[OdE Chap. 7-60] L'abbaye de Sainte Isold | 7h45

[Pwyll]

"Pouvez-vous seulement définir ce qu'est un être suprême et faire la différence entre cela et un de ces Esprits qui aurait pris goût au pouvoir sur les gens ? M'entendre dire cela vous peine sans doute, mais c'est exactement ce que vous venez de faire en comparant les grands Esprits de la nature à ces sales démons."

Pwyll marqua une pause, il réfléchissait vite, il en avait rarement l'occasion à ces sujets, pour ne pas que l'autre lui coupe le sifflet.

"Aucun d'entre nous ne peut apporter de preuve du bien fondé de sa croyance. On sait en effet que le mal existe, que des choses plus grandes et anciennes nous menacent. On sait aussi que certains élus semblent capables de faire preuve de pouvoirs, mais c'est aussi le cas des Demorthèns."

Pwyll s'était calmé au fur et à mesure qu'il s'efforçait d'exprimer sa pensée.

"Je suppose que nous aurons d'autres occasions d'en discuter. Je reste intéressé par la découverte de la version présente dans ces écritures, même si la tradition des histoires racontées de génération en génération est largement aussi valable à mes yeux et sans doute plus."

[Casaïr]

Si le scepticisme de Pwyll était compréhensible, il n'était pas certain qu'il était l'heure pour un débat d'idée, aussi intéressant qu'il promettait de l'être.

"J'ai toujours pensé, tenta Aeldred, que si la vision des demorthèn était assez juste, elle restait incomplète. Il doit donc être possible de faire des recoupements entre les textes de Soustraine et la vision des demorthèn pour toucher au plus juste..."

Il réfléchissait à voix haute, autant pour lui que pour les autres. Il jeta un regard à Pwyll qui signifiait "Tu sais de quoi je parle". Après tout, Ultana n'a jamais pu lui expliquer pourquoi le fantôme de sa mère lui était apparu puisque pour elle les esprits n'existaient pas. Cependant, Fredelme n'avait pas pu l'aider davantage à ce sujet car si les unistes croient en l'existence de fantômes, pour eux ils sont systématiquement mauvais. Il y avait certainement un point qui manquait quelque part.

"Cependant je ne peux pas nier ce que j'ai vu, ce que j'ai vécu. Vous avez évoqué ces monstres qui dévorent leurs âmes après la mort. C'est le sort qui m'était réservé si l'Unique n'était pas venu à mon secours. J'ai vu leurs griffes, senti leur souffle sur ma nuque alors qu'ils me poursuivaient sur ces terres désolées."

L'évocation de ce souvenir lui donna des frissons.

"Démons, feondas, à mon sens deux noms différents pour parler des mêmes créatures qui cherchent à nous détruire. Je ne suis pas suffisamment instruit d'un côté ou de l'autre pour mener un débat plus approfondi mais je peux au moins attester de la vérité de l'âme justement niée par les demorthèn, j'en suis une preuve vivante pour ainsi dire. Est-ce déjà arrivé dans le passé ? Des élus qui... auraient été sauvé de la mort par l'Unique ?"

[Iris]

La méthode frontale de Pwyll consistait à déverser un flot ininterrompu de paroles, empêchant toute répartie. Au moment où le moine allait pouvoir s'exprimer, Aeldred prit la parole longuement à son tour.

" L'âme existe, et l'Unique est là pour sauver nos âmes. A cette fin, Il sauve parfois nos corps du trépas, afin que Ses élus puissent porter Sa parole et prouver Sa vérité par le témoignage de leurs visions des Limbes et de la blancheur immaculée."

[Pwyll]

Pwyll n'allait pas relancer un débat sur de tels sujets, d'autant qu'il était loin d'avoir les éléments pour se faire un avis sur les idées de ces gens. Il avait surtout réagi suite aux propos tenus sur les la Triade des Esprits.

"Bon, on pourrait tenter de définir une heure pour demain, quand même, ce serait plus productif. Si on le fait, je viendrai écouter."

[Iris]

" Vous voulez venir ? " demanda Alduin avec une forme de scepticisme.

Néanmoins, il prit sur lui de ne pas poursuivre sur sa lancée, et se contenta de se tourner vers Aeldred : " Rencontrer d'autres croyants sera une expérience je pense intéressante. Ce n'est pas facile d'être seul dans son coeur, privé de la communauté de ses semblables. C'est sans doute pour ça que je n'aurais jamais pu être vecteur. Ils se risquent en terres hostiles pour apporter la lumière à des gens qui n'en ont que faire, mais le font parce qu'ils estiment que chaque âme sauvée est digne de tous les dangers."

[Casaïr]

Aeldred se sentit obligé de défendre son ami en voyant la tête du moine.

"Malgré ce qu'il peut dire, Pwyll est plutôt curieux." Il laissa planer un léger silence pour que le géant puisse réaliser la moquerie sous-jacente. "Et ça ne peut pas lui faire de mal de s'ouvrir à des choses qu'il ne connait pas. Je me doute bien qu'on ne te convertira pas et ce n'est pas le but, mais si tu peux accepter et comprendre ne fut-ce qu'un peu le fonctionnement de la foi uniste, on n'aura pas perdu notre journée."

Il sourit à ce grand gaillard qu'il connaissait bien. Alors qu'Alduin poursuivait, ses propos sur les vecteurs le firent réfléchir.

"C'est vrai que ce que fait Fredelme est remarquable mais comme vous pouvez le constater, sa gentillesse a su toucher au moins une personne. En fait, il m'a été d'une grande aide, il m'avait même déjà proposé d'aller étudier en Gwidre. Je n'y suis juste pas prêt ; malgré les difficultés que je rencontre, je n'ai pas le cœur de quitter mon village, pas pour une durée aussi longue. Pourtant l'Unique sait à quel point je suis curieux de tout apprendre !"

"Mère Gudela a une idée en tête je pense à ce sujet et je lui suis reconnaissant de l'aide qu'elle m'apporte."

[Iris]

" L'abbesse fut autrefois vectrice, nulle doute qu'elle est parmi les personnes les mieux à même de comprendre..."

Alduin était apparemment peu inspiré par la conversation. Le silence s'insinua, avec la vague gêne qu'il entraînait quand personne ne savait trop quoi dire, mais que tous avaient l'impression qu'il fallait parler.

" Vous verrez les lectures publiques sont animées. Il y a des jeunes gens et des familles. Les gens se réunissent dans la grande salle..." Il désigna d'un geste une pièce sur la gauche après l'entrée dans l'abbaye. Il y a ensuite la sixième et dernière prière, consacrée à la bénédiction de la nuit dans la chapelle, où nous nous retrouvons tous."

" Si vous souhaitez prier, il y a une messe chaque matin à l'aube, pour célébrer la lumière qui revient."

[Casaïr]

Autant Aeldred n'était pas certain de pouvoir encore se dégager du temps pour assister à une lecture, autant l'idée de participer à la prière lui semblait très accessible.

"Je viendrais demain matin alors."

Il cherchait s'il avait encore d'autres questions et réalisa qu'il était sans doute temps de laisser Alduin tranquille.

"Nous allons vous laisser, je vous remercie pour le temps que vous nous avez accordé."

[Iris]

Le moine s'inclina : " Nous nous verrons à la messe alors." ; il adressa un salut plus court à Pwyll, et retourna dans le scriptorium, laissant les deux hommes à l'étage, dans une galerie couverte qui donnait sur le cloître, le jardin et la chapelle.

[Casaïr]

Aeldred s'étira.

"Je pense qu'on en a vu assez pour le moment, on ferait mieux de rentrer. Enfin moi surtout, j'imagine que je vais avoir du travail et je dois parler à Blodwen au sujet d'un... enseignement me concernant."