11 Sigmarzeit 2522 CI - Une semaine après le premier jour de l'été
Cela faisait des mois que Silk traversait l’Empire, vivant des quelques opportunités charitables et charités opportunistes, cherchant à trouver un chevalier capable de faire de lui son égal (à moitié tout de même) et montrer à toutes ces panses garnies et ces pieds brossés que lui et Gueule d’Or étaient dignes de devenir ce qu’ils leur avaient refusé.
Gueule d’Or était de bonne compagnie et toujours enthousiaste à reprendre la route. Ils avaient déjà suivi le Stir et visité Averheim et même Nuln, mais ils n’y avaient pas trouver là de chevaliers à qui se joindre. A vrai dire, les ‘vrais’ chevaliers étaient chose rare et les principaux ordres de chevalerie de l’Empire étaient tout aussi fermés que celui de la Patte.
Néanmoins, à Nuln, (quelle cité !), il s’était plusieurs fois entendu dire d’aller se trouver un chevalier en Bretonnie*.
Se renseignant sur les moyens de s’y rendre, il se rendit vite compte que ce ne serait pas une chose simple, les droits de péage à la sortie des cols des Montagnes Grises étant exorbitant, du moins du point de vue de sa maigre bourse. Les passes secrètes cachées dans les montagnes étaient suicidaires. Dans cette situation, il se mit en tête de trouver la Bretonnie dans l’Empire, ce qui l’amena à apprendre l’existence à Wissenburg, la capitale du Wissenland, non loin de Nuln, d’un restaurant nommé “Le Roi Oisillon”, dont le patron était un bretonnien expatrié et qui saura probablement lui parler de chevaliers.*Expression du Wissenland équivalent chez les halflings à “Va te faire cuire un oeuf”, subtilité que Silk ignore.
C’est ainsi que quelques jours plus tard, Silk se trouvait dans la belle ville de Wissenburg, et demandait au patron du Roi Oisillon ce que son exceptionnel établissement avait à offrir. Suivant les conseils avisés du patron, Benoît Dumeaux, Silk savoura probablement la meilleure cuisine depuis son départ du Moot, une belle pièce de veau baignant dans une onctueuse sauce crémeuse, arrosée par un vin bretonnien excellent. Le sujet gastronomique abordé et débattu, le patron bavarda avec lui et trinqua à leur santé.
Quand il lui demanda où trouver un chevalier bretonnien qui l’accepterait, Benoît réfléchit un moment avant de finir par lui conseiller de trouver sir Alnoius. Il le connaissait bien et avaient quelques affaires en commun.
Benoît lui dit qu’il le trouvera très probablement ce soir près du terrain de Rotzball (sport prisé à Wissenburg par le fait de la quantité de Morveux infestant les égouts, consistant à l’affrontement de deux équipes cherchant à amener une balle faite d’une morveux (également appelés, Snotling, espèce de modèle réduit de gobelin), ligoté par des lanières de cuir ,dans le but adverse). De plus, s’il voulait s’attirer les bonnes grâces d’un chevalier, il lui conseilla de venir en offrant ses services comme écuyer, c’est ainsi que l’on devient chevalier en Bretonnie, et tout chevalier trouve valorisant d’avoir un écuyer pour le servir. Et dernier conseil, ne pas oublier le titre de ‘Sir’ quand il parle à un chevalier bretonnien, ils sont assez susceptibles vis à vis de leur titre.
Quand Dumeau lui indiqua le montant de son repas, Silk lui rappela qu’il avait accepté ce que l’établissement avait à offrir, sinon, il ne se serait pas permis, mais Dumeau ne goûta pas à cette subtilité et il lui fallut lui glisser entre les doigts avant d’être conduit à la garde… Il allait devoir éviter le quartier de Dotternufer à présent, quel dommage, la cuisine du roi fraîchement plumé était vraiment succulente…
Silk se rendit donc à l’écart de la ville, au nord ouest, où se trouvait le terrain de Rotzball. Alors qu’il cherchait le chevalier sans cheval, il entendait les ovations, insultes, et brouhaha indéfinissable du public assistant à la rencontre entre les Ecorcheurs des Égouts et les Enclumes des Forges. La corne de chasse sonna la fin du match alors que Silk repérait deux hommes surveillant les abords de l’enceinte, dont un vêtu différemment des impériaux, probablement le chevalier.
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Sir Alnoius de Bellefontes et Von Kristen avait été recrutés pour assurer la sécurité à l’occasion de la finale du tournoi de Rotzball. Ils n’étaient ni l’un ni l’autre le genre d’homme que l’on aurait pensé retrouver là, tous deux de noble naissance, l’un expatrié de Bretonnie, du duché de Lyonesse comme le rappelait le lion de sa tunique, l’autre fils d’un seigneur possédant quelques terres de chasse près de Wissenburg. Mais ils étaient là tous les deux car ils avaient besoin d’argent malgré leur statut.
Sir Alnoius avaient pendant des années où il était au service de la dame de la Motte-Vaillard, espéré obtenir ce pour quoi il s’était donné corps et âmes … corps surtout … Cependant, la quinquagénaire Jeanne de la Motte-Vaillard, héritière sans descendance du fief, qu’il avait conquis et dont il avait reçu les promesses d’union, avait eu la bonne idée de rendre l’âme en sa compagnie chaleureuse, avant d’avoir pu en faire son époux.
Cette mésaventure lui valut d’être surnommé l’Ereinteur de Carne dans tout le duché et même au delà, et d’être gentiment chassé du fief par le nouveau comte de la Motte-Vaillard, un cousin de Jeanne qui convoitait le fief également depuis bien des années.
Sir Alnoius avait donc dû partir loin, et c’est dans l’Empire qu’il espérait pouvoir se refaire. Mais la vie n’était pas facile dans l’Empire pour un chevalier errant expatrié, qui ne possédait plus que son cheval et ses affaires. Il voulut se rééquiper à Wissenburg et trouva de l’aide par l’intermédiaire de son compatriote Benoît Dumeau qui lui prêta un peu d’argent. Mais séduit par la vie auprès de la noblesse locale et cherchant à s’y faire une place, il tarda à rembourser Dumeau, vivant au dessus de ses moyens dans l’espoir de trouver parmi ces nobles un nouveau mécène, et finit par épuiser son pécule. Il n’avait à présent plus le choix, il devait rembourser Dumeau et pour cela, il acceptait le moindre emploi correctement payer.
De son côté, l’histoire de Von Kristen est bien différente mais tout aussi malheureuse. Fils cadet, il aurait dû être capitaine de quelques régiments dans l’armée mais cette vie n’était pas pour lui et il ne pouvait se résoudre à s’éloigner de leur manoir où son père malade restait alité. Leur famille, bien que descendant d’une ancienne lignée n’avait plus que de maigres ressources et les 3 fils du seigneur veuf et malade ne pouvaient se permettre de rester oisifs. Les terres de chasse ne les aidaient pas à vivre et les principaux revenus étaient ceux que percevait son aîné par son travail pour le comte Stephan von Windisch-Grätz, intendant de la comtesse Emmanuelle von Liebewitz, l’assistant auprès du conseil de la ville. Lui même n’a qu’un petit revenu dans son emploi de patrouilleur pour la garde de la ville mais il a bon espoir de monter les échelons et un jour être capitaine de la garde de Wissenburg. Enfin, leur frère est parti de son côté étudier la médecine, une fois médecin, il espère pouvoir soigner leur père.À savoir que Dumeau garde en gage le cheval et une partie de l’équipement de Noius tant qu’il ne l’aura pas remboursé ce qu’il lui devait. C’est pourquoi Noius est coincé à Wissenburg
La finale étant un des grands événements de l’année, la garde avait recruté quelques personnes supplémentaires pour assurer la sécurité, dont le chevalier bretonnien, c’est ainsi que Von Kristen et sir Alnoius se sont retrouvés à patrouiller ensemble quand ils repérèrent un de ces fichus halflings, pickpocket par excellence, rôdant dans les parages et les observant.