[Focus] Occulte (Aeldred)

[Pwyll]

Mettant à profit l'esprit plus coopératif d'Aeldred suite à l'effet très apaisant qu'avaient eu sur lui les paroles de Rhéa, Ultana accéléra les préparatifs.

On finit par obtenir un petit foyer bien timide et crachotant, luttant difficilement contre l'humidité ambiante. Tout en alimentant régulièrement celui-ci, la blonde demorthèn expliqua à nouveau ce qui allait se passer :

"Après avoir bu un peu de cette décoction... et non pas la peine de faire la grimace, elle n'est pas si mauvaise..., tu t'allongeras sur la fourrure, au pied de l'ancien monolithe. Tu entreras doucement dans un sommeil un peu différent de celui dont tu as l'habitude. Grâce à la plante et aux C'Maoghs, tu seras en partie réceptifs à nos paroles et nous pourrons t'aider, te protéger et te guide dans tes songes."

Ultana fit une pause, humant la vapeur s'échappant de la petite marmite qui était posée au-dessus du maigre foyer. "Voilà, l'amertume est suffisante, dans quelques instants, tu pourras boire."

"C'est un peu de la force combinée d'Usghardh, Adhar et Roimh qui nimbera ton corps et ton esprit. Avec toi nous avancerons, main dans la main, jusqu'à trouver la force qui saura chasser ces cauchemars pour de bon. Il ne s'agit pas d'oublier le passé, mais d'être capable de résister au poids néfaste qui te retient et vient gêner le courant profond du Rindath qui parcoure ton être et fait de toi une petite parcelle de ce vaste monde."

Le trio vint s'installer sur la fourrure étendue au pied des étranges et fascinants glyphes parcourant le doigt de pierre.

Ultana fit signe à Rhéa qu'elle pouvait donner la décoction à boire à Aeldred. Pendant ce temps, la demorthèn s'installa à genoux, saisit le petit tambour et, d'un battement léger et maîtrisé, commença à faire naître un rythme agréablement hypnotique.

L'effet gagnait en puissance à chaque nouvelle note qu'Ultana ajoutait d'une voix profonde et riche qu'on n'aurait pu lui deviner et qui semblait surgir du fond des âges.

[Casaïr]

L'air dubitatif, Aeldred prit le bol et but une gorgée... Pas si mauvaise ?! Mais c'est carrément dégueux !! Le garçon se força à boire, une grimace de dégoût sur le visage, avec la peur de tout vomir une fois le breuvage avalé.

Il jeta un œil noir à la demorthèn quant au mensonge sur le goût de cette chose avant de s'installer sur la fourrure. Il n'avait absolument rien compris au blabla d'Ultana et se demandait si elle savait vraiment ce qu'elle faisait, en fin de compte, ou si elle n'inventait pas au fur et à mesure.

Une fois installé, il écouta Ultana jouer du tambourin mais se montrait malgré tout réticent quant à ce qui allait vraiment se passer. C'est donc avec un soupçon de peur qu'il ferma les yeux et tenta de se détendre.

[Iris]

Réagissant au quart de tour, Aeldred, la peur au ventre, essaya d'ouvrir la porte, hurlant "Maman ! MAMAN !!!" mais il n'arrivait à rien, et derrière, les cris étaient atroces.

"Je vais chercher de l'aide, maman !!"

Courant comme s'il avait la mort aux trousses, il sortit en trombe de la maison familiale, criant aussi fort qu'il le pouvait.

"A L'AIDE ! VENEZ M'AIDER ! IL FAIT DU MAL A MAMAN !!"

Il chuta plusieurs fois dans sa course, s'écorchant méchamment les mains, les coudes, les genoux. Il pleurait et hurlait toujours, incapable de se rendre compte si les villageois réagissaient à ses suppliques.

"AIDEZ-MOI !! PAPA, IL... Il tue maman..."

Aeldred courait chercher de l'aide, mais il habitait très à l'écart du village et pour s'y rendre il fallait emprunter des chemins forestiers sombres... Le vent secouait les branches de plus en plus fort, au point d'en briser certaines, qui tombèrent avec des craquements d'autant plus terrifiant pour l'enfant.

Il était seul, dans la forêt, entouré des ombres menaçantes, à courir chercher de l'aide, en vain. Il courait, il courait, mais il lui semblait qu'il n'arrivait pas à avancer, qu'il ne serait jamais à temps au village pour sauver sa mère qui avait tant besoin de lui.

La forêt paraissait infinie, et à mesure qu'il s'y enfonçait, il la reconnaissait de moins en moins.

Il se retrouva, confus, dans un sous-bois inconnu, ne voyant plus de chemin devant lui et plus non plus quand il se retournait. Que se passait-il ?

[Casaïr]

Aeldred avait peur, perdu qu'il était. Il connaissait pourtant par cœur la route menant jusqu'au village pour l'avoir arpenté presque tous les jours de sa courte vie. La forêt lui semblait menaçante, sans doute même d'avantage que dans ses souvenirs.

Il se tournait en tout sens, à la recherche de repères connus mais n'en trouva pas. Il vit du regard un arbre qui lui semblait plus imposant et, paradoxalement, moins effrayant pour lui et courut jusqu'à lui pour s'y adosser, pantelant. Il s'efforça au calme, avec la vague impression que son cœur allait exploser alors qu'il le sentait battre jusque dans ses tempes.

"Il y a quelqu'un ? Ohé !"

Il se sentit immédiatement ridicule sans savoir pourquoi. Il n'y avait aucun bruit autour de lui et à part des arbres, il n'y avait rien. La nuit d'encre n'aidait en rien pour rassurer l'adolescent qui finit par se laisser tomber au pied de l'arbre, en proie à un désespoir grandissant. A quoi ça servait tout ça, au final ? Les arbres semblaient le juger, tendant leurs branches vers lui comme autant de bras terminés par des mains griffues. N'y tenant plus, il passa de la terreur à la colère et se mit à hurler aussi fort que ses poumons le lui permettait.

"Qu'est-ce que je dois faire alors ? Dites-le moi si vous êtes si malins !!"

[NailsEater]

Aeldred ? Je suis là, je veille sur toi.

La voie douce, connue d’Aeldred, résonnait. S’il était difficile de savoir d’où elle provenait, elle semblait se déplacer, rendant sur son passage le lieu moins effrayant. Les branches qui semblaient vouloir l’aggriper l’instant d’avant, paraissaient le protéger finalement.

Je t’aimerai toujours. Tu n’as plus rien à craindre, je suis là.

[Casaïr]

Aeldred s'arrêta instantanément en entendant la voix. Il n'était pas sûr d'avoir reconnu la voix qui venait de s'adresser à lui. Il nota le changement dans les arbres l'entourant, auparavant si menaçants et maintenant... aimants ?

Quand la voix se fit entendre à nouveau, il la reconnut tout à fait sans trop y croire. Il regardait autour de lui, prit d'un fol espoir, son visage s'illuminant de seconde en seconde.

"Ma... Maman ? Où tu es ? Montre-toi, je ne te vois pas ! Papa t'a laissé partir, tu as pu t'échapper ? Les autres t'ont sauvé ?"

Il se relevait tout en parlant, de plus en plus pressé de voir sa mère.

"Allez, maman, je suis trop grand pour jouer à cache-cache maintenant !"

[Pwyll]

La voix qui avait retenti semblait associée à une lumière diffuse ne provenant ni du soleil, ni de la lune ou des étoiles et encore moins d'une flamme.

Aeldred n'en n'avait pas eu conscience lorsqu'elle avait jailli de nulle part, trop surpris et transporté par cet espoir soudain. Toutefois, maintenant que cette lumière bienfaitrice et apaisante nimbait un petit chemin à quelques dizaines de mètres de lui, le garçon ne pouvait plus avoir de doute.

Le reste de la forêt avait repris une allure si ce n'est menaçante, mais du moins inquiétante de par la nature même des profondeurs sauvages de la péninsule qu'il fallait apprendre à arpenter à défaut de pouvoir les domestiquer.

La lueur s'éloignait sur le chemin, lentement, à un rythme irrégulier, comme pour laisser le temps à Aeldred de saisir l'opportunité de la suivre.

Alors que le garçon s'était levé et cherchait à attirer l'attention de cette présence, ses premiers pas sur le sentier l'amenèrent soudainement face à un entrelacs de buissons épineux aux excroissances acérées.

Maintenant, la lueur s'éloignait plus sûrement. Il fallait agir.

[Casaïr]

Aeldred resta interdit devant le spectacle qui se présentait devant lui. Cette... chose se tenait devant lui et semblait attendre quelque chose de lui. Au moment où il chercha à s'approcher, la lueur fila, obligeant l'adolescent à la suivre.

"Eh, attends !"

Il se sentit immédiatement idiot d'interpeler ce truc étrange qui manifestement ne parlait pas. Il suivit la lumière d'un bon pas jusqu'à ce qu'elle traverse un buisson de ronces peu engageant. C'est bien ma veine, pensa-t-il. Il chercha du regard un autre chemin mais il se rendit compte que la lumière ne l'attendrait pas et cela l'effraya. Passer et se blesser, ou trouver un autre sentier au risque de voir disparaitre cette chose ?...

Il se mordit la lèvre, de plus en plus effrayé et finit par s'engager en courant dans les ronces, plus par peur de rester tout seul que par courage.

[NailsEater]

- Je suis là. Ne t'inquiète pas. Je veillerai toujours sur toi, quoiqu'il arrive.

La voie réchauffait le coeur d'Aeldred. Cette présence, même lointaine, semblait une bougie dans les ténèbres.

- Tu n'es pas seul ...

[Casaïr]

Cette voix, c'était forcément celle de maman, sinon cela n'aurait eu aucun sens. Aeldred, enhardi par cette voix si familière bien que résonnant étrangement en ces lieux, s'efforça de suivre la lueur du mieux qu'il le pouvait malgré les ronces qui le blessaient cruellement. La douleur était vive, mais l'envie de continuer toujours présente. Il jeta un œil derrière lui, sur cette forêt si sombre, et il pressa le pas pour s'en éloigner toujours d'avantage.

Regardant de nouveau vers l'avant, il essaya d'estimer la distance qu'il lui restait à parcourir pour sortir de ces buissons d'épineux mais l'obscurité ambiante et sa propre peur le gênaient dans sa tâche, et il recommença à avoir peur : et si jamais il restait coincé ici, au beau milieu des ronces semblant prendre plaisir à le torturer ? Le simple fait de poser un pied devant l'autre devenait plus une nécessité qu'autre chose. Il ne voulait pas finir ici mais il n'avait plus grand chose à se raccrocher.

Pourquoi je fais ça ? Maman n'est pas par là, alors pourquoi je suis ce truc ? Si ça se trouve, ça cherche à me perdre et je vais mourir ici...

Il finit par tomber à genoux, meurtri aussi bien physiquement que mentalement, mais une petite, toute petite lueur d'espoir refusait d'abandonner et continuait de le pousser, alors que le reste de son être n'aspirait plus qu'à l'abandon pur et simple, à se reposer ici-même et attendre...

C'est cette lueur qui prit le contrôle du corps d'Aeldred, le poussant à avancer vaille que vaille, s'aidant de ses mains pour continuer à avancer alors que tout lui hurlait l'inutilité de ce qu'il faisait.

Il faut que ça ait un sens ! Sinon, à quoi bon !