[OdE - Chap.2.1] La dernière limite

[Arthus]

Blodwen serra plus fort la main de Névéna, puis lui sourit doucement.

"Ce n'est rien, mère... cela devait être très difficile pour toi, et puis... vu la situation... je te comprends."

... Et c'est sur cette superbe scène de retrouvailles que je vais m'arrêter cette semaine, ce qui permettra à tout le monde de nous rattrapper (Aeldred et le garde, Oanell et Aeldred, Elwigg et son coussin...). Les prochaines étapes seront donc normalement : conseil au castel Terfinysel avec Blodwen, Hafnir, le capitaine de la garde, Maelor (oui, Blodwen veut savoir si le messager chargé de transmettre l'invitation aux funérailles aurait des infos supplémentaires) et le chef Hilderin. Et après, un court dodo pour Blodwen!

EDIT : rectification suite à un message dans l'oreillette qui m'indique qu'il est plus de minuit en jeu : dodo tout de suite pour Blodwen, après ces charmantes retrouvailles! Et conseil le lendemain matin, au saut du lit! (il y a peut-être même moyen de faire ça quand les invités sont sur le départ, si aucun ne passe pas Swelbecky : du coup, les Hilderins restent, et les autres repartent sans s'inquiéter de rien...)

[NailsEater]

Oanell suivit l’échange entre Hafnir et Blodwen avec attention. Les compétences du nouveau seigneur étaient nombreuses, mais quelques conseils sur la prise de parole pourraient, à l’avenir, lui servir. Oanell profita de la conversation, et du fait d’être entièrement transparente, pour observer l’attitudes des protagonistes, leurs tournures de phrase cherchant à noter, comme l’aurait fait son mentor, les erreurs de la Dame.

Quand ils se levèrent et se mirent en marche pour rejoindre Nevena, Oanell souhaita la bonne nuit au commandant et demanda à Blodwen si une entrevue le lendemain matin avant le conseil serait envisageable. Une fois fait, elle rejoint les deux hommes attendant sur le pas de la porte.

[Casaïr]

Le chasseur avait attendu patiemment que ses amies reviennent. Le temps lui avait paru désespérément long, surtout en compagnie de quelqu'un avec qui il n'avait pas forcément de discuter. Il y avait pensé à un moment, mais à quoi bon ? Il ne remettait plus son visage (il vivait maintenant sans regarder les gens directement dans les yeux, de peur qu'ils ne le prennent mal), il n'était donc même plus sûr de le connaitre ou même de l'avoir connu enfant, si cela a jamais été possible un jour.

Avec les herbes que lui avait gentiment donné Blodwen, Aeldred avait pu préparer assez de tisane pour lui et le garde qui les avait accompagné et qui était donc resté avec lui. Il y en avait même assez pour au moins deux tasses de plus, à condition toutefois de rationner légèrement. Il avait donné une tasse au garde sans attendre de remerciement de sa part et n'était pas sûr de les avoir reçu, vu l'état second dans lequel il se trouvait. Il tremblait toujours, encore sous le choc des visions qui l'avaient agressé en arrivant à la rosace. Se sentant un peu fragile, il songea à la possibilité de demander, à Névéna ou Blodwen, de quoi l'aider à dormir cette nuit.

Il en était là de ses réflexions quand il vit Oanell arriver et il manqua d'air. elle avait toujours cet air digne qu'il lui avait vu un peu plus tôt, et qu'elle maintenait sans doute pour donner le change, alors qu'intérieurement elle devait être au plus mal. Tentant tant bien que mal -et plutôt mal que bien- d'avoir l'air remis de ses émotions, il s'avança d'un pas raide vers la jeune femme.

"Comment cela se passe à l'intérieur entre dame Blodwen et le commandant Hafnir ? Ils en ont encore pour longtemps ? S... Si tu veux, j'ai pu faire un peu plus de tisane que prévu, tu... en veux une tasse ? Pour te réchauffer. Enfin, sauf si tu ne comptes pas rester..."

Il ne savait pas du tout comment se comporter face à le jeune femme, et l'image de l'entrée humide de sang, même imaginaire, refusait de le quitter tout en encombrant d'avantage son esprit en le remplissant de pensées malsaines. Il se sentait désorienté et cela se voyait. Il ne cessait de jeter des regards apeurés, comme s'il s'attendait à voir un fantôme surgir de la pénombre.

[NailsEater]

- Merci, ce n’est pas de refus. Tout se passe bien à l’interrieur, Dame Blodwen voulait parler avec Nevena, le commandant Hafnir et moi-même sommes donc sortis de la pièce.

Oanell esquissa un sourire afin de rassurer Aeldred en récupérant la tasse qu’il lui tendait. Puis elle se retourna vers le garde :

- Ne vous inquiétez pas, je ne pense pas que ce soit long, Dame Blodwen semble fatiguée. Au moins, vous avez de la compagnie et une tisane ! lanca-t-elle avec une petite moue. De quoi parliez-vous donc avant que j’arrive ?

Connaissant le peu d’assurance d’Aeldred avec les habitants de Terfynisel et pour se faire pardonner de sa conduite un peu lunatique, elle tentait de briser la glace entre les deux hommes. D'autant plus que le garde semblait moins patibulaire que certain de ses confrères.

[Casaïr]

De quoi parliez-vous donc avant que j’arrive ?

Aeldred prit un air gêné. Discuter, hein ?... C'était sûrement facile pour d'autres, avec des bagages moins lourds à porter mais pour lui, c'était une autre paire de manches.

"On... enfin, je... ne parlais pas, j'étais..."

Il eut un frisson. Même si Oanell semblait de meilleure humeur, le fait de l'avoir vu pleurer -de l'avoir fait pleurer !-, ne l'aidait pas vraiment. Il regarda la jeune femme, cherchant à deviner ses pensées, son humeur. C'était bien entendu peine perdue, alors qu'on pouvait lire en lui comme dans un livre ouvert. Alors, comme l'avait conseillé Blodwen, il se décida à prendre la parole.

"Je... ça te paraitra peut-être idiot de ma part, mais je... je voulais m'excuser. J'ai l'impression d'avoir passé la soirée à te tourmenter et ça me... Mon père ne me donnait pas souvent de conseils, plutôt des avertissements ou des remontrances, mais il y en a un dont je me souviendrai toujours : il m'avait dit qu'un homme ne devait jamais faire souffrir une femme, surtout s'il attend de l'affection de sa part en retour. Bon, en réalité, c'était aussi un sermon, ajouta-t-il avec un léger rire. Je l'ai reçu alors que la dàmàthair me ramenait à la maison pour parler à mes parents, je devais avoir huit ou neuf ans à l'époque. J'avais passé la journée à tirer les nattes d'une fille et..."

Il s'arrêta un instant, interdit. On aurait presque pu l'entendre penser à ce moment là, alors qu'un sourire vaguement horrifié naissait sur son visage.

"Ho non, rassure-moi, ce n'était quand même pas..."

A cet instant, plus de peur de la flaque à l'entrée de la rosace, ni de croiser des fantômes dehors, juste une impression bizarre.

[NailsEater]

Et voilà qu’il recommençait. Elle venait de lui offrir le moyen de converser avec quelqu’un et il entamait un dialogue qui ne concernait qu’eux devant une tierce personne. Décidément, Aeldred ne faisait comme il fallait. Désespérée, Oanell n’écoutait qu’à moitié ces excuses quand :

J'avais passé la journée à tirer les nattes d'une fille et...

Sérieusement … Un souvenir lointain remontait à l’esprit d’Oanell. Elle essayait de revoir les traits de l’enfant qui l’avais fait pleurer à l’époque, sans succès. Elle se rappelait seulement la colère qu’elle avait ressentie quand il avait attrapé une de ses tresses et qu’il s’était amusé à tirer dessus.

"Ho non, rassure-moi, ce n'était quand même pas..."

En l’espace d’une seconde, la jeune femme passa d’un air digne à une colère noire. Elle fixait Aeldred, les yeux écarquillaient.
- C’était … Tu ! Ma natte ! balbutia -t-elle, incapable de faire une phrase censée.

[Casaïr]

Aeldred blanchissait à mesure que Oanell changeait d'expression, ne sachant plus du tout où se mettre. Comme souvenir d'enfance, j'aurai pu trouver mieux !

"Je... NON ! Mais je... ! On était..."

Un observateur extérieur aurait sans doute trouvé la scène des plus comiques en voyant les deux jeunes gens incapables de formuler des phrases cohérentes, l'une sous l'effet de la colère, et l'autre sous celui de l'horreur qui s'était révélée à lui.

"Je... C'est pas croyable.... Je... rate tout..."

L'avait-il pensé ou s'était-il exprimé à voix haute ? Il n'en était pas vraiment sûr pour le coup. Essuyant l'orage, il tenta de se reprendre.

"Je ne peux... décemment pas revenir sur ce que j'ai fait étant enfant. J'étais du genre à faire les quatre cent coups, au grand dam de mes parents."

C'était dit sur un ton d'excuse, mais son regard se voila une seconde. Il se reprit et, Inspirant à fond et avec un air faussement résolu, il lança : "si tu veux te venger, vas-y. Ça me semble la moindre des choses. Les imbéciles méritent d'être punis pour leurs mauvaises actions, et peut-être que ça te soulagera. Mais je ne m'attends pas à être pardonné. J'ai..."

Il préféra laisser sa phrase en suspens. Inutile de partir dans le larmoyant.

[Iris]

Kevan, le garde, buvait sa tisane en regardant les deux tourtereaux s'écharper :

" Eh ben, vous deux, c'est du spectacle."

Les voyant se tourner vers lui :

" Bah quoi ? Sérieux, se faire des déclarations au tumulus et s'engueuler après pour une natte tirée il y a, quoi ? dix ans ? quinze ans ? "

Il haussa vaguement les épaules :

" Oh vous faites bien c'que vous voulez, ça m'regarde pas."

Sur quoi il alla faire quelques pas pour mettre un peu de distance entre eux.

[NailsEater]

Quand le garde fit sa remarque, Oanell se démonta en un instant. Elle en avait décidément vu de toutes les couleurs aujourd’hui.

" Oh vous faites bien c'que vous voulez, ça m'regarde pas.

"

Elle soupira, se remit droite et s’excusa auprès de celui-ci. La soirée avait été longue et sa réaction était disproportionnée. Un sourire apparut au coin de sa bouche quand elle fit remarquer à Aeldred que finalement ils avaient un souvenir commun.
Puis, voyant que le garde s’était éloigné :

- Ça va, vous pouvez revenir ... D’ailleurs, quitte à changer de sujet, vous travaillez pour les Mac Terfynisel depuis longtemps ? elle semblait vraiment vouloir se rattraper et espérait ne pas tomber à côté.

[Iris]

Kevan n'était pas mauvais bougre et revint de bonne grâce :

" Moi ?" s'étonna-t-il

" Depuis que je suis revenu de mon service d'ost à Louarn."

Le garde n'était pas très vieux. 23 ans ?... il avait grandi à Terfynisel et connaissait donc Oanell et Aeldred depuis l'enfance. Il était d'ailleurs l'un des plus jeunes gardes d'un ensemble peu nombreux. Les autres avaient eu tendance à vieillir sous le précédent seigneur et à n'être pas remplacé sauf nécessité, et il n'y en avait pas tant que ça.

Dans les (très) lointains souvenirs des deux tourtereaux, Kevan était un garçon sage, qui était bon dans les jeux d'adresse et dont le père était soldat sur le domaine.