TDF Chap. 12 : Sept jours pour agir

[Thalgrim]

Myrosh se précipita vers Jolan en repoussant rageusement les tables et les bancs qui entravaient sa progression. Il avait couvert la moitié de la distance qui le séparait son ami lorsque ce dernier brisa d'un geste vif la lanterne sur le sol. Le prêtre rouge poussa un grognement de frustration en voyant le jeune homme décidé à s'immoler. Immédiatement, l'homme d'Asshaï interrompit sa course et commença à psalmodier dans un mélange de bravosi et de haut valyrien tout en s'adressant au brasier naissant, comme s'il le mettait au défi de consumer le pupille Hastwyck. Sans cesser de parler, il reprit sa progression d'un pas lent, le bras droit tendu en avant, paume ouverte vers le feu. À chacun de ses pas, il scandait le nom de R'hllor. Désormais les flammes semblaient danser au rythme de ses paroles, et leur intensité paraissait décroître à chaque fois qu'il prononçait le nom du Seigneur de la lumière. Lorsqu'il arriva au niveau de son ami, Myrosh plongea sans hésitation sa main dans le feu qui s'emparait des cheveux de Jolan Hastwyck, gagnant progressivement le haut de ses vêtements et menaçant de brûler son visage , et la referma d'un geste sec en terminant sa prière.

Dans un ultime crépitement, le brasier mourut, comme aspiré de l'intérieur par une force surnaturelle, révélant la silhouette recroquevillée de Jolan qui tenait nerveusement le corps de Bénédicte d'un bras. Les vêtements du jeune homme étaient partiellement consumés mais son corps ne portait nulle trace de brûlure.

"Je ne te laisserais pas rendre R'hllor responsable de ton ton désir d'en finir, m'entends-tu?"

Myrosh balaya la pièce du regard, notant la présence du cadavre poignardé de Corwin, avant de s'agenouiller devant son ami. Les mains du jeune homme étaient couverte de sang, tout comme la poitrine de sa bien aimée. Ce dernier releva la tête, et le regard des deux hommes se croisa. Le prêtre rouge réalisa avec un mélange d'horreur et de désespoir que les yeux de Jolan étaient emplis de folie et de noirceur et il repensa en frissonnant aux avertissements de l'archimestre Marwyn. Il n'existe aucun remède contre le poison d'une lame d'ombre.

Le prêtre rouge inspira longuement, conscient du poids du destin pour lui et Jolan, avant de prendre la parole d'une voix calme :
"Quelque chose d'horrible s'est produit ici ce soir, mais j'ai besoin de l'entendre de ta bouche."

[DukeTogo]

HRP : Maitrise-Extinction surnaturelle du feu / Dévouement-Volonté (4D+1B = 17) + dépense d'un point de destin, car ce n'est pas une capacité que tu sais normalement réussir, tout comme tu manques de temps pour t'infliger une lésion

Ordonnant aux flammes de ne pas s'emparer du souffle de vie du nouvel héritier Hastwyck, Myrosh eut dans les crépitements comme des visions dansantes. Il voyait Jolan et Bénédicte s'embrasser et s'embraser. Le feu de leur passion les dévoraient mais cédait la place à une nuit sombre et pleine de terreurs. Bénédicte était une jeune fille, assise seule dans une chambre sombre, incapable de crier quand une ombre obscène, portant une robe de bure, l'enveloppa. Myrosh voyait l'ombre flotter dans l'instant présent, comme un nuage de malheur et de malédiction déjà repu de l'essence de vie des deux corps maintenant inertes, glisser entre les doigts de Jolan, tourner autour de lui.

Vaincre l'ombre à un prix.

Dans le crâne de Jolan, tant et plus d'idées sordides et pensées heureuses s'entrechoquaient. Myrosh... Myrosh commandait aux flammes et lui non. Une part de lui avait entendu les mots du prêtre rouge. Une autre part remarqua dépasser de sous le corps de Bénédicte la garde du poignard de Thalia. Non. C'était le stylet acérée, celui qui avait puni Corvin et libéré Bénédicte.

[DukeTogo]

Combien de fois Darren avait-il ravi et conquis par ses baisers mesurés, ses caresses pensées, parfois presque calculées ? L'art de l'amour était le terrain de bataille du chevalier courtois. Il se devait de briller, découvrir les désirs cachés et être le meilleur. Ce plaisir de la conquête et de la maîtrise s'assouvissait patiemment, par la tactique et l'observation. Si l'amour était une guerre, il serait l'un des plus grands généraux de tous les temps. Ses amantes s'abandonnaient souvent à ses étreintes en frissonnant. La victoire était souvent facile et il n'échouait que lorsqu'il ne se donnait pas la peine de s'appliquer -- comme ce fut le cas pour la servante Lysette, simple défouloir de tension.

Une crispation. Du plaisir, de la douleur ?

Un regard attentif vers sa belle lui fit découvrir une forme de détresse, et même de malaise. Qu'est-ce qui n'allait pas ? Darren resta une seconde sans comprendre. L'inconnue muette en profita pour échapper à ses baisers intimes. Déjà elle se redressait, se détournait, assise -comme réfugiée - au bord du lit. Elle lui tournait le dos, n'osant plus le regarder, la tête basse, les bras ramenés pudiquement contre sa poitrine.

[DukeTogo]

"J'ai toujours pensé que je devais avoir quelque chose de mauvais à désirer ce que d'autres ont décidé ne pas être fait pour moi. Aujourd'hui, j'ai rencontré un véritable monstre. Je crois que je n'en suis pas un."

"Croire? Quel vilain mot pour soi-même. Quand à être un monstre... L'on devient vite ce que l'on fait. Tout comme, si on veut devenir quelqu'un, il faut s'y appliquer. Souvent. Remplacer donc désirer par obtenir."

"Merci pour votre bienveillance à mon égard."

"Là d'où je viens, les femmes peuvent accomplir de grands destins. Je ne dis pas que toutes le peuvent. Il m'arrive de recueillir, un temps seulement, des filles qui ne s'avèrent n'être que des oies blanches, qui gloussent quand il faut se taire et couinent quand il faut parler." Elle exhala un soupir. "J'espère ne pas le regretter un jour mais je ne pouvais pas laisser la moitié d'un couard briser celle que vous pourriez être. Vous êtes non seulement jolie mais avez une cervelle. Ce sont des qualités rares, souvent tuées dans l'oeuf, dès que l'on se trouve au nord des Montagnes Rouges. Non, je ne déplore pas faire de vous une Jouvencelle de ma maison, je n'oublie pas qui vous êtes."

Elle se tourna vers le miroir pour voir le reflet de lady Castellane qui lui inspira une expression satisfaite.

"C'est tout de même mieux."

Dame Adrienne avait une véritable expertise pour rehausser la féminité et la beauté. Aleth elle-même était surprise du résultat alors que moins d'une heure plus tôt elle avait les traits tirés et les yeux gonflés par l'émotion et l'effroi. Le corset de la robe l'enserrait plus qu'elle avait pris l'habitude de le faire au quotidien, l'obligeant à se tenir plus droite qu'à l'accoutumée. A plusieurs reprises, Dame Adrienne lui avait imposé de garder un menton haut. Elle insista également sur un dos tonique et contracté ayant pour effet de dégager les épaules et mettre en valeur la gorge. Une pensée traversa l'esprit d'Aleth. Elle avait entendu un jour une rumeur selon laquelle dame Adrienne aurait étranglé à mains nues son mari. Se remémorant la force du poing qu'elle avait écrasé sur le nez de Corvin, il était indéniable qu'elle s'y connaissait en tonicité.

"C'est peut-être beaucoup d'informations pour ce soir. Il y'a tant à dire si vous voulez gouverner votre vie et vos désirs. Vous pourrez avoir mon aide si vous me le demandez... et que je suis disponible."

"Il est temps que j'aille au poste de garde. Il y a encore des choses à faire cette nuit."

"Déjà sur pied? Bien. La robe est à vous, du moment que vous m'en payez le prix qu'elle m'a couté. Rien ne presse, je gage vous revoir bientôt, même si ce n'est pas pour le bonheur d'un certain homme en noir."

[Iris]

Pour l'heure, quoique déterminée à agir rapidement, Aleth était surtout emplie de tristesse. Tout juste exprima-t-elle une ébauche de sourire à la pensée de Jack. Un peu machinalement, elle demanda le prix de la robe -- mais se rappela alors qu'elle n'avait plus rien et que le temps pressait avec le prochain départ pour Hautjardin.

Une fois dehors, elle trouva soudain incongru de se trouver dans une ruelle borgne. Tout était si étrange cette nuit.

Elle se dirigea -- assez pressée et en partie absente -- vers le poste de garde pour demander à trouver Béric. Quand on lui suggéra de chercher du côté de l'auberge, elle demanda à être accompagnée d'au moins deux gardes. Elle n'avait pas peur -- elle était bien trop loin pour ressentir cette émotion -- mais elle tenait à ce que le maître d'armes eût un minimum de personnel pour agir.

Une fois à l'auberge, elle alla trouver Béric et s'assit près de lui, pour lui parler à voix basse, de manière à n'être entendue que de lui. Elle était presque inexpressive, le regard partagé entre douleur, tristesse et colère froide. Elle était coiffée différemment, portait une robe qui ne lui appartenait pas jusqu'à récemment :

"Béric, j'ai de très graves nouvelles. Mestre Corwin était le traître qui a tué Floki. Il avait pris peur suite aux investigations de Myrosh à Villevieille. Il a voulu s'en prendre à moi et je ne dois la vie qu'à l'intervention de Dame Adrienne. Elle l'a passé à tabac et laissé dans l'école. Il doit être arrêté afin d'être interrogé. Il comptait prendre un bateau en partance pour le sud, et susceptible de partir cette nuit. Il y a peut-être des preuves parmi ses malles. Il faut récupérer ces bagages. "

" Je vais rentrer au château prévenir Père de la situation."

Puis elle alla trouver l'aubergiste et précisa souhaiter parler à Myrosh demain dans la matinée. Elle lui serait reconnaissante de venir la retrouver au château. Elle souhaitait parler avec Gyles dans les mêmes conditions.

Aleth s'apprêtait à rentrer au château, et se rappela un détail anodin qui lui parut soudain important : "Je suis désolée, j'ai manqué d'adresse à utiliser le stylet que vous m'aviez offert. J'ai pu frapper Corwin, mais cela n'a pas été suffisant. J'ai perdu l'arme sur place. " La seconde d'après, elle se trouvait stupide de développer ainsi et salua Béric brièvement pour prendre congé.

[DukeTogo]

Hadrian Tor offrit sa tournée. Le patron de l'auberge profita d'un moment de calme pour s'entretenir à voix basse avec ser Béric le droit.

"Hum... Béric, enfin, ser Béric..." L'aubergiste sourit quand le chevalier lui fit signe de ne pas trop s'en faire avec l'étiquette, ce qu'Hadrian apprécia. Après tout, ils avaient l'habitude de se tutoyer, pourquoi cela devait-il changer?

"Et bien, je m'inquiètes un peu. Ma fille, Bénédicte, elle traine avec des mauvais garçons... Hum... Ca me rendrait service si tu pouvais voir à... faire le vide autour d'elle - par la garde, hein, je sais que t'as autre chose à faire - dès qu'elle côtoie un vaurien."

[Casaïr]

Que venait-il de se passer ? Je ne m’étais pas vraiment attendu à cela. Avait-elle eu mal ? M’y étais-je mal pris ? À moins qu’il n’y ait… autre chose ? Je pensais peut-être trop, mais une telle réaction me semblait cacher quelque émoi profondément ancré, et pas en bien semble-t-il. À moins qu’elle ne soit pas habituée à ce genre de caresse et qu’elle ait pris peur, tout simplement. Si seulement elle parlait ! Voir sa détresse ainsi révélée me peinait ; je l’imaginais avoir longtemps attendu ce moment –sinon, pourquoi se donner tant de peine pour me voir ?-, s'être imaginée comment elle se passerait et se rendre compte que la réalité n'était peut-être pas celle qu'elle s'était attendue à vivre.

Je fis doucement le tour du lit, m’approchant d’elle à pas mesuré, pour ne pas l’effrayer. Je me mis à genoux devant elle, l’air profondément désolé pour cette maladresse qui lui avait causé du tort et gâché une partie de sa soirée. J’avançais lentement mes mains pour enserrer les siennes tendrement et, si elle me laissait faire, les entraînais vers ma bouche pour les baiser. Il me fallait réparer mon erreur, mais, en cet instant, j’ignorais encore comment ; je manquais d’information et j’avais la nette et étrange impression qu’elle ne m’aiderait pas, qu’elle voulait que je découvre par moi-même ce qu’elle désirait. Toutefois, je ne pouvais continuer à chuter tel l’oisillon cherchant à apprendre à voler.

Dans un élan que je ne me connaissais guère, j’eu soudain envie de protéger cette âme qui s’offrait ainsi à moi. Je montais sur le lit avant de la prendre délicatement dans mes bras pour la bercer, espérant qu’elle ne serait pas trop rétive quant à mes gestes d’apaisement, chuchotant à son oreille :

« Je suis navré si je vous ai heurté, ma Dame, ce n’était pas dans mes intentions. Souhaitez-vous guider mes gestes, afin que cela ne se reproduise pas ? »

Lui laisser la possibilité de diriger nos jeux de ce soir, de prendre l’ascendant sur moi, pourrait peut-être la rassurer, j’étais en tout cas prêt à essayer. Je la regardais, prêt à accepter tous ses désirs, même les plus fous. Ce soir, je n’avais d’yeux que pour elle.

[Maëlys]

Installé à l'auberge, Béric avait été fort étonné de voir Lady Aleth arriver à sa table. Encore plus qu'elle s'assoit à ses côtés puis lui parle à voix basse tandis qu'il apercevait les deux gardes qui l'avait accompagné dans l'encadrure de la porte.
Il écouta avec attention ces quelques paroles, contenant du mieux qu'il pouvait ses émotions.

Il aurait souhaité rire d'un coup et lui demander d'où elle sortait de telles histoires mais le timbre de la voix de la Lady ainsi que son regard lui assurait la réalité des propos. Il réfléchit quelques instants sur la réalité de la situation. Il fallait garder la tête froide et agir le plus vite possible et dans la plus grande efficacité si il ne voulait pas perdre des éléments en route.
Puis il répondit à voix basse également :

"Adrienne ? Comment ça ? Et comment allez-vous ? Enfin non ... Ce qui est important c'est que vous soyez-là. Rentrez au château, un des hommes va rentrer vous escorter. Je m'occupe de suite de Corwin et du port."

Il se leva immédiatement puis accompagna Lady Aleth jusqu'à la porte après qu'elle se soit entretenu avec Hadrian. Ce dernier lui glissa d'ailleurs quelques mots auquel il répondit :

"Je vais personnellement regarder ça dès demain Hadrian, j'ai fort à faire pour ce soir je pense."

Une fois à la porte, Lady Aleth lui glissa quelques derniers mots au sujet du stylet qui n'avaient pour lui guère d'importance sur l'instant :

"Vous êtes en vie et debout, c'est tout ce qui compte désormais. Rentrez au château et reposez-vous. Je fais ce qui concerne Waterford."

Arrivant dehors où les deux gardes se trouvait, il ordonna au premier d'escorter celle-ci jusqu'à ce qu'elle puisse voir Lord Rhéomar puis se tourna vers le deuxième :

"Retourne au poste de garde, que trois hommes soient envoyés à l'école où ils me retrouveront. Et que le reste aille sur le port, un bateau serait sur le départ, je veux que tout soit bloqué et qu'on me trouve Garrys. Même si il faut le traîner de son lit !"

"Allez du nerf ! Lady, je vous retrouverai au château avec Corwin et des réponses."

Il partit ensuite en direction de l'école d'une large foulée pour mettre la main sur Corwin. S'il s'en était pris à Lady Aleth il lui en couterait cher.

[Crépuscule]

Myrosh avait fait un miracle, R'hllor était bien réel et accordait à son prêtre tant de pouvoirs ... il vit alors ... il vit un bref instant la brèche que son esprit sombre avait tenté d'occulter ...

Il murmura à lui même ...

"Je suis un monstre ... et un lâche, je n'ai pas eu le courage de suivre la voie qu'il m'a montré, que mon coeur m'indiquait … je n’en avait pas le courage, c’est pour cela qu’il le fallait … “

Il plongea son regard dans celui de Myrosh alors que cette fenêtre intérieure sur la vérité se fermait derrière le voile obscure de ses démons, il n’avait pas la force pour lui mentir et lui dit en criant :

“Il le fallait, tu comprends ? Il est en moi, ce mal, tant de haine, je n’avais à lui apporter que de la souffrance, il le fallait, je ...je l’ai... je l'ai fait!

... Je suis l'Héritier des Hastwyck, je devais agir pour que cela s’arrête, aucun obstacle ne doit m’empêcher de faire de ma Maison ce qu’elle doit être, je leur montrerai à tous que rien n’arrête un Hastwyck. Le dévouement passe par le sacrifice Myrosh, il faut que tu me comprennes mon ami … il le fallait ....”

[DukeTogo]

D'effarouchée et presque rétive, la jeune femme s'adoucit et eut même un rire étouffé en voyant la manière dont Darren prenait tout cela à cœur et s'inquiétait. Apparemment elle n'allait pas si mal... il n'était pas question de souffrances qu'il avait ravivées, non, c'était autre chose.
Elle plongea son regard dans le sien, avec intensité, comme si ses yeux seuls pouvaient transmettre un message authentique, profond, et sans aucune des fioritures hypocrites du jeu social. De quel couleur étaient-ils vraiment? Les quelques rares bougies allumées et le ton dominant indigo du salon donnaient une faible lumière claire-obscure, accentuant les ombres.

"Je veux le vrai toi." finit-elle par dire dans un léger murmure souriant, sa main posée sur la joue de son amant.