Aeldred le paria était enveloppé dans une cape imperméabilisée, la pluie dégoulinant sur les bords de son large chapeau en feutre. Il était juché en haut de la pente d'une prairie, une trouée au milieu d'une forêt de résineux. Il contemplait une grange en contrebas. Un curieux homme portant un vêtement blanc terne et sali, aux bords bleus, s'échinait à faire entrer les moutons déjà mouillé. Les bêtes avaient une laine très épaisse. Il était temps de les tondre, mais l'étranger ne savait pas faire. Quelle idée d'acheter des moutons et louer une grange quand on ne connait rien à la vie à la campagne ?
Le tonnerre roulait au loin, mais la pluie se contenterait de tomber drue comme maintenant. Il n'y avait pas à craindre d'aggravation, et donc ce n'était pas la peine de se claquemurer dans son habitation comme le faisait le vecteur Fredelme à cet instant.
Pourquoi s'embêter à regarder un homme maladroit venu se compliquer la vie au milieu de nulle part ?
... son amie lui avait dit que ces gens-là, ceux qui priaient dans des bâtiments, et pas à l'air libre, avaient des histoires sur les esprits qui différaient considérablement de celle des demorthèn. Pour les tenants du cultes traditionnel, un bon esprit défunt devait se dissoudre dans la sève de l'Arbre-Monde. Il n'était pas question qu'ils se soucient des vivants. Cependant Aeldred, depuis des années, avait une vision différente des choses. Il avait entendu des colporteurs qui parlaient de livres dans lesquels on apprenait des choses sur ces entités immatérielles. Mais à Terfynysel, seul le barde Glyndwyr enseignait à lire et à écrire, et uniquement aux protégés de son seigneur Breth Mc Terfynysel. On disait que les gens qui priaient dans les bâtiments savaient tous lire car leurs esprits étaient dans l'encre des livres. Pour eux c'était comme la sève de l'Arbre de Vie.
Aeldred oserait-il passer outre sa timidité pour en savoir plus ?
