[OdE - Chap.2.5] Soirée dans le bois [15 Damhar]

[Casaïr]

- Que nous prépares-tu donc ? Je te préviens, je serai exigeante !

Il eut un petit rire complice en se tournant à demi vers son amie.

"En fait, tu as de la chance. J'ai un canard entier qui eut la malchance de me croiser récemment et que j'avais déjà commencé à préparer. A la base je comptais le manger seul mais je ne suis pas un égoïste ! Pour les légumes j'ai moins de chance, je troque mes services contre de la nourriture le plus souvent. C'est plus pratique et ça arrange tout le monde -surtout moi en fait. Mes réserves sont toutefois un peu moins importantes mais il me reste des fèves -il reste toujours des fèves, en fait, ajouta-t-il un rien circonspect. J'ai une miche de pain... Non, oublie."

Il tapa le bord de la cheminée avec, pour montrer à Oanell. "Après, si tu veux consolider un muret avec, je pense que cela pourrait t'être utile, mais à consommer... Par contre j'ai encore un beau morceau de fromage. Sans pain c'est moins amusant mais il se mange très bien malgré tout. Mais pas d'alcool malheureusement. Cela, je n'en prends jamais. En fait, réfléchit-il, hier, c'était bien la première fois que j'en buvais et..."

Il s'interrompit, rougissant brutalement, balbutiant "je devrais apprendre à tenir ma langue, excuse-moi..."

Malgré tout, il sortait le grand jeu, enfin ce qui en tenait lieu avec ses modestes moyens, mais cela ne le gênait pas vraiment. A partir de demain, il mettrait les bouchées doubles pour remplir ses réserves, voila tout. Il installa assiettes en grès qui avaient connu de meilleurs jours, donnant à son invitée celle qui semblait la moins abîmée, godets de bois et un broc. Constatant que celui-ci était vide, il s'excusa un instant pour aller le remplir rapidement. Une fois revenu et content de voir que le repas -pour une fois- semblait cuir de belle façon, il se réinstalla à table, à côté de Oanell. Il hésitait manifestement pour parler, cherchant un sujet de conversation. Puis finalement, il eut une idée.

"Hier, tu m'as demandé pourquoi je me sentais proche de la nature et ait voulu être chasseur et je t'ai répondu. Mais je ne t'ai pas demandé ce qui, toi, t'avait poussé à devenir barde."

[NailsEater]

- Oh ! C’est sûrement un comble mais ma réponse sera moins poétique que la tienne, plaisanta-t-elle. J’ai toujours était quelqu’un d’assez distrait et j’ai très vite souhaité quitter la campagne. Quand un barde de passage me proposa de partir vivre en ville et apprendre le métier de barde, je suis partie sans vraiment regarder derrière moi.

Oanell parlait de manière claire mais l’on pouvait sentir un certain malaise lorsqu’elle continua :

Je n’ai pas de relation particulière avec mes parents, ils me voyaient comme une enfant trop curieuse qui leurs attirerait surement des ennuis. Ils n’ont pas vraiment hésité quand Briavel leur demanda leur accord pour m’embarquer sur les routes. Et voilà, 13 ans plus tard, je suis de nouveaux ici, constata la barde.
Elle s'arreta de nouveau, regardant Aeldred dans les yeux.

Je n’aime pas beaucoup parler de moi. Alors je réponds peut-être un peu à côté. Elle réfléchit quelques instants, retira ces lunettes sans y faire attention, puis enchaînât. En fait, ça ne me dérange pas que tu me poses des questions ! Je n’ai pas vraiment l’habitude alors je ne promets rien !
Elle avait rajouté cette dernière phrase en faisant un sourire qui sonné comme une excuse.

[Casaïr]

"C'est normal de poser des questions, enfin je crois. Sinon, comment peut-on apprendre à se connaitre ?"

Sans ses lunettes, elle est encore plus... Il n'alla guère plus loin dans ses pensées, celles-ci étant rapidement parasitées par les dernières images qu'il avait d'elle sans ses lunettes. Sans aucun autre vêtement en fait. Il avait l'impression de bouillir de l'intérieur, littéralement. Si je me mettais à la place du feu pour cuire le canard, j'y arriverai sans doute aussi bien ! Mais pourquoi donc avait-elle retiré ses lunettes ?...

Tentant de faire dériver le fil de ses pensées vers des contrées plus chastes, il prit le temps de repenser à ce qu'elle lui avait dit sur la maison et son absence totale de gaieté. Il savait qu'elle n'avait pas tort mais c'était aussi la première fois que cela le gênait.

"Au fait, ton idée pour... rendre la maison plus accueillante... est plutôt intéressante. Malheureusement je n'ai aucun goût en la matière, j'aurai très certainement besoin d'aide pour... rendre l'endroit moins froid. Avec des fleurs, des tentures, ou d'autres choses... Comme ça, si d'aventure tu devais revenir -j'ai vraiment dit ça ?!-, cela sera plus agréable pour toi..."

Il avait à nouveau l'impression de se noyer dans le regard de la jeune femme, comme la veille. La sensation qui l'avait envahi à ce moment précis -et qui se manifestait à nouveau- lui faisait totalement oublier ses malheurs et dispersait tous les obstacles sur son chemin. Il déglutit difficilement, ayant beaucoup de mal à détourner son regard de ce si charmant minois au perpétuel sourire.

[NailsEater]

- Etant donné que tu es la personne qui habite ici, il vaut mieux qu’elle soit chaleureuse pour toi. Hmm. Voyons voir …

Elle se releva et fit le tour de la pièce afin de prendre conscience de ses réelles proportions. Mordillant ses lunettes tout en réfléchissant, elle marmonnait quelques « peut-être que si … », « ici, ça serait pas mal » ou même « non, ça ne va pas du tout ! ».

Elle semblait être absorbé par sa tâche, cela faisait déjà pas mak de temps qu'elle tournait en rond parlant toute seule. Le regard exalté et enthousiaste, elle se retourna vers la table, songeant à une nappe au teinte parme ainsi qu'un bouquet de primevère et de calypso, quand elle remarqua Aeldred. Celui n’avait pas bouger et semblait la regarder d’un air ahuri. Elle se mit à rire, d’un rire clair, sincère et soudain. Elle se moquait à la fois de son visage perdu et d’elle-même tellement absorber par sa tâche qu’elle en avait oublié son hôte. Elle mit quelques instants à s’arrêter de rire.

- Ou alors peut être suffirait-il de quelques soirées comme celle-ci pour créer de nouveaux souvenirs ! Elle pouffa.

Revenant s’asseoir prêt du jeune homme, elle avait le souffle cours d’avoir tant rit. Elle n’avait pas autant ri depuis longtemps ! Aussi dans l’allégresse ambiante, s’allongeât elle en équilibre sur le banc, posant sa tête sur les jambes d’Aeldred, fermant les yeux cherchant à graver ses instants dans sa mémoire.

[Casaïr]

Voir virevolter une femme dans sa maison, surtout une femme pour qui il avait énormément d'affection, rendit bizarre Aeldred. Cela devait se voir car elle éclata de rire à son tour. Les rires emplirent quelques instant cette maison devenue si froide avec le temps et cela rendait Aeldred heureux. Il eut même l'impression fugitive de voir ses parents apparaitre, souriant de ce bonheur retrouvé.

L'image disparut quand Oanell s'allongea de tout son long en posant sa tête sur les jambes du chasseur, reprenant à grand peine une respiration normale.Il caressa délicatement les cheveux de la jeune femme en souriant.

"J'aime beaucoup ta douce folie, dit-il sans réfléchir avant de se reprendre, rougissant. Je... je veux dire, comparé à mon caractère habituel, cela fait comme... un genre... d'équilibre..." Il changea de sujet en toussant. "Pour donner de la joie dans cette maison, je sais que je peux compter sur toi désormais. J'essaierai d'y remettre un peu de vie aussi, avec ton aide si tu le veux bien. Tu... tu seras toujours la bienvenue, que ce soit ici ou ailleurs. Et tu peux entrer sans y être invitée, ça me donnera l'impression que l'endroit a retrouvé sa vocation d'origine..."

Une information frappait avec insistance à la porte de son cerveau depuis un moment avant de finalement l'enfoncer avec force, lui faisant réaliser avec horreur : "Le repas !!" Soulevant délicatement la tête de la jeune femme comme si elle était faite de porcelaine avant de la déposer puis se raviser en enlevant sa veste pour la plier pour enfin la lui glisser sous la tête en douceur, il lui dit "excuse-moi !" avant de s'élancer vers le canard qui cuisait maintenant depuis un moment.

"Allez, ne me fais pas le coup encore une fois, s'il te plait", marmonnait-il en soulevant le couvercle de sa casserole avant de lâcher un soupir de soulagement. "Il était temps ! Un peu plus et il était trop cuit. J'espère que tu as faim", lança-t-il gaiement en direction de son amie en apportant le déjeuner à table.

[NailsEater]

Oanell reprenait son souffle tandis qu’Aeldred s’afférait en cuisine.
Douce folie ? Elle gloussa. Pourquoi pas.

"Il était temps ! Un peu plus et il était trop cuit. J'espère que tu as faim"

- Au moins autant que si j’avais marché toute la journée ! s‘exclama-t-elle. En tout cas ça sent bon ! ajouta la jeune femme en s’asseyant correctement sur le banc.

Pendant qu’ils mangeaient, elle commenta le repas, plutôt bon pour un repas de dernière minutes. Et continua à donner son avis sur la décoration de la maison. En effet, quelques tentures et un bouquet de fleur suffirait à égayer la demeure d’Aeldred.
Tout en conversant, elle se rendit compte qu’ils avaient passé plus d’une journée complète ensemble. Cette remarqua la perturba un peu.

- Je n’avais plus passé autant de temps avec quelqu’un depuis la mort de Briavel, dévoila-t-elle pensive. Maelor est d’un genre plus… fin … moins … amical.

Soupirant, elle fit remarquer au jeune homme qu'il faudrait peut-être qu'elle retourne à sa chambre un jour où l'autre.

[Casaïr]

- Je n’avais plus passé autant de temps avec quelqu’un depuis la mort de Briavel, dévoila-t-elle pensive. Maelor est d’un genre plus… fin … moins … amical.

"Tu sais, c'est un peu pareil pour moi. Hormis Rhea, je ne reste avec quiconque que le temps strictement nécessaire pour mener mes affaires, hormis le séjour à Swelbecky avec Blodwen qui fut loin d'être un voyage d'agrément. Je te remercie, ça fait du bien de pouvoir discuter normalement avec quelqu'un. Je... Je ne sais pas ce qui se dit sur moi au château, dit-il en pensant à Maelor, mensonges ou vérités arrangées, mais je veux que tu saches que jamais je ne te mentirais et que je ne t'ai jamais menti jusqu'ici ! Enfin, sauf pour l'histoire des pièges de tout à l'heure et pour les filles que je ramènerai ici", ajouta-t-il, mi-figue, mi-raisin.

Il resta souriant le reste du repas, parlant de choses diverses pour faire durer encore la magie avant de ranger la vaisselle et de tendre la main à Oanell pour l'aider à se lever avant de se préparer à la raccompagner au château. "Il ne sera pas dit non plus que je suis un goujat", lança-t-il sur un clin d’œil.

***

Ils traversèrent le village en sens inverse tout en ignorant de concert les villageois. Il se souvint qu'à l'aller, Oanell avait finit par lui prendre la main, aussi tenta-t-il de faire de même avant de se raviser, en rougissant. Si je fais ça, on passera définitivement pour un couple ! Est-ce que je suis préparé à propager ce genre de ragots sur moi ? Sûr que ça changerait du refrain habituel ! Il eut un petit rire en y songeant.

Bientôt, les jeunes gens furent devant les portes du château du vieux seigneur et le moment de se dire au revoir se présenta. bien sûr, Aeldred était un peu triste que cela se termine mais il avait tant gagné depuis la veille que ce serait déraisonnable d'en demander plus.

"Bien, je suppose que c'est le moment de se séparer..."

Il laissa le temps à Oanell de lui répondre avant d'ajouter avec un sourire en coin : "pardonne moi mon effronterie, mais considère ça comme une douce revanche." Et sans lui laisser le temps de riposter, il déposa un doux baiser au coin des lèvres de la jeune femme, reproduisant ce qui avait tout déclenché la veille. Il lui tira la langue avec espièglerie avant de s'éloigner et de lancer aussi haut qu'il le pouvait :

Ainsi, utilisant comme piège ce même baiser,
Chercha-t-il à conquérir sa Belle.
Aura-t-elle à cœur de le lui retourner ?
Le chasseur l’espérait de la donzelle !

[NailsEater]

Oh ! Le goujat ! Passé la stupéfaction, Oanell sourit face à l’audace du jeune homme. Elle fit demi-tour et rentra dans le château. Elle marchait d’un pas léger se dirigeant vers sa chambre.

Elle repensa à ces deux derniers jours, quelle était sa relation avec Aeldred maintenant. Sa bonne humeur retomba légèrement. Elle se laissait emporter par le charme d’Aeldred. Si pour certain cela n’était pas une mauvaise chose, pour Oanell c’était délicat. Mitigée entre le désir de connaitre mieux le jeune homme, de passer plus de temps avec lui et la peur que les choses se passent mal, elle rester à naviguer entre deux eaux.
Elle ne pourrait pas fuir cette fois, elle n’avait pas d’autre choix que de s’intégrer au mieux. Peut-être devrait-elle éconduire son amant. Il était difficile de savoir comment il réagirait. Cet homme était un condensé de sentiment, elle l’avait vu en quelques jours passer de la colère à la joie, de la tristesse à au fou rire.

Arrivée à sa chambre, elle fit sa toilette, détacha ses cheveux et s’allongeât dans son lit. Ces muscles savourant ce repos bien mérité, elle s’endormit avec le visage du jeune homme en tête.