[Artland 1.1] Chemins du Destin - I - Le rêve

[Iris]

La queue entre les pattes, Peter Lester faisait profil bas, mais la colère d'Asch ne retombait pas si vite. Ce n'était pas un homme à menacer ou insulter, une fois qu'il avait cette effrayante lueur fauve dans les yeux, une sorte de reflet un peu jaune, comme si l'iris s'était modifié, il avait un peu de mal à faire de nouveau baisser la tension. Par ailleurs, il était en mode "combat" et chaque mot lui coûtait, Séraphine devinait que la Bête affleurait, Mabrouk aussi. Quant à Cassis, il avait, pour autant qu'un chat pût avoir cette tête, une mine d'une souveraineté blasée.

Cependant c'était un salon cossu, mignon, il y avait une fillette à côté et la femme qu'il aimait à proximité, au fond de lui, il ne voulait pas se laisser aller à la violence de sa Rage, et Peter Lester avait de la chance qu'il y eût ces présence, car en fait, la simple phrase de Lester "pour sauver les apparences" frôlait déjà dangereusement le dépassement de limite d'Asch quand il était dans cet état. En fait, il aurait plus sage de s'asseoir en silence, yeux baissés, bref, de se comporter visiblement en animal soumis... Peter Lester le devinait confusément, Asch se comportait un peu comme un animal... un chien sauvage ou un loup... Ici, c'était son "territoire", sa "meute" était sous sa protection et il était capable de faire un carnage pour éliminer toute menace...

Sans un mot, Asch traversa vivement l'espace qui le séparait de la plus proche fenêtre ouverte, il parut sauter, mais en fait dans un geste d'une grande vivacité, des réflexes anormaux, il venait de grimper sur le toit au-dessus, les personnes dans le salon entendant quelques pas tandis qu'il se trouvait une place à l'air libre.

En principe Séraphine devait deviner qu'Asch avait apparemment besoin d'air pour se calmer, pour permettre à l'accès de Rage de passer et elle comprenait sans doute pourquoi il avait jusque là vécu en nomade, incapable de tenir un boulot régulier, il pouvait être "normal" et soudain son "autre visage" réagissait à une menace qu'un "humain" aurait géré sans avoir besoin de frapper et mordre... Question "infirmité", Séraphine pouvait noter qu'il y avait pire que son problème à elle. Cette prise de conscience pouvait peut-être lui faire comprendre à quel point elle pouvait être blessante quand elle se traitait d'infirme et qu'elle lui rappelait constamment par là qu'il était condamné à une véritable inadaptation sociale...

Annie pour sa part se mit à table, Cassis sautant sur ses genoux : "Cassis dit qu'il a très faim, il reviendra forcément pour le rôti."

...

[Kenny]

Séraphine n'en revenait pas qu'il se mette dans des états pareils pour pas grand chose au fond, et donc calma tout le monde avec la tendresse qu'elle pouvait communiquer.
"Bon, assaillez-vous Peter, vous devait surement vous poser des milliards de question, mais vous pouvez prendre conscience de ce que la guerre peut changer un homme."
Elle soupira. "Je vais tenter d'être claire." Tout en servant Peter de salade.
"Vous devez avoir vu déjà, des gens au bord d'un péril qui trouvent alors un regain d'énergie qui les font soulever des montagnes, non ? Peut-être cela vous est même arrivé ? Disons que cet état peut provoquer des changements plus profond quand le péril est insurmontable...Je ne sais pas très bien ce que cela à fait à Asch, mais il est différent, vous avez pu voir qu'il guérit plus vite. Mais cela a une contre partie forcément. Je peux juste vous dire..." fermant les yeux. "qu'il éprouve une colère extrême, qu'il s'efforce de contenir constamment...Je sais bien que pour vous autre artlandais ce n'est pas possible et vous allez repousser en bloc tout cela, mais il y a des choses en ce monde qui ne sont pas rationnelles."

Tout en parlant, elle avait servir Annie et elle même...

[Iris]

Tandis que Séraphine essayait d'arrondir les angles avec tendresse et tact, Cassis se désintéressait totalement des explications et mangeait, avec sa fourchette et sa main, apparemment elle n'avait pas encore bien eu l'occasion d'apprendre à se servir de ses couverts avec distinction. Sa manière de faire évoquait plutôt une gamine des rues qui s'appliquait distraitement et elle donnait souvent des morceaux de jambon à Cassis qui n'était définitivement pas le chat le plus malheureux sur Terre, et d'ailleurs ce narquois minou regardait Mabrouk en silence tout en mangeant, avec un petit air "hé hé, moi je suis à table et pas toi !" ce qui arracha au chien un petit gémissement dépité, sur quoi il se coucha, avec cependant toujours l’œil aux aguets, suivant le jambon des yeux...

Cependant son maître avait un peu autre chose à avaler... lui qui se décrivait volontiers comme plutôt routinier apparemment... et rationnel... il trouvait un ancien camarade de l'armée qui avait clairement menacé de le tuer, et pas pour rigoler, il avait vraiment l'air sérieux quand il l'avait dit, cette même détermination qu'il lui connaissait au plus fort du danger, elle affleurait chez lui, et était décuplée...

[rolender]

Peter se demandait s'il était sage de rester... mais d'un autre côté sortir tant qu'Asch était dehors l'enchantait encore moins. Il regarda la salade d'un oeil suspect. Essayait-on de l'empoisonner ? Apparemment, non : Séraphine et Annie en mangeaient elles-même.

Même s'il n'avait pas très faim, il se força à manger : ce n'était pas le moment de déplaire à Séraphine : un seul mot d'elle auprès d'Asch et s'en était fini de lui...

- Très bonne cette salade, Séraphine... dit-il d'un air qui se voulait détendu, mais qui ne l'était point du tout !

- Je suis désolé Séraphine, je n'aurais pas du parler de la guerre comme vous me l'aviez conseillé...

Essayant d'analyser la situation, il déduisit que sa situation n'était pas si critique après tout : Asch ne serait pas parti s'il l'avait cru vraiment capable de faire du tors à sa famille, non ? ...

- Si je suis bien votre raisonnement Séraphine, devoir surmonter de grands dangers entraineraient des humains à développer des pouvoirs insoupsonnés qui n'ont rien de "rationnels" ? Cela n'arrive pas à tout le monde j'imagine, sinon cela se saurait ! Enfin je crois... combien êtes-vous au juste et comment vous nommez-vous ?

Asch déglutit lentement : n'était-il pas trop curieux ? Cependant sa curiosité était la plus forte : quitte à mourir, il voulait avoir le fin mot de l'histoire.

- Asch a prétendu qu'Annie et vous étiez comme lui. Quels sont donc ces événements qui vous ont "métamorphosé" et qu'elles sont vos facultés, au juste ? Avez-vous un but précis ?


Sur le coup, Peter en avait oublié Mabrouck et comme Séraphine ne lui avait rien apporté à manger, il devait effectivement mourir de faim...

[Kenny]

Séraphine ne se doutait pas qu'il faille nourrir le chien, et puis il mangerait bien les restes, si reste il y a...

Toujours avec le sourire :
"Vous avez de bien drôles questions ! Vous pensez que nous faisons partie d'une organisation ou je ne sais quoi ? non non...je vous rassure de suite, il n'y a rien de tout ça. Je ne parlerai pas pour les autres, pour ma part, je pense qu'on peut dire que je suis médium, même si je ne sais pas si c'est la définition exacte. Ce qui me fait penser que vous même, vous avez un lien beaucoup plus étroit avec votre chien. Vous ne trouvez pas anormal qu'il comprenne tout ce que vous lui dites ?"

[rolender]

- Anormal que Mabrouck comprenne tout ce que je dis ? Pourquoi cela ? Ce chien, je l'ai dressé pour cela, vous savez. Les chiens sont des animaux très intelligent. A partir des émotions de son maître, de sa gestuelle, ils en déduisent les actions qu'il souhaite que l'on fasse. Ils ne comprennent pas les mots bien entendus,... Pas vrai Mabrouck ?

Mabrouck se met au pied et exclame un wouf d'approbation !

- Vous voyez ? Chaque fois que je dis ces trois mots, il a appris à aboyer parce qu'il sait que cela me fait plaisir. Les chiens sont aussi de fidèles compagnons qui cherchent un ami dans la vie, c'est aussi cela le secret. Rien de bien surnaturel là dedans.

- Et au fait, c'est quoi un médium ? Je n'ai jamais entendu ce mot auparavant.

[Iris]

Annie, moue souveraine et aussi hautaine que peut l'être un enfant qui est sûr qu'un adulte dit des bêtises :

" T'as rien compris ! En plus en lui demandant de faire des tours bêtes comme te dire toujours que t'as raison, tu l'empêches de devenir ton double. Y'en a plein comme toi qui sont bêtes. "

" Heureusement que Asch est sur le toit, tu l'énerverais bien en disant ça ! "


... Et elle continue de manger l'air de rien...

[rolender]

Peter se demandait s'il devait mal prendre l'insubordination et les insultes de cette gamine. Se rappelant la situation dans laquelle il se trouvait, il se força à entrer dans son jeu.

- Alors comme ça, je n'ai rien compris, je suis bête, hum... Ah, comme je peux détester cette expression. Je suis particulièrement bien placé avec Mabrouck pour te dire que bon nombre de "bêtes" sont bien plus intelligentes que des êtres humains. Il n'y a rien de mal à être une bête.

- Et une autre leçon pour vous, petite mademoiselle, c'est qu'il est particulièrement stupide de traiter quelqu'un de stupide pour la simple raison qu'il ne sait pas quelque chose. Est-ce qu'un enfant analphabète est stupide parce qu'on ne lui a jamais appris son alphabet ? Non ! Je n'ai jamais été mis au courant de ces secrets que vous semblez si bien connaître.

- Alors Annie, et si tu me parlais un peu plus de ces secrets que je n'ai pas compris, hum ... ? Quel est cette histoire de double ?

[Iris]

Annie, air supérieur, totalement en décalage avec son âge :

" J'ai voyagé sur les rivages du Styx, je n'ai pas à supporter les leçons d'un adulte buté. "

" C'est vraiment trop bête ! Cassis dit que tu vas vouloir aider Séraphine à chercher le garçon du futur... Et moi, je vois pas comment, parce que tu comprends rien à rien ! Et même que tu fais tout exprès pour pas comprendre ! "

" C'est trop long de parler du double à table, j'ai pas envie. J'ai encore faim."

" Séraphine, je peux reprendre de la salade ?"

...

[rolender]

Le visage de Peter tourna au rouge tomate.

- Espèce de petite...

Puis, regardant Séraphine et se rappellant Asch non loin, il vira cette fois-ci au blanc linceuil...

- ... petite, charmante petite fille, ne trouvez-vous pas ?

Peter eut un rire crispé.

- Son chat lui parle d'un garçon du futur ? C'est fou l'imagination que l'on peut avoir à cet âge là, non ?

Peter sembla comme implorer auprès de Séraphine. Pitié, il avait besoin d'un peu de lucidité dans cette discussion de fou ou il n'allait pas tarder à en devenir un lui même !