Fortuna Imperatrix Mundi

"C'est une possibilité, admit Rozenn. Prêt à vous jeter à l'eau pour vérifier par vous-même ?"

Tandis que le couple discutait de stratégie...
Les deux investigateurs sursautèrent en découvrant qu'une nuée de 8 tentacules à extrémité de nénuphar s'élevaient brutalement, 4 s'attaquant à Rozenn et 4 à Uilleam.
Les horreurs étaient rapides et risquaient tout à la fois de les étrangler, frapper, entrainer dans les profondeurs et noyer !

Depuis la berg..

Des tentacules?!!! Uilleam ne perdit pas une seconde à y réfléchir. En force, et à grands coups de rames en arrière :

EN ARRIERE TOUTE ! ON S'ARRIME DAME ROZENN !

C'était à croire qu'il avait été lieutenant de marine dans une autre vie.

L'assaut fut tellement soudain que Rozenn n'eut qu'à peine le temps de réaliser que le feond les prenait pour cibles. Déjà, quatre tentacules l'attaquaient de toutes parts et elle tenta de se défendre tant bien que mal devant un tel déchaînement.

Uilleam avait initié un mouvement énergique et efficace qui put le mettre hors de danger, mais sa victoire fut amère, car dans le même temps, la créature élança ses tentacules et captura Rozenn, qu'elle entraîna dans les airs.


Pendant une seconde interminable Rozenn se sentit irrésistiblement tirée vers les flots.

Rozenn hurla lorsque les tentacules du drewfilig s'emparèrent d'elle avant de la soulever hors de la barque comme un fétu de paille. Au milieu de la vague de panique qui menaçait de la submerger, elle tenta d'agripper sa dague pour découper, tel un saucisson dégoûtant et puant le poisson, l'un des appendices du feond.

Rien n'avait préparé Rozenn Pereg d'Osta Baille à l'horreur qui s'empara littéralement d'elle. L'agression fut rapide et massive, envahissant brutalement tous ses sens. Le contact visqueux et ferme des appendices végétaux la saisit simultanément à plusieurs endroit de son corps et une odeur nauséabonde de vase putride lui emplit la bouche et les narines alors qu'un des ces pseudopodes s'enroula autour de son cou puis courut le long de son visage. Son cri s’étouffa dans sa gorge et elle sentit ramper sur sa peau les liens urticants qui se frayaient un chemin autour de ses membres et de sa cage thoracique. C'est comme si son corps passait sous une roue de meunier qu'on aurait posé sur elle lentement, et qui l'écrasait doucement mais inexorablement, pouce après pouce. L'esprit rationnel et peu combatif de la magientiste se fissurait sous la perverse férocité de l'agression dont elle était l'objet. Les dessins joliment crayonnés des plantes de ses livres l'étouffaient. L'encre avait une odeur de fange. La beauté se muait en souffrance...

Le contact brusque de son visage avec le bord de la barque ramena sèchement Rozenn à la réalité crue. L'esprit sonné par le choc mais encore consciente elle comprit que la créature avait soudainement heurté son corps contre le bois avant de la suspendre de nouveau, la soulevant graduellement au dessus de la barque qui commençait à s’éloigner sous l'impulsion de Uilléam. Son nez saignait. Les sang coulait abondamment, mouchetant le bois en une ligne qui s'étira progressivement le long de l'embarcation jusqu’à en atteindre le bout puis glisser sous la surface trouble du marécage. Son corps et son esprit s'engourdissaient, pourtant elle pouvait toujours sentir le manche de sa dague verrouillée au creux de son poing fermé.

Malheureusement l'inévitable arriva, son injonction n'avait pas suffit, Dame Perreg n'avait pu s'arrimer. L'hilderin lâcha tout, ramassa son épée, et en trois enjambées fut à l'avant de la barque. Visant une masse noirâtre sous l'eau, il plongea. Profondément, avec l'élan et l'impulsion de ses jambes sur le dernier rebord de bois. Son objectif : planter rapidement et directement sa lame au coeur de la bête.