Teskani - Appel à l'aide

[Iris]

Assistant du procureur : je faisais référence à la fonction (d'accusation), pas au grade dans la hiérarchie

En examinant les minutes du procès (et en essayant de répondre aux questions sans recréer toutes les pièces du procès) :

• Pas d'empreintes mentionnées, mais chiffons humides, papier journal humide... l'accusation a affirmé que c'était "normal"
• les photographies du lieu où la scie avait été découverte montraient une sorte de tas de vieux cartons, poubelles variées ou produits usés, pots percés, outils cassés... La scie étaient déballée, posée sur le papier journal qui l'avait enveloppée. Donc dissimulation sommaire, surtout si on tient compte du fait que la scie a été trouvée après le début de l'enquête sur Nils Gruber qui était interrogé et donc qu'il était évident que les lieux qu'il fréquentait habituellement allaient être examinés.
• pas de traces de découpage (pas de mare de sang), mais non loin se trouvait un lieu couvert avec une bouche d'incendie et des grilles d'égout et donc d'après l'accusation la possibilité de faire le sale boulot sans qu'il en restât des traces visibles (pas de luminol)
• Gruber était confus dans ses explications, il disait qu'il y avait eu une fois une sorte d'humain monstrueux avec comme une toile d'araignée sur la tête, qui était passé avec une sorte de gros sac, mais il avait eu peur et s'était caché. Ce témoignage fut interprété assez généralement, au mieux comme la marque d'un délire, au pire comme une tentative de se faire passer pour fou en accusant un "monstre" en s'appuyant sur les légendes urbaines elles-mêmes délirantes... Bref, question rapidement évacuée.
• Autopsie : en résumé ?
  • viols avec blessures internes suggérant l'usage d'instruments, d'objets pour pénétrer les victimes ; pas de traces de sperme (en même temps, corps lessivé dans l'eau) ;
  • peau griffée, coupée en surface au couteau comme des dessins abstraits (ces plaies avaient commencé à cicatriser) ;
  • traces de brûlures de cigarette
  • coups de poings très violents signalant une force supérieure à la moyenne
  • mort supposée par strangulation sur une personne déjà très affaiblie
  • le contenu de l'estomac indiquait que la fille n'avait pas beaucoup mangé peu avant sa mort, le menu ressemblait à du "goulasch + lait", un menu à emporter typique des quartiers populaires avec des variantes et souvent des abats comme viande, parfois un lait coupé d'eau ou un jus de pomme coupé d'eau...
• criminalistique : corps probablement déposés / jetés aux environs du pont des trains, un peu au nord de la gare à partir des berges aménagées tranquilles, ou en s'engageant sur le pont, via les chemins d'accès des techniciens (aucune sécurité significative pour interdire à un quidam de passer par là)

Autres questions ? ... Il était aux alentours de 16h.

[Wenlock]

_Quelles sont les dates (et éventuellement heures) exactes de ces événements : le soir où Gruber a vu le monstre, la découverte du ou des corps, son arrestation, la diffusion de l'info, la découverte de la scie ? Juste pour voir en combien de temps nos assassins ont réussi à improviser leur petite farce, et si ça implique une source proche de l'enquête ou s'ils ont pu se contenter d'écouter la radio ou de lire les journaux. Et le lieu exact, histoire qu'on puisse le situer sur la carte.
_Quelle est la procédure exacte pour nous faire confier officiellement l'enquête par les parents ? Combien de temps ça peut prendre avec l'aide d'Amanda et de Jeremy Furlong, mon avocat ?
_Parmi les journaux que nous avons parcouru la veille, a-t-on repéré le nom de quelques proches ami(e)s de May kutty ? Des gens qui auraient témoigné auprès de la presse et connaissaient ses fréquentations ?
_Où est le téléphone le plus proche des archives ?

Dès qu'il en eut lu parcouru les pages, Kolb s'accapara les rapports d'autopsies pour en épargner la lecture à sa jeune assistante. Lui- même, malgré l'insensibilité acquise avec les années, affichait une mine crispée en notant le détail des sévices subies par les deux jeunes femmes. Les pauvres mômes, quelle boucherie. Et en même temps, Kolb était presque électrisé par ses découvertes ; l'inquiétude et les bribes de rêve activaient le sang dans ses veines et ses instincts de chasseur. Il allait falloir faire vite, beaucoup plus vite qu'il ne l'avait imaginé, sans quoi... Il chassa l'image d'Emily saignée dans la baignoire de son ancien appartement et passa les pages du témoignage de Gruber à Miss Stark :
« Dîtes-moi Miss, vous vous y connaissez en légendes urbaines ? Un homme monstrueux portant une "toile d'araignée", probablement un voile ou une résille sur la tête, ça vous évoque quelque chose ? Un tatouage peut-être ? [Ça se fait à Teskani, de se tatouer le crâne ?]

(...)

Pour ma part j'en conclus que l'homme chargé de se débarrasser des corps -probablement d'une carrure très au-dessus de la moyenne- a croisé un Gruber très aviné lors de sa sinistre besogne et, lorsque l'ivrogne a été arrêté, aura saisi l'occasion de lui faire porter la responsabilité des crimes en déposant sciemment la scie là où les enquêteurs pourraient la trouver [c'est cohérent avec la chronologie des faits ?]... Ce qui dénote une certaine réactivité, donc une attention sérieuse portée aux progrès de l'enquête.
Autre chose : si l'exécuteur des basses œuvres a une apparence aussi frappante, il lui est impossible d'approcher de jeunes femmes sans provoquer leur crainte et il n'est donc pas le recruteur...

En tous cas, je reconnais que vous aviez raison : il va falloir accélérer nos démarches car s'il y a seulement une possibilité que nos Tueurs se soient procuré une nouvelle victime, il n'y a plus de temps à perdre.
Voici ce que je propose : j'appelle Miss Korsakov pour qu'elle nous procure les coordonnées des parents Kutty et tente de les joindre chez eux. Si leur fille avait la 20aine il y a 15 ans, il y a des chances qu'ils soient aujourd'hui à la retraite. S'ils sont disponibles, nous fonçons les rencontrer pour tâcher d'obtenir d'eux une demande officielle pour rouvrir l'enquête. Si nous parvenons à remplir les formalités nécessaires avant la fermeture des bureaux, je contacterai immédiatement l'inspecteur Adams pendant que vous commencerez à rechercher les amies de May Kutty à partir des informations que pourront nous donner les parents... Nous avons énormément de terrain à couvrir, et le plus vite possible. »

[Iris]

_Quelles sont les dates (et éventuellement heures) exactes de ces événements : le soir où Gruber a vu le monstre, la découverte du ou des corps, son arrestation, la diffusion de l'info, la découverte de la scie ? Juste pour voir en combien de temps nos assassins ont réussi à improviser leur petite farce, et si ça implique une source proche de l'enquête ou s'ils ont pu se contenter d'écouter la radio ou de lire les journaux. Et le lieu exact, histoire qu'on puisse le situer sur la carte.

• Pamela Spring (corps) : Découverte le 4 mai, 10 ans en arrière ; disparue le 25 avril. Touriste.
• Angela Murdock (corps) Découverte le 10 septembre, 10 ans en arrière ; disparue le 30 juillet. Ouvrière brune décolorée.
• Nils Gruber pense avoir vu le "monstre" quelque chose comme la nuit du 2 au 3 mai, minuit passé, en tous cas peu avant la découverte du premier cadavre.
• les découvertes de corps ont eu lieu en cours de matinée. Le corps de Pamela Spring était encore assez "frais", en revanche Angela Murdock a traîné un peu plus longtemps dans l'eau, le corps étant par ailleurs repêché dans le port.
• Nils Gruber avait été remarqué par la police durant l'enquête autours de Pamela Spring. Il avait fallu un peu de temps pour l'identifier avec certitude, enquête de voisinage, chercher qui connaissait la fille et pouvait lui en vouloir. Il fut interrogé comme beaucoup d'autres, puis relâché. Concernant ce stade de l'enquête, il peut être qualifié de "bavard" et d'épuisement contre productif. Quand le second cadavre de l'été fut retrouvé, la pression sur les enquêteurs fut soudain accrue, et pourtant "miraculeusement", alors que la psychose menaçait de s'installer, il "apparut" que Nils Gruber était "forcément" le coupable et qu'il était regrettable que les premières investigations n'avaient pu suffire à l'incriminer, ce qui aurait certainement sauvé Angela Murdock. Hermann Wright fit même un "mea culpa" qu'un cynique pourrait qualifier d'opportuniste puisque la manière dont il s'excusait et disait souffrir de cette injustice donnait une seule envie, celle de mettre Nils Gruber immédiatement derrière les barreaux pour l'empêcher de sévir encore une fois, "ce qui serait la véritable injustice".
• Vu la manière dont l'enquête a été menée, il est tout à fait possible pour un Tueur ou duo de Tueur qui écoute la radio et lit la presse, d'improviser sa farce en septembre. En termes d'informations, il est difficile d'affirmer qu'il(s) a (ont) eu accès au dossier de l'enquête... Hermann Wright ayant largement communiqué, ce n'était pas a priori insurmontable pour quelqu'un connaissant intimement les faits et les lieux d'agir. Bien sûr, c'est toujours plus facile avec l'accès au dossier, mais les actions entreprises ne sont pas suffisamment significatives pour être certain de ce fait.
• Pont ferroviaire : indiqué sur la carte. Le premier cadavre a été trouvé à peut-être un demi carreau en diagonale au sud-est ; le second corps a flotté jusqu'aux abords de l'île du port, pointe nord-ouest du "triangle" ; le dépôt de la gare centrale est assez grand et occupe quatre à cinq carreaux au sud des coordonnée EST - Avenue I à IV ; Rues 1. Les faits se sont déroulés pour l'essentiel (cachette de Gruber, scie...) du côté de {Est ; I ; -1} . Clair ou d'autres questions ? ...

_Quelle est la procédure exacte pour nous faire confier officiellement l'enquête par les parents ? Combien de temps ça peut prendre avec l'aide d'Amanda et de Jeremy Furlong, mon avocat ?

Aucun problème de ce côté, formulaire standard, noms, coordonnées, motif, un saut dans une administration judiciaire, coup de tampon, dépot en double. Bref, c'est vraiment anodin et Amanda Korsakov peut s'en charger, même qu'elle fait ça régulièrement quand Alen a du travail.

_Parmi les journaux que nous avons parcouru la veille, a-t-on repéré le nom de quelques proches ami(e)s de May kutty ? Des gens qui auraient témoigné auprès de la presse et connaissaient ses fréquentations ?

Dans la presse, de l'époque de May Kutty, il y a eu des témoignages des membres de son club de peinture sur soie, de son club de ... pom-pom girls (pardon, j'ai pas pu résister), sa mère, Adeline Kutty, sa soeur Georgina Kutty, encore jeune adolescente à l'époque. Les établissements scolaires et universitaires ont leurs propres publications où il devrait être aisé de retrouver la liste des membres des clubs fréquentés par May Kutty, l'accès est public, dans la bibliothèque de l'école ou assimilable (on reprend le système US avec les photographies de presque tout le monde etc.).

_Où est le téléphone le plus proche des archives ?

Tout simplement dans le hall d'entrée.

« Dîtes-moi Miss, vous vous y connaissez en légendes urbaines ? Un homme monstrueux portant une "toile d'araignée", probablement un voile ou une résille sur la tête, ça vous évoque quelque chose ? Un tatouage peut-être ? [Ça se fait à Teskani, de se tatouer le crâne ?]

En terme de légende urbaine, les toiles d'araignée, ça peut aussi désigner les cheveux filasses des mystérieux troglodytes albinos cannibales des profondeurs !... Sinon, c'est compatible avec un type qui aurait une implantation capillaire "filasse" (ne pas oublier que Nils Gruber était limite défoncé). Sinon, il y a même des gens qui croient aux vampires, revenants, fantômes...

Les tatouages sur le crâne ne sont pratiqués que par une minuscule sous-culture influencée par la passion des courses de voitures enragées et de musique assourdissante, avec les piercings qui vont avec... soit en fait, pas grand monde, même si dans une grande ville, "minuscule" remplit quand même une salle de concert underground. Cependant ces gens sont plutôt en noir, et les motifs de tatouages aussi tandis qu'une toile d'araignée c'est blanc... Sinon, côté sous-culture voilée, il y a ponctuellement des port de voile chez des vesmeri lors de prières. Pour les résilles enfin, elles ne sont en principe que portées par des femmes qui se veulent élégantes, mais ce n'est pas très "moderne", ce serait plutôt côté "romantiques" qu'il faudrait chercher.

Pour ma part j'en conclus que l'homme chargé de se débarrasser des corps -probablement d'une carrure très au-dessus de la moyenne- a croisé un Gruber très aviné lors de sa sinistre besogne et, lorsque l'ivrogne a été arrêté, aura saisi l'occasion de lui faire porter la responsabilité des crimes en déposant sciemment la scie là où les enquêteurs pourraient la trouver [c'est cohérent avec la chronologie des faits ?]..

Oui.

... (Si tout est OK, suffit de me dire qui fait quoi et où )...

[Wenlock]

Ben si c'est bon pour "Miss Stark", Kolb appelle sa secrétaire pour trouver l'adresse des Kutty et, dès qu'il est confirmé qu'ils sont chez eux, c'est parti pour l'opération séduction...
Je brieferai ma collègue en route.

[Iris]

Il ne fallut sans doute pas plus d'un quart d'heure pour qu'Amanda rappelle Alen D. Kolb et lui fournisse deux adresses pour les Kutty.

• Monsieur Edward Kutty, retraité (apparemment), installé dans la banlieue au sud-ouest du Crescent et de la couronne de Teskani. Numéro de téléphone fourni. Pas de mention d'Adeline Kutty.
• Georgina Kutty, logeant dans un appartement du Crescent, dans un coin "classe moyenne supérieure", pas très loin du quartier festif

En toute logique il faut un peu plus de temps pour aller voir le père qui loge pratiquement hors de la ville que la sœur qui n'est pas très loin en voiture.

...

[Aubelune]

HRP : Pfff mais vous bossez la nuit pour pondre autant de lignes?

Est-ce que l'évocation d'un type de grande taille avec éventuellement des cheveux filasses rappelle à Lisa quelque chose de ses rêves ou non?

- Même si la sœur est la plus proche à visiter je suppose que c'est le père qui doit accepter de vous confier l'enquête Monsieur Kolb? Nous commençons donc par lui? Je suppose que vous comptez lui expliquer que nous pensons que sa fille a été victime du tueur de l'encre... Comment risque-t-il de le prendre? Je n'ai jamais eu à annoncer ce genre de choses pour ma part mais je suppose que c'est la routine pour vous...

Après une pause...

- Je suppose aussi qu'on ne demandera pas clairement aux proches si May avait une connaissance avec telle ou telle caractéristique physique? Nous risquerions de déclencher une bagarre entre la famille et un éventuel suspect qui n'aurait peut-être même rien à faire dans l'histoire...

[Iris]

Non, j'écris juste vite

Le gars aux cheveux filasses pourrait avoir un "air de famille" avec l'affreux en tablier de cuir et mains ensanglantées, mais vous n'avez pas vu son visage dans le rêve...

La procédure "d'intérêt à agir" des investigateurs privés est souple, elle peut fonctionner entre époux, parents & enfants, et même au sein d'une fratrie. D'autres liens peuvent également être avancés (associés travaillant étroitement ensemble par exemple,) mais dans ce cas il faudra justifier par des pièces un peu plus longues à fournir pour montrer que voilà, cette personne là agit quand la famille s'est résignée. Il est donc possible de passer par la sœur.

...

[Wenlock]

Dès que Kolb eut demandé à Amanda de préparer les documents nécessaires (dans l'optique où ils obtiendrait la demande officielle du père), le fier duo d'investigateurs sauta dans la Steiner et fila vers l'adresse de Georgina Kutty. Roulant la fenêtre ouverte pour pouvoir fumer, Kolb expliqua son plan :
« J'ai effectivement eut à faire quelques annonces désagréables par le passé, mais la situation est ici un peu différente : il s'agit surtout de convaincre une sœur -vraisemblablement vieille fille- qui aura plus ou moins fait son deuil depuis 15 ans de nous laisser rouvrir l'enquête, donc les espoirs et les souffrances qui vont avec.
Savez-vous mentir, Miss Stark ? Si oui, notre meilleure approche serait probablement de lui présenter la situation ainsi : vous serez mon assistante -aucune mention de la presse à cet homme- et nous travaillons pour la famille de Feryel qui a disparu peut après son arrivée à Teskani et tout nous porte à croire qu'elle a été, comme May il y a 15 ans, victime du Tueur de l'Encre. Nos recherches jusqu'ici nous ont convaincu que May était la première victime, la plus importante, et qu'en rouvrant l'enquête sur sa mort nous pourrions retrouver l'assassin et peut-être encore sauver la jeune Feryel. En arrangeant votre coiffure d'après les photos, vous devriez pouvoir produire une ressemblance suffisamment subtile avec la défunte May pour apitoyer cette femme et nous permettre d'obtenir le document dont nous avons besoin pour avoir accès aux dossiers, et donc effectivement tenter de sauver votre "camarade onirique". Tout cela devra lui être expliqué avec tact et doigté car nous ne pouvons pas nous permettre de nous faire jeter dehors, vous sonnerez donc à la porte la première pendant que je "garerai la voiture".
Tâchez d'être éloquente car s'il est important que j'inspire confiance à cette femme, il est indispensable que vous l'incitiez à rouvrir d'anciennes plaies. Difficulté supplémentaire : le temps nous est compté.
En fonction de la manière dont tournera l'entretien avec Georgina Kutty, nous déciderons s'il est pertinent de l'interroger sur les fréquentations de sa sœur à l'époque.

Avez-vous des questions ou des suggestions, avant que nous arrivions ? »

[Aubelune]

- Encore faut-il que la famille de May soit plus sensible à la douleur des autres qu'envieuse d'enfouir ses propres plaies. Mais ça se tente à mon avis. Je peux toujours me coiffer comme May l'était sur les photos mais je doute que nous ayons le temps de me décolorer les cheveux... Allons-y toujours...

Et changeant de sujet :

- Si on nous pose des questions trop précises sur Feryel, je répondrai que sa famille souhaite rester discrète.

Tout en parlant, Lisa enlevait les épingles de ses cheveux et les refixait avec concentration en se regardant dans le petit miroir du siège passager. Elle se préparait mentalement au (demi) mensonge à venir. Après tout, Feryel elle-même l'avait appelée à l'aide, ce n'est pas comme si personne ne lui avait demandé d'enquêter. Et pareil pour Kolb bien qu'il ne veuille pas se l'avouer.

[Iris]

Le bloc urbanistique dans lequel se trouvait l'immeuble où logeait Georgina Kutty était assez tranquille et doté dans des ruelles de suffisamment de place pour se garer sans difficulté. Il y avait non loin une école avec un terrain de sport où des gamins de 7 à 11 ans jouaient en criant sous la surveillance flegmatique et bienveillante d'un entraîneur et de quelques parents qui discutaient entre eux, regardaient distraitement ou lisaient installés sur un banc. De hautes grilles autours du terrain devaient permettre d'éviter que les balles finissent dans la rue. Les entrées arrières des immeubles étaient souvent collées à un carré de gazon et ponctuellement des bouleaux ainsi que de nombreuses "boules" d'arbustes de différentes espèces, censés fleurir les uns après les autres du printemps à l'automne. De petites places dallées servaient pour un petit marché comme l'indiquait une pancarte discrète signalant les jours et heures pour lesquels les lieux étaient réservés.

Depuis le matin, le ciel s'était couvert et menaçait de pleuvoir doucement, le genre de gouttes fines et insidieuse, assez fraîches et denses. Une bourrasque s'engouffra dans les allées du bloc, faisant dévier un ballon qui était lancé haut en l'air, ce petit événement attirant un concert de plainte et de commentaires, piaillant, les voix se répercutant sur les hauts murs. Les riverains de ce côté des immeubles avaient intérêt à avoir des fenêtres bien isolées s'ils ne voulaient pas subir toute la journée les hauts et les bas des joueurs de l'enfance à l'adolescence.

Les premières gouttes de pluie tombaient au moment où Elisabeth 'Lisa' Stark arrivait enfin à la porte du bon immeuble, découvrant rapidement que Melle Georgina Kutty habitait au quatrième étage, ascenseur disponible. Le tout était dans un style "art déco" épuré, courbes blanches, cubes ivoirins, panneaux et noms discrets, panneaux ornementaux favorisant des formes géométriques en mosaïque noir, doré, argenté. A la sortie de l'ascenseur Lisa fit sur moquette gris acier, notant un plafond de couloir d'un noir impression "laque" ou "verni" qui reflétait la lumière d'un jaune doré qui provenait de lampes au mur qui diffusait un éclairage réduit et contribuaient à une ambiance feutrée y compris encore en plein jour.

Georgina Kutty logeait au 44, soit le second appartement en partant de la gauche à partir de l'ascenseur au quatrième étage ; pour une raison assez étrange, les numéros pairs étaient à gauche, les impairs à droite. Un caprice d'architecte ?

Au moment de sonner, Lisa nota qu'elle entendait vaguement des échos de l'intérieur de l'appartement 44 et dut insister pour avoir une réponse de la personne à l'intérieur. La musique fut un peu réduite (tendance Glenn Miller). Finalement la porte s'ouvrit un peu vivement :

" Je n'achète rien. Je ne signe rien. Je n'ai rien commandé. Je n'ai rien à faire réparer. "

Elle devait avoir 30 ans, difficile à dire, sa peau semblait en indiquer un peu moins, en revanche son maquillage était franchement chargé. Taille moyenne, augmentée par des talons, jupe droite jusqu'aux genoux inclus, fins collants tirant sur le doré, bonne qualité. Chemisier de soie dont le décolleté lamé tombait assez bas et lui faisait un décolleté plutôt vertigineux, bras nus. Yeux soulignés de noirs, sourcils redessinés et assombris, lèvres peinte en un rouge profond et verni, ongles assortis. Cheveux noirs teints, lui arrivant au milieu du cou, une coupe qui signalait des visites régulières chez son coiffeur.

Le tout dénotait de l'argent, un grand soin porté à son apparence et une certaine propension à l'affirmation presque agressive de soi.

... Et maintenant ?