Fortuna Imperatrix Mundi

Fredelme et Rozenn arrivaient à la rosace, accueillis par le garçon d'écurie. Ils ne tardèrent pas à rejoindre la cellule de Uilleam. Arborant un sourire serein qui lui était habituel, Fredelme s'avança : "J'ai appris qu'une âme requérait mes services. Me voici, vecteur Fredelme."

Iarnuud alla à sa rencontre et s'inclina respectueusement, sans effusion : "Mon frère. " avant d'expliquer

- Un chevalier hilderin revenu de mission dans les marais et fortement éprouvé par ce qu'il a vécu au cours de sa captivité requiert votre soutien spirituel. Il ne se déclare pas uniste, mais son trouble le porte à rechercher un guide, de sorte qu'il vous a réclamé avec insistance.
- Merci, j'espère pouvoir l'aider. Les récits que l'on entend des marais sont effrayants, mais c'est face à l'adversité que se révèle la valeur de l'âme. Puisse l'Unique nous guider dans ces épreuves.

Rozenn salua Fredelme alors que celui-ci se rendait dans la cellule. Elle profita d'une petite pause pour s'asseoir sur un tabouret, son endurance toute relative était mise à rude épreuve, cependant qu'elle constatait qu'hormis cette fatigue, tout allait bien. Elle interrogea du regard les hilderins mais son attitude indiquait clairement qu'elle ne prendrait pas la parole à moins qu'ils ne le veulent.

Jazkez s'éloigna de la geôle de Uilleam après avoir salué le vecteur Fredelme, à la fois étonné et déçu de découvrir que son compagnon doive se tourner vers la foi uniste et non pas les C'Maoghs pour y chercher un apaisement. Il rejoignit la magientiste Pereg qu'il aperçut assise un peu plus loin.

-Bon, il a l'air plus ébranlé par ce qu'il a traversé que possédé par des forces obscures. Il mériterait surtout un bon coup derrière les oreilles en lieu et place d'une confession à mon avis.

Il manifesta quelques signes d'impatience en regardant par dessus son épaule puis soupira visiblement résigné à attendre que cette mascarade soit terminée.

-Avez vous tout ce qu'il vous faut pour notre voyage jusqu'a Déas ? Nous ferons halte chez Gloada Mac Elowan comme d'accoutumée. Si vous voulez faire plaisir à Blodwen vous pourrez lui piquer quelques couverts en argent histoire de renflouer les caisses du domaine.

"Ho oui, répondit Rozenn avec un franc sourire, j'ai même un cheval, bien que je ne sache pas le monter, je l'avais acheté pour tirer le chariot qui m'a amené jusqu'ici. " Elle s'interrompit avec de reprendre en plaisantant. "Je pense que je ferai aussi bien de venir à pied, j'irai tout aussi vite et je n'aurai pas mal aux reins, tout en évitant les chutes disgracieuses."

Elle regarda dans la direction qu'avait prise Fredelme.

"Que pensez-vous de Uilleam ? Je ne lui ai pas parlé très longtemps, mais il semble avoir un énorme poids sur la conscience. Je ne l'ai pas connu avant, vous qui avez été sous ses ordres, j'imagine que cela doit être étrange de le revoir dans de telles circonstances. Quant à l'uniste, c'est moi qui le lui ai proposé, il désirait s'entretenir avec le demorthèn, mais étant absent pour le Tsioghair, il ne restait qu'une seule autre personne dépositaire d'une religion quelconque de disponible ici."

L'interrogatoire partiellement terminé, l'hilderin fut seul dans sa geôle quelques minutes. Assis sur sa paillasse, la tête dans les genoux, les yeux fermés, il essaya de chasser l'horreur de l'expérience qu'il avait vécue pour rétablir les fils manquant entre le moment de sa disparition et son retour. En vain. Ni pitié, ni répit. Chaque fois qu'il fermait les yeux, elle lui revenait la fracture dans son esprit, l'aliénation qui prenait le contrôle de sa raison : la forme abominable d'une femme, d'une insatiabilité, d'une concupiscence innommable. Couvert de sueur, il sursauta : et si Elle revenait ? Il lui lécherait les seins et lui arracherait le coeur avec les dents. Brusquement il se releva, il alla se rincer le visage, puis il retourna s'asseoir les mains sur le visage. Son penchant pour les femmes était à l'origine du mal. Soif de plaisir, gloutonnerie, bestialité, carnage... La chair, mon père, la chair est un péché... Et puis la porte s'ouvrit, la lumière éclaboussa la petite cellule. Dans l'embrasure, le Vecteur.

Le prisonnier cligna des yeux, dévisageant le visage de son bienfaiteur, la voix enrouée :

Merci d'être venu, mon.. père ?

Casaïr a écrit : ↑

10 févr. 2020, 21:19

Quant à l'uniste, c'est moi qui le lui ai proposé, il désirait s'entretenir avec le demorthèn, mais étant absent pour le Tsioghair, il ne restait qu'une seule autre personne dépositaire d'une religion quelconque de disponible ici."

-Ça me rassure un peu, je me demandais bien quelle mouche l'avait piqué pour qu'il se transforme subitement en grenouille de bénitier. Uilleam ? J'en connais ce qu'il faut connaitre. Je suis enfin j'étais, à son service depuis que nous avons été assigné a Swelbecky, avant il m'était juste connu de vue ou de ouïe-dire tant que nous étions sur Osta Baille. Il s'est un peu emballé quand nous sommes arrivés ici, j'ai l'impression qu'il s'est dit qu'il y avait un truc à faire avec Terfynysel et L'Ordre. Sauf que là ou lui voyait une promotion dans cette nouvelle affectation nous y voyions tous au contraire une punition. Je ne lui en veux pas vraiment pour ses décisions car elles étaient déjà la conséquence de la fièvre chimérique qui lui a brouillé l'esprit. Je lui en veux surtout pour la mort de Morch. Et aussi parce que depuis qu'il est réapparu c'est une vraie tête à claques ! Encore pire que quand il était en charge ! On a vraiment pas besoin d'un second Jeryl des marais en ce moment. Donc je vais le ramener à Déas et on va pouvoir tourner la page sur cette sombre histoire qui ne grandit personne et qui a déjà trop coûté.

Jazkez jeta un oeil dans le fond des géoles d'où lui parvenaient quelques bruits de discussion étouffés.

-Je peux jeter un coup d'oeil à votre canasson si vous voulez. Je vous dirai si vous pouvez le monter sereinement ou s'il vaut mieux le laisser tranquillement ici. Je ne pense pas que vous soyez obligée d'aller à Déas à pied, au besoin je vous trouverai une autre monture. Au pire je sellerai cette mule de Terkhem et il vous portera jusqu'à la citadelle.

Rozenn se retint de rire, il lui semblait que Jazkez ne savait guère comment réagir et semblait prêt à bouder comme un enfant. Elle réprima donc son envie afin de ne pas vexer davantage le noble hilderin et se contenta d'un sourire poli avant de prendre la parole.

"De ce que j'entends, je pense pouvoir dire que nous sommes loin du cas de ce Jerryl : après tout, Uilleam s'est rendu de lui-même et cherche à expier ses fautes, et il ne semblait pas mauvais non plus avant toute cette affaire. Rien que cela devrait vous rassurer."

La jolie magientiste, d'abord surprise par la proposition de Jazkez de s'occuper de son cheval, apprécia finalement l'attention du chevalier.

"Examiner Elfa ? Je vous en saurais gré, c'est une bonne jument qui m'a bien aidé sur la route, d'un tempérament calme, mais je ne sais pas si elle a été éduquée pour la monte. Enfin, même si cela était le cas, je ne possède pas d'harnachement ni de selle. En fait, n'étant jamais montée à cheval moi-même, je pense qu'il faudrait m'attacher dessus si vous ne voulez pas me voir choir au moindre cahot !" rit-elle franchement.