la charge dans son esprit. Je pensais faire avec Kiddle ce que Rhea a fait pour moi. Ce gamin est une vraie bourrique et ce n'est pas en ce moment que je pourrais m'occuper de son éducation."

"Tu as bien fait, ajouta-t-il, oubliant totalement de la vouvoyer, l'éloigner avec une mission comme celle-ci ne peut que faire du bien à tout le monde. Mais... Ethel ? Tu es sûre ? Enfin, j'imagine que pour ménager les susceptibilités de chacun ce n'est pas forcément une mauvaise idée, juste que ça va être un drôle de couple. J'irais les voir avant leur départ et rappeler -encore- à Kiddle comment se comporter avec des gens normaux."

Tout en se demandant s'il ne le verrait pas revenir dans une cage pour avoir manqué de respect à la quasi-totalité de ses interlocuteurs.

[Iris]

Blodwen eut une expression blasée :

" Je ne suis pas du tout certaine qu'ils feront ce que j'ai demandé, et je t'avoue que je m'en fiche un peu. Juste, qu'ils ne reviennent pas manger au frais de Terfynisel sans être fichu de se rendre utiles. Et je ne parle pas de me donner des leçons de vie. "

Elle fit une pause :

" Nous ne sommes pas fait pour nous entendre, au fond ce n'est pas grave. Mais je ne suis pas obligée de supporter leur présence -- en payant pour eux en prime, au propre et au figuré. Nous quitter sans esclandre, c'est encore ce qu'il y a de mieux à faire dans ces conditions. "

" Tu n'es pas obligé de t'impliquer encore. Fais ce que tu veux, mais ne t'épuise pas avec ça. S'ils se comportent en vagabonds, ils seront traités comme tels, et ils finiront par en supporter les conséquences, c'est tout. Ce que les mots ne leur apprennent pas, les privations et les dangers le feront peut-être. "

[Caeso Senjak Khan]

"Bonsoir Osfer Jazkez."

Jazkez se retourna vers son nouvel interlocuteur. S'il était surpris, cela ne se voyait pas. Il salua Briaga de Caiginn rapidement.

-Officier Briaga, quel honneur ! Et quelle surprise également ! Honnêtement je n'imaginais pas vous croiser un jour en dehors de Déas. Qu'est ce qui a bien pu pousser notre commandeur Ergon Tamir à consentir se passer de vous ?

Il désigna ses deux hôtes.

-Je ne sais pas si vous avez eu l'occasion de déjà rencontrer nos hôtes. Guenal Mac Tremen et Bodian Mac Tremen, le fils d'Enora Mac Tremen.

[Iris]

L'austère officière ne se laissait guère toucher par les compliments.

" Tout ne peut pas se régler depuis la citadelle. "

Elle salua Guénal l'Aveugle et Bodian, avant de préciser : "Je suis là depuis hier ; Je ne reste pas longtemps."

Guénal l'Aveugle et le jeune Bodian comprirent peut-être que les hilderins avaient à discuter et échangèrent de leur côté. Guénal l'Aveugle flattait le chien, discutait légèrement, et reprit sa harpe.


" Qu'en est-il de vous ? J'ai cru comprendre que vous aviez désormais une osfei en la personne de la blessée arrivée avec les Terfynisel ?"