TdF - Chap. 0.2 - Le lierre sur la tour vieille tour

MJ DukeTogo
Date de début : printemps 2014
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Iris
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Chapitre 07 - JOUR 1 - Ser Emmon Cuy

Message : # 53688Message Iris
01 juin 2016, 21:53

Ser Emmon,

Demain se tiendra le marché et je me préparais à passer une commande à à Messer Bartheld le tisserand. Il devait s'agir d'une écharpe tissé de bleu et de rouge, d'une manière que l'étoffe paraisse tantôt l'un tantôt l'autre, ou grise ou violette, sitôt que varie la lumière. Je voulais la broder de mon cher lierre et de tournesol dorés, afin de vous en faire présent à votre visite. J'ignore si j'aurais pu jamais vous rendre des sentiments aussi tendres que ceux que vous m'offrez, mais il me semble vain d'espérer trouver meilleur homme.

Aujourd'hui je nourris le désir d'acquérir des métrages de soie la plus obscure et la plus ténébreuse puisqu'il semble que je doive prendre le noir pour l'épargner à mon cousin, Ser Darren Risley, et ainsi nous donner une chose de sauver l'existence même de la Maison Risley. Ma nuit sera brodée d'étoiles car je ne veux pas me résigner, quel que soit le sort qu'on me réserve si jamais cela devait arriver.

Tout cela, vous ne l'apprendrez que trop tard et je me sens déloyale de devoir décevoir vos espérances de cette manière. Comment pourrais-je laisser la Maison de ma mère disparaître, même si c'est au prix de mon malheur ? Ser Darren Risley est le soleil de Risbourg, il fut l'écuyer de Ser Bonleu et sut se faire apprécier de Lord Cendregué. Même si aujourd'hui il est désargenté, il a du talent et un charme par lequel il parvient à se faire aimer de tous. S'il n'avait été victime des manigances de Lady Silva Harte-Manning, il ne serait pas aujourd'hui sommé de payer une rançon exorbitante... ni moi à me demander si je dois entrer sur la balance pour la faire fléchir en sa faveur.

Dans trois semaines environ, nous irons à Hautjardin, la tête haute, suivis d'un défilé de prisonniers capturés dans le marais de la sorcière et voué à rejoindre le Mur. Gyles chantera les exploits de Darren à qui veut l'entendre, quitte à lui attribuer au besoin ceux de Jolan, Béric ou Myrosh. Nous irons trouver les Tyrell, je m'inclinerai au plus bas devant qui voudra bien nous recevoir. Darren confiera les recommandations que Ser Bonleu et Lord Cendregué nous aurons envoyées par corbeau. Je dirais alors que les représentants de la Maison Castellane emportèrent deux épreuves, l'emportant à chaque fois sur un champion de Lord Florent. Je m'excuserai par convention que le trouble causé à notre hôte suite à tant de rebondissements l'ait rendu incapable de nous recevoir en sa demeure. J'évoquerai les brigands du marais de la sorcière que Ser Darren Risley, à peine remis, alla traquer en compagnie de notre champion, Béric Kardalt. Je m'excuserai que nos troupes aient dû empiéter sur les terres des Tyrell en arguant du fait que nos voleurs et contrebandiers s'y réfugient. Afin d'éviter à l'avenir cette incursion maladroite sur le domaine de nos seigneurs, je proposerai que Ser Darren Risley reste à Waterford pour nous aider à lutter contre les criminels et offrirai d'acheter le marais pour les 2000 couronnes gagnées au tournoi de Rubriant, présentant une équivalence entre le tournois de Lord Florent d'une part et d'autre part un marais infesté de bandits et moustiques... et supposé même abriter une sorcière ! Si l'Aïeule me sourit, la flatterie portera un peu, mais encore une fois, le prix ne sera pas suffisant à leurs yeux.

Il ne me restera plus qu'à proposer notre dernier prix : confier au bon soin de nos seigneurs le choix de mon futur époux.

J'ignore ce qu'il adviendra de moi... Je prie l'Aïeule qu'elle m'inspire : il existe au moins une chance d'en réchapper, peut-être d'autres ? Si mon avenir n'est pas réduit à néant, sachez que ce sera par l'intervention d'un de ces bandits de la Confrérie de la Liberté que vous vouliez pendre à notre première rencontre.

Le lierre ne disparaît que si l'on arrache jusqu'à la plus infime partie de ses racines, même si les Tyrell s'empare de ma liberté, s'ils croient m'imposer leur volonté, je lutterai en silence tant qu'il existera la plus petite lueur d'espoir.


J'espère pouvoir vous expliquer mes choix et que vous me pardonnerez,


H.
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Chapitre 07 - JOUR 1 - Jack

Message : # 53820Message Iris
04 juin 2016, 22:23

Cher Jack,

Dans deux lunes nous serons en route pour Hautjardin, transportant une fortune, suivis de prisonniers promis à la Garde de nuit, chevauchant dans l'espoir de sauver le dernier espoir de la Maison Risley dont est issue ma mère. Je ferai envoyer un corbeau à Noircouronne dans l'espoir que vous en soyez avertis, mais peut-être serez-vous à Hautjardin attiré par la promesse des Tyrel de vous fournir des recrues sachant tenir une épée ? Je me figurais déjà vous trouver à Rubriant, attiré par le tournoi, en vain. Peut-être me trompé-je encore.

Vous risqueriez de me voir l'esprit désabusé et désenchanté, quand bien même je m'acharne à ne pas abandonner tant qu'il reste un espoir... Pour sauver Ser Darren Risley, je n'ai que deux rançons de valeur suffisante.
  • La première est la tête de l'espion Lannister infiltré à la cour Tyrel et que je soupçonne être le commanditaire de ma tentative d'assassinat. Pour remonter à lui, je dépends de l'inspiration, du talent et de la chance d'un unique brigand de la Confrérie de la Liberté. S'il ne parvient à rien d'ici quatre semaines, je pourrais encore tenter le démon en cherchant au hasard à effrayer cet homme... si toutefois il existe vraiment... et ne comprend pas que je suis aveugle... que je ne constitue en réalité aucun risque... qu'il vaut mieux pour lui attendre patiemment... Si j'ai raison, il n'y a pas de raison qu'il recule devant une nouvelle tentative d'assassinat. Je peut l'écrire presque légèrement, alors même que mon cœur se serre à chaque fois que je dois chevaucher au pas sous le couvert d'une forêt. Je ne peux m'empêcher de scruter les ombres, en quête d'un mouvement annonçant une attaque. La prochaine fois, il n'est pas certain que j'en réchappe. Une chimère presque insaisissable qui me trancherait volontiers la gorge. Quand bien même je parviendrai à déloger l'homme, il me faudrait le faire en seulement quelques jours sous peine que ma victoire ne m'épargne pas le second prix.

    L'autre prix n'est autre que moi. Ma vie, mon avenir, mes rêves, mes désirs, ma volonté, ma liberté. Ma dot pour racheter l'avenir d'un Ser lumineux et solaire comme le fut autrefois Dugal. Par cette tractation donnant tout pouvoir aux Tyrel de m'offrir à qui bon leur semble, je deviens un cadavre animé, un objet qu'on prise, négocie, soupèse... Je suis réduite à n'être qu'une possession perpétuelle, une esclave en robe de soie, un ventre de noble naissance pour servir les ambitions lignagère d'un agent de nos maîtres.
Comment en sommes-nous arrivés là ?

Aujourd'hui je me suis entretenue avec ma mère. Elle me félicita pour avoir été suffisamment prudenteà son goût à Rubriant ; elle se réjouit de me voir revenir en bonne santé, ce qui était à ses yeux plus important que notre victoire au tournoi ; elle exprima enfin sa fierté en écoutant mon analyse des solutions envisageables pour sauver Darren. Elle disait ne s'être pas rendue compte jusque là à quel point j'avais grandi. Un court moment j'étais heureuse : Mère me reconnaissait enfin de la valeur. M'aurait-elle encouragée dans mes propositions, j'aurais été prête à danser. Mais elle me demanda seulement si j'étais prête à me marier contre mon gré pour payer la rançon de Darren.

A cet instant, le voile se déchira.

Elle était capable de concevoir cette idée qui ne m'avais pas traversé l'esprit une seconde auparavant. Cela lui faisait horreur, et pourtant, à mon acquiescement en cas d'absence de la moindre autre solution, elle n'a pas essayé -- même pas essayé ! -- de m'encourager à dénicher l'espion. Elle n'a pas perdu une seconde à soutenir l'espoir de l'existence d'une alternative ! Elle était peut-être choquée de la cruauté qu'elle manifestait à mon égard, mais ne m'a pas non plus remerciée d'accepter de sacrifier ma vie, et plus encore, car mourir est moindre que ce qui peut m'attendre.

Pourquoi vous dire tout cela ?

Vous avez abandonné votre rang, vous avez déçu les espoirs qui reposaient sur vous : votre exemple est une tentation pour moi. J'ai l'impression que tout mes efforts sont vains. A quoi bon m'exposer alors que je ne gagne rien ? Si les Risley deviennent vassaux, mon père, mon frère et mon oncle seront gagnants ; si les Risley survivent, Darren et Mère seront satisfaits... Quelle contrepartie puis-je escompter ? Béric risque au moins sa vie pour un salaire et peut-être un titre de Ser qu'il aura acquis définitivement ; quant à Jolan et Darren, ils deviendront Lord et ont tout à gagner.

Je ne reçois rien. Je ne fais que servir les ambitions d'autrui.

Aujourd'hui que je risque de devenir la chose d'un inconnu, je me rends compte avec effroi que je ne peux plus continuer ainsi. Encore un pas de plus vers le sacrifice et je n'existerai plus, je serai vidée de ma substance, je ne serais plus qu'obéissance, modestie, piété et suivi scrupuleux de règles édictées par d'autres dans leur intérêt.

Je croyais qu'à force de servir ma Maison, mes actions seraient reconnues et me vaudraient affection, reconnaissance, avenir... Mais il est évident que tout le monde se moque de mes rêves de dispensaires ou d'école. Je pensais que la victoire de Béric au tournoi vaudrait bien le prix d'une restauration du toit du septuaire pour commencer... Non, si Tristifer est assez fou pour envisager d'emprunter à des vautours pour ses propres projets, et si ma propre mère envisage spontanément de me donner en rançon, alors il faut me rendre à l'évidence : je ne vaux rien -- ou si peu -- à leurs yeux.

Jack, j'ignore ce que je ferai, ce que je dois faire. Je suis perdue dans la plus profonde détresse. D'une manière ou d'une autre, il me faut trouver le moyen de transformer cette insoutenable contrainte en opportunité. Mais je sens aussi que j'aurais du mal à leur pardonner.


Peu importe au fond si nous nous revoyons... je ne suis pas sûre que vous apprécieriez de m'entendre m'épancher de la sorte...


Portez vous bien,


H.
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Chapitre 07 - JOUR 1 - Lord Rhéomar Castellane

Message : # 53951Message Iris
11 juin 2016, 22:43

Père,

Voilà environ quatre mois, je me rappelle que vous me glissâtes avec bienveillance que vous et Mère étiez satisfaits de mon apparence et de mon attitude, dont la modestie était inspirée de mes séjours à Risbourg et au Grand Septuaire de Villevieille. Une fille vertueuse satisfaisait vos attentes. A cette époque pourtant proche, je priais la Jouvencelle de me protéger de tout mariage tant que je n'avais pas au moins pu faire restaurer le septuaire de Waterford, et j'espérais alors qu'on me laisserait organiser un dispensaire ainsi qu'une école. Je voulais le meilleur pour notre domaine, heureuse d'apporter ici ce qui m'avait paru si remarquable.

Aujourd'hui je suis contrainte de me rendre compte que j'étais pétrie d'illusions.

L'avenir n'est pas encore écrit, mais il me semble bien difficile d'obtenir des fonds pour des projets qui ne sont importants qu'à mes seuls yeux alors que mon oncle Tristifer est déjà prêt à nos endetter auprès d'individus sans scrupules pour mener ses propres objectifs. Quant à mon mariage, je n'abordais pas cette issue avec intérêt, trop heureuse de vivre librement auprès des miens, mais je le vois sous des couleurs de plus en plus tristes.
  • La première fois, aussi loin que je me souvienne, que Mère me laissait entendre qu'elle était fière de moi... fut immédiatement suivie par sa demande de me sacrifier pour assurer le destin de la lignée Risley et leur épargner l'extinction. Je croyais qu'en faisant de mon mieux en tout, en étant rigoureuse, modeste, persévérante, vous m'aimeriez... mais aujourd'hui il me semble que tous mes efforts pour vous complaire étaient vains. Je suis frappée par la vanité et l'absurdité de mes souhaits : l'amour et la tendresse de Mère ont été enterrés avec Dugal. Jamais je ne le remplacerais. Jamais je n'aurais sa valeur ou celle de Jared à vos yeux. Je ne suis qu'une fille, vouée à rejoindre une autre Maison.

    Si je dois épouser un inconnu choisi par les Tyrel, ce sera par la volonté de Mère. Si j'échappe à ce sort, ce sera par la volonté de Darren de sauver son honneur. Si finalement je dois malgré tout m'y résoudre, ce sera parce que Darren aura changé d'avis.

    Mais même si l'infortune m'épargne grâce à l'aide providentielle d'un brigand -- goûtez l'ironie de la situation --, je m'attends déjà à être mariée à Ser Emmon Cuy. Non qu'il s'agisse d'un individu déplaisant, il est au contraire charmant, attentionné, courtois et persévérant. Il respecte si parfaitement l'étiquette qu'il devrait même agréer à Mère. En l'attente, il a déjà convaincu Jolan et Darren de sa valeur. Je ne doute pas que Tristifer se réjouisse : l'héritier de Sunhouse, qu'espérer de mieux ? ...
Dans aucune de ces situations je n'aurais choisi quoi que ce soit. Je n'aurais fait qu'accepter ce qui aura été estimé juste et bon par d'autres. Je n'ai aucune raison de refuser ni de sauver Darren, ni de laisser Darren choisir son destin, ni de donner ma main à un parti acceptable. Il me semble que je suis embarquée sur un bateau sur lequel je n'ai aucune part aux commandes. Comment vous exprimer la douleur que je ressens à me sentir spectatrice de mon existence ? Comment vous dire mon sentiment sans paraître une ingrate ou une insolente ? Je devrais accepter la main qui me guide pour le mieux, au lieu de quoi, mon cœur est lourd et mon âme déchirée hurle en silence.

A défaut de pouvoir saccager et dévaster, frapper et tuer, je suis ici dans ma chambre proprette et bien rangée. Je regarde mon reflet dans la glace et je vois un regard grave, désabusé, encadré d'une chevelure d'enfant ; une poitrine que l'on m'a imposée et que l'on juge sans mon accord, dissimulée à peine de robes de pensionnaire du Septuaire. Le simple fait que mon apparence satisfasse les attentes de Mère me remplit d'une sourde colère. Je n'ai plus envie de m'épuiser à vous plaire. A quoi bon ? Mon sort sera scellé sous peu et je n'aurais eu aucun mot à dire ! Mariée, je n'aurais plus qu'à porter les héritiers de mon époux, contrainte de devenir mère à mon tour alors que je désire seulement vivre un peu librement ! A peine revenue de Villevieille, je serais déjà emmenée ailleurs. Je me sens prise dans un sablier qui se vide minute après minute et auquel je ne pourrais échapper.

Si je ne peux changer mon avenir, je peux au moins changer mon reflet dans le miroir.


Nous nous reverrons bientôt, et peut-être déciderez-vous de mon destin, d'une manière ou d'une autre. Il n'y a plus guère de place pour moi dans la lumière, mais les ombres m'offriront peut-être encore un peu d'espace. A défaut des conseils inexistants de Mère, celle d'une mère maquerelle me seront peut-être plus utiles,


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Chapitre 08 - Jour 1

Message : # 54674Message Iris
16 août 2016, 22:07

Cher Dugal,

Laissant parfois ma fenêtre ouverte, la brise qui vient de la mer et s'enfonce dans les terres fait halte dans ma chambre et l'agite avant de repartir au loin. Mon corps endormi, mon âme légère vacille et se détache avant de s'envoler à sa suite. Si du temps de veille les règles me lient et les limites me paraissent indépassable ; que le sommeil me terrasse et plus rien ne m'arrête. Plus personne ne me retient et l'impossible ne m'astreins ni à la raison ni à la modération.

Nous sommes nombreux, je le vois. Ils courent sur des chemins escarpés, aux travers des bois, cheveux et vêtement agités, gonflés par le souffle qui les anime et les enlève. Je les rejoins et les questionne. Ils me disent en courant qu'ils se rejoignent ainsi chaque nuit. C'est ainsi qu'ils échappent à l'ennui et à la tristesse. Leur peine est oubliée et ils sont libres, sans plus aucun mur ni horizon pour les borner.

Je les lai accompagné et ils ont franchi au cœur des forêts des portails qui nous firent jaillir aussitôt dans des contrées éloignées où brillait un soleil éclatant. Les gens portaient des tenues vives et des armes exotiques. Nous nous mêlâmes à la foule. Le cœur léger je déambulais dans un marché où tout m'était inconnu et désirable. Je vis là un épéiste aux cheveux blancs qui se distinguaient de tous les autres autour de lui. Je crois bien qu'il me vit alors que j'étais invisible à la population. Il avait une épée étrange dont je compris qu'elle avait des propriétés et capacités rares. J'entrepris d'en savoir plus...

Mais happée au travers du portail cerclé de marbre et entrelacé d'or, je fus tirée de mes rêves. J'avais l'impression que l'homme était d'un autre temps, qu'il était réel, mais certains songes me sont si saisissants que je ne suis plus sûre de moi. Je voudrais qu'ils le fussent. S'ils l'étaient, tu serais là aussi, de l'autre côté.


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Chapitre 08 - Jour 1 - Dugal

Message : # 55706Message Iris
06 oct. 2016, 22:28

Cher Dugal,

Devant la statue de l’Étranger, j'ai longuement prié pour trouver le courage de faire face dignement à la Mort si elle devait me frapper ce soir. Le soleil descend dans le ciel, je partirai bientôt et j'ai du mal à me faire à l'idée qu'il n'y aura peut-être pour moi plus que la nuit.

Aurais-tu jamais imaginé que nous puissions avoir des ennemis aussi déterminés qu'infâmes ? Quel genre de personne fait appel à des assassins et leur promet plus de 50 dragons d'or pour tuer une femme qui n'a jamais nui à personne ?

J'ai procédé à mon examen de conscience comme on nous l'a enseigné au Grand Septuaire. J'ai cherché dans mon âme les remords et les regrets, la colère et la tristesse. Je ne peux pas prétendre être prête à accepter sereinement mon trépas, mais si tel est mon destin, je veux croire que je n'affligerai pas notre Maison de ma lâcheté. Je ne veux pas mourir, mais je ne pourrais peut-être rien faire pour l'empêcher.

Nous avons convenu que je devais accueillir l'assassin dans l'espoir de le faire parler. J'ai accepté les conditions du plan, mais le doute m'assaille. Je ne sais pas quoi lui dire, je ne sais pas mentir... Torman et Ulric en sont témoins, je risque de me trahir... Et d'ailleurs lui, ce Celtigar, cette épée à louer qui a reçu ce matin sur le marché des dragons d'or pour m'assassiner, ne va-t-il pas se débarrasser de moi d'un coup de poignard avant que quiconque ne puisse réagir ?

Accepter de mourir m'est douloureux et injuste, mais ce qui me hante le plus est l'incompréhension : pourquoi moi ? Pourquoi se donner tant de peine ? Personne ou presque ne me connaît dans la noblesse, pourquoi me viser, moi ? En quoi ma mort est-elle urgente ? Ai-je raison de croire qu'un agent de la couronne souhaite empêcher les Castellane de l'identifier à Hautjardin ? Pourtant s'il n'avait tenté de me tuer, je n'aurais sans doute jamais imaginé cette possibilité. Cette obstination à vouloir m'éliminer est-elle un signe de peur ou une manière de provoquer notre Maison dans une vengeance contre les mauvaises personnes ? Notre soupçon portait sur les Lannister : faut-il les croire innocents de mon assassinat ? Ont-ils des ennemis connaissant leur tentative d'enlèvement d'Alyse Hastwyck et ayant des raisons de vouloir nous pousser à nous venger par erreur d'eux ? Le plan cependant ne pourrait fonctionner que si, à ma mort, des indices pointaient les lions d'or et n'aurait de sens que si nous étions mieux placés que nous ne le pensons pour leur nuire.

Cela a-t-il du sens ?

Le premier tueur était membre de la Confrérie de la Liberté : j'ai supposé qu'il était un agent double au service de la couronne, pour espionner des activités plus importantes qu'il n'y paraît... et si le donneur d'ordre était bel et bien un membre de l'organisation, mais dépourvu des scrupules de leur chef, un noble les finançant, ayant son propre agenda ? Si l'assassin n'était pas un traître, mais un agent obéissant à des individus plus hauts placés dans leur organisation ? Ou simplement, parallèle... Cela impliquerait aussi un espion à Haut-jardin, mais lié à la Confrérie de la Liberté, à une branche pourrie par rapport aux idéaux de Torman, Ulric, Wulfgar ou Emmet. Le contraste serait tel que cela me paraît peu vraisemblable. Mais si c'était le cas ? La confrérie, ou une partie d'elle aurait-elle intérêt à nous inciter à frapper les Lannister ?

Le seul moyen de savoir, et trancher entre les deux hypothèses, serait de capturer le commanditaire.

Mais s'il n'est pas un agent de la couronne ? S'il n'est pas un espion, aura-t-il encore de la valeur aux yeux des Tyrell ? Sera-t-il malgré tout un prix suffisant pour sauver Darren ?

Je n'ai pas envie d'aller au moulin ce soir, j'ai peur que les choses ne tournent mal.

Si je meurs, que se passera-t-il ?... Mère viendra-t-elle dans ma chambre pour découvrir ce journal ? Me maudira-t-elle pour mes mauvaises pensées à son égard ? Donnera-t-elle à Jack son écharpe s'il venait ? Si je succombe et que ma dernière hypothèse est exacte, que le problème est une manoeuvre de nobles finançant la confrérie, que se passera-t-il ? M'aura-t-on assassinée inutilement ? Ulric ira-t-il partager ses recherches avec Jolan ? Verrai-je la danse des vivants parler de moi en mon absence ? Commettra-t-on des crimes et des erreurs funestes pour me venger ?



Je ne veux pas mourir.



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Chapitre 9 - JOUR 1 - Jack

Message : # 56957Message Iris
06 janv. 2017, 22:06

Cher Jack,

Darren nous a rejoint à Waterford et j'espère qu'il pourra rester auprès de nous. Sa présence est lumineuse. Il rayonne de bonté et de joie, avec une force et un sourire à toute épreuve, en dépit de la menace qui pèse aujourd'hui sur lui. Jusqu'à hier, je croyais pouvoir le sauver, avec l'intervention providentielle d'Ulric, le brigand.

J'ai trop d'imagination. C'est bien tout ce que j'ai. Ce que j’échafaudais s'effondre. Mes rêves s'évanouissent et se dissipent. .. qui sait, la solution à notre problème sera peut-être trouvée... par tout autre que moi, après que j'y aurais passé en vain des heures... mes rêves s'évanouissent, pourquoi pas mes cauchemars aussi ? Me laissant seule, sans éclat.

Et vous qui n'êtes que chimère, vous ne m'écoutez avec attention que parce que vous n'existez que dans un songe. Je vous invite à visiter le paisible Waterford, celui qui n'a ni émeute, ni intendant à l'inquiétante mégalomanie. Nous allons chevaucher librement et je m'allonge dans l'herbe tendre, entourée de fleurs des champs. Ce n'est pas convenable, je ne devrais jamais laisser paraître ce que je désire, ce qui me fait envie sans arrière pensée -- il faudrait que je reste toujours droite et impassible -- mais vous ne m'en tenez pas rigueur car vous vous moquez pratiquement de tout, Ô sombre génie. Je tends le bras vers le ciel infini, d'un bleu profond, d'une clarté qui vire à l'outremer quand on s'y plonge. Ma manche tombe et mon bras est nu. Vous m'écoutez, car les rêves ne sont guère bavards et je ne vous connais pas assez pour vous prêter des paroles qui vous siéraient. Vous me pardonnez mon incapacité à aider Darren -- après tout mes échecs vous offrent un gai compagnon.

Cette promenade nous l'avons faites cent fois.

Aussi souvent que j'ai assemblé les pièces du puzzle, me prenant très au sérieux, fière de mes découvertes et déductions.

Quelle sotte je suis ! J'ai honte, je me sens terriblement ridicule.

L'assassin que nous avons capturé est un homme du Balafré de Villevieille. Entre Hautjardin et Villevieille, il y a plusieurs jours de route : il est impossible que cette fripouille ait reçu ses ordres consécutivement à mon rapport à Hautjardin sur l'affaire des Manteaux d'or. Si vraiment cela devait être, il faudrait une ligne de corbeaux amenant aux Balafrés ses commandes d'homicides, et même là, je ne vois pas comment Floki aurait pu se transporter si vite pour nous intercepter.

... je voulais offrir la tête d'un espion ou peu importe, quelqu'un qui était placé au plus près des Tyrell, mais il apparaît que le commanditaire aurait pu agir n'importe quand... et donc n'est pas nécessairement à Hautjardin... et donc... je ne pourrais pas le démasquer là-bas quand j'irais... et je n'aurais donc aucune monnaie d'échange valable pour sauver Darren.

Vous allez rire : je suis vexée d'être insignifiante au point qu'on ne me tue pas pour moi-même, mais seulement parce qu'une rumeur me fait passer pour une autre, l'amante de je-ne-sais-qui d'important à Port-Réal... Ou peut-être que je me trompe aussi ici ? Si je ne peux aider Darren, je n'ai plus qu'à attendre qu'on cesse de me prendre pour cette personne. Les choses finiront bien par revenir à la normale ? Darren au Mur, moi mariée. Je n'aime pas cette normalité. J'aurais aimé que vous puissiez me répondre et me conseiller, mais les ombres restent silencieuses -- et même si vous étiez vraiment vous, que pourriez-vous bien me dire ? Rien sans doute.

Il y a toujours la possibilité de me vendre aux Tyrell, mais Darren ne veut pas en entendre parler. S'il savait le peu d'espoir que je nourris pour moi, accepterait-il ? Que suis-je au juste ? Une fille, une dot. Mes proches, ma famille, ceux qui constituent mon monde : qu'en restera-t-il quand je me marierais ? Rien. Je serais seule dans une maison étrangère. Darren est un héritier, quelqu'un qui a un avenir, quelqu'un qui pourra agir. Il est brillant et tout le monde l'aime. Le sauver a du sens.

Cette pensée m'arrache toujours un sourire désabusé : lui a de la valeur ; moi, on ne projette même pas de me tuer pour moi, je ne suis qu'une usurpatrice, un masque, une poupée. J'aurais voulu représenter quelque chose... moi, pas ma dot, ni mon rang... moi, même si c'était pour être détestée... au moins je me sentirai exister.


Peut-être que je rêve tant car je ne suis moi-même pas réelle ? Rencontrons-nous au crépuscule, à l'heure où les parfums embaument l'air et où les pétales s'avivent au cœur des ombres croissantes. Quelques instants d'émerveillement avant de tomber dans la nuit.


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Chapitre 9 - JOUR 1 - Emmon

Message : # 56958Message Iris
06 janv. 2017, 23:05


Ser Emmon,

Il semble que je ne vous écrive, à vous et à mes autres ombres, que lorsque je suis prise par l'ouvrage. Les heures s'écoulent, les fils passent dans le chas de l'aiguille et se glisse au travers de la toile fine. La monotonie de la tâche, même minutieuse, m'abandonne à mes pensées et à mes doutes. Je n'ai pas assez pour bâtir, seulement de quoi nouer une fragile toile d'araignée, arrachée d'un coup de vent ou d'un distrait revers de la main.

Vous avez dû -- j'entends votre ombre si bien informée, là où votre être solaire serait horrifié et se sentirait humilié d'avoir posé le regard sur moi -- vous demander pourquoi je m'obstine à offrir mes songes à des brigands ou des gardes de nuit. Est-ce là l'éducation que j'ai reçue ?

Je pense avoir dénoué ce mystère avec ma dernière bobine de soie noire.

Quand j'étais enfant, je pouvais rire et jouer sans arrière pensée avec Jolan, mais depuis tout est bien plus compliqué. Il est devenu un homme, il porte l'épée, il est l'héritier de son père. Même si sa Maison est plus faible que la nôtre,et souffrant d'une réputation désastreuse, il m'est déjà presque supérieur. C'est encore plus vrai vous concernant. Pour ce que je peux en juger, nos Maisons respectives sont sensiblement de même importance, mais vous êtes homme, Ser et héritier désigné. La distance qui nous sépare... j'ai du mal à la mesurer précisément, mais je sais une chose : je vous serai toujours inférieure.

Mon devoir est fait de respect et d'obéissance. Mon honneur se limite à donner satisfaction à mon père puis à mon époux.

Mais voyez déjà ce demi-sourire presque canaille qui ose s'afficher fugacement sur ma figure quand j'y songe : je ne me sens pas inférieure avec Jack, Torman ou Ulric. Je me sens sensiblement égale à eux -- davantage avec Jack me semble-t-il. A la réflexion Corbin Celtigar pourrait possiblement intégrer ce rang des êtres au mode de vie indécent, marginal ou infâme, mais néanmoins attachant. Je le trouve cependant trop empressé. Même s'il est sympathique, il ne me met pas vraiment à l'aise, je n'arrive pas à me sentir autant en confiance qu'avec mes autres camarades.

Pourquoi ? ... comment expliquer que je me sente inférieure à mes pairs, à vous, et seulement égale à ces gibiers de potence ? ... Je n'en suis pas sûre. Le fait est là, il n'y a qu'avec eux que je me suis sentie vraiment libre -- sans crainte d'être jugée, mesurée, soupesée.

Vous vous demandez si j'estime que les autres femmes de mon milieu valent autant que ces tristes individus ? A la réflexion, la réponse est non. Je me sens infiniment inférieure à ma mère, mais également à cette vipère malveillante de Lady Silva-Harte, tout autant qu'à -- je crois -- toutes les femmes que j'ai rencontré à Rubriant. Elles me paraissaient si sûre d'elle, tellement à l'aise, et entière. Voyez-vous, j'ai souvent l'impression de jouer la comédie quand je m'efforce de paraître digne. Au fond de moi, je ne suis qu'une sorcière échevelée qui court la nuit dans la tempête. Je ne suis pas la femme dont les hommes jugent le physique d'un oeil critique en le comparant à d'autre.

Quand vous me demandiez ce que je voulais, je vous ai parlé à cœur ouvert de mon désir de liberté. En ne répondant rien, vous m'avez donné le sentiment que j'avais eu tort de vous faire cette confidence, que vous ne pouviez comprendre. La liberté, cela signifie être traitée en égale : il n'y a pas de liberté sans une telle considération. Il me vient alors à l'esprit que je ne peux espérer tout cela qu'avec mes semblables que tous méprisent.

... Suis-je aussi méprisable ? Peut-être est-ce la raison pour laquelle je ne suis à mon aise dans les mondanités. Certes je connais l'étiquette et je suis assez prudente pour éviter les impairs -- pas toujours -- mais il n'y a rien de naturel chez moi. Je me force pour être à la hauteur des attentes que l'on place en moi.

... Peut-être suis-je au fond de moi mauvaise ? Je dois l'être si c'est mal de désirer ce qui est unanimement condamné.

J'ai pourtant peur de n'être finalement ni remarquable, ni détestable, mais simplement quelconque. Et tout mon élan envers mes ombres mal famées ne serait que l'expression d'un esprit infantile, inutilement romanesque. Mon inadaptation vient peut-être seulement de mon immaturité et des limites de mon intelligence.


Je ne sais pas ce que je devrais faire, je sais seulement ce que j'aime ou pas, mais comment juger à partir de là de ce qui est bon ou souhaitable ?



H.
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Chapitre 11 - JOUR 1

Message : # 57897Message Iris
21 mars 2017, 23:16

Cher Jack,

Vous me remerciiez hier pour l'après-midi que nous passâmes ensemble, mais je vous suis tout autant reconnaissante. Vous m'avez accompagnée et écoutée avec indulgence, vous avez accepté d'aller par les chemins cueillir des fleurs alors qu'il n'y a là rien pour pour plaire aux hommes -- s'il en était autrement, alors ils se priveraient de bien des plaisirs, et pourquoi ?

J'étais heureuse d'aller dans les bois. Je ne peux jamais m'y rendre, et même si nous ne sommes pas allés loin, c'était pour moi une grande joie de voir, sentir et toucher cet autre monde sauvage si proche de celui -- si policé -- qui forme tout mon univers. Goûter un peu de cette liberté, de ces rêveries sans entraves à vos côtés m'était doux.

Tout comme me l'est de savoir que vous avez pour moi la même tendresse que je nourris à votre égard.

Vous me disiez que vous garderiez un souvenir impérissable de ces quelques heures enchantées, cette digression dans nos vie -- une parenthèse incongrue, dépareillée comme une moitié de paire, sans espoir d'être comblée, car elle n'est pas vouée à l'être, pis, elle ne le devrait pas.

Je suis heureuse de ne plus être si seule, et j'aurais voulu vous parler, tant et encore, et vous demander, vous écouter... Toucher avec vous cette écorce qui nous parlait de ce monde invisible que je comprends bien peu, bien que vous fûtes déjà surpris que je le perçusse. Sans vous pour me guider, je n'aurais jamais rien vu, et je voudrais en savoir davantage. Je voudrais plus de temps.

...et un peu de temps pour de plus suaves baisers ! Celtigar n'est qu'un vaurien, mais il s'y prend mieux. Au moins une leçon pour moi : il y a ceux qui ne comptent pas pour vous, mais qui ont une manière de faire... et ceux qui comptent, mais ... J'ai eu l'impression que nous n'étions pas vraiment... Dans les romans ceux qui s'aiment savent toujours quoi faire. Est-ce moi, ou vous, ou bien nous -- deux égarés surpris ?

Je me demande si je commets une erreur -- mais je ne sais pas envers qui. Moi ? Vous ? Ma famille ? D'autres encore ? J'ai tant de mal à savoir comment exister sans trahir tous mes devoirs.

Il me faudra du temps je suppose pour mettre de l'ordre dans mes émotions et mes pensées, et pour nous retrouver ?..

Toujours du temps,

Il en manque sans cesse,


H.
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Chapitre 11 - Jack

Message : # 58331Message Iris
17 avr. 2017, 21:43

Cher Jack,

Faut-il que tu sois porté par le vent pour apparaître et disparaître sans avertir ? Imprévisible, facétieux, sauvage et insaisissable -- tu vis dans un monde qui me sera toujours étranger. J'aurais aimé te garder, te retenir, mais quand je ferme la main, il n'y a que le vide : la brise s'est déjà échappée. Nul lien de ce monde de l'or et de la terre n'a plus de prise sur toi. Tu l'as tranché en prêtant serment devant le barral. Il ne reste plus que l'invisible et les bavards silences des bois.

Je suis heureuse que tu aies aimé mes jeux de fils, ma toile pour capturer l'essence de ce que je ne conçois ni ne comprends pas toujours. Je vois l'écharpe nouée danser gaiement au vent du large et ton sourire.

Où que tu ailles, je souhaite que tu sois heureux, et si les Sept le permettent, nous nous retrouverons un jour -- une nuit de tempête ?

Tu me manques déjà. Je n'ai pas eu le temps -- l'aurons-nous jamais ? --

Je ne suis pas vraiment triste : il n'y a pas de surprise. Tu es semblable aux songes des nuits, au bourrasque qui emmêlent les cheveux, au désordre des fêtes : intensément présent, et d'une présence toujours éphémère. Si on ne saisit pas l'occasion, elle est perdue à jamais.

Porte-toi bien,

Je ne t'oublierai pas,


H.


P.S. : je crois que Waterford risque aussi de se souvenir un moment de toi... et je suis soulagée de partir ce jour vers le nord pour me faire oublier avant que la nouvelle de ce baiser sur le quai n'arrive à mes parents. Je ne t'en veux pas. Même si je le voulais j'en serais incapable.
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Chapitre 11.A - Ser Walton Dulver

Message : # 58565Message Iris
25 avr. 2017, 22:08

Cher Ser Walton,

Nous sommes partis un peu précipitamment du Puits, et je tenais à vous remercier pour votre accueil. Nous avons eu peu de temps pour parler et faire connaissance, mais vous m'avez offert votre amitié et votre affection.

Grâce à votre bienveillance à notre égard, il fut bien plus aisé de faire la lumière sur les manigances infâmes du Fer-né Ormund qui cherchait à provoquer une guerre entre votre Maison et celle de vos voisins Marsten, offrant ainsi une opportunité facile de pillage à ses comparses. Votre gentillesse et votre franchise nourrissent quelques remords de ne pas vous avoir avoir la vérité complète à notre propos. Notre présence opportune ne l'était que parce que les Tyrell s'inquiétaient des tensions entre Dulver et Marsten, parce que les Tyrell ont fait appel à Lady Alysanne Bulwer, parce qu'enfin, elle a fait appel aux Castellane pour l'aider à résoudre le problème.

Également aussi car je tenais tant à trouver un moyen de sauver Darren du Mur. Oui, ce même Ser Darren qui vous avait tant irrité en riant -- peu courtoisement il est vrai -- durant notre première promenade. Je ne suis pas sûre qu'il ait songé à se moquer de vous. Peut-être se rappelait-il ce qui s'était passé sur le quai de Waterford. Il voit deux héritiers -- vous, et Ser Emmon Cuy -- manifester avec tact et semble-t-il, une certaine détermination, leur intérêt pour ma personne, mais il se doute de mon inclination pour quelqu'un qu'il me sera -- quoi qu'il arrive -- impossible d'épouser.

Je ne souhaite pas me montrer déloyale alors que vous fûtes si bon envers nous.

Puisqu'il m'est ici permis de vous faire part de mes pensées, je peux vous révéler que j'ai été très touchée de vos paroles. Vous m'avez fait une bonne impression et je serais heureuse de vous revoir. En revanche, votre père me fait l'effet d'être une sorte de Tristifer en pire et n'a certainement pas usurpé son surnom de Vautour ! Je me suis fait proprement escroqué par lui. Heureusement que je ne venais pas vraiment pour faire des affaires, sans quoi je serais sans doute choquée et honteuse de la manière dont j'ai été incapable de lui tenir tête.

J'avais nourri l'espoir de trouver des débouchés nouveaux pour notre vin, et ainsi pouvoir toucher une petite part des bénéfices, ce devra être pour plus tard ! En fait, j'ai un point commun avec votre père et mon oncle : je tiens vraiment à avoir des biens en propre, que je serai libre d'utiliser sans demander d'autorisation. Une rente représente pour moi une liberté précieuse et qui pourrait vous paraître vile tant elle s'attache à une matière vénale.

Quand je vois la manière dont votre père s'accroche à ses affaires, à son bureau, à ses livres de compte, je l'imagine sans peine devenir centenaire, enterrer ses enfants, pour ne transmettre le domaine à contre cœur qu'à ses petits-enfants voire arrière-petits-enfants ! ... Je sais que vous êtes en froid avec lui, et je ne doute pas de votre intégrité, ni de votre vertu ou de votre courage, mais j'ai peur de ce que représente une vie entière dans l'ombre d'un tel seigneur.


Je garde un bon souvenir de notre promenade sur la dune, près des pins, la veille de notre départ, et j'étais un peu peinée que vous ne veniez pas à notre départ. J'espère que les choses se passeront désormais mieux chez vous, et nous aurons peut-être l'occasion de discuter à nouveau,


Portez vous bien,



H.
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