[OdE - Chap.2.1] La dernière limite

[NailsEater]

La barde écouta les déboires d'adolescents d'Aeldred. Il n'avait donc même pas essayé de la retrouver vraiment ou de lui avouer ses sentiments ? Tss les hommes sont toujours lâches. La résignation est une belle plaie et les hommes s'engouffrent toujours dedans ...

"tu vois, ton premier amour a une plus belle fin que le mien !"

- Apparemment

Elle s'arreta et fit en sorte qu'Aeldred la regarde et ajouta, très sérieusement :

Tu sais, il suffit rarement de penser ou de dire à une personne qu'on l'aime. Si à côté tu ne te donnes pas les moyens d'avoir ce que tu veux, il y a peu de chance que ça marche. Je ne suis pas une experte mais je pense qu'il ne tient qu'à nous de s’élever et de réussir ce qu'on entreprend, c'est valable aussi en amour.

[Casaïr]

"Tu as sans doute raison, admit-il. Pour Lizon... Je ne voulais surtout pas qu'elle subisse le rejet de ses parents alors qu'elle les avait encore. Je crois que son père est réellement persuadé de ma responsabilité dans ce qui est arrivé à mes parents. Et de toutes façons, elle en aimait déjà un autre, d'un village voisin, elle me l'avait confié une fois."

Il regardait Oanell calmement même s'il sentait qu'elle désapprouvait. En même temps, il ne pouvait pas lui en vouloir, elle voyait les choses d'un point de vue extérieur. Dans les grandes villes on devait moins faire attention aux qu'en-dira-t-on.

"Quant à un amour futur..." Il s'arrêta pour regarder tour à tour Oanell et le village, une expression indéfinissable sur le visage. "Tant que je ne serai pas accepté ici, ça ne servira à rien, sinon à attirer les mêmes réflexions sur elle que sur moi. Tu sais qu'on ne veut pas de ma présence aux mariages ? dit-il abruptement. Ils ont peur que je ne jette le mauvais œil aux futurs mariés, ou un truc du genre. Du coup, le dernier mariage que j'ai vu, je devais avoir dix ans, je crois bien. Et du village, je suis un des derniers hommes non mariés, et certainement le seul encore célibataire."

"Passé vingt ans, si tu n'es pas au moins fiancé, tu as raté ta vie. Ici en tout cas, je ne sais pas comment ça se passe ailleurs. Je voyais bien mes anciens amis compter fleurette aux jeunes filles du voisinage. Comme je voyais bien comment on me regardait..."

Il se sentit doucement partir vers cette ombre si familière qui ne l'avait jamais vraiment quitté et qui l'accompagnait maintenant depuis des années, aussi se reprit-il comme il put.

"Ca veut dire, dit-il aussi sérieusement que son amie et en la regardant droit dans les yeux, que si je veux retrouver une vie normale, peut-être me marier un jour et, qui sait, avoir des enfants, je dois d'abord prouver à ces gens que je ne suis pas un monstre, et me le prouver à moi aussi d'ailleurs. Car tant que je n'aurai pas de certitude à ce sujet, je ne pourrai pas vivre sereinement."

[NailsEater]

L’attitude d’Aeldred dérangeait le caractère naturellement optimiste d’Oanell. Elle, qui avait toujours fait en sorte d’aller de l’avant, se retrouvait démunis face au fatalisme du chasseur.

Elle approcha sa main du visage du jeune homme et lui cogna le front.

- Ce n’est pas ton passé qu’il faut remettre en ordre. Tu dois surtout commencer par apprendre à faire une déclaration dans les formes, avant de parler mariage et bébé.

Peut-être que cela vient de mon éducation, de ma vie à la ville, comment savoir. Je ne supporte pas ce genre d’attitude.

- Je déteste les gens qui décident pour les autres. Avant même d’être face à la situation, tu décides pour la femme que tu aimes. Tu crois donc à ce point qu’elle ne sera pas capable de choisir -elle-même- ce qu’elle est prête à endurer pour toi ?

Si je voulais juste donner un conseil s’est raté, en voilà une belle de Barde … Il est trop tard pour s’en vouloir.
Oanell n’arrivait pas à savoir ce qu’elle ressentait, énervée, déçue.

- Tu sais, une relation quelle qu’elle soit se fait à deux. S’il n’y a pas de confiance au départ, ça ne marchera jamais.

Elle regarda Aeldred, se demandant s’il comprendrait ce qu’elle voulait dire. Voilà que je suis sévère maintenant … Blodwen a une mauvaise influence sur moi !

- Ça ne me va pas d’être aussi sérieuse. Je me ferai pardonner, promis.

[Casaïr]

"Décider pour les autres ? Si je reprends tes termes, ils ont pratiquement tous décidé de me mettre au ban, de me déclarer coupable, depuis presque dix ans et sans me laisser le bénéfice du doute ! Moi, je peux tout juste m'occuper de moi sans me noyer ! C'est aussi pour ça que j'ai fini par récupérer notre ancienne maison, pour que les gens arrêtent de raconter des histoires dans le dos de Rhea."

"Et mon passé... On me le jette au visage chaque fois que je fais le tour du village pour voir qui pourrait avoir besoin de moi. Je n'ai que deux façons de m'en débarrasser : quitter le village ou prouver que je n'ai rien à voir."

Il se sentait en colère, mais était incapable de savoir contre qui. Il était désorienté et chercha sa broche à tâtons sous sa cape. le contact du métal le calma un peu et lui permit de réfléchir plus sainement. Il regarda intensément Oanell, se demandant comment, elle, gèrerait le fait d'être avec lui, si elle serait prête à endurer cette vie. Il soupira, gardant pour lui cette dernière réflexion avant de reprendre :

"J'aime ce village et je le déteste en même temps, et je ne sais pas comment gérer tout ça. J'ai envie de prouver aux gens d'ici que je peux être utile, et pas que je dois rattraper en permanence un crime qui n'est peut-être même pas le mien, tu comprends ? Et tu n'as pas à t'excuser, tu es l'une des rares personnes ici à me dire franchement ce qu'elle pense."

Il était prêt à en rester là mais il restait une question qui lui brûlait la langue depuis des heures maintenant, et celle-ci décida, timidement, qu'il était plus que temps de crever l'abcès.

"Je voulais... te demander une chose : pourquoi... pourquoi m'as-tu embrassé cette nuit ?"

[NailsEater]

"Je voulais... te demander une chose : pourquoi... pourquoi m'as-tu embrassé cette nuit ?"

Hmm ? Devant la porte de la rosace tu veux dire ?

Prenant le temps de la réflexion, elle laissa Aeldred attendre un peu. Pour l'avait-elle embrassé ? A vrai dire, elle ne se posait pas souvent la question du pourquoi.

Tu veux une réponse honnête ? J'en ai aucune idée. Tu étais là, à grommelé que tu resterai dehors, ça m'a dépité. Et comme je ne voulais pas attendre seule à l'intérieure et que j'ai bien compris que tu ne te laisse pas convaincre par les mots bah ... au moins je savais que tu me suivrais sans te poser des milliers de questions, puis avec un grand sourire: Oui, je pense que c'est pour ça !

Ils arrivaient presque au château, où les gens s'affairaient. Hésitante, elle attendit de voir si Aeldred voulait s'approcher ou attendre ici. Ce n'était sûrement pas les réponses qu'il aurait voulu mais après tout c'est comme ça que les choses ce sont passées ...
Y avait-il autre chose ? Oanell essayait de se souvenir des émotions qu'elle avait ressentie la veille.

[Casaïr]

"Alors c'était tout ?..."

C'était vraiment tout ?...

Aeldred affichait un sourire triste mais intérieurement il était dévasté. Cela ne voulait rien dire pour elle alors... Il se sentit stupide d'avoir laissé son imagination se débattre avec un problème qui n'en n'était visiblement pas un pour tout le monde, et surtout de s'être laissé berner de la sorte.

Après tout, on est rien l'un pour l'autre. A quoi je m'attendais ? Je suis vraiment un imbécile...

Il suivit Oanell sans plus vraiment parler, ne répondant que laconiquement quand elle parlait. Il sentit sa bulle se refermer et ne fit cette fois aucun effort pour s'en dégager. Le bruit en provenance du château lui fit lever la tête et il put voir les préparatifs demandés par Blodwen suivre leur cours mais cela ne l'intéressait même plus. Il ferait ce qu'on lui demande malgré tout, parce que, finalement, c'était ce qu'il faisait de mieux.

Mon refuge me manque...

Sans dire un mot, il alla s'installer dans un coin, loin du tapage et des regards indiscrets pour prendre sa broche. N'étant pas dans son Refuge, il ne pouvait pas l'installer sur le petit tertre de pierre qu'il avait assemblé pour sa mère, alors il la posa simplement par terre avant de s'asseoir en face.

"Maman, je suis vraiment aussi manipulable que le dit Oanell ?... Ca fait quoi de moi, alors ?"

[NailsEater]

"Alors c'était tout ?..."

Le reste du trajet se fit assez silencieux. La jeune n'avait pas pensée provoqué ça. Ou n'avait juste pas pensée tout cours.
Raaaaah, c'est compliqué d'être honnête avec les gens ... Un instant, ils te remercient d'être franche et l'instant d'après ils boudent.
Que voulait-il que je réponde ! Après tout, on ne se connait pas et ... s'il n'est pas content des réponses, pourquoi pose-t-il des questions.

Quand il s’isola dans un coin, Oanell ne le suivit pas, comprenant ce que cela voulait dire. Elle s'énervait mais en vérité, l'éloignement d'Aeldred la touchée, plus qu'elle ne l'aurait imaginé, et la culpabilité pointait timidement le bout de son nez. Faut vraiment apprendre à tenir ta langue, ma vieille. Évidement, tu t'attendais à quoi. Il te fait une déclaration d'amour et toi tu lui dis que tu l'as embrassé pour qu'il "bouge de devant la porte". Désespérante ...

Elle aida, comme elle pouvait, devant le château, jetant régulièrement un regard à son ami. S'il l'était encore.

[Casaïr]

Aeldred ruminait depuis presque une heure déjà, ses pensées dérivant sur des eaux incertaines. Elles finirent par échouer sur la plage des souvenirs de la veille et, devant leur insistance à creuser dans le sable, le jeune homme s'attarda un peu dessus en soupirant.

Il revit la soirée, ses échanges avec Oanell, et eut une étrange impression. Sentant qu'il lui fallait se focaliser dessus, il attrapa le rossignol d'argent au sol, s'assit aussi confortablement qu'il était possible de le faire et ferma les yeux. Il revit ce moment gênant dans les couloirs, leurs mains qui se frôlèrent ; à quel point elle avait été bouleversée peu après qu'il lui ait refait sa déclaration, sa vaine tentative pour la consoler ; puis enfin, la scène clef, devant la rosace, ou elle l'embrassa. Elle s'était élancée vers lui après qu'il l'ait remerciée, et en y réfléchissant bien, ce baiser...

Si elle avait voulu le tromper, comme il le croyait, elle aurait sûrement fait autrement. Elle y arrivait toujours d'ailleurs, sans pour autant avoir besoin de coller ses lèvres aux siennes. Voilà que je me fait expert en baisers maintenant ! songea-t-il un peu gêné. Mais en se concentrant dessus...

Il eut soudain une idée, à double tranchant certes, mais qui lui permettrait d'en avoir le cœur net par la suite. Peut-être pas dans l'immédiat mais au moins, il se sentirait capable d'attendre une vraie réponse de la part d'Oanell.

Sans plus attendre, il se releva d'un coup puis, dans le même élan, se dirigea d'un pas rapide vers Oanell, l'air décidé et les sourcils froncés.

"Je peux te parler ? Un peu à l'écart, s'il te plait."

[NailsEater]

Au bout d'un temps certain, Aeldred finit par revenir vers elle, d'un air un peu trop assuré et revêche pour ce soit de bon augure.

"Je peux te parler ? Un peu à l'écart, s'il te plait."

Elle acquiesçât et le suivi sans un mot. Qu'est ce qu'il lui passait encore par la tête ?Ne sachant qu'elle attitude adopté, elle se contenta d'afficher un air interrogateur et sûrement un peu perdu ...

[Casaïr]

L'air un peu perdu d'Oanell failli détourner le chasseur de sa tâche mais il se devait d'aller jusqu'au bout cette fois-ci, sinon cela ne servirait à rien. Il vérifia qu'ils étaient effectivement bien seuls avant de se lancer, un doigt accusateur pointé vers la jeune barde.

"J’ai deux choses à te dire : premièrement, je t’en veux, tu sais ! Pas pour ce que tu m’as dit tout à l'heure, ni pour la façon dont tu l’as dit, mais parce que je crois que tu te mens à toi-même ! J'y ai bien réfléchis, et je me dis que c’est toi que tu as essayé de convaincre tout à l’heure, pas moi. Et deuxièmement, tu as raison : Si je ne me donne pas les moyens d’avoir ce que je veux, autant continuer à faire du sur place toute ma vie, et ça, plus jamais. Maintenant, tu vas sans doute m’en vouloir pour ce que je vais faire, mais tant pis, j'assumerai les conséquences, quoi qu'il arrive."

Et, sans lui laisser le temps de se défiler ou de rétorquer, il franchit les derniers mètres qui les séparaient pour l’embrasser passionnément, de ces baisers trop longtemps réprimés et qui n’attendaient qu’une occasion pour se libérer et s’exprimer. Il ne rompit ce contact enfiévré que pour coller son front à celui d’Oanell et de lui chuchoter, les yeux mi-clos : « je t’aime ».

Il finit par reculer, le regard pétillant de malice, et il lui lança :

"Maintenant, à toi de décider ce qui te semble le mieux pour toi. Jusqu'où es-tu prête à t'aventurer ? lui demanda-t-il avant d'ajouter : Je ne te demande pas de me répondre maintenant, mais au moins d'y réfléchir. J'ai fait ce que je devais, et même si c'est égoïste, au moins tu sais jusqu'où je suis décidé à aller pour toi. Et je ne t'en voudrai pas si tu décides d'en rester là, tu auras toujours mon amitié."

Il resta là, haletant légèrement et le cœur battant à tout rompre, à attendre un signe ou une parole de la jeune femme.